Prélude - 1.4

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Bastian, attiré par cette forme, cette créature, reporta ses yeux sur le balafré au sol. Il vit le visage de Johan se crisper dans une expression mêlant peur et incompréhension face à la mort proche. Devant cette mort qui était venue le prendre dans l’ombre.

— Houmains ! réussi à articuler le monstre d’une voix rauque.

Bastian qui était figé après la scène fut arraché à son état par le porion qui l’invectivait. Les pensées embrumées par ce qui avait eu lieu, il tentait d’armer son fusil, mais sous le stress coinça la cartouche.

— POUSSE-TOI ! s’écria Jeremiah en jetant Bastian hors de l’entrée de la pièce.

Le porion droit comme un I portait toujours sa lourde lampe d’une main et pointa son pistolet vers la créature. Il actionna la détente et un flash de lumière éclaira la zone. Bastian qui avait seulement repris ses esprits fut à nouveau assourdi, cette fois par le bruit des détonations qui résonnèrent dans l'espace exigu. Un acouphène le tenailla et, lâchant son fusil, le jeune homme se boucha les oreilles, recroquevillé sur lui-même de peur et de douleur. Les coups de feu du porion se succédèrent, mais la forme énigmatique de la créature avait disparu dans la pièce plongée dans la pénombre avec le pétrole du sol qui s’était entièrement consumé.

L'arme du porion émit de légers clics sous l’action de son maître qui essayait de tirer malgré les chambres désertes du barillet. il abandona sa lampe à ses pieds, Jeremiah se mit à fouiller dans ses poches afin de recharger le revolver. Il l'ouvrit et y introduisit les munitions en gardant toujours son regard sur l’obscure salle faisant tomber un bon nombre de cartouches au passage. Le calme enfin revenu, Bastian observant son supérieur âpreté son pistolet, fit de même en chercha alors son fusil au sol. Il posa la main sur la bandoulière, il la tira vers lui. Le jeune homme ouvra le mécanisme, sortit la douille coincée et actionna le verrou pour engager une nouvelle balle. Calant l'arme contre son épaule, il se redressa à côté du porion et tous deux scrutèrent la salle devant eux.

Jeremiah, tenant son pistolet à nouveau chargé, prit la lampe du sol et balaya la pièce avec son faisceau de lumière, mais rien. Rien à part le corps inanimé et sans vie de leur défunt camarade. Bastian qui observait la scène avait diverses idées et informations qui fusaient dans son esprit. Mais tandis que l’éclairage passait une seconde fois sur la dépouille de leur ancien compagnon, Bastian remarqua l’absence de l’arme de Johan. Mais avant qu’il n’ouvre la bouche pour prévenir le porion, un bruit vif et un flash lumineux naquit à l’intérieur de la salle et Jeremiah s’écroula lourdement. Atteint au cou par une balle, il se tortillait de désespoir et tentait de dire quelque chose malgré le flot de sang qui inondait sa gorge.

Suivant le regard du porion, Bastian vit la forme se diriger vers lui. Sans plus réfléchir, il prit ses jambes à son coup et s’enfuit dans la structure.

Le jeune homme courait, il courait pour fuir la scène d’horreur qui venait d’avoir lieu et la créature qui avait tué ses camarades. Dans sa course folle, son cœur tambourinait dans sa poitrine et son souffle se faisait de plus en plus difficile à garder. Au détour d’un couloir, il rebondit contre un mur pour continuer dans sa lancée. Il ne sentait plus la douleur, juste le goût du sang dans sa gorge. À ce moment, seul comptait de distancer le mutant, la créature ou toute autre chose qu’était censé être le meurtrier de Johan et Jeremiah. Bastian ne pensait plus, il était guidé par son for intérieur qui lui criait de courir, de s’enfuir toujours plus loin.

Avec le stress qui ne faisait que l’envahir, Bastian ne prêtait plus attention aux panneaux et affichages. Dans le noir, la petite lampe accrochée à son torse virevoltait, éclairant fugacement au gré de ses mouvements le chemin. Le jeune homme fut vite perdu et les couloirs commençaient à tous se ressembler. Coursives, tuyaux et murs se succédaient. Arrivé dans une énième voie secondaire, Bastian fut stoppé par une porte close.

De ses mains tremblantes, il essaya de l'ouvrir, mais le verrou de cette dernière était fermement ancré et le passage restait hermétique, immobile devant toutes les tentatives de Bastian. Pris par le désespoir, il frappait à présent la surface grise. Entendant des pas se rapprocher, il fit volte-face l’arme prête, mais un énième flash lumineux éclaira les corridors de la tour de forage. Un projectile atteignit Bastian à l’épaule et sous l’impact de la balle, il s’écrasa contre les vitres qui longeaient la coursive. Elles cédèrent sous son poids, précipitant le jeune homme dans le vide.

La chute se déroula au ralenti pour Bastian. Son corps se dirigeait inexorablement vers le sol encerclé par d’innombrable bout de verre dans lesquelles son visage horrifié se reflétait. Au bout de sa course, il entra lourdement en contact avec la terre et le monde qui l’entourait s’obscurcit alors qu’il perdait connaissance.

Bastian revint à lui, ne sachant pas combien de temps s’était écoulé. Il tenta de bouger, mais son corps refusait toute action. Il était étalé dans la boue qui tapissait le sol entourant la tour de forage. Une partie de son visage était pris dans cette mélasse brunâtre et son souffle difficile remuait l’eau d’une des flaques proche de lui. Au loin, les cris de la colonie résonnaient et déchiraient la nuit autrefois calme.

Des bruits d’affrontements émanaient d’Ultis et de nombreux feux éclairaient le dominion tel de petits brasiers. Bastian, qui réussit à tourner la tête au prix d’un effort qui lui parut inhumain, vit la tour et le paysage entourant Ultis. Les automates  à présent écrasés brûlaient au sol. Un groupe était établi sous la structure d’acier proche de lui. Un étrange rassemblement de monstres aux tailles diverses se trouvait illuminé par les incendies de la colonie et des édifices de forage avoisinant encore en fonction. Les créatures étaient pour la plupart en simple pantalon grandement abîmé. Leurs corps blancs comme de la craie étaient squameux et puissamment musclés. Leurs visages glabres comprenaient des pupilles noires et perçantes qui surmontaient une bouche garnie de petits crocs.

Une figure traversa alors les rangs de la troupe en armes. Cette personne énigmatique enleva sa capuche. Par ses cheveux et sa taille plus que réduite, Bastian l’identifia comme son égal. Ce dernier inhalait une bouffée dans un masque qu’il avait saisi sur son torse. Lâchant le respirateur après avoir pris une salvatrice bouffée, il se tourna vers Bastian et leurs regards se croisèrent. Cette parodie d'homme désigna alors le corps inerte du garçon au sol.

L’une des créatures du groupe se rapprocha de Bastian et quand il fut à sa portée, il empoigna son pistolet. Ainsi à la merci du monstre et de son arme, un mélange de peur et de résignation l'envahit face à son incapacité à bouger, à agir. Regardant la bête, il la vit sourire. Elle était intelligente et semblait se délecter de la crainte qui transpirait du visage à Bastian.

Le canon de son revolver se trouvait pointé sur la tête de Bastian. Bientôt, un tir s’en échappa en émettant un flash mêlé à un bruit puissant.

La lumière de l’arme fut la dernière chose que Bastian vit avant de mourir.

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