Chapitre 21

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Ecrit en écoutant notamment : Vini Vici – Where the Heart is [AcidTrance]

Le lendemain soir, je quitte seul le lycée après la fin des cours, car le moniteur d’auto-école de Lilian est venu le récupérer dans la rue qui longe le portail du lycée. J'arpente paisiblement les quais de l’Ill jusqu’à mon arrêt de bus, profitant d’une des dernières ambiances estivales de cette année.

Je m’amuse à scruter d’un air goguenard les stupides touristes qui voguent amassés comme du bétail ruminant sur les bateaux-mouches, lorsque j’entends un galop désordonné dans mon dos.

L’individu en question me dépasse, haletant, et se plante devant moi en s’arc-boutant sur mes épaules. Alexandre, encore ? Je suis arrêté net, une fois de plus frappé par son air aussi désespéré qu’essoufflé.

— S’il te plaît, on peut discuter deux minutes en marchant ?

— Je t’écoute, lui réponds-je, en me forçant à adopter un ton glacial qu’aurait tendance à faire fondre son regard ardent.

— Vraiment, je ne sais pas comment m’excuser pour la dernière fois, j’ai été vraiment con, je te jure, ce n’est vraiment pas de ma faute. Je...

— Tu n’as pas besoin de t’excuser, je ne veux juste plus avoir affaire à toi, ni à ton collègue. C’est compris ?

J’accélère le pas, espérant ainsi lui signifier que je souhaite mettre définitivement un terme à cet incident. Il ne met pourtant pas longtemps à me rattraper de nouveau, et me saisit l’épaule pour me forcer à ralentir. Ce simple contact m’électrise, mais je me force à en faire abstraction en baissant le regard vers quelques brins d'herbe, qui n'ont sûrement jamais connu telle notoriété dans leur triste vie, lorsqu’il se place à nouveau face à moi en m’assurant qu’il souhaiterait s’expliquer plus longuement.

Cette fois-ci, je continue impassiblement à marcher et l’écarte vigoureusement de mon passage en le repoussant au niveau du torse. Il se résigne enfin et je peux poursuivre ma route. Avec ça, il va presque me faire rater le bus de 17h20...

Un quart d’heure plus tard, installé de manière pas trop inconfortable dans ce bus aux sièges décrépis, dont la mise en service doit dater des années 90, je repense à la confrontation de tout à l'heure. Sur le coup, même si je l'ai envoyé paître, j’étais profondément convaincu de sa sincérité, mais avec le recul, je ne peux m’empêcher d’imaginer qu’il s’agit probablement d’une manigance machiavélique orchestrée par son pote Victor.

Mais après tout, le contact avec ses pectoraux quand je l’ai écarté de mon chemin n’était pas si désagréable… Enfin, si je peux me rassurer, c’était une sensation purement physique, je ne me sens absolument pas attaché sentimentalement à lui, tout le contraire de Morgan, dont l’enthousiasme, la joie de vivre, l’empathie et la franchise m’avaient ébloui lors de notre rencontre et continuent d’enjoliver mes journées. Quoi qu’il en pense, il a déjà marqué mon cœur d'une empreinte indélébile.



Jeudi matin, en me réveillant, j’attrape mon portable et y trouve avec un plaisir non dissimulé un message de Morgan.

2h19 : Hey mec, tu n'imagineras jamais la note que j’ai eue à mon devoir maison en maths. 17 !! Et je te rappelle que la plupart des trucs, je les ai faits vraiment tout seul après que tu m’as expliqué ! La prof était assez sceptique quand je lui ai assuré que je m'étais juste trouvé un prof particulier hors du commun!

Je m’empresse de pianoter :

Mais de rien mon Morgan !

Juste avant de rentrer en cours de philosophie, je reçois une réponse délicieusement impudique violant toute bienséance élémentaire:

Si tu veux je peux te tailler une petite pipe de remerciement, non plus sérieusement, mes parents sont chauds pour que tu viennes une fois chez moi un soir avec ta famille.

Je souris bêtement devant mon smartphone, et ne remarque pas que M. Castagnier attend en me fixant sévèrement que je rentre pour fermer la porte de la salle.

À la pause de 9 heures, je renvoie un message :

Ah, t’es vraiment con ! Mais fais gaffe à toi, je crois que je vais te violer un jour si tu continues, et pour ton invitation, on en reparle samedi au match ? J’en toucherai un mot à mes parents cette semaine.

J’ai son approbation dans la minute, et laisse naturellement un sourire s’étirer sur mon visage en me rendant compte que même s’il ne peut pas m’aimer d’amour, je lui suis très reconnaissant d’être un tel ami, quoique très taquin avec mon homosexualité.

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