Solar, la planète

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 Laissant le Black-Bird en orbite et prêt à tirer en cas d’alerte, Sharks descendit à la surface en compagnie de Fifty, Sixth, Rangers, Blood et Dekon, son escouade d’exploration favorite. On pouvait s’interroger sur la cohérence de prendre son second et son pilote, mais le capitaine avait depuis longtemps réglé ce problème en instaurant des procédures de commandement efficace. Selon le type de missions et le personnel présent à bord du Black-Bird, chaque Air-Line savait qui était le commandant du vaisseau et quelles étaient ses prérogatives exactes. Ce jour-là, c’était le volubile Angel qui était assis dans le fauteuil du grand manitou et il espérait vraiment ne pas avoir à se servir du laser 4000 millimètres.

_ Rangers, vous resterez en vol stationnaire à bord du Translator avec Dekon. Avait planifié Sharks. Nous, nous irons au sol. Le premier groupe qui repère quelque chose prévient l’autre.

_ Capitaine, faîtes attention. Avait répondu Rangers en obéissant. Les instruments sont tous perturbés, il se peut que le contact soit rompu.

_ C’est pour parer à cette éventualité que Dekon est avec vous. En cas de panne des radios, il utilisera sa projection astrale pour nous prévenir.

Les Ghost Fighters, l’armée d’où venait Dekon s’était spécialisé dans l’étude et l’utilisation de certaines forces psychiques cachées au sein des êtres humains. Après deux siècles d’eugénisme, de sélection et d’entrainement, les membres de cette armée étaient capables de télékinésie, télépathie et autres prodiges du cerveau. Dekon pouvait, et c’est ce qui lui avait valu sa place au sein des Air-Lines, projeter son moi conscient à l’extérieur de son corps. Cette entité n’était pas assujettie aux règles tridimensionnelles et pouvait se déplacer sans contrainte dans toutes les directions. Cependant, elle ne pouvait pas interagir avec la matière à part produire des sons. Les Ghost Fighters avaient nommé cet état, l’effet Horla en référence au Dopel Ganzer de Maupassant. De fait, Dekon était le binôme idéal pour Rangers qui pouvait se concentrer sur son radar et les communications, tout en lui laissant le pilotage.

Sharks attendit patiemment que le Translator soit à sa place avant de commencer à bouger. L’équipe de choc se dirigeait vers un pic d’énergie qui apparaissait sur les radars. Au fur et à mesure qu’ils couvraient du terrain, Sharks eut la sensation que cette énergie l’appelait.

_ Viens à moi, Sharks. S’imaginait-il entendre. Viens. Plus près. Juste ici. Dans la grotte. Je t’attends.

L’état de fébrilité de leur invincible capitaine commençait à inquiéter les autres. C’est peu rassuré qu’ils pénétrèrent dans la grotte. Tout leurs sens étaient en alerte et ils étaient prêts à tirer sur tout ce qui pourrait les attaquer.

La grotte s’enfonçait sur quelques dizaines de mètres avant de s’ouvrir sur une gigantesque salle où tous les Air-Lines pouvaient tenir sans pouvoir se toucher les uns les autres. Mais le plus surprenant était que l’on pouvait voir comme en plein jour à l’intérieur. Sixth ramassa une pierre.

_ Du minerai phosphorescent, c’est épatant ! S’exclama-t-il. Je n’ai jamais vu une pierre produire autant de lumière d’elle-même !

_ Production d’énergie. Ajouta Blood d’un ton atone.

Sharks n’écoutait leurs commentaires que d’une oreille distraite car il était vraiment perturbé par l’énergie qu’il ressentait.

_ Montre-toi ! Finit-il par dire exaspéré. Je sais que tu te caches ici !

Un rire grave tonna, faisant trembler la grotte entière, puis une voix douce de femme parle.

_ Je ne me CACHE pas ici, petit requin, je SUIS ici !

Les quatre hommes se tendirent pour essayer de repérer l’origine de la voix. Sharks regretta de ne pas avoir Rangers sous la main car c’était lui qui avait le plus de chance de la localiser. Fifty, lui, fut intrigué par tout autre chose.

_ Pourquoi elle a appelé le capitaine, petit requin ?

_ Vieille langue terrienne, l’anglais. Répondit Blood. Sharks égale Requin au pluriel.

_ Pfu ! Se moqua Fifty. Sharks, de la planète Sharksennokhan, ayant intégré le Commando Requin, signifie RE-QUIN ? Ça, c’est l’ironie !

_ Si ça ne te plait pas, Fifty, on peut toujours en discuter plus tard… Marmonna Sharks entre ses dents… J’aime bien les requins. Conclua-t-il, comme pour se justifier.

_ Je comprends pas ! Les coupa Sixth. On dirait que la voix vient de partout !

A nouveau, le rire ébranla la grotte.

_ Je viens de le dire. Dit doucement la voix. Je SUIS la grotte. Je SUIS le sol. Je SUIS l’atmosphère. Je SUIS les arbres que tu as croisés…

_ Oh merde ! S’exclama Sixth en comprenant. On est sur Solar ! La planète vivante ! Le sanctuaire de la vie. Le point de départ de l’univers.

Sixth essayait de se rappeler ce qu’il avait bien pu lire au sujet de Solar lorsqu’il était archiviste des Fire Warriors mais tout ce qui lui venait à l’esprit, c’était ses surnoms. La planète eut un frémissement de plaisir semble-t-il.

_ Oh oh ! L’un d’entre vous semble plus au fait que les autres. En effet, je suis Solar. Je suis une planète vivante… mais toutes les planètes sont vivantes à leur façon. Moi, j’ai la conscience de ma conscience et j’ai besoin de toi, Sharks, parce que tu es… Un vrai guerrier.

Solar expliqua qu’elle était le berceau d’une civilisation très avancée mais qui avait disparu. La planète avait le pouvoir de modifier très vite son écosystème pour évoluer et pouvait étendre son champ de conscience pour observer l’univers entier. Cependant, comme elle ne pouvait agir elle-même qu’à l’intérieur de l’anomalie, elle « invitait » de temps en temps ce qu’elle appelait des vrais guerriers pour en faire ses émissaires.

_ Et quelles sont les qualifications qui font de moi un vrai guerrier ? Demanda-t-il en bandant ses muscles.

_ Ah ah ah ! Fusa à nouveau le rire. Déjà en tant qu’être humain, ta science du combat sous toutes ses formes atteint une maitrise rarement inégalée. Tu sais être sans pitié sans toutefois tomber dans la violence excessive et ta compassion envers tes adversaires ne t’affaiblie en aucun cas.

_ Il y a une différence entre adversaires et ennemis, c’est normal. Se justifia Sharks.

_ Ensuite, en tant que militaire de carrière, tu n’obéis pas aux ordres, juste pour obéir. Tu sais réfléchir par toi-même. C’est un point qui fait défaut à nombre de tes congénères.

_ Quand un ordre est aberrant, y obéir est un suicide ! Se justifia encore Sharks qui semblait ne pas vouloir accepter l’éloge. Encore une fois, c’est normal !

_ Et pour finir, en tant que leader, tu aides tes hommes à s’épanouir autant physiquement qu’intellectuellement en favorisant l’échange de compétences.

_ Afin que chacun d’entre eux puisse être remplacé en cas de problème. Tenta-t-il encore de justifier. Si une personne est indispensable, c’est que la machine n’est pas fonctionnelle.

_ Exactement. Et en faisant d’un petit badge à l’épaule le seul uniforme des Air-Lines, tu les laisses conserver leur individualité. De plus, tu t’es assuré le soutien de chaque armée qui t’a fourni un membre d’équipage… Les photos sont magnifiques.

_ Ce… Ce sont les journalistes qui font ce travail. Bégaya Sharks.

Les autres assistaient à une scène surréaliste. Le super guerrier Sharks, exemple de courage et d’abnégation, qui ne reculait jamais devant un combat, qui n’avait pas hésité à se jeter dans la gueule d’un gigantesque monstre marin pour y récupérer Dave Glory qui s’était fait gober. Ce Sharks-là, se faisait déstabiliser par une simple voix qui le complimentait.

_ En bref, plus que tes qualités de combattants, j’apprécie grandement tes qualités morales. Ces qualités qui s’impriment sur tes hommes à ton contact et c’est bien là ce qui a motivé mon choix. Par le passé, le pouvoir que je vais vous offrir à corrompu des personnes qui n’étaient pas prêtes à le recevoir mais je sais que tes Air-Lines suivront ton chemin de droiture.

_ Quel est donc ce pouvoir dont vous parlez ? L’interrompit Sixth. En quoi nous aidera-t-il ?

Une fois de plus, la grotte fut secouée par le rire cristallin de la voix. La planète s’amusait de la suspicion des humains.

_ J’ai vu naitre et mourir des milliers de civilisations à travers l’univers. Je peux aisément, à l’aide de vos mécaniciens, apporter des modifications au Black-Bird qui amélioreront grandement ses capacités. Mais ce ne sont là que des vulgaires connaissances technologiques, je peux faire bien mieux et vous améliorer, vous. Vous êtes tous, dans l’ensemble, des soldats surentrainés ou de puissants mutants. Pour la plupart, vous êtes capables de l’endurer.

Rangers, à bord du Translator, reçu cette dernière phrase comme une balle en plein cœur. Il était sûr que cette phrase s’adressait à lui, qui finissait systématiquement les entrainements de Sharks couchés sur le sol de la salle de gym à tenter vainement de reprendre son souffle. Le Capitaine lui avait même appris une méthode de respiration pour parvenir à réduire l’essoufflement pour qu’il puisse finir les séances. Cependant, même si le jeune rouquin était parmi eux depuis plusieurs mois, il lisait dans les yeux de ses camarades et parfois même, les entendait dire, qu’ils se demandaient dans combien de temps ils perdraient leur opérateur radar.

La planète conclue son monologue.

_ Et le plus grand pouvoir que je vais te donner sera celui de faire de tes ennemis les plus féroces, tes plus fidèles compagnons. Au lieu de détruire les Bio-Weapons, tu en feras des alliés indéfectibles. Acceptes-tu le don que je t’offre, Sharks ?

Sharks hésita à répondre. Il tentait de passer toutes les possibilités en revue dans sa tête mais aucunes ne semblaient viables. Il se tourna vers ses hommes qui restaient interdit. Ne sachant pas quoi penser, ils prenaient l’attitude militaire standard et attendaient que le chef prenne une décision. Le regard de Sharks reprit sa détermination habituelle.

_ Comment procède-t-on ? Cria-t-il à l’intention de la grotte.

Une heure plus tard, la totalité des Air-Lines étaient rassemblés dans la grotte. Anxieux, Sharks avait fait poser le Black-Bird à un kilomètre de la grotte et avait programmé l’autodestruction de la génératrice pour peu après la fin de la cérémonie. Il avait ensuite prévenu Solar qu’il avait confié une partie du code d’annulation à six de ses soldats pris au hasard parmi la troupe. Si la planète les trahissait, elle exploserait avec le Black-Bird. Une fois cette précaution prise, Sharks rejoignit ses troupes à l’intérieur de la grotte phosphorescente. Les lueurs bleutées et l’inquiétude sur leur visage faisaient ressembler les Air-Lines à des fantômes. Seule exception à cet état, Rangers qui fermait les yeux et ressentait du plaisir de façon évidente. Un large sourire étirait son visage.

_ Qu’avez-vous, soldat ? Lui Demanda Sharks.

Rangers ouvrit les yeux sans se départir de son sourire.

_ La planète est en train de chanter. Répondit-il simplement. C’est extrêmement apaisant.

_ Ca ne vous fait pas peur ? Dit Sharks, montant d’un cran dans l’énervement. Nous sommes tous, sans exception, réuni au sein d’une grotte sur une planète qui a avoué pouvoir se modifier d’elle-même. Elle pourrait tous nous tuer en effondrant la grotte.

Rangers vit son sourire se réduire un peu et regarda Sharks droit dans les yeux.

_ Capitaine, vous avez autorisé le débarquement de tous les Air-Lines. Commença-t-il calmement. Depuis que je suis parmi vous, vous n’avez donné cet ordre que sur trois planètes. Et deux d’entre elles étaient totalement inhabitées. En ne me basant que sur ce fait, j’en déduis que vous ne considérez pas Solar comme une menace. Ensuite, nous sommes tous réunis ici, sous cette grotte que vous qualifiez de dangereuse parce que vous avez déjà décidé que Solar ne ferait pas ce que vous venez de dire. Le ton de votre voix est sans équivoque. Et pour finir, je n’ai détecté aucun mensonge dans les paroles de la planète, elle va réellement faire ce qu’elle a annoncé.

Sharks fronça les sourcils. Rangers soutint son regard en gardant son sourire.

_ Votre oreille d’or vous permet de détecter les mensonges ? Demanda le Capitaine avec curiosité.

_ A chaque fois. Répondit le jeune soldat en se tournant vers Angel qui écoutait la conversation. Ah ! Elle va parler.

Solar fit entendre sa voix à la seconde où Rangers finit sa phrase. Tous les Air-Lines se turent instantanément et écoutèrent avec attention, prêt à réagir au moindre signe de traitrise.

_ Air-Lines, soldats de l’humanité, vos adversaires sont puissants. Parfois même plus fort que vous, mais vous n’abandonnez jamais et vous protégez votre race au mépris de votre santé. Et comme vous n’êtes pas nombreux, cela s’en ressent.

La lueur produite par les parois s’intensifia légèrement. De nombreuses mains se portèrent à la crosse de leurs armes.

_ Sur Terre, la loi de l’évolution, la survie de l’organisme le plus fort, fut supplantée lorsque l’humanité acquit la conscience et la moralité. Le fait que vous mainteniez en vie et permettiez aux plus faibles d’entre vous de se reproduire a affaibli considérablement votre génome.

Le discours déroutant de la planète amena quelques murmures. Pourquoi parlait-elle de génome affaibli et des plus faibles ? La lueur se changea en lumière franche.

_ Ce n’est pas forcément un mal puisque vous compensez par une curiosité sans frontière et une intelligence qui vous a conduit à la technologie. Cependant, vos corps sont loin d’être aussi efficace qu’ils pourraient l’être. Je suis donc en train de réorganiser vos centres nerveux, votre ADN ainsi que vos flux de circulation d’énergie afin que vous puissiez être le meilleur de ce que vous êtes. Vous devez déjà sentir que votre fatigue s’envole, vos blessures se referment et votre pensée va plus vite… C’est mon premier cadeau.

Baignés dans la lumière, les Air-Lines ressentaient exactement ce que décrivait Solar. Sharks, qui avait une gêne dans la respiration depuis qu’il avait pris une balle en plein poumon, sentit qu’il respirait à nouveau librement. Le super mathématicien Burnz sortit son carnet pour noter toutes les équations qui submergeait soudain son esprit.

_ Vous serez plus fort, plus rapide, plus intelligent et vous vous régénérerez plus vite que jamais. Et bientôt, vous vous découvrirez des pouvoirs dont les autres humains ne peuvent que rêver…. Pour mon deuxième cadeau…

La lumière changea de couleur et devient plus chaude, avec des teintes orangées.

_ Je vais vous donner de quoi grossir vos rangs car votre faiblesse est votre petit nombre. Le pouvoir de la Cristallisation permet de laver les esprits de toute influence associée à l’idée de mal tel que le définit son lanceur.

Dave Glory se retourna à l’écoute de cette phrase. Il se dit en son for intérieur que ce pouvoir équivalait à un lavage de cerveau. La planète dût entendre ses pensées car elle y répondit.

_ C’est exact, Dave, la Cristallisation est un lavage de cerveau. Elle place tout ce que la personnalité de sa victime contient de « mauvais » dans une gangue de cristal qui se désagrège lentement, donnant le temps à son utilisateur de se rééduquer lui-même. C’est pour cela que je choisie avec attention les personnes à qui je confie ce pouvoir. Des personnes au sens moral irréprochable. Vous autres, Air-Lines, êtes les personnes qui ne feront pas mauvais usage de ce pouvoir… Pour mon dernier cadeau…

La lumière orangée vira au blanc, éblouissant tout le monde. La voix devint un peu hésitante, comme si elle pensait à autre chose en même temps.

_ Je vous fais don de la technologie. Sur les parois de cette grotte se trouvera de quoi modifier le Black-Bird pour en faire un appareil bien plus performant. Une plus grande vitesse, une meilleure maniabilité, un champ de répulsion protégeant la coque, des programmes de diagnostic plus performants et surtout… de quoi faire la même chose qu’ici pour vos nouvelles recrues. Je vous conseillerai juste d’attendre un peu avant de distribuer des pouvoirs au moindre postulant.

Fifty, moins éblouis que les autres grâce à ses lunettes de soleil, se tourna vers son Capitaine.

_ J’imagine que ça allait de soi, non ? dit-il avec euphorie.

_ Evidemment, Fifty. Répondit Sharks sans joie. Seules les recrues validées et intégrées se le verront proposer.

La cérémonie prit fin lentement. La lueur s’éteignit, laissant les Air-Lines un peu hébétés. Seul Sharks garda son esprit clair et ordonna aux six hommes qui possédaient le code d’annulation de foncer sur la passerelle du Black-Bird. Suspicieux, il attendit le tout dernier moment pour faire annuler l’autodestruction. Pendant ce temps, les soldats mécaniciens commencèrent à scanner les plans qui étaient apparus sur les parois de la grotte pour les analyser.

Optimiser les moteurs ou la protection du vaisseau ne demandait que deux jours de travail mais la salle qui devait être une reproduction technologique de la grotte prit une semaine entière. Elle fut installée juste sous la passerelle dans la salle circulaire de repos de l’avant de l’appareil. Les bancs furent poussés contre les murs pour faire place à une grande colonne bourrée de lampes et d’électronique ainsi qu’un cristal provenant de Solar. Pour le façonner, elle provoqua une éruption volcanique dans la plaine voisine suivie d’un cyclone chargé de pierres extrêmement solides qui taillèrent la roche volcanique avec la précision d’un orfèvre. Le spectacle fut assez impressionnant.

Une fois la colonne montée et branchée, elle irradia la salle circulaire de lumière aux couleurs changeantes. Une onde bienfaisante se dégageait de l’ensemble mais marquait également la fin de cette petite pause paradisiaque. Chaque Air-Line se sentait navré de devoir quitter ce havre de paix mais l’appel du devoir se faisait ressentir. La planète Solar leur ouvrit la singularité pour les renvoyer dans la galaxie.

Quelques jours plus tard, le Black-Bird, étincelant sous la lumière d’une géante bleue, fit face à une créature déconcertante, un tigre blanc géant. La férocité du monstre n’eut d’égale que son originalité. Malgré le nouveau champ de force, le Black-Bird fut cabossé par les coups de l’animal géant. Sharks ordonna un tir de l’arme principale.

Grâce à l’escadre des chasseurs spatiaux commandée par Angel, le tir toucha la créature au-dessus de la tête, révélant son numéro Bio-Weapon, le III. Les Air-Lines étaient habitués à ce que les créatures géantes qui les attaquaient soient des Bio-Weapons mais pas à ce qu’un tir de l’arme principale aussi bien placé soit aussi inefficace.

_ Le 4000 est endommagé ? Demanda vivement Sharks à son second.

_ Pas du tout, Capitaine. Répondit Sixth après avoir regardé ses moniteurs. Il a même délivré vingt-deux pour cent de puissance supplémentaire par rapport aux précédents tirs. C’est la créature, elle est plus résistante !

_ Très bien ! On va tester notre nouvel arsenal. Décida Sharks en bondissant de son siège. Je mets une combinaison et je sors sur le toit du Black-Bird. Pendant ce temps, faites pleuvoir les tirs des tourelles laser. Quant à l’escadre, je veux qu’elle se positionne face au flanc de la créature et qu’elle se prépare à tirer de toutes leurs armes.

_ Vous comptez essayer la Cristallisation, Capitaine ? Demanda Rangers depuis son poste. Ce n’est peut-être pas le meilleur moment. Cette créature est la pire que nous ayons eu à affronter !

_ En plus si ça échoue, qu’est-ce qu’on fera ? Rajouta Fifty. On ne connait même pas les effets réels de cette technique.

Sharks les fusilla du regard. Sixth n’essaya même pas d’ajouter sa propre objection et se retourna sur ses moniteurs.

_ C’est justement parce que c’est la plus puissante qu’il faut que ce soit elle. Et si j’échoue, vous éperonnez la bestiole et vous utilisez le 4000 pour la réduire en bouillie. Nous sommes en pleine forme, vous pourrez tirer une bonne dizaine de fois. Je préfère agir plutôt qu’attendre.

Après avoir donné ses ordres, Sharks quitta la passerelle pour aller enfiler sa combinaison spatiale tandis que le vaisseau était secoué par les coups de griffes du grand tigre. Les tourelles laser faisaient pleuvoir leur déluge de feu sans faire plus de dégâts que quelques égratignures sur le monstre. Le Capitaine, une fois sanglé dans son scaphandre pénétra dans le sas et appuya sur le bouton du toit. Dans le silence de l’espace, la bataille était comme un spectacle grandiose. Le Bio-Weapon secouait le vaisseau et tentait de mordre la proue. Sharks prit une grande respiration et tendit la main vers la tête du monstre.

_ Cristallisation ! Hurla-t-il, simplement.

Un flux d’énergie blanchâtre sortit de sa main à la vitesse de la lumière et frappa l’œil gauche de la créature. Un lien télépathique s’établit instantanément entre les deux. Pendant une seconde, Sharks eut la vision trouble de personnes l’entourant et le regardant avec attention dans un laboratoire. Le leader des Air-Lines comprit que c’était un souvenir de l’enfance du tigre. L’un des hommes, dont Sharks n’arrivait pas à distinguer les détails du visage mais dont la voix lui semblait étrangement familière, s’adressa à lui, ou plutôt au monstre.

_ Tu détruiras les Air-Lines ! Tu peux bouffer tous ces humains !

_ Non. Ça ne se passera pas comme ça. Répondit Sharks tout naturellement mais personne ne l’entendit.

Le flux de liaison s’interrompit et la créature cessa d’attaquer. Sharks ordonna le cessez-le-feu mais de rester sur le qui-vive avant de se rendre compte qu’une larme coulait sur sa joue. La Cristallisation se révélait être un pouvoir aux effets surprenants.

Durant une journée, les Air-Lines surveillèrent la créature blanche en restant le doigt sur la gâchette, ou plutôt, la main sur la borne d'interface humains/machine. Le tigre se montrait doux et coopératif, permettant même à Nek de prélever des échantillons. Mais le plus surprenant fut que Sharks s’installa dans la salle de repos où se trouvait la colonne de lumière de Solar et n’en bougea pas de toute la journée. Seul Rangers osa pénétrer dans la salle. Le dispositif était allumé et Sharks regardait la lumière.

_ Vous ne trouvez pas que cette lumière est apaisante, Rangers ? Demanda doucement Sharks.

_ C’est une pâle copie de ce que nous avons vécu sur Solar, Capitaine, mais oui, elle est apaisante. Par contre, votre comportement inquiète les hommes.

Sharks tourna son visage vers Rangers. Il semblait ne pas comprendre la question. Rangers se sentit très mal à l’aise et tenta de se justifier.

_ C’est le message que m’a confié le Major Sixth. Dit-il rapidement. Le fait est qu’un Bio-Weapon se trouve à côté du Black-Bird et vous, vous restez prostré dans cette salle. Un peu comme si vous étiez hypnotisé ou ensorcelé.

_ C’est peut-être le cas, soldat. Dit Sharks en se retournant vers la lumière. Les effets de la Cristallisation m’ont surpris. Durant un instant, je me suis trouvé dans les souvenirs du monstre et j’ai ressenti ses émotions.

_ Ce monstre a des émotions, Capitaine ? Qui l’aurait cru ?

_ Dès sa naissance, il a été formé à être un destructeur. On a brimé ses émotions pour faire de lui un tueur parfait. Maintenant, il est libre de devenir autre chose qu’un monstre…

_ Un peu comme vous ? Le coupa Rangers.

Le jeune soldat avait visé juste mais Sharks fut quand même surpris par la question. Le regard qu’il lança ensuite au jeune soldat lui ressemblait beaucoup plus. Tranchant et décidé.

_ M…Maintenant que vous êtes à la tête des Air-Lines. Bégaya Rangers. Que vous… Que nous possédons la cristallisation, vous n’êtes plus obligé de n’être qu’un tueur à la solde de l’armée… Et je pense que cette idée vous fait un peu peur.

_ … Touché. Dit Sharks lentement. Solar a changé la conception que je me faisais de mon avenir. Vous savez, après la cérémonie, je l’ai interrogée.

Rangers prit une profonde et discrète inspiration. Il sentait qu’il allait entendre son Capitaine parler de ses propres sentiments. Chose que le super soldat ne faisait jamais.

_ A quel sujet ?

_ Au sujet de l’autodestruction de la génératrice. Je voulais savoir si elle avait les moyens de l’empêcher.

_ Je parie qu’elle a répondu oui. Dit Rangers en souriant.

_ Effectivement. Elle a répondu que pour commencer, elle connaissait les six membres d’équipages à qui j’avais donné le code d’annulation, qu’elle connaissait le code d’annulation, qu’elle pouvait générer un champ magnétique arrêtant la génératrice et qu’en dernier recours, elle aurait pu prendre le contrôle d’un de mes soldats pour taper le code elle-même si les quarante-sept autres solutions moins intrusives qu’elle envisageait n’avaient pas fonctionnées.

_ Quelle honnêteté. S’étonna le frêle rouquin. C’est rare.

_ Oui. Une honnêteté digne d’une déesse. S’exclama Sharks avec ironie.

_ Vous ne prêtez quand même pas attention à cette rumeur comme quoi Solar serait une divinité, Capitaine ?

Sharks partit d’un grand rire et se leva.

_ Je n’ignore jamais ce que pensent mes hommes, Rangers. Et je sais qu’ils ont déjà surnommés cette salle, le Temple. Je n’ai pas votre oreille d’or mais je sais écouter. Mon comportement récent a inquiété mes hommes, il est temps que je rectifie le tir…Merci Rangers.

Sharks mit sa main droite sur le cœur et remercia intérieurement Solar et sortit du « Temple ». A partir de ce moment-là, il ne se montra jamais plus lunatique et son commandement s’améliora. C’est ainsi qu’en agrandissant leurs effectifs par le recrutement et la cristallisation parmi leurs ennemis, cent Air-Lines, qui commençaient à développer des capacités plus qu’humaines, posèrent le pied sur l’astéroïde Oméga CX 05 2398 065. Ce caillou géant traversait le vide spatial en direction de la Terre et la mission du jour consistait à déposer une bombe dans un cratère profond pour le disloquer. Mais une fois à la surface, une personne étrange fit son apparition…

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