Chapitre 6 (2/2)

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Malgré tout ce que pouvait bien dire Ace, et après deux heures à plancher sur leur mémoire, Tyler s'était montré travailleur au même titre que lui, et n'avait pas chômé. Mais il restait fidèle à lui-même : un exaspérant gosse de riches. La frontière entre leurs deux mondes était visible, à la façon dont il buvait son verre ou encore par la montre en cuir très chère qu'il portait à son poignet.

— Il faut que je rentre, s'exclama Ace.

Il s'étira en levant les bras, courbaturé d'être resté assis sans bouger pendant tout ce temps. Ils avaient bien avancé et ils étaient prêts à présenter une ébauche de leur travail à leur professeur référent. Tyler lui avait expliqué que les enseignants étaient là pour les guider, mais qu'ils ne feraient pas le travail à leur place. Beaucoup de personnes prenaient le premier rendez-vous avec eux à la légère, mais si Ace et Tyler arrivaient à faire bonne impression en proposant ne serait-ce que le brouillon d'un plan, ou leur problématique, le prof serait peut-être plus enclin à les aider.

— Je te l'avais dit que c'était mieux comme endroit pour travailler, lui lança-t-il alors qu'ils quittaient la table.

— C'est vrai.

Tyler rit devant sa moue et se rendit au comptoir pour payer. Ace resta légèrement en retrait tandis que Tyler inséra sa carte bancaire dans le petit appareil.

— Merci, mon chou, s'exclama Maria. Dis donc, ajouta-t-elle à l'adresse de Tyler, assez fort pour qu'Ace entende, ton amoureux est très mignon, tu en as de la chance...

Tyler fronça les sourcils. Ace manqua de s'étouffer avec sa salive et toussa plusieurs fois, le visage cramoisi sous l'effort tandis que son binôme éclata de rire si fort que toutes les personnes présentes se retournèrent.

— Oh non, ce n'est pas mon petit-ami, articula-t-il entre deux hoquets, on est juste amis !

Le sang d'Ace ne fit qu'un tour. Qu'est-ce que cette bonne femme avait dit là ? Qu'il était homo ? Elle était complètement stupide ou quoi ? Comment pouvait-elle penser que Tyler était son... Il n'arrivait même pas à l’imaginer.

— Oh, pardon, excusez-moi, je ne voulais pas... répondit Maria avec un sourire mi-figue, mi-raisin.

Tous les regards étaient rivés sur eux, et même si Ace les affronta, il se sentit rougir de honte. Son regard passa d'un Maria perplexe à un Tyler hilare. Un sentiment d'humiliation le prit à la gorge.

— Je suis navrée, je ne pensais pas que...

— Ça ne vous regarde pas, souffla Ace d'une voix dure.

Il sortit en trombe du bar, non sans un regard à glacer le sang à la pauvre Maria, complètement désolée de la bourde qu'elle venait de commettre, ainsi qu'à Tyler qui en avait les larmes aux yeux, à force de rire.

— Je suis désolé, s'exclama Tyler plus tard, lorsqu'il le rejoignit, mais si tu t'aurais vu ! Et ne t'en prends pas à Maria, elle n'y peut rien.

De rage, Ace serra des dents. La réminiscence d'un sourire flottait sur les lèvres de Tyler. Il se prenait pour qui à se foutre de sa gueule, comme ça ?

— Maria est au courant de ma bisexualité. J'ai emmené une ou deux fois quelques partenaires ici, reprit Tyler. Il faut l'excuser, elle ne savait pas....

— Sauf qu'elle ne sait rien de ma vie donc elle aurait mieux fait de se taire !

— Calme-toi, je t'ai dit qu'elle n'avait pas eu l'intention de te blesser ! C'est que tu n'es pas à l'aise avec ça ou... ?

Il jeta un regard en coin qui insinuait beaucoup de choses. Ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase.

— Que tu la mettes ou que tu te la fasses mettre, ça m'est égal. J'en ai rien à foutre que tu prennes ton pied avec un homme, tu fais ce que tu veux de ton cul. Mais ne me mêle pas à tes histoires, merci !

Tyler le regarda, trop abasourdi pour répondre. Ace en profita pour faire volte-face, voulant à tout prix dégager de cet endroit. Il mit ses écouteurs dans l'espoir bien futile de se calmer. Il aurait préféré frapper dans un sac de frappe – ou toute autre chose susceptible de le défouler comme un visage par exemple. Avant que la musique ne perce ses tympans, il entendit la voix de Tyler, étouffée.


Ce ne fut qu'une fois dans le métro bondé, qu'Ace se rendit compte de la violence mots qu'il avait eus. Tyler avait probablement était blessé car il avait eu la même expression sur le visage que tous ceux que son franc-parler avait blessé. Lui qui trouvait cela aberrant que l'on se permette de juger sa vie, qui était-il pour juger Tyler ? Qu'il couche avec une femme ou un homme, cela ne le regardait pas. Il était en général assez ouvert d'esprit, parce qu'il se foutait de ce que les autres faisaient. Alors pourquoi s'était-il emporté contre lui ?

Fatigué, Ace ferma les yeux et se laissa bercer par le balancement du wagon. Il s'était comporté comme un vrai con, mais le regrettait-il ? Tyler avait été suffisamment pénible, il n'avait eu que ce qu'il méritait. Et Maria avait clairement manqué de tact. Mais le fait que ce petit arrogant prétentieux c'était clairement foutu de lui tout l'après-midi lui donnait-il le droit de l'avoir blessé ?

Tyler avait dit à Maria qu'il le considérait comme un ami. Mais de son côté, se sentait-il capable d'être ami avec un type pareil ? Clairement pas. Il était exaspérant au possible. Il avait visiblement des priorités qui ne rejoignaient pas les siennes, comme par exemple faire la fête. Ace n'était pas sociable, et même si prendre prendre un bain de foule ne lui donnait pas un sentiment d'angoisse comme chez certains, il n'était pas trop soirées alcoolisées et fêtes d'anniversaire.

Non, Tyler n'était pas un ami. Juste quelqu'un avec qui il devait travailler sur un projet. Mais il était vrai que ça pouvait se passer dans une ambiance plus légère. Était-il trop tard pour cela ?


Ce soir-là, malgré la soirée épuisante qu'il avait passée à servir des cocktails et autres bissons, il n'arriva pas à trouver le sommeil. Tout tourné en boucle dans sa tête et son cerveau n'avait pas l'air de vouloir le laisser dormir : sa mère, le mémoire, Tyler et les mots durs qu'il avait eus. Avant qu'il ne sombre dans un monde sans rêves, Il se rappela qu'il avait complètement oublié de répondre au message de Vanessa. Vanessa... peut-être que la revoir lui procurerait un peu de bien. Il en avait besoin.

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