Chapitre 17

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Ace était aussi raide qu'une statue de marbre. Il essayait de bouger le moins possible, assis à l'arrière de la voiture – une Audi Q6 – à côté de Tyler. Leurs genoux se touchaient et il ne voulait pas rompre le contact.... enfin si, il le voulait... Quoique... Bref, il était en pleine hésitation, partagé entre deux sentiments contradictoires et tandis qu'il essayait de comprendre ce qu'il voulait, il préférait ne pas bouger.

Tandis que seul le moteur de la voiture brisait le silence dans l'habitacle, Ace se repassait en mémoire Tyler sortant de la douche. Il revoyait son torse finement musclé, sa peau aussi blanche que lui était bronzé inondée par le rai de lumière qui avait filtré à travers la fenêtre de la chambre. Il ne s'était pas détourné par pudeur, non. Au fond de lui, ça ne l'avait pas dérangé que Tyler se retrouve torse nu. Non, c'était pour qu'il ne voit pas ses joues devenir aussi rouges que des tomates mûres. Encore maintenant, il se fustigeait mentalement. Mais que diable lui arrivait-il ? Voilà maintenant qu'il devenir aussi cramoisi qu'une fillette prépubère en voyant un garçon. Un garçon !! Il se demanda alors s'il réagirait pareil avec Andreï. Il ne put s'empêcher de grimacer devant cette scène. Non, c'est sûr, Andreï est son meilleur ami, c'était inimaginable. Mais qu'est-ce qu'il disait ? Avec Tyler c'était aussi inimaginable ! Il n'aimait que les femmes, leurs poitrines et leurs fesses rebondies.

Il n'avait pas baisé depuis longtemps, c'est pour cela que le moindre morceau de chair lui donnait envie. Ses hormones le travaillaient trop !

Il se représenta mentalement involontairement le corps d'une femme aux formes généreuses ainsi que la vision de Tyler sortant de la douche. Lequel l'attirait le plus ? Il dut bien se résoudre à la vérité : il n'en savait rien.

Son cerveau était influencé, Ace savait qu'il plaisait à Tyler. Le baiser de la dernière fois n'était qu'une preuve intangible. Même en admettant que l'alcool y soit pour quelque chose, on n'embrassait pas n'importe qui sans ressentir un minimum de sentiments pour la personne ne serait-ce qu'une attirance purement physique ou sexuelle. Et puis, il avait très bien vu Tyler frissonner lorsqu'il lui avait fait face dans le couloir quand il était passé devant lui.

Et maintenant, leurs genoux se touchaient et Ace pouvait sentir la pression qu'exerçait la jambe de Tyler sur la sienne. Il eut soudainement chaud mais se refusa à bouger un millimètre pour ouvrir la vitre.

— À quoi penses-tu ? demanda Tyler. Tu as l'air bien concentré.

Ace sortit de ses pensées et regarda Tyler.

— Je réfléchissais à ce que nous pourrions faire, mentit-il.

— On pourrait aller en ville flâner. Et pourquoi pas entrer dans deux ou trois magasins. J'ai déjà en tête ceux où tu pourrais trouver ton bonheur. Enfin si ça te convient ?

— Oui, oui c'est parfait.

En réalité, Ace s'en moquait un peu. Il n'arrivait plus à réfléchir correctement et priait pour que le temps avance plus vite. Il n'en pouvait plus de rester assis dans cette voiture et de la proximité avec Tyler.

Alors, quand Georges se gara enfin sur le bord de la route, Ace fut le premier à sortir. Il respira à pleins poumons et l'air froid lui fit le plus grand bien.

Une fois que Tyler ait donné ses instructions au chauffeur pour qu'il vienne les chercher le soir, ils marchèrent côte à côte et empruntèrent l'avenue piétonne où se trouvaient les magasins. Ace se demanda si Tyler avait fait exprès d'aller dans ce quartier car il savait que ces magasins étaient tous abordables pour lui. Il se doutait bien que lui, ne s'habillait pas ici.

Il reprit ses esprits et arrêta de s'éparpiller dans ses pensées, Tyler était trois pas devant lui et, avec la foule qu'il y avait, il avait une chance de le perdre de vue. Il accéléra le pas pour être à sa hauteur. Ils adoptèrent le rythme de la masse mouvante quand Tyler tourna brusquement et entra dans un magasin de prêt-à-porter d'une enseigne connue.

— Je ne pense pas que ça soit ton style, supposa Tyler, mais ça n'empêche pas de jeter un coup d'œil.

Ace déambula tout en farfouillant dans les rayons. Tyler se saisit d'une chemise mais la reposa bien vite devant la mine de dégoût qu'affichait Ace.

Ils parcoururent rapidement le côté homme du magasin et sortirent. Tout en continuant d'avancer, ils discutèrent de tout et de rien. Ace évoqua la fois où Tyler s'était rendu à l'appartement et était tombé nez à nez avec Andreï. Tyler avoua que le grand russe l'avait intimidé par sa prestance et Ace éclata de rire. Andreï était la gentillesse incarnée. Même s'il s'était battu quelque fois – surtout à cause d'Ace – il ne ferait pas de mal à une mouche. Tyler, gêné, coupa court à la discussion en entrant dans un second magasin. Il ne voulait pas trop entrer dans les détails de la raison de sa visite.

Ils firent le tour du magasin.

— Je te verrais bien porter ça, ricana Ace en montrant un t-shirt où il était inscrit : « Si tu veux savoir ce que ça fait de frôler la perfection, passe à côté de moi ! ».

— Pfff, souffla Tyler en levant les yeux au ciel.

Tyler trouva une chemise noire très élégante avec des broderies et un jean bleu qu'il s'empressa d'aller essayer. Lorsqu'il sortit de la cabine d'essayage, il se pavana devant Ace, en lui demandant son avis.

— Tu es aussi inutile qu'une moule accrochée à son rocher, s'exaspéra Tyler devant le peu d'entrain et d'avis de son ami.

— Pourquoi toujours rechercher l'approbation des personnes ? répondit Ace. Mon avis importe peu, du moment que toi tu aimes, pourquoi tu te refuserais de porter les habits qui te plaisent sous prétexte que celui avec qui tu fais les boutiques n'aime pas.

Tyler réfléchit.

— Peut-être que son avis nous importe parce qu'on souhaite plaire à l'autre ?

Ace fixa Tyler avant de hocher les épaules.

— De toute façon, les habits n'altèrent en rien la beauté des personnes qui les portent. Ils ne peuvent que les rendre plus belles mais en aucun cas ils peuvent l'enlaidir. Donc tu peux porter ce que tu veux.

Tyler eut un sourire énigmatique.

— Bon, eh bien je la prends cette chemise.

— D'accord.

Ils allèrent en caisse, lorsque Tyler s'arrêta devant un présentoir à bijoux.

— Regarde ce collier de perles, s'exclama-t-il. J'aime beaucoup et il irait bien avec ma chemise.

— Mais c'est un collier pour les meufs, hésita Ace, embarrassé.

Tyler le regarda, étonné.

— Ce sont les marques et la société qui ont décidé de genrer les vêtements et les accessoires. Après tout, ce ne sont que des bouts de tissus, pourquoi devrait-on limiter nos envies et nos goûts au genre que la société nous a imposé depuis la naissance ?

Tyler l'essaya et se regarda dans le petit miroir mis à disposition.

— En plus, il me va bien.

— Tu n'as pas peur de ce que les gens vont penser ?

— Pardon ? Ce n'est pas toi qui m'a fait tout un discours sur le fait que les personnes n'ont pas d'avis à donner sur ce qu'on porte ? Et même si cela arrive, je me contrefous de l'avis des gens. Je l'aime bien, je l'achète.

— D'accord, d'accord, ne t'énerve pas, abdiqua Ace.

— Je ne suis pas énervé, rétorqua Tyler en faisant un clin d'œil à Ace.

Une fois les achats payés – Ace ne put s'empêcher de se faire une réflexion sur la carte gold que Tyler sortit de son portefeuille – ils se remirent en route.

Tyler proposa à Ace d'entrer dans un magasin dont il soupçonnait que le style allait lui plaire. Ace ne le connaissait pas, mais accepta.

Comme il l'avait prévu, Ace y trouva son bonheur. Malheureusement, le peu de moyens financiers dont il disposait ne lui permit pas de tout acheter. Il sélectionna quelques habits ainsi qu'une veste en cuir que Tyler le força à essayer. De couleur noire – comme la plupart de ses vêtements – elle lui allait comme un gant. Il épousait parfaitement sa carrure.

Ace était encore plus attirant vêtu de cette veste que la normale. Son côté « bad-boy » ressortait. Quelque chose de différent se dégageait de lui. Tyler nota mentalement qu'avec sa carrure, les costumes trois pièces devait lui seyait merveilleusement bien. En cet instant, il aurait donné beaucoup pour voir Ace vêtu d'un costume.

Soudain, Ace soupira fortement et secoua sa tête en enlevant la veste.

— Elle coûte beaucoup trop chère pour moi.

— Mais elle te va si bien ! protesta Tyler.

— Peut-être, mais j'ai un loyer à payer à la fin du mois et je peux pas me permettre de demander à Andreï de payer une plus grosse part que moi. Pour lui aussi, c'est dur.

Tyler fit une petite moue triste.

— Elle est très jolie, mais je ne peux pas.

Ace reposa à contre-cœur la veste à sa place et s'éloigna. Il allait regretter c'est sûr, mais il préférait cela plutôt que de demander à Andreï de faire une avance sur le mois prochain. Il touchait une bourse plus importante que lui et il se devait d'éviter les moindres dépenses excessives à son meilleur ami.

Il s'apprêtait à rejoindre la file d'attente pour payer lorsqu'il sentit quelque chose s'enfoncer sur sa tête. Il sursauta et se retourna. Il se retrouva nez à nez devant un Tyler rieur.

— Ça te fait une tête de bébé, s'émerveilla-t-il.

Il poussa Ace devant un miroir. Tyler lui avait fait enfiler un bonnet marron du même style que celui qu'il portait la dernière fois, à la bibliothèque universitaire.

— J'étais sûr qu'ils en vendaient pas ici !

Ace fronça les sourcils et réajusta le bonnet. Des petits mèches capricieuses s'en échappaient et formaient des petites cornes de chaque côté du bonnet.

— T'es si mignon, ça contraste avec ton côté terrifiant, constata Tyler en roulant les « r » du dernier mot.

Ace était d'accord avec lui, le bonnet lui allait bien.

— Il coûte combien ?

— Je te l'offre ! répondit aussitôt Tyler. À défaut de la veste, tu auras au moins ce bonnet.
Ace était gêné. Il ne voulait pas faire le rabat-joie à être trop à cheval sur les prix mais en même temps, il ne pouvait pas faire de folies.

— Ce n'est pas à toi de m'acheter ce que je porte...

— Arrête donc, ce n'est pas comme si $10 représentaient beaucoup pour moi. Je te rassure, je ne verrais même pas la différence sur mon compte.

Il enleva le couvre-chef en faisant attention de ne pas tirer les cheveux d'Ace en même temps et le prit sous le coude.

Têtu comme il était, Il était peine perdue de le faire changer d'avis. Et si cela lui faisait plaisir, alors Ace pouvait bien le laisser faire. C'est bien ce qu'il se fait entre amis habituellement ? Chacun paye un petit quelque chose tour à tour.

À peine les portes du magasin franchies, Tyler arracha l'étiquette du bonnet et couvrit Ace. Il se plaça devant lui et le scruta.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Attends deux petites secondes... ordonna Tyler.

Il ajusta adroitement le bonnet, sortit quelques mèches et les replaça correctement. Une fois terminé, il claqua sa langue contre son palet, satisfait.

— Voilà, ta petite bouille de bébé est revenue.

Ace souffla d'exaspération.

— T'as pas fini de me faire chier ?

— Oulah, recula Tyler en mettant les mains en avant. Le jeune Ace se rebelle contre ses aînés ?

Ace préféra ne pas rétorquer et s'éloigna rapidement, obligeant Tyler à trottiner derrière lui pour le rattraper.

Ils divaguèrent encore quelque temps dans la ville, s'éloignant de l'avenue commerçante. Puis lorsque la lumière commença à décroître, signe que le soleil entamait sa descente dans le ciel, ils se décidèrent à rentrer. Mais lorsque Tyler appela Georges pour qu'il vienne les chercher, la pluie commença à tomber. La fine bruine se transforma rapidement en averse d'orage, obligeant les deux amis à courir pour se mettre à l'abri sous un renfoncement d'un immeuble.

— Et merde, cette belle après-midi se termine mal, marmonna Ace.

— Mais la journée n'est pas finie ! signala Tyler avec un clin d'œil. Tu voudras bien dîner à la maison ce soir ?

— Il faut que je rentre chez moi, Andreï doit m'attendre et j'ai un peu de trajet à faire.

— Allons donc ! s'écria Tyler. Andreï n'est pas capable de passer une soirée tout seul ? Je suis sûr qu'il serait ravi qu'on soit de nouveaux amis et ça ne serait pas lui qui t'empêcherait de dîner avec moi.

Tyler savait qu'il avait raison. Et Ace aussi.

— Tu es tout le temps comme ça ? Demanda Ace.

— Comment quoi ?

— Sûr de toi et à avoir toujours raison ?

— Pas toujours, mais presque, rectifia Tyler, pensif.

Puis il sourit à Ace, de son sourire si parfait et étincelant. Ace ne put s'empêcher de sourire à son tour par mimétisme.

Prostrés et trempés dans leurs habits, ils attendirent en silence le chauffeur de Tyler.

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