Chapitre 12

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Lorsque Tyler ouvrit les yeux, la seule chose qui put faire fut de les refermer immédiatement en grognant sourdement. La lumière du soleil qui filtrait à travers la fenêtre réveilla une intense migraine qui semblait prendre plaisir à lui vriller le cerveau. Il se retourna, s'empêtra dans ses draps, retrouva enfin son oreiller et soupira de bonheur en enfouissant sa tête dedans pour retourner dans l’obscurité. Il somnola quelques minutes, avant que son subconscient enregistre un bruit mat, ce qui le réveilla pour de bon. Tyler rouvrit prudemment les paupières, au fur et à mesure que ses yeux s'habituaient à la luminosité. Il se redressa en position assise, avant de se tenir la tête à deux mains. Il tenta de se remémorer la soirée tant bien que mal ; il se rappelait qu'il y avait du monde, que la musique était forte. Il se souvint aussi qu'il avait trop bu, et qu'il avait dansé une bonne partie de la soirée, complètement ivre. Par contre, il ne savait pas comment il avait rejoint son lit et comment il s'était retrouvé en caleçon. Soudain, une image lui revint brusquement en mémoire, celle d'un corps appartenant à un beau brun aux yeux verts, et à son visage ravagé par la colère. Il ouvrit grand les yeux lorsqu'il comprit pourquoi.

— Putain, fais chier ! s'écria-t-il avant de s'affaler sur son lit.

Il avait embrassé Ace. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il ne savait pas s'il devait se sentir coupable ou bien être très content de cela. Il se mit à sourire bêtement lorsqu'il se rappela de la sensation de ses lèvres contre celles légèrement gercées d'Ace et de sa main qui se perdait dans ses cheveux d'un noir d'encre incroyablement doux. Maintenant c'était sûr, il était amoureux d'Ace.

Mais ce n'était pas réciproque du tout ! Tyler grimaça au souvenir de la fureur d'Ace, il avait bien cru qu'il le frapperait. Il avait complètement merdé sur toute la ligne. C'était la pire chose qu'il aurait pu faire, prendre Ace par surprise et surtout le forcer. Il aurait dû emmener ça en douceur, essayer de le faire se questionner sur sa sexualité avant de tenter quoi que ce soit, et si cela n'aurait pas marché, alors il l'aurait laissé vivre sa vie. Il était stupide ! Ace n'avalera jamais l'excuse bidon de l'alcool, car il n'y était pour rien. Il en avait eu tellement envie qu'il l'avait fait sans penser aux répercussions, lui qui était d'ordinaire si posé et réfléchi. Il s'en voulait tellement, car il avait foiré sa seule et unique chance, Ace ne lui pardonnerait jamais. À cet instant, il voulait se coller lui-même une droite pour avoir été si con.


Tyler avait le regard fixé sur le plafond allongé en travers de son lit, à ressasser sa culpabilité, lorsqu'il entendit quelqu'un monter les escaliers. Il se demanda qui cela pouvait bien être. On frappa à sa porte et une tête connue passa le seuil.

— Alors la marmotte, on vient juste de se réveiller ? le taquina Morgan avant d'entrer.

— Ouais. Dis, tu aurais pas...

—Tiens, le coupa-t-il en lui tendant un verre d'eau où finissait de fondre une aspirine.

Tyler le remercia d'un geste de la tête avant d'avaler d'une traite le médicament. Il fronça les sourcils en se rendant compte que son meilleur-ami ne portait qu'un bas de jogging, et tenait un gros sac de poubelle dans ses mains.

— Tu es resté pour ranger ? demanda Tyler, surpris.

— Il fallait bien que quelqu'un s'y colle, je savais bien que tu n'allais pas être très frais aujourd'hui, se moqua Morgan.

— Merci, souffla-t-il.

Tyler s'assit sur son lit, jambes repliées, et regarda son ami remettre de l'ordre dans la pièce. Il prit les habits de Tyler de la vieille et les jeta dans le couloir, sûrement pour ne pas oublier de faire tourner une lessive, car ils empestaient l'alcool à des kilomètres à la ronde.

— Tu peux me raconter ce qu'il s'est passée hier soir ? J'ai des gros trous de mémoire.

— Bien sûr, avant ou après qu'Ace soit parti en furie, de ta faute je suppose, le taquina gentiment Morgan.

— C'est ça moques-toi, comme si j'avais déjà pas assez envie de me frapper comme ça.

— Eh bien, pour tout te dire, tu es parti complètement en vrille. Tu t'es saoulé la gueule, quitte à faire un coma éthylique. On a essayé de t'en empêcher, tu nous répétais sans cesse que t'étais désolé, que tu ne voulais pas. Tu es parti danser et à un moment, tu as failli te foutre à poil. Heureusement que Matthew et Damon veillaient. Ah oui, tu as essayé d'embrasser tous les mecs de la soirée et quelques nanas aussi, dont Abby et moi. Et si tu veux vraiment tout savoir, tu m'as dit, je cite « Putain, t'es vraiment trop hot, j'aurais dû baiser avec toi depuis longtemps. »

Morgan s'arrêta de compter sur ses doigts. Tyler le regarda horrifié.

— Oh merde, je suis désolé !

Son ami éclata de rire.

— Ne t'inquiète pas, je t'ai déjà excusé auprès de tout le monde, et pour moi, ne t'en fais pas, je sais bien que tu n'aurais jamais dit ça si t'étais dans ton état normal. Aller maintenant, vas prendre une douche, nous avons besoin de parler, toi et moi.

Morgan lui lança un regard entendu avant de quitter la chambre, traînant son sac poubelle derrière lui et sifflotant doucement un air qui était passé plus tôt dans la soirée.


XXX


— Donc tu peux m'expliquer comment tu as fait pour merder autant ?

Les deux jeunes hommes étaient dans la cuisine, Morgan faisait chauffer un bol de chocolat chaud pour Tyler tandis que le blond était assis à l’îlot central, prête à faire face au courroux de son ami.

— J'en sais rien, j'avais trop bu, je savais plus que je faisais, gémit Tyler en se prenant la tête entre les mains.

— T'es conscient que c'est mort, là ? Ace ne voudra jamais plus te reparler et je te signale que tu as un Mémoire à faire avec lui.

Il lui servit son bol et s'assit en face de lui, pour se tartiner une tranche de pain de pâte à tartiner.

— Je sais bien, tu crois quoi !

Morgan n'ajouta rien, il savait déjà bien assez que son meilleur-ami se sentait coupable.

— Et toi alors, tu as conclu avec Abby ? demanda Tyler pour changer de conversation.

Un sourire mangea les lèvres du brun.

— Tu doutes de mes talents ? Bien sûr qu'on s'est embrassés, et pas qu'une fois ! Sérieusement, reprit Morgan d'une voix plus calme, cette fille est parfaite : drôle, intelligente et magnifique. Elle est différente des autres filles, et je t'assure que j'ai pas envie de déconner avec elle. Je pense que c'est la bonne, tu vois.

Tyler regarda son ami quelques instants. Des étoiles dansaient dans ses yeux, chose qu'il n'avait jamais vu auparavant.

— Ce que je vois très bien, c'est que t'es piqué mon pote, lança avec un clin d'œil.

— T'as peut-être bien raison et franchement, c'est pas pour me déranger, répondit Morgan avec un petit sourire. Comme ça, on est deux.

— Yep.

— Tu sais comment tu vas t'y prendre ? Tu sais, pour te faire pardonner.

Tyler secoua la tête.

— Pas le moins du monde. Et je ne vais pas te cacher que j'ai un peur de sa réaction ne serait-ce que si on se croise dans la rue, alors j'imagine même pas lui parler. Rien que pour l'incident au bar de la dernière fois, j'ai bien cru qu'il allait me frapper.

— Il faut que tu lui dises vraiment ce que tu ressens, t'as plus le choix Ty. Et le plus tôt sera le mieux. Ne le laisse pas mariner dans ses pensées, il va s'imaginer mille et une choses et c'est comme cela qu'il va te détester.

— T'as raison. Je vais lui parler. Mais pour l'instant, on a quelque chose à fêter : Le plus grand et le plus beau des coureur de jupons de la ville, qui soit-dit en passant est mon meilleur-ami, s'est enfin casé ! s'écria Tyler en levant son bol de chocolat comme si c'était un toast qu'il portait.

— T'es vraiment con, toi ! souffla Morgan d'exaspération avant de venir entrechoquer sa tasse.

XXX

Les doigts de Tyler virevoltaient dans le vide au-dessus du clavier de son portable comme s'ils reproduisaient une danse qu'eux seuls connaissaient. Morgan et lui avaient fini de nettoyer la maison et de tout remettre en ordre. Son ami venait tout juste de partir et lorsqu'il se retrouva seul, Tyler fut pris d'un sentiment de culpabilité si fort qui lui noua a gorge. Il s'en voulait tellement d'avoir ruiné son amitié avec Ace. Il voulait se frapper la tête contre lu mur pour se punir lui-même.

Cela faisait déjà dix minutes que le jeune homme avait décidé d'écrire un message à Ace. Il voulait lui présenter ses excuses pour le mal qu'il lui avait indubitablement fait. Mais il n'arrivait pas à trouver les mots et il finissait indubitablement par appuyer sur la touche « effacer ». Ses mots semblaient vides de sens, d'émotions.

Soufflant d'exaspération, il lâcha son téléphone sur la table basse en un bruit sourd qui résonna dans tout le salon et se prit la tête entre les mains. Il ne savait pas quoi faire et cela le mettait hors de lui. N'y tenant plus et parce qu'il ne supportait plus de s'imaginer mille et un scénario qui tournait en boucle dans son crâne, il se leva du canapé, prit sa veste en jean et sortit en trombe de la maison.

XXX

Ce n'est que lorsqu'il se vit comme au ralenti appuyer sur la petite sonnette de l'appartement d'Ace qu'il se rendit compte qu'il était vraiment stupide. Comment réagirait Ace lorsqu'il le verrait ainsi, en short de sport et en t-shirt, les cheveux décoiffés et une mine cadavérique, comme s'il n'avait pas dormi depuis deux jours ? À coup sûr, il se prendrait une droite d'Ace et franchement, il l'aurait largement mérité.

Il fut pris d'une violente envie de tourner les talons et de s'enfuir par les escaliers mais la porte s'ouvrit au même moment, le statufiant sur place. Au lieu du visage qui hantait ses jours et ses nuits, apparut une tête aux cheveux châtains clairs, et au visage carré.

— Bonjour... ? salua d'une voix hésitante l'inconnu qui semblait vivre chez Ace.

Il devait avoir probablement son âge mais sa musculature développée et sa voix grave lui donnait un certain charisme. Tyler ne sut que dire, beaucoup trop étonné de voir surgir un homme tel que celui qui lui avait ouvert.

— Vous cherchez quelque chose ?

Tyler se rendit compte qu'il avait un léger accent, mais plus « dur », là où celui d'Ace était plus chantant.

— Je... Je pense m'être trompé. Excusez-moi, répondit Tyler, prêt à tourner les talons.

— Attendez ! Vous ne serez pas Tyler Scott par hasard ? Ace m'a parlé de vous. Je suis Andreï, son meilleur-ami et colocataire par la même occasion. Très heureux de faire ta connaissance.

Tyler esquissa un sourire. Et dire qu'il avait senti durant un petit instant une pointe de jalousie... Il se souvint qu'Ace partageait son appartement avec son meilleur ami, celui qui voulait devenir peintre avec un physique de lutteur. Il fallait bien avouer qu'Andreï était très impressionnant.

— Hm... Est-ce que cela serait possible de lui parler ?

Une mimique à la fois mystérieuse et triste naquit sur le visage de son interlocuteur.

— Il est parti à la salle en début d'après-midi, il avait besoin de... se défouler. Il avait pas l'air bien quand il est rentré cette nuit. Et il n'a rien voulu me dire ce matin

Tyler déglutit, honteux. Andreï semblait le regarder comme s'il voulait sonder son âme, et savait déjà tout.

— Oui, je...

Les mots restèrent bloqués dans sa gorge.

— Tu peux entrer l'attendre si tu le souhaites, il ne devrait plus tarder, annonça Andreï en s'effaçant légèrement de l'entrée.

— Non, non, s'empressa de répondre Tyler, j’avais une course à faire dans le coin et je voulais en profiter pour voir comment il allait.

Pire mensonge qu'il avait pu sortir de toute sa vie. Il était sûr qu'Andreï n'était pas dupe, pourtant, il hocha la tête comme s'il comprenait.

— Dans ce cas, je lui dirai que tu es passé...

— D'accord, merci. Excuse-moi du dérangement, bonne journée.

À peine Andreï eut le temps de lui répondre que Tyler dévala les escaliers. Il respira à pleins poumons lorsqu'il déboucha sur le trottoir. Il ne s'était jamais senti aussi mal, et ce n'était pas à cause de la présence d'Andreï mais plutôt celle de la culpabilité qui menaçait de le submerger.

Il avait joué au con, et il avait perdu.

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