117.1 - La déchéance du mage

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Alors qu’il s’apprêtait à retourner voir ses collègues de travail, Flint sursauta lorsque la porte automatique éclata, derrière lui. Il tourna son regard vers le mur, en face de cette dernière et vit qu’elle avait été transpercée par de puissants pics de glace. Le mage colérique sortit de la salle et se jeta sur son supérieur. Il lui planta son poing dans la figure à plusieurs reprises. Le grand blond encaissa coup après coup jusqu’à ce qu’il fasse apparaître son épée dans ses mains. Il transperça le ventre de Wyatt. Son adversaire contre-attaqua et le figea celui-ci dans une prison givrée. Wyatt mit une main sur sa blessure et gémit de douleur.

— Alors, t’a enfin pété un câble ? soupira le capitaine. Tu n’as pas d’honneur.

— Si j’en ai ! Seulement je ne comprends pas pourquoi tout le monde insiste à te donner des passe-droits quand tu n’arrêtes pas de faire ta propre loi !

— Peut-être parce que mon instinct a toujours été bon, en général ?!

— Je t’emmerde !

— Tout ceci n’a aucun sens !

La lèvre inférieure de Flint était en sang. Les coups de poing de Wyatt avait failli lui briser la mâchoire, ainsi que quelques dents. Le mage était sur le point de bondir à nouveau sur son supérieur quand ce dernier eut pour réflexe de lui lancer un sort puissant de lumière à la figure. Le mage hurla de douleur et se recouvrit le visage.

— Mes yeux ! cria celui-ci. Enculé ! Je vais te tuer !

— Que ceci te serve de leçon ! Tu es désormais congédié ! Tu aurais dû suivre mon conseil, mais tu ne m’as pas écouté ! Amuse-toi à expliquer tout ça aux autorités de ce vaisseau, je m’en lave les mains !

Le capitaine recracha du sang qu’il avait avalé et s’essuya la bouche du revers.

— Au fait, pas besoin de t’en faire pour les témoins, continua celui-ci. Il y a des caméras partout et les gens de Baldt prennent très mal les traîtres dans ton genre. Amuse-toi à te trouver une nouvelle brigade, parce que plus ne voudra de toi.

Sur ces paroles, Flint lui cracha aux pieds.

Fou de rage, Wyatt lança plusieurs pics de glace autour de lui et essaya de le tuer. À l’instant où le blond allait recevoir l’un d’entre eux près du cœur, l’attaque magique se fracassa contre un champ de force. Flint se tourna rapidement pour voir Estelle qui venait de courir à son secours. Elle était accompagnée de Scottie et Kylie. Le jumeau était dans tous ses états et ne comprenait pas pourquoi son supérieur et son mari luttaient ainsi.

— Non, mais qu’est-ce qui te prend, Silverwind ?! aboya la jumelle. Ce n’est pas dans tes habitudes de provoquer les gens ainsi !

— Ne te mêle pas de cette dispute, Kylie ! grogna le mage. Cela ne concerne que moi et cette grosse merde !

— Je t’interdis de traiter mon père de cette façon ! lança Estelle, avant de repousser son camarade avec une puissante onde magique.

La journaliste contrôlait si bien ses champs de forces qu’elle avait fini par développer une technique non-offensive, qui permettait de repousser ses adversaires avec ces derniers. Elle s’en servait surtout pour se protéger ou venir en aide à ses coéquipiers.

— Wyatt, mais qu’est-ce qui t’as !? brailla Scottie. Qu’est-ce qu’il t’a fait pour que tu l’attaques ainsi ?! Arrête, je t’en prie !

— Toute cette histoire est de sa putain de faute ! grogna le mage. S’il ne nous avait pas abandonné sur Célestia, nous aurions encore une planète et nous ne serions pas coincés dans l’espace ! Tu sais que j’ai raison ! Tous nos malheurs viennent de lui, cet enculé de traître ! Il mériterait que je le pende !

Flint avait la conviction que tout ceci n’était que des balivernes. Wyatt avait passé une bonne partie de la matinée à culpabiliser sur le fait qu’il ne voulait pas d’enfants, s’était disputé Luna et maintenant il s’en prenait à lui parce qu’il avait besoin de décompresser. Toutefois, il devait reconnaître que ses actions, ces dernières semaines, n’avaient pas été exemplaires. Le blond n’avait fait que suivre son instinct et son cœur. Il avait eu quelques crises d’anxiétés, mais il ne se voyait pas comme un mauvais chef. Le mage pensait tout le contraire. Ce dernier le méprisait.

— C’est faux et tu le sais ! répliqua sèchement Kylie. Si tu as quelqu’un à blâmer pour nos malheurs, c’est Perséphone et ce maudit Conclave ! Par leurs décisions, ils ont ruiné Aeglys et ils ont aussi détruit Célestia ! Ce n’est pas la faute de Flint si nous avons tous perdu ! Au moins nous sommes ensemble, crétin !

— Il m’a aveuglé, merde ! hurla Wyatt.

— Tant mieux, répondit Flint, d’un ton moqueur. Tu n’auras plus à voir mon si joli visage que tu ne peux plus voir en peinture.

Le mage se prit la tête et gémit de douleur.

— Tu n’avais pas le droit !

— Tu m’as attaqué en premier, je te signale, répliqua le capitaine, nonchalamment. Qu’attendais-tu que je fasse ? Me laisser faire ? Allons, mon chaton. Ce n’est pas comme ça qu’on a élevé les Markios…

— Je te hais ! Je te hais ! JE TE HAIS !

La prison de glace qui entourait Flint disparut en poussière, mais cette fois, ce fut Scottie qui intervint. Il mobilisa son époux avec des lianes et lui recouvrit le visage, sauf le nez et la bouche.

— Qu’est-ce que tu fais ?! demanda sa sœur.

— J’emmène mon imbécile de mari à l’infirmerie, déclara-t-il, à travers ses larmes. Il répondra de ses actions devant Athéna.

— Mais… attends…

— Il vient d’agresser ouvertement notre capitaine, Kylie. C’est un acte de trahison.

Flint soupira et leva une main afin d’attirer l’attention vers lui.

— Ça va, ça va. Je l’ai provoqué, à vrai dire, parce qu’il me tapait sur les nerfs avec vos affaires de couple. Je l’ai simplement congédié. Je vais devoir me livrer à l’autorité, car j’ai ma part de responsabilité dans cette affaire. Cependant, je t’autorise de l’emmener à l’infirmerie.

Scottie était surpris d’entendre que son supérieur était en partie responsable de ce conflit, mais s’inquiétait davantage pour la blessure de Wyatt que tout le reste. Il traîna donc son époux de force, à travers le couloir. Le blond espérait que ce duel déloyal allait donner un peu de courage au mage afin de tout avouer à son partenaire de vie.

Estelle s’occupait déjà de soigner la blessure de son père ; elle était anxieuse et ne comprenait pas ce qui s’était passé.

— As-tu vraiment congédié Wyatt ? demanda-t-elle en tremblant.

— Mais non… c’était une ruse, soupira ce dernier. Luna et lui sont en conflit et il est trop borné pour avouer ses véritables sentiments à son mari. Je voulais un peu le secouer, mais il l’a mal pris et m’a attaqué réellement. J’aurais dû faire plus attention à mes mots. Espérons que ce que je viens de lui dire lui donnera assez de force pour dire la vérité à Scottie…

Kylie ne comprenait pas où il voulait en venir. Elle sortit une trousse de premiers soins de sa bague magique et s’approcha près de son épouse et de son beau-père. Elle avait déjà une bouteille de désinfectant à la main et une éponge de l’autre. Toutes deux refermèrent la plaie sur la lèvre. Il ressentait toujours du mal, mais être capable de parler comme il le faisait depuis l’incident, leur démontrait qu’il n’avait rien de cassé.

— Quelle vérité ? interrogea Estelle. Que s’est-il passé ?

— Scottie veut un bébé, Wyatt n’en veut pas, répliqua Flint.

— Ah ça !? s’exclama la guerrière. Mon frère le sait déjà.

Elle gloussa avant d’éponger le sang qui avait coulé sur la nuque du capitaine.

— Il ne fait que taquiner Wyatt à longueurs de journées parce qu’il sait que ce dernier a horreur des bébés. De toute façon, mon frère préfère la compagnie des animaux.

— Ouais, bah… Luna voudrait que l’un d’entre eux lui offre la chance d’être mère.

— Eh ?! Comment ça !?

Flint expliqua alors à Estelle et Kylie toute la conversation qu’il avait eue avec la magicienne, dans le jacuzzi : sa légère attraction pour le couple, ainsi que son désir de fonder sa propre famille, sans pour autant avoir le besoin d’avoir un partenaire de vie.

— Ouah… je ne pensais pas qu’elle avait tous ces sentiments refoulés, remarqua la punk. La pauvre, ça ne doit pas être évident de vivre ce qu’elle a.

— Bah, c’est comme ça. La plupart des asexuels que j’ai connus à Baldt vivaient souvent des situations très compliquées que nous ne pouvions pas vraiment comprendre, Gabriel et moi. On finit par s’y habituer. Mais pour le cas de Luna, c’est un peu différent parce qu’elle ne ressent pas forcément le besoin d’être en couple, non plus. Mais si vous voulez mon avis, elle se cherche encore…

Il fit une courte pause avant de se masser la mâchoire endolorie. Ensuite, il continua :

— Si j’ai bien compris la logique de notre amie, elle peut ressentir des sentiments amoureux, mais très rarement et uniquement avec des gens qu’elle affectionne.

— Il y a un terme pour ça, en fait, répondit sa fille. Lors de notre passage dans la simulation terrienne, j’étais aussi journaliste et je fréquentais ce qu’on appelait des réseaux sociaux. Dans la plupart de ces sites webs, il y avait des articles sur la demisexualité et la demiromance. Tous les deux font respectivement partie du spectre de l’asexualité, ainsi que celui de l’aromance.

Flint et Kylie échangèrent un regard confus. Ces termes ne leur étaient pas familiers. La petite blonde secoua la tête et rajouta :

— C’est ce que tu viens d’expliquer, papa.

— Ah, je comprends mieux… dit-il. Tu arrives donc à te souvenir de la simulation ? Parce que pour moi, tout est flou.

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