110.3 - Quand Estelle rencontre Kylie

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La punk passa sa main devant le visage de la journaliste.

— Hé-ho ? Miss Tabris ? T’es dans la lune… remarqua-t-elle.

— Je dois le rencontrer, dit l’apprentie-journaliste qui se leva d’un bond.

— Hein ?! Mais il est dangereux ce mec ! Faut pas t’en approcher…

La petite blonde choisit d’ignorer les mots de la musicienne et se déplaça jusqu’au bar, où Arthur Sage discutait avec son fils. Répugnée, Kylie opta pour aller s’asseoir à nouveau à sa table, au fond de la pièce. Elle se croisa les bras et s’appuya vers l’avant, dans l’espoir que son repas arriverait plus vite que prévu. Cependant, cette conversation avec Estelle lui avait fait du bien.

— Alors, as-tu des nouvelles de ta sœur ? demanda Artael à Flint.

— Je suis passé chez sa Maddie, sa collègue, répliqua son fils. Elle m’a dit que Marie n’a donné aucun signe de vie depuis plus de quarante-huit heures. C’est comme si la présence de maman l’avait fait péter un câble.

— Ça ne me dit rien de bon.

Le restaurateur se passa la main sur le menton, mais une cloche sonna depuis la cuisine. Le repas de l’un des clients était prêt à servir. Il s’excusa puis s’éloigna. Pendant ce temps, Estelle s’approcha du comptoir, elle se tordait nerveusement les mains et hésitait à déranger l’homme qui l’intéressait.

— Monsieur Sage ? dit enfin cette dernière. Est-ce bien vous ?

Flint sursauta et se tourna pour voir sa fille, ou plutôt, l’alter ego de cette dernière qui s’adressait à lui. Elle était un peu plus jeune que la véritable incarnation, mais lui ressemblait beaucoup.

— O… oui ? dit-il nerveusement. Que puis-je faire pour vous aider ?

— Je suis stagiaire pour le Maple Leaf's Gazette, avoua-t-elle. J’aimerais savoir si vous accepteriez de passer une entrevue avec moi, à propos du succès que connaît votre livre virtuel, distribué gratuitement en ligne.

— L’avez-vous lu, au moins ?

Flint haussa un sourcil, puisqu’il avait mentionné le prénom de la demoiselle dans son livre, ainsi que le nom de famille Tabris. Il savait que celle-ci travaillait pour Athéna et qu’elle était liée à Gabriel dans cette simulation, comme sœur adoptive. Son père venait de lui mentionner tout ça, discrètement.

— Je n’ai pas eu la chance d’aller plus loin que le chapitre dix ou onze, je crois, avoua cette dernière. Toutefois, j’ai bien aimé votre plume et je pensais qu’en faisant un article sur vous, ça vous aiderait à vous faire plus de lecteurs à travers la province. Notre journal est très populaire en ligne, ça vous ferait une très bonne publicité.

Mince alors, songea le blond. Il faudrait qu’elle lise plus loin, sinon ça n’en vaudra pas la peine. Je vais devoir la convaincre…

Le capitaine de la Septième Brigade se passa une main dans les cheveux et répliqua :

— Voyons voir… j’ai tout mon temps devant moi, mais j’aimerais d’abord m’assurer que vous avez bien lu mon livre. Comment s’appelle l’oncle du protagoniste ?

— Nash ? dit la jeune femme qui leva les yeux vers le plafond.

— Quel est le nom du vampire ?

— Shayne Wolfe.

— Je vois… maintenant, pourrais-tu me dire qui sont Flint et Gabriel ?

Elle fronça des sourcils et fit une petite moue.

— Probablement le couple le plus adorable que j’ai lu depuis quelque temps, avoua-t-elle. Je ris encore du passage dans l’auberge, avec le pauvre Nash qui a envie de mourir de honte. Personnellement, quand je les lis, je me sens nostalgique… Étaient-ils basés sur des gens que vous connaissiez ?

Flint rougit timidement, et réalisa que sa fille approuvait ses parents, même si elle ignorait qu’ils existaient vraiment.

— Oui… ils sont très proches, même. Ils ont adopté une petite fille et son tout premier cadeau fut une jolie petite poupée appelée Magalie.

Le visage d’Estelle Tabris s’illumina lorsqu’elle entendit cette phrase.

— Quelle coïncidence ! s’exprima-t-elle. J’ai aussi une poupée du même prénom ! Elle m’a suivi jusqu’à ma maison d’accueil. Vous êtes une sorte de devin ou quoi ?

Elle pouffa de rire, alors que Flint adorait l’échange qu’il avait avec la jeune demoiselle. Celle-ci semblait beaucoup plus déterminée que la véritable version, mais était tout aussi chaleureuse.

— Tout simplement quelqu’un qui aime ses proches assez pour écrire des histoires sur leurs vies et les publier en ligne, dit l’écrivain.

— En tout cas, j’aimerais avoir votre patience et votre talent… déclara son interlocutrice. J’ai cru comprendre que vous aviez dépassé les six-cent-mille mots avec le dernier livre de votre trilogie. Quel exploit, quand même !

Le grand blond était flatté par cette remarque.

— Et moi, je crois que ça prend beaucoup de courage pour devenir journaliste et raconter la vérité aux gens sur divers sujets ou bien faire des entrevues… formula-t-il. Honnêtement, je crois que c’est l’un des métiers les plus cool du monde. Je n’ai simplement pas la patience de confronter les gens. Anxiété sociale et tout ça…

L’apprentie-journaliste cligna des yeux et hocha la tête.

— En effet, ça demande beaucoup de détermination et surtout du courage, avoua-t-elle. Mais le plus important, c’est la technique. Malheureusement, je débute et je doute que Mme Sawyer me laissera ma chance avant la fin de ce stage… C’est pourquoi je voulais faire cette entrevue avec vous.

— Dans ce cas, je vous mets au défi, dit-il. Si vous arrivez à terminer mon premier livre, j’accepterais volontiers de répondre à toutes vos questions.

Estelle exprima du désespoir et de la fatigue, mais se ressaisit et se tint droit.

— J’accepte votre proposition ou je ne suis plus une Tabris, affirma-t-elle.

Sans plus tarder, la petite blonde sortit son téléphone portable et salua Flint avant de sortir du restaurant. Finalement, elle ne commanderait rien. Elle était déterminée plus que tout à terminer cette histoire, quitte à en perdre la raison.

Artael revint au comptoir avec un plat que son fils avait commandé.

— Eh ? Elle est où, Estelle ? questionna celui-ci.

— Partie lire mon livre, répondit son fils. Elle veut une entrevue, elle l’aura. Seulement, ça ne sera pas avant qu’elle ait fini de lire Le Culte de Perséphone.

— Tu espères que cela l’aidera pour tu sais quoi, n’est-ce pas ?

— Entre autres. Je suis aussi curieux d’en savoir plus sur ce qu’elle pense de mon écriture… J’ai quand même passé plusieurs années à retravailler tout ça…

Quand Kylie vit Estelle sortir de la rôtisserie, elle se leva d’un bond, puis ramassa ses restes de tables en vitesse. Elle emporta le tout dans une boite en styromousse, paya sa facture au comptoir et donna un généreux pourboire à Artael.

Gardez la monnaie ! dit-elle en anglais, avant de filer en fusée à l’extérieur.

Ébahi, Flint regarda son père, puis la porte qui battit derrière la punk pressée.

— C’était quoi, ça ? demanda-t-il.

Artael haussa les épaules. Néanmoins, le capitaine de la Septième Brigade avait compris que Kylie semblait déjà très attachée à Estelle. Il espérait qu’elles s’aideraient mutuellement à retrouver leurs souvenirs, enfouis dans leurs subconscients. Ce fut sur cette pensée que l’écrivain prit une bouchée de son délicieux club sandwich.

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