95.5 - Au-delà du temps et de l'espace

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— C’est quand même très étrange de te voir prendre autant de risques, tout à coup. Aujourd’hui même, tu as pris tellement de décisions sur un coup de tête que je me demandais si ça allait ou pas. Je ne t’ai jamais vu aussi sûr de toi.

— Ah bon ? Je n’ai pas remarqué… Il est vrai que j’ai fait quelques modifications dans la cuisine avec l’aide de Nash, mais…

Il se perdit dans ses réflexions. Au bout d’un instant, le gros barbu continua :

— J’ai carrément dit à ton oncle que le décor du salon n’était pas vraiment mon style, quand même ! C’était la première fois que je disais un truc dans le genre.

— T’as vraiment fait ça ? demanda Flint. Je devais être absent…

— Tu étais parti chercher des légumes dans le jardin. Il m’a regardé d’un drôle d’air et a haussé les épaules. Lui-même a l’air d’avoir beaucoup changé.

— On s’est tous perdu de vue pendant quatre ans, après tout. C’est normal qu’il y ait autant de changements. Les gens finissent par changer aussi…

— Et c’est toi qui dis ça…

Le colosse croisa ses mains et retroussa ses lèvres pour taquiner son mari.

— Ah tiens, tu fais ton impertinent, maintenant… commenta Flint. Décidément, Luna a une bien mauvaise influence sur toi.

Son époux gesticula sa main droite de façon maniérée, ce qui lui donnait sur le coup une allure très douillette. Le capitaine roula les yeux et se leva de table pour aller enlacer Gabriel dans ses bras. Il déposa son menton sur l’épaule gauche du gros bonhomme et l’embrassa sur la joue. L’ex-golem lui prit les mains tendrement. Il protifait de cet instant avec celui qu’il aimait.

— J’aimerais essayer quelque chose de différent avec toi, cette nuit… proposa Gabriel.

Il lui murmura alors quelques mots à l’oreille. Flint rougit timidement et gloussa lorsqu’il entendit cette idée, puis se tourna vers son interlocuteur.

— C’est complètement tordu ton truc ! s’exprima-t-il. J’embarque !

Ils s’embrassèrent tendrement et décidèrent de rentrer à l’intérieur du bâtiment.

Alors que le blond et son colosse s’apprêtaient à faire des galipettes dans leur chambre, un autre binôme ne dormait pas dans la pièce d’à côté.

Lucas avait le souffle court alors que Misaki s’allongea à côté de lui, souriante. Celle-ci venait de lui faire passer une excellente soirée. Tous deux avaient finalement baisé après plusieurs jours à flirter et se donner plein de compliments. L’homme trans ne s’était jamais attendu à se retrouver dans une situation de ce genre, surtout pas avec une femme aussi jolie que l’albinos. Il était ravi.

— Tu… sais comment plaire un homme, toi, dit-il avant de rire.

— Oh tu sais, j’ai fréquenté beaucoup de personnes intéressantes avant mon ex-mari et toi. C’était une expérience enrichissante, surtout avec tous tes petits couinements virils… Je suis contente que ça t’ait fait du bien…

Elle lui caressa les cheveux tendrement.

— Je ne sais pas ce qui est le plus étrange dans cette phrase, remarqua Lucas. Que tu associes tout ça à ma masculinité ou bien que tu sois une experte du sexe…

Misaki gloussa et l’embrassa sur les lèvres.

— Ce qu’il y a sous la ceinture, ça n’a pas d’importance pour moi, ajouta celle-ci. Tant que l’homme ou la femme avec qui je passe du bon temps m’intéresse, tout me va. Et puis, ça t’as plu, donc c’est l’essentiel.

— Faudra que tu m’apprennes comment t’as fait, avec la langue…

— Ah bon ? T’as envie d’essayer ? C’est plus facile que tu le crois.

Le blond à la queue de cheval lui toucha les lèvres, elles étaient douces et rouges comme des pétales de roses. Il la trouvait envoûtante. Jamais il ne s’était imaginé tomber follement amoureux de son existence. Tout chez elle lui plaisait. Son franc-parler, ses jolis yeux rouges et son côté garçon manqué, mais parfois légèrement vulnérable… elle était parfaite.

Il avait fini par craquer pour la dame et lui avait proposé un rencart dans la jungle magique, alors qu’ils s’adaptaient à la zone d’entraînement. Elle avait accepté, timidement et avait joué le jeu de la séduction avec lui. Quelques heures plus tard, ils s’étaient retrouvés dans une chambre, au hasard, et avaient verrouillé la porte. Pendant plus d’une demi-heure, ils s’étaient embrassés, puis enlacés au rythme d’une musique douce et romantique que l’homme avait choisi. Il avait pensé qu’il en avait fait un peu trop, mais elle avait trouvé cela adorable de sa part.

— Tu es si belle… murmura celui-ci, envoûté.

— Oh arrête, gloussa-t-elle. Je ne suis pas si parfaite…

— C’est là que tu te trompes, ma jolie colombe. Tu es duveteuse, forte et brave… Tu as tant fait pour ta famille, je n’aurais jamais eu ton courage…

— Et moi, je ne pense pas que j’aurais assumé tout ce que tu as fait pour être heureux dans ta peau… Tu es plus courageux que tu ne le crois.

Elle lui caressa le dos et lui bécota le menton, puis la nuque. Elle descendit plus bas et enfouit son visage dans son torse. Elle chatouilla celui-ci, lorsqu’elle frôla ses cicatrices au niveau de la poitrine.

— Ce sont de belles marques de guerre, mon soldat, dit-elle en gloussant.

— Vilaine, pouffa son partenaire. Je parie que tu te demandes quelle était leur grosseur, pas vrai ?

Misaki leva sa tête vers son partenaire et la pencha d’un côté.

— Disons qu’ils étaient plus gros que ceux de Cassandra… avoua le blond.

Les joues de l’albinos rosirent quand elle entendit ces paroles. Lucas s’esclaffa et secoua la tête. La guerrière baissa son regard, timidement. Elle lui donna une petite tape sur le torse et l’enlaça. Elle ne pouvait pas s’empêcher de trouver la situation amusante, quoi qu’embarrassante pour celui-ci. Le pauvre devait avoir mal au cœur à force de parler de son passé.

— C’est bête, mais avec tout ça, je ne t’ai pas demandé si tu n’aimes que les femmes, gloussa l’experte des arts martiaux.

— Ouais… je me considère hétérosexuel. Si je n’étais pas trans, je serais probablement une lesbienne. C’est un peu ironique, quand on y pense. J’ai toujours aimé les formes féminines, mais pas sur moi.

— Ça a du sens, mentionna-t-elle, tandis qu’elle égarait son regard dans le vide. As-tu connu une femme trans, de ton côté ?

— Non… mais j’ai entendu dire qu’il y en avait une à l’est de Lanartis, beaucoup plus âgée que moi. Ça n’a pas vraiment d’importance, sinon… Ce n’est pas parce que nous nous identifions comme transgenres que forcément, nous allons tous nous entendre. C’est comme te dire que tous les gays s’entendent bien.

— Ah… je ne voulais pas paraître maladroite, déglutit celle-ci.

— Ça ne fait rien. On me pose souvent cette question, car tout le monde se demande si je me sens seul avec ma condition de naissance.

Misaki hocha la tête, se tourna sur le dos et fixa le plafond. Ensuite, elle se passa la main sur le menton. L’albinos se demandait comment réagiraient ses enfants, lorsqu’ils apprendraient que leur mère s’était fait un nouvel amant. Elle n’osait pas imaginer la réaction de Flint et Gabriel ; ces derniers n’arrêtaient pas de les taquiner, car ils trouvaient qu’ils allaient bien ensemble. Au moins, Misaki savait qu’elle aurait le support moral de ses amis, si jamais leur histoire d’amour allait plus loin.

— Dis, Lucas… commenta celle-ci.

— Oui, ma douce ? fit l’ambassadeur.

— Que comptes-tu faire, une fois la guerre terminée ? Vas-tu essayer de restaurer la nation de Lanartis ?

Il y eut un moment de silence. Le soldat réfléchissait.

— Le Roi Davis et Dame Floraine n’ont jamais eu d’enfant, répondit Lucas. C’est possible que des cousins éloignés puissent prendre la place du trône, s’ils sont toujours vivants, mais je doute qu’ils le soient… Après tout, mon oncle s’est emparé de la nation et a fait exécuter plein de nobles…

— On les vengera, dans ce cas.

Le blond à la queue de cheval gloussa.

— J’aime bien cette idée, dit celui-ci. Après, on verra… J’imagine que j’ai perdu mon titre d’ambassadeur à leur mort, mais ça ne m’empêchera jamais de me dire qu’Archenwald était l’endroit où je me sentais chez moi.

— C’est comme cela que je me suis sentie, lorsqu’on a quitté notre île pour traverser l’océan. Quand nous sommes arrivés aux montagnes, Yosuke et moi, on a eu du mal à s’adapter, tellement on aimait notre petite vie paisible. Puis, on a eu Sakura et les choses se sont améliorées.

Lucas serra la main de Misaki, afin de lui prouver qu’il tenait à elle. Elle lui sourit et se coucha en cuillère, contre lui.

— Essayons de dormir, maintenant, proposa-t-il. Mon oncle nous veut tous debout de bonne heure, pour l’entraînement.

— Oui, répondit cette dernière. Dors bien, mon beau papillon…

Ce surnom lui toucha droit au cœur. Il versa quelques larmes de bonheur, puis s’endormit paisiblement.

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