62.3 - Chaos sur l'île de Cao Cao

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Ses collègues et amis de longues dates l’observèrent, déboussolés. Ils ne comprenaient pas ce qui était en train de se produire sous leurs yeux. Ce qu’ils comprirent, par contre, c’était que Flint Markios était venu à leur rescousse et qu’ils étaient en train de gagner ce combat.

Quand la plupart des monstres s’affalèrent au sol, le capitaine se posa à terre et fit disparaître ses ailes. Il fit siffler son épée dans les airs, afin de se débarrasser du sang dégoulinant qui la recouvrait. La brume commença à se dissiper et la pluie cessa tranquillement.

Il remarqua ensuite une déchirure magique, à plusieurs pas de son groupe. C’était la brèche, celle qui avait causé ce désastre sur l’île de Cao Cao. Il se tourna vers elle et pointa son arme dans cette direction.

— Dia ? fit-il. Tu sais ce qu’il te reste à faire.

— C’est comme si c’était fait, Flint ! répliqua-t-elle.

L’épée lui glissa des doigts et repris sa forme de louve. Elle se dirigea alors vers la brèche, sous les regards étonnés des autres. Ensuite, une lumière divine jaillie de la créature, avant d’aller refermer la déchirure du voile. Le reste du groupe s’approcha de capitaine. Ils ne comprenaient toujours pas ce qui s’était passé et comment leur ami avait fait pour régler la situation en un rien de temps.

— Toi, t’as des choses à nous expliquer, dit Shayne, à la fois inquiet et autoritaire.

Le blond rit nerveusement, alors qu’il se tourna vers ses compagnons. Cassandra était bouche-bée. Luna se recouvrit la bouche, choquée par ce qu’elle venait de voir. Quant à Wyatt, il se frottait les yeux, comme s’il avait eu une hallucination. Flint se mit une main derrière la tête puis frotta sa nuque. Une fois la brèche refermée, Dia s’approcha d’eux et s’assit à leurs côtés, la langue pendante.

¤*¤*¤

Gabriel et son groupe étaient à l’entrée du village de Cao Cao, ou plutôt ce qui en restait. Ils étaient arrivés trop tard. Tout avait été saccagé par les monstres. Le colosse déposa le coffre à ses pieds et secoua la tête.

— Quelle horrible tragédie, soupira le marin, près d’eux. Nous leur apportions beaucoup de produits chaque mois. Leur communauté était reconnue pour leurs excellents bains publics…

Il y avait des cadavres partout et plusieurs immeubles avaient été incendiés ou avait été démolis par d’autres moyens. Il ne restait de cet endroit que des souvenirs.

Misaki n’avait rien dit depuis qu’ils étaient arrivés sur l’île. Elle venait d’assister à un autre massacre, similaire à celui qu’elle avait vécu sur l’île Megumi. Elle reconnut dans ces ruines et ces corps, des traits familiers à sa culture. Son visage s’assombrit lorsqu’elle vit le corps sans vie d’une gamine, recouvert par celui de son père.

— Ils étaient comme mon clan, soupira-t-elle. Ces gens… leurs habits… ce sont ceux que l’on portait chez moi…

— Ah bon ? demanda Gabriel. Oh…

Il remarqua que l’albinos était en train de pleurer, elle serrait les poings contre ses hanches, enragée. Estelle, derrière eux, ne savait pas ce qu’elle devait dire pour réconforter la guerrière. Elle avait compris que son amie ne se sentait pas bien.

— Que voulez-vous dire, comme eux ? demanda le marin qui se tourna vers Misaki.

— J’ai les cheveux blancs et les yeux rouges, mais je partage les mêmes traits que leurs visages… Mon défunt mari, tout comme nos enfants ont les cheveux et les yeux noirs. Ces gens, que vous voyez devant nous, étaient comme nous… Cette île fait partie de notre héritage.

— Je pensais que vous n’aviez que l’île Megumi, dit alors Gabriel. Vous ne nous avez pas tout dit, on dirait bien…

— C’est parce qu’il y a très longtemps, la plupart de nos ancêtres se sont disputés et pour cette raison, ils ont quitté l’île Megumi afin de voyager vers l’est, formula Misaki. Je ne suis jamais venue à Cao Cao, mais je savais que cette île était celle de nos ancêtres… Quel gâchis…

Elle était sur le point de faire demi-tour lorsqu’elle entendit un petit cri.

— Qu’est-ce que c’était ?! fit Estelle qui sursauta. Ça venait d’en face !

Elle pointa un immeuble effondré. Quelques créatures rôdaient toujours dans la ville, mais ce cri avait attiré leur attention. Gabriel s’avança donc vers l’avant et prépara sa hache, au cas d’une confrontation. Il fut suivi par Misaki et le marin. L’adolescente attendit un moment avant de les suivre. Elle observa son père soulever une partie de toit et ils y trouvèrent une mère et sa fille, coincées sous les décombres. Ils les sortirent de là, aussitôt.

— Ne perdons pas espoir, dit alors le colosse. Il se peut que d’autres aient survécu.

Sa fille et sa collègue de travail hochèrent leurs têtes. Elles assistèrent ensuite les villageois blessés, alors que le golem s’éloigna un peu plus loin, accompagné du matelot. L’homme, à ses côtés, était armé d’un sabre et combattait les créatures qu’ils croisaient, un par un.

Gabriel arrivait toutefois à éliminer plusieurs monstres à lui seul, à un point que son partenaire improvisé se sentait ridicule.

Au bout d’une quinzaine de minutes, la pluie avait cessé et certaines bêtes prirent la fuite vers le nord du village.

En tout, ils avaient trouvé une quinzaine de survivants qui s’étaient cachés dans l’auberge et une dizaine de personnes pris au piège, sous les décombres de leurs bâtiments. Il y avait eu un taux élevé de mortalité, mais au moins, la plupart d’entre eux pourraient reconstruire ce qui avait été perdu.

— Mais depuis quand tout ça a commencé ? demanda Misaki à l’aubergiste.

— Depuis la nuit dernière, répondit celui-ci, d’un air grave. Quand les monstres ont envahi la ville, j’ai accueilli qui j’ai pu à l’intérieur de mes murs et on a dû barricader les portes et les fenêtres, parce que c’était trop dangereux pour sortir…

— Je comprends… Vous avez fait de votre mieux. Une chose similaire est arrivée sur mon île.

Elle leur avait déjà expliqué d’où elle venait et pour qui ils travaillaient. Elle leur raconta par la suite qu’elle était une survivante du clan Megumi.

— Comment se remet-on d’un tel drame… ? demanda l’aubergiste, désemparé. Notre village était un endroit touristique si apprécié des voyageurs…

Il se prit le visage et fondit en larmes. Misaki dût le réconforter, alors que d’autres villageois vinrent le consoler.

À l’extérieur du grand immeuble, Estelle soignait de son mieux quiconque avait besoin d’un sort de guérison. Elle avait aussi des pansements et des outils de premiers soins qu’elle gardait dans son sac de voyage. Gabriel l’aida de son mieux à immobiliser certains de ses patients trop instables. L’adolescente n’était guère une experte, mais elle avait vu sa tante Sarah soigner tant de gens qu’elle avait fini par apprendre d’elle.

— Ne bougez pas trop votre bras, sinon l’os ne guérira pas, dit-elle à une vieille dame qui ne comprenait pas la langue commune.

Mais qu’est-ce qu’elle dit ? Je ne comprends pas… marmonna sa patiente, dans un dialecte qui lui était peu familier.

Gabriel avait entendu Misaki et Sakura parler ce langage à plusieurs reprises. Toutefois, il n’y connaissait que les prononciations et non les définitions.

Ne bouge pas ton bras, mamie, dit un adolescent, près de la blessée.

Il tourna son regard vers Estelle.

— Je peux traduire, ajouta-t-il, en langue commune.

— Très bien, répondit l’adolescente. Je suis une apprentie, mais je connais les cours de premiers soins. Essaie de maintenir le calme et je vais faire en sorte de soigner qui je peux, avant que les secours n’arrivent.

— C’était donc ça, le fusil à détresse, un peu plus tôt ? questionna le garçon.

La petite blonde approuva d’un signe de tête. Depuis quelques années, presque tous les brigadiers en transportaient un dans leurs bagages. Cela leur permettait de se retrouver plus facilement. Les armes à feux avaient récemment été déclarées illégales dans la république et à Lanartis, mais cet outil avait été régularisé afin d’aider les brigadiers et les voyageurs à venir en aide à leurs semblables.

Flint et son groupe avait aperçu le signal d’Estelle et étaient déjà en route pour le village, pendant que l’apprentie-guérisseuse soignait les victimes.

— Comme je vous le disais, expliqua la louve aux amis du capitaine, vos souvenirs devraient revenir sous peu. Quand nous vous avons quittés, nous étions en route pour le Saint Royaume, afin de réparer les déchirures du voile. Cependant, nous ne sommes pas restés longtemps et quand je me suis réveillée, j’étais sur cette île et j’étais entourée de brouillard.

— Tu veux dire… que tu t’es réveillée qu’aujourd’hui ? demanda le grand blond.

— Bah ouais ! s’exclama-t-elle. Mais ça fait peur quand même, quand vous me dites que quatre ans se sont écoulés… Je reconnais à peine la figure de Shayne et la coupe de cheveux de Cassandra… Quant à toi, Luna…

La louve siffla avant d’hocher la tête.

— Ton nouveau look te va à ravir ! lança-t-elle.

— Euh… moi ? Enfin… ce n’est rien qu’une robe de chambre… Et euh…

La magicienne ne reconnaissait pas la louve, mais se dit que si Flint lui faisait confiance, c’était sûrement pour une bonne raison. Sa présence lui semblait être familière, même nostalgique. Elle avait la sensation de l’avoir déjà vue en compagnie d’une autre personne. Wyatt était le seul qui n’avait passé beaucoup de temps en compagnie des esprits élémentaires. Pour cette raison, il se sentait de trop dans cette conversation. Il trouvait quand même curieux de constater que ces créatures étaient en retard sur leur horaire. Quelques années s’étaient quand même écoulées depuis leur dernière rencontre.

— Oh ! Ça me revient ! s’exclama Cassandra qui observait la louve. Nous avons fait ta rencontre à Kritz et tu hantais les lieux… C’est Nash qui t’as sorti de ce trou souterrain, pas vrai ? Tu étais sa partenaire…

— Bingo ! sautilla la louve de joie. Enfin, je te retrouve, ma petite Cassie.

Cassandra se pencha et donna une caresse sur la tête de l’animal. Alors que Dia lui lécha le menton, l’elfe lui demanda :

— Par contre, j’avais aussi une crécerelle, n’est-ce pas ? Je ne me souviens plus de son nom… Elle représentait l’élément du vent, d’après mes souvenirs.

— Windy, mentionna l’animal. Vous étiez très proches avant que les dieux ne nous séparent de vous. Elle est quelque part en ce monde et dort paisiblement, j’imagine. Elle ne devrait pas tarder à te retrouver.

— C’est bien ma Windy… Elle passait beaucoup d’heures à dormir sur mon épaule lorsque je me promenais en ville…

Elle eut un petit sourire nostalgique, alors qu’elle repensait au passé.

— Et Nox ? demanda Flint. Sais-tu s’il est parmi nous ?

Le vampire tourna sa tête en direction du capitaine. Voilà bien un nom qu’il n’avait pas entendu depuis longtemps. Comment avait-il pu oublier la panthère qui l’avait accompagné pendant une bonne partie de sa vie ? Il s’en voulait beaucoup, maintenant qu’il comprenait ce qui s’était passé.

— Il dort, tout comme les autres. Shayne le retrouvera bientôt, j’en suis certaine !

L’âme tourmentée du vampire fut aussitôt apaisée. Il sourit.

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