1.4 - Le Capitaine Markios

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— Mm hmm, je suis arrivée il y a deux jours environ. J’ai suivi les petites annonces et je me suis présentée aux bureaux administratifs, pour me faire embaucher comme brigadière.

— Vraiment ? Normalement, ça prend quelques semaines pour être sélectionné…

— Ils m’ont fait passer quelques tests sur le terrain d’entraînement et sur papiers, dit-elle. D’après Monsieur Artael, c’était suffisant pour qu’il m’engage.

— Ah ! Dans ce cas, si c’est le grand chef des brigades qui vous a engagée… Je lui fais confiance. Un chic type, cet homme !

Le gardien d’enfants lui sourit et lui serra la main.

— Je vous souhaite bonne chance dans votre nouvelle carrière, mademoiselle.

— Nous aussi, madame ! lança l’une des fillettes.

— Dis, tu viendras jouer avec nous, hein ? demanda l’autre.

Cassandra se passa une main sur la joue ; elle ne pouvait pas dissimuler sa timidité. Elle n’avait jamais pu se passer des enfants, tellement elle adorait jouer avec eux et les garder. Là où elle vivait avant, on la considérait comme une excellente gardienne. Son côté maternel et son sens du devoir faisaient d’elle une excellente guérisseuse.

— J’essaierai de vous trouver du temps, c’est promis, dit l’elfe aux gamines.

— Chouette ! fit la fillette qu’elle venait de soigner.

Les deux enfants se présentèrent rapidement ; Cassandra ne pensait pas qu’elle retiendrait leurs prénoms. Elle avait tellement de détails à apprendre dernièrement qu’elle se sentait dépassée par les événements.

La brunette avait encore quelques minutes à jongler avec, en attendant de rencontrer son équipe pour la toute première fois. Elle s’excusa alors, car elle devait partir. Déçues, les deux fillettes saluèrent la guérisseuse, puis elle s’éloigna afin d’aller chercher son arme et son carquois.

Un instant plus tard, elle croisa le regard d’une jeune femme aux cheveux blancs, appuyée à un mur de pierres. Celle-ci mangeait une pomme tranquillement et l’observait depuis un moment. La dame avait des yeux rouges semblables à des rubis. Sa peau très pâle faisait penser aux couches de neige que les gens de cette nation avaient l’habitude de voir en hiver.

— Bien joué ! lança celle-ci. C’était généreux de ta part !

Cassandra enfila son arme et s’approcha de l’étrangère.

— Je n’ai fait que mon devoir, c’est tout, répliqua l’elfe.

— Ne me dis pas que tu es une nouvelle recrue, hein ? On va faire équipe, toi et moi.

— Ah bon ? Qu’est-ce qui te fait croire ça ?

L’elfe avait remarqué le bâton plié, attaché derrière l’étrangère. Celle-ci portait des vêtements légers et peu de protections.

— Elle est sûrement une guerrière spécialisée dans les déplacements rapides, se dit l’elfe. Par contre, la couleur de sa peau m’intrigue… Est-elle humaine ?

Cassandra n’avait jamais rencontré d’albinos de sa vie. À vrai dire, elle avait peu côtoyé les humains, depuis sa naissance. Son père adoptif avait beaucoup voyagé et lui avait tout appris de la race des hommes... Toutefois, elle apprenait rapidement, tout en observant ce qui l’entourait. Tout ceci était nouveau pour elle.

— Bah, pour répondre à ta question, mentionna la guerrière, tu as un arc et des flèches et tu n’as pas l’uniforme des soldats sur toi. Puisque les gens armés sont souvent des mercenaires ou des aventuriers, j’en déduis qu’on t’a recruté pour la nouvelle brigade.

— En tout cas, tu as un bon sens de déduction, car j’ai effectivement été employée par le Conseil. On m’a affecté à la Septième Brigade.

— Ah ! Sympa. Moi, je combats au bâton depuis quelques années. J’imagine qu’on t’a aussi demandé de rester près de la fontaine, pas vrai ?

L’elfe confirma, d’un hochement de tête.

— Je vois, continua la demoiselle. En passant, moi c’est Misaki.

L’albinos jeta son trognon de pomme à terre. Cassandra grinça des dents, mais elle ne souhaitait pas lui manquer de respect. Elle lui montra alors sa main, en guise de politesse. La guerrière lui faisait une étrange impression.

— Moi c’est Cassandra, enchantée.

Misaki serra alors la main de la guérisseuse et ces dernières se mirent à discuter de tout et de rien, pendant les minutes qui suivirent. Elles n’avaient même pas remarqué qu’un individu aux vêtements sombres les observait depuis le coin d’un bâtiment…

¤*¤*¤

L’homme basané vêtu de noir avait observé la guérisseuse en silence. Un grand chapeau ténébreux recouvrait ses oreilles elfiques, aussi dissimulées derrière sa longue chevelure noir jais. Il avait remarqué la finesse à laquelle Cassandra avait appliqué son sort de soin. Ensuite, il l’avait vu se déplacer vers la guerrière à la peau très pâle. Il avait tout entendu avec son ouïe très développée et repéré leurs parfums. Il n’était aucunement en danger pour le moment, ni elles, par la même occasion.

— Cassandra me semble intéressante… se dit-il. Cette Misaki, par contre, j’ai l’impression qu’elle est nerveuse. Il y a quelque chose d’anormal dans le ton de sa voix.

Il caressait la poigne de son épée aux couleurs sombres. Celle-ci avait un motif en crâne humain. Il ne s’en était pas séparé depuis des années. Cet homme aussi était une nouvelle recrue pour la Septième Brigade.

— Une archère guérisseuse et une guerrière de la culture des îles… songea celui-ci. Je sais déjà à quoi ressemblent la plupart des Markios, donc je me demande comment ils vont réagir en voyant ma sale tronche…

Le mercenaire était arrivé en ville, une semaine plus tôt et avait formé un marché avec le Conseiller Artael. Même s’il n’avait pas tellement hâte de commencer son contrat, il savait qu’il serait bien payé.

— D’après ce qu’on m’a dit, Flint n’est pas un cadeau… soupira celui-ci. J’espère qu’il ne me causera pas trop de problèmes, pour la durée de ce contrat.

Un soldat qui portait l’armure officielle de l’armée baldtienne descendit les marches du palais. L’homme ténébreux jeta un coup d’œil à sa montre et remarqua qu’il ne manquait plus que cinq petites minutes, avant sa première rencontre avec les autres. Cet individu devait sûrement guider les nouvelles recrues à l’intérieur du palais.

— Ce n’est pas trop tôt, songea le mercenaire. Je commençais à avoir mal aux jambes.

Même s’il avait visité cet immense immeuble à quelques reprises, il connaissait déjà la réputation de la plupart de ses habitants. À force de voyager à travers la république, il avait compris qu’une forte influence dans les affaires du peuple partait du Conseil et des Markios. Le Conseiller Artael avait même expliqué au mercenaire que le capitaine de la Septième Brigade serait son frère cadet, donc cela arrangeait bien des choses pour tout le monde.

— Shayne Wolfe ? appela le soldat, en direction du grand ténébreux.

L’épéiste sortit de sa cachette et s’approcha.

Le représentant de l’armée hésita quand il le vit de plus près, mais lui fit signe de le suivre. En dessous de son grand chapeau, on pouvait voir les iris dorés de l’homme mystérieux et sa peau olive, recouverte d’écailles à quelques endroits.

Shayne esquissa un sourire et dévoila une canine pointue à celui qui venait de l’appeler.

— Je suis celui que vous cherchez.

— Oh ! Je vois… Vous êtes un… marmonna le soldat.

— Je n’ai pas l’intention de vous mordre, si c’est que vous pensez, répliqua le mercenaire. Je ne me nourris pas de sang humain.

Il y eut un moment de silence embarrassant, et l’envoyé du palais se mit à rire nerveusement. Ce genre de malaise arrivait bien trop souvent à l’homme ténébreux.

— C’est bon, ce n’est pas la première fois qu’on me confond avec un simple démon… dit Shayne qui roula des yeux. Pourriez-vous me guider vers les autres, maintenant ?

Le délégué déglutit et hocha rapidement la tête. Se retrouver en présence d’un vampire lui avait foutu la trouille de sa vie. L’épéiste commençait à être habitué d’être traité comme un monstre, mais il avait surtout hâte d’en finir avec les protocoles. Il comptait aller se présenter et examiner son groupe de plus près. Ensuite, il commencerait son travail.

— Je suis d… désolé, dit le délégué. J’espère que vous vous entendrez bien avec les autres.

— Moi de même, rétorqua le mercenaire.

Les deux dames n’avaient même pas fait attention à eux, elles montaient déjà les marches du palais. Shayne soupira de soulagement.

— Une chance pour moi, elles n’ont rien entendu… Ça nous aurait mis en retard, avec toutes ces questions, se dit-il. Ma vie privée ne les concerne pas.

Jugeant que l’affaire était réglée entre lui et le guerrier, l’envoyé du palais dit :

— V… veuillez me s… suivre, M… Monsieur Wolfe.

Malgré le fait qu’il ne courait aucun danger en présence du vampire, il resta toutefois sur ses gardes et jeta fréquemment des coups d’œil derrière lui, alors qu’il montait les marches. Shayne n’avait jamais rencontré quelqu’un d’aussi nerveux. Il soupira et finit par suivre le soldat en silence. Il avait déjà hâte que cette journée embarrassante se termine.

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