Chapitre 10 : La pluie de cendres.

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Continent Ouest, Royaume de Cendria, dans les appartements de la princesse :

Alors que Galahn est sur le point d’en finir avec l’homme à la marque de lune, il hésite un instant en apercevant Émi, par peur de la blesser. Une erreur qui lui est fatale, puisque son adversaire en profite pour inverser la tendance. Subissant une attaque féroce, le chevalier heurte violemment le plafond, fracassant ce dernier avant de retomber au sol, tandis que la puissante aura l'entourant disparaît quasi-instantanément.

Mais percevant les cris de détresse de la princesse, il accomplit une prouesse, repoussant une nouvelle fois ses limites, à la grande surprise des intrus et de la jeune femme : sa détermination est sans faille. Malgré son état, il puise dans toutes ses forces pour se relever encore.

L'étonnement de son adversaire, exaspéré par la tenacité du commandant, ne dure cependant que quelques instants. Ce dernier se relève à son tour et s'avance sereinement vers Galahn.

En effet cette fois-ci, aucune aura n’émane de lui. Pire encore il n’arrive même plus à garder l’équilibre, vacillant légèrement avant de se servir de son épée comme d’une béquille.

Il prend néanmoins sur lui et réussit, non sans peine, à se redresser complètement, tout en haletant.

Le silence règne dans la pièce, ne laissant transparaitre que le bruit des pas de l’homme à la marque de lune qui revient vers le chevalier, ainsi que le souffle saccadé de ce dernier.

Le colosse arrive face au commandant au visage couvert de sang, le fixant sans rien dire. Il n'avait plus envie de rire, l'excitation du combat avait disparu. Son regard envers le commandant était emplie d'estime cette fois.

Galahn essaie alors tant bien que mal de lui asséner un coup d'épée. Mais, l'étincelle de volonté qui avait jailli de lui quelques instants plus tôt et qui lui avait permis de dégager une telle puissance s'était dissipée. Manquant de force et tenant à peine sur ses jambes, le coup est tellement lent que son adversaire l’évite tout doucement, d'un mouvement d'épaule, sans même bouger les jambes.

- Tu as tout mon respect chevalier, avoue le colosse.

Ce dernier recouvre sa main d'aura puis lui transperce l'estomac d'un coup sec, sous les yeux de la pincesse dévastée.

De son autre main, il l'empoigne par la gorge et le soulève :

- Je ne respecte que la force. Tu as lutté et tu as donné tout ce que tu avais. Je n’avais jamais affronté quelqu’un m’ayant poussé à utiliser un tel niveau d’énergie, ce fut plaisant. Mais malheureusement, tu t'es retrouvé face à plus fort que toi. La puissance est tout dans ce monde, tu ne peux en vouloir qu'à ta propre faiblesse, celle qui est derrière nous.

Le colosse avait compris. Il aurait pu encaisser de gros dégats si le chevalier n'avait pas pris en compte la princesse en tant que dommage collatérale. Et cela l'enerver plus que tout, tant il aimait se mesurer à des êtres puissant : - Et à présent tu vas mourir… dédaigne t-il.

Il s'avance vers le trou béant laissé dans le mur détruit plus tôt :

- Non, je vous en prie ne faites pas ça ! implore la princesse.

- Va en paix chevalier ! prononce l’homme à la marque de lune.

Il relâche le cou de ce dernier, le laissant tomber du haut de l'immense tour.

Alors qu’il est précipité dans le vide, Galahn ,à peine conscient, réalise qu’il vient de faillir à sa mission :

- C'est fini ? J'ai échoué...le royaume, les habitants, mes compagnons, mon roi...La princesse...J’ai échoué. C’est la fin... se lamente-t-il, tandis qu'il termine sa chute dans l'eau de la rivière Arathénos et perd définitivement connaissance.

- Non Galahn ! Non ! hurle Émi en se ruant vers le précipice.

Hélas, son protecteur venait de sombrer dans les profondeurs. Vu son état et la hauteur de la chute qu'il avait subi, la mort était irrémédiable : Il ne restait plus aucun espoir.

En réalisant cela, elle éclate de nouveau en sanglot. Elle venait de perdre son royaume, son père, son ami et nombres de ses fidèles sujets.

Alors que le premier flocon de cendre se dépose délicatement sur sa joue, d'autres mousses charbonnées commencent peu à peu à tomber, annonçant le début de la fameuse pluie de cendres.

La princesse ne pouvait se retenir de pleurer, tandis que les flocons se mélangeaient aux larmes coulant sur ses joues, leur donnant une couleur sombre. Les hommes de mains qui n'avaient jamais vu ce spectacle auparavant, s'étonnèrent, tandis que le jeune maître restait impassible, admirant quelques instants ce phénomène rare. Cette nuit grisâtre, qui marquerait désormais le jour ou la famille royale de Cendria ainsi que ses cinq protecteurs disparurent.

- Nous en avons fini ici, rentrons ! ordonne-t-il, Kanon ! Met le palais à feu et à sang, aucun témoins, soldats ou pas.

- A vos ordres jeune maître, répond Kanon.

- Non ! Il y a encore des domestiques et des valets dans le palais, vous m'aviez promis que vous ne leur ferez pas de mal ! Non! hurle la jeune fille ...

- Hmm... Une leçon que j'ai appris grace à votre père et ses amis, ne jamais croire aux paroles des autres, rétorque le jeune chef d'un ton calme.

Quelques jours plus tard :

La nouvelle s'était répandue comme une trainée de poudre à travers une large partie du continent.

La disparition de la princesse, des cinq grands chevaliers ainsi que celle du roi Raal fit basculer Cendria dans une ère chaotique. Les pays frontaliers profitèrent de cette oportunité pour étendre leur influence sur le territoire sans perdre de temps. Bientôt, ce royaume paisible et prospère devint un tombeau pour ses habitants.

En ce qui le concerne, il avait survécu... Porté par le courant de la rivière Arathenos, il avait dérivé jusqu’à un petit village en périphérie du royaume où une jeune fille l'avait retrouvé à moitié mort.

Inconsciement le chevalier avait développé le peu d'aura qu'il lui restait continuellement sur le point de perforation, comme s'il refusait de mourrir.

Elle l’emmena donc chez la guérisseuse du village. Une femme aux dons de guérison et à la maitrise de l'aura admirables. C’est ainsi qu’il fut sauvé. Le destin lui offrait une deuxième chance, ou plutôt, il avait déjoué la fatalité de ce dernier.

Toutes ces années de paix l’avaient ramolli. Il avait été négligeant, mais cela ne se reproduirait plus, se promit-il.

Il décida alors de s’entraîner nuit et jour, passant une année dans le village à se parfaire pour retrouver son niveau d’antant.

Pour remercier la guérisseuse et la jeune fille de l'avoir reccueilli, il chassait et coupait du bois en prévision de l'hiver, il protégeait aussi le village contre les "Crocs du Dragon", un groupe de brigands qui profitaient de l'absence du roi et de l’armée pour exercer leurs méfaits... jusqu'au jour où il prit enfin le départ.

Jetant un dernier regard sur le village qui l’avait recueilli, il se tourna vers la rivière Arathenos, retira le médaillon à son cou, caché sous ses vêtements.

Durant un instant, il fixa le sceau royal, gravé sur l’objet sphérique doré, hésitant à le jeter à l’eau avant de finalement se raviser.

Un moment de doute allant de pair avec ce qu’il pensait : pour lui, il ne méritait plus de se faire appeler ''grand chevalier" ou "commandant'' après avoir failli à son devoir, alors autant se débarrasser du symbole des cinq. Mais cependant il se devait encore de les honorer, sa mission n'étant pas encore achevée, il ne pouvait se résoudre à tirer un trait définitif sur son passé.

En l’an 723, il quitta donc le village.

Au cours de la même année, il devint aventurier au sein de la Guilde.

Il gagnait à présent son pain en jouant les chasseurs de primes et montait des expéditions à la recherche de tous indices sur l'homme à la marque de lune et ses acolytes.

Il n’avait plus qu’un seul but : tenir la promesse faite à son roi déchu, retrouver la princesse où qu'elle soit et faire payer à ces monstres leurs crimes. C’était tout ce qui comptait à présent pour Galahn, l'aventurier revenu d'entre les morts.

Ce qu'il ignorait encore, c'est que le destin avait un tout autre dessein pour lui, et qu'il ne tarderait pas à rencontrer trois personnes spéciales.

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