Chapitre 31 :FAIRE CONFIANCE

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 La vie reprend ses droits, même si je lui en veux toujours de nous avoir flanqué une gifle pareille. Pourtant, rien ne sera plus jamais comme avant, nous ne sommes plus des ados, loin de là, même si nous avons à peine dix-huit. La vie nous a propulsé dans l'âge adulte en quelques instants. Depuis la mort de Sarah, rien n'est plus comme avant, nous avons des obligations que nous n'avions pas et deux enfants c'est un paquet de responsabilités. Ce sont officiellement les enfants de Thomas, ils portent son nom, ce sont des "Da Vinni", mais nous nous en occupons tous autant les uns que les autres. Entre deux couches ou deux biberons, nous passons par la case répétitions. Nous serons à nouveau au-devant de la scène avec Bon Jovi au mois d'octobre. J'ai l'impression que c'est de la folie, nous serons de l'autre côté de la planète en Australie et en Nouvelle-Zélande, puis nous partons pour l'Europe. Nous avons dû faire faire un passeport, aucun de nous quatre n'a jamais quitté les Etats-Unis, de ce côté-là aussi cela nous fait beaucoup de changements.

 Les jours passent, les semaines se déroulent entre les kids et les répétitions, le week-end, nous sommes au country club la journée pour la répétitions, le soir pour les concerts en live, ces nuits-là nous ne rentrons pas, ni Thomas, ni moi. J'avoue que cela me dégoute profondément et pas une seule nuit je n'ai réussi à me regarder en face lorsque je sors de chez Dalhia. Pourtant, elle et ses amies sont majeures, elles sont consentantes. On m'a appris à respecter les femmes, on m'a appris que l'amour cela se faisait à deux, que c'était un moment de partage, pas d'utilisation de l'un ou de l'autre partenaire. Enfin comme dit Thomas, cela se fait deux nuits par semaine, ce n'est pas un drame et puis on savait ce qui nous attendait. L'avantage c'est que nous savons où nous allons, il fait propre et toutes ces femmes sont clean elles-aussi. Elles sont mariées à de riches hommes qui passent leur temps soit avec leur secrétaire à leur bureau, soit sur des terrains de sport, enfin partout sauf à la maison.

 Nous sommes à la fin du mois d'août, le dernier week-end, nous sommes dimanche matin, nous prenons le bus de sept heures afin de rentrer chez nous. Nous sommes crevés, physiquement. Nous avons eu beaucoup de "clientes" cette nuit, lorsque je pense à cela j'ai vraiment l'impression de n'être qu'une pute. Il y avait huit femmes pour nous deux, et même si nous sommes dans la fleur de l'âge, les week-end sont durs entre les répétitions et les concerts live. On s'écroule littéralement dans le bus. Thomas est assis en face de moi, il a déposé sa tête contre le siège, mais je sais qu'il ne dort pas, il ne dort jamais dans aucun moyen de transport, il a besoin d'un lit pour dormir.

— C'est bientôt fini, frangin, c'est promis ! me dit-il.

— Oh, je m'y fais, ne t'inquiète pas. En tous cas j'ai appris quelque chose, je jure que le jour où je rencontrerai une femme et que je prendrai la décision de vivre avec elle, je m'en occuperai, je dégagerai du temps pour elle, et je serai attentionné.

— Ouais, elles ont tout, sauf de l'attention de la part de leur mari, c'est effectivement ce qui leur manque, autrement, nous ne serions pas chez elles le week-end.

— Je ne sais pas ce qui me dégoute le plus, elles, nous, ou le manque de respect de la part de leur mari.

— Je ne sais pas Julian, je ne sais pas. Mais comme tu dis, le jour où nous aurons notre femme, nous nous en occuperons, c'est certain !

 Nous sommes rentrés une fois de plus à la maison et nous avons déposé l'argent gagné en deux tas une fois de plus. Je sais que les économies de papa et maman sont renflouées, mais nous vivons tous les jours sur leur compte, nous sommes sept de plus chaque jour à boire, manger, consommer de l'eau, sans oublier Luke et Matthew qui y vivent deux ou trois jours semaine eux aussi.

 Enfin Thomas a raison, nous en avons bientôt fini, pour deux raisons, les dettes s'effacent lentement, mais surement et puis nous devons être en Australie pour le trente octobre, et nous y serons. Faire une tournée de plus avec les Bon Jovi est un immense honneur. Jusqu'à présent, aucun groupe ne l'a fait, personne n'a partagé la scène comme nous l'avons fait avec eux, non personne. Je pense à cela alors que je suis sous la douche. Je me dis que nous ne devons pas être si mauvais que cela, nous sommes même plutôt bons, autrement Jon ne perdrait pas son temps avec nous. Je souris en pensant à cela. Il y a quelques mois, nous avons fait sa connaissance dans le bureau du préfet, nous étions heureux s'il nous avait demandé de porter ses valises, aujourd'hui je l'appelle par son prénom et on se téléphone trois ou quatre fois par semaine. C'est un homme exceptionnel, je sais que j'ai trouvé mon exemple. Chacun a une idole, un acteur, un chanteur, un compositeur, moi j'ai la chance d'avoir rencontré mon idole et cette personne est devenue mon confident, une aide précieuse sur tous les plans, artistiques et personnels et surtout il est devenu un ami, mon ami. Je dois toujours sourire quand je sors de la douche, car Thomas me fait la réflexion :

— A quoi tu penses ? Cela à l'air sympa, me dit-il en donnant le biberon à Jackson.

— Je pensais à Jon, à l'aide qu'il nous apporte, à la chance qu'il nous donne en nous faisant monter sur scène, à la chance que nous avons de pouvoir compter un homme comme lui parmi nos amis.

— Je crois que tu as pris la meilleure décision de ta vie, de notre vie, la nuit où tu lui as téléphoné. Sans lui, nous n'y serions pas arrivés, nous n'aurions pas l'expérience de la scène et surtout nous n'aurions pas Oliver et sans lui, je me dis que l'on serait dans la merde la plus totale.

— Je pense la même chose. J'ai une question : tu as déjà vu les comptes depuis qu'il s'en occupe ?

— Non, je t'avoue que je n'ai rien demandé, mais j'ai aussi le sentiment que nous ne devons rien demandé. J'ai confiance, je sais que l'argent est bien géré. Tu pense que l'on devrait le demander à Oliver ?

— Vous devez me demander quoi ? Nous questionne Oliver en passant sa tête dans l'encadrement de notre chambre.

 Nous restons tous les deux sans répondre, nous nous regardons et aucun des deux n'ose poser la question. Je prends une grande respiration, je me lance, je suis la grande gueule du groupe, c'est reconnu.

— Oliver, ne le prends pas mal, mais on se disait que l'argent devait être bien placé. On sait que nos dettes diminuent, on ne t'a jamais rien demandé. Je t'avoue que je me sens gauche de te demander ce que tu fais avec l'argent, mais on a eu une mauvaise expérience, et en ce moment on n'a pas eu beaucoup de temps, mais bon, on n'a plus aucun courrier de la banque, cela doit être en bonne voie, enfin je pense ? Je lui dis en passant ma main dans mes cheveux de façon très maladroite.

— Mec, je ne le prends pas mal, c'est votre fric, pas le mien et dès que l'on a fini de dîner, on se met à table et je vous montre les comptes. Je n'ai aucun soucis avec cela, et quand vous avez envie de me poser une question, vous le faites. Mais honnêtement je pense que vous avez eu assez d'emmerdements ces derniers temps, c'est la raison pour laquelle je ne vous parle pas d'argent. Ce soir, on analyse le tout, mais je peux vous dire que nous ne sommes plus dans le rouge, et c'est promis on va rester dans le vert pour la suite, c'est juré !

— On n'est plus dans le rouge ? Demande Thomas. Nos dettes sont remboursées ?

— Oui, les dettes sont effacées, depuis lundi dernier. Les concerts live vous ont rapporté un max et j'ajoute que votre single en est à dix millions de ventes. Il faut peaufiner l'album. Je pense qu'il faudrait sortir l'album pour les fêtes de fin d'années. Vous êtes en tournée, raison de plus pour sortir l'album, on va vous connaître sur une autre partie du globe, faut en profiter.

— On a vendu dix millions d'exemplaires du single, sur quelques semaines de temps ? J'ai bien entendu ???? Interroge Thomas, tout à fait incrédule.

 Jackson y met du sien aussi, mais pour la bonne et simple raison que Thomas vient de lui ôter son biberon de la bouche !

— C'est ce que j'ai dit, ajoute Oliver, un grand sourire aux lèvres.

— Tu es bourré mec ? J'ajoute, tout aussi ahuri que Thomas.

— Pas du tout, les gars. A quoi servent les promo via les radios que je vous fais faire toutes les semaines ? Pourquoi les journalistes sont-ils présents tous les week-end à vos concerts ? Le country club est complet jusqu'à votre dernière date mi-octobre. On s'arrache vos places. Et Jon fait de la pub à chacun de ses concerts pour vous, alors oui, vous avez vendu dix millions de singles.

 On a poussé un cri de joie tous les deux. Jackson nous regarde et sourit avec nous. J'ai pris Jessica hors de son berceau et je la fais tournée dans mes bras. Je l'embrasse sur les joues et sur le front en répétant "on va y arriver, on va y arriver".

— Ce n'est pas si idiot que cela une tournée mondiale dans deux ans en stades, me dit Thomas en se levant et en se mettant devant moi.

— Ce n'est jamais idiot ce que je dis, mec, jamais. Je lui dis en le prenant dans mes bras et en l'embrassant.

— On va y arriver, frangin, on va y arriver.

— Cela ne fait que commencer les gars, on va devoir bosser dur, très dur ! Je vous avais prévenu, il y a quelques semaines, nous dit Oliver tout sourire.

— Oliver, on n'y serai pas arriver sans toi, c'est certain ! Tu vas rester avec nous ?

— Tant que tu veux de moi, je reste ! C'est toi le boss dit-il en regardant Thomas.

— Non, je ne suis pas le boss, mais oui je veux que tu restes et pour longtemps, très longtemps si possible.

— Ca marche, vous n'êtes pas trop chiants comme patron, je reste, moi cela me va ! Nous confirme-t-il en nous faisant un clin d'œil et en passant sa main dans nos cheveux.

Oliver nous a laissé seul avec les kids.

— Tu te rends compte mec, dix millions de single vendus, Tu y crois ?

— Si Oliver le dit, oui ! J'y crois, j'en confiance en lui, entière confiance. Julian on devrait lui offrir un salaire, non ? Qu'en penses-tu ? Enfin je ne sais pas si c'est faisable, mais il a dit que les chiffres étaient bons, que les dettes étaient épongées, alors on pourrait lui proposer un petit quelque chose. Je ne dis pas dix mille dollars par mois, mais on devrait lui proposer un montant, tu es d'accord ?

— Je pense que c'est une très bonne idée, Thomas. Il fait un taf formidable. Pour moi c'est OK. On en discute avec Hugo et Hector. Je vais les chercher ?

— Non, on attend de voir les chiffres et de voir ce que l'on peut lui proposer. On est peut-être juste au bord du gouffre, avec un pied en dehors et un pied en dedans, je n'en sais rien, ajoute Thomas.

— Le dîner était excellent Carole, comme d'habitude ! Merci pour tout, cela va nous manquer.

— Vous manquez, tu comptes partir Oliver ? Demande Carole.

— Non, pas du tout, au contraire, je vais rester pendant encore quelques temps, enfin si tout le monde veut de moi, mais on va se mettre en route pour la tournée de Bon Jovi. On part mi-octobre, alors oui, tes repas vont me manquer.

— Ne t'inquiètes pas, mes fils cuisinent très bien. Je dois dire que Julian est plus fin en cuisine que Thomas, il mélange plus, fais plus d'essais et c'est toujours très bon ! Tu ne perds rien, ne t'inquiètes pas.

— Je vais nous trouver de temps en temps un endroit où l'on pourra cuisiner, c'est certain. De plus, il faut que l'on garde la ligne, alors on va faire attention à notre bouffe.

— Comment travaillent les Bon Jovi pour la cuisine ? Demande Carole.

— Ils ont un cuisinier et pas question de bouffer mal. C'est un des principes du groupe, la nourriture est importante pour avoir la forme. Ils sont sur scènes six jours par semaine, ils doivent avoir une hygiène de vie bien précise et la nourriture en fait partie.

— Je passerai en cuisine avec le cuisto, c'est promis ! je confirme.

 J'aime l'idée, la nourriture comme valeur j'apprécie beaucoup. Ils ont raison, sans une bonne nourriture, on ne tient pas le coup. Je sais qu'ils ont des règles de vie très strictes, pas d'alcool sauf de temps en temps un verre de vin, pas de cigarettes, pas de mal bouffe !

 Oliver va chercher les livres de compte et les ouvre devant nous tous. Il a simplement noté l'ensemble de nos dépenses comme les frais de passeports ou les valises que nous avons achetées. En réalité, il y a très peu de dépenses depuis qu'Oliver s'occupe de nous. Quelle différence avec Brian. Oliver a repris l'ensemble des dépenses qui nous ont menées aux dettes que nous avions, et les premières pages de son livre de compte sont rouges, rouges et encore rouges. Alors que depuis qu'il est venu travailler avec nous, il y a très peu de dépenses et énormément de recettes. Même si certaines des recettes proviennent du "travail complémentaire" que Thomas et moi faisons, les recettes sont présentes et cela fait du bien.

 Oliver attire notre attention en nous disant que nous sommes dans le vert depuis lundi dernier exactement, suite aux ventes et au remboursement des dettes que nous avions. Nous avons reçu un courrier de la banque nous expliquant qu'ils étaient très heureux de voir que nous avons remboursé nos dettes dans un délai aussi court et que si nous souhaitions un autre prêt, il ne fallait pas hésiter. Merci, on a donné, plus jamais de dettes, enfin si possible.

 Oliver nous explique l'ensemble des dépenses. Hugo et Hector étant le binôme matheux du groupe, vérifient les comptes et sont tout à fait d'accords avec les explications d'Oliver. Un coup de fil de Jon appelle Oliver. Nous en profitons pour discuter entre nous afin de savoir si nous donnons un petit quelque chose à Oliver ou pas. Hugo et Hector partagent notre avis. Ils pensent comme nous qu'Oliver fait un super taf et qu'il faudrait qu'il soit rémunéré, même si c'est peu, mais il faut qu'il reçoive quelque chose.

— Vous avez le bonjour de Jon les mecs ! nous dit Oliver en s'asseyant à nouveau à la table.

— Oliver, nous avons quelque chose à te dire, intervient Thomas.

— Je vous écoute !

— Nous avons décidé de te donner un salaire. On ne peut pas te payer par rapport à ce que tu fais, tu en as fait beaucoup et pour moi personnellement, je ne pourrai sans doute jamais assez te remercier, mais nous voulons te donner un petit quelque chose.

— Thomas, je ne veux rien. Je te l'ai dit quand j'ai commencé. Je peux vivre sans salaire, j'ai des rentes de mes parents.

— Je sais tout cela, Oliver, mais tout travail mérite salaire.

— D'accord, tout travail mérite salaire, mais je ne veux rien.

— Tu es aussi têtu que moi, c'est fatiguant ! ajoute Thomas en lui faisant un clin d'œil.

— On a un point de plus en commun alors ! lui répond Oliver en ajoutant lui aussi un clin d'œil.

— Oliver, je suis sérieux, nous le souhaitons tous. Nous pensons que tu fais un taf formidable et que sans toi, nous n'y serions pas arrivés, alors voilà la raison de la décision du salaire.

— Ok, vous estimez que j'ai fait un bon job, et j'avoue que moi aussi je pense faire un bon job, mais je ne veux rien.

— D'accord, pas pour le moment, mais on va mettre une date alors là-dessus. En fin d'année, le dernier jour, tu nous fais un topo comme tu viens de le faire, et nous te donnons un salaire à partir du premier janvier de l'année prochaine, cela te va ?

— Là, je suis d'accord. On verra plus clair dans quelques mois, mais si cela ne devait pas décoller comme je le veux, je ne veux pas de salaire, c'est clair pour tout le monde ?

— C'est clair, nous répondons en cœur.

— Je me suis aussi occupé de faire déposer vos chansons, vos paroles, vos musiques ainsi que les arrangements de chacun de vos morceaux. J'ai mis un brevet de nonante-neuf ans dessus et j'ai mis cela à vos quatre noms. Vous lisez les documents, vous faites des réflexions si vous en avez, et vous signez.

 Je prends un stylo et je veux signer, mais Oliver me prend le stylo des mains en me disant et en nous disant à tous :

— Pas question de signer quoi que ce soit sans avoir lu les documents ! Vous m'entendez, aucun ne le fait, aucun. Je peux avoir fait une erreur, il peut y avoir une erreur de la part de la société d'enregistrement. Vous lisez tous les documents et chacun d'entre vous le fait. Après, seulement vous apposez votre signature ! Et vous le ferez tant que je travaillerai avec vous. Une erreur est humaine, alors il y a plus dans cinq têtes que dans une.

  C'est dans des moments précis comme celui-là, que l'on remarque que Brian nous a bien eu, jamais nous n'avons eu aucun document, raison pour laquelle nous avons sans doute eu autant de dettes.

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