CHAPITRE 12 : UNE PREMIERE FOIS

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 "La valeur des choses n'est pas dans la durée, mais dans l'intensité où elles arrivent.

C'est pour cela qu'il existe des moments inoubliables.

Des choses inexplicables et des personnes incomparables."

Fernando Pessoa

 Vendredi soir arrive bien vite, et après les cours, nous ne sommes pas à quatre à rentrer chez mes parents, mais à cinq. Sarah nous accompagne. Nous nous installons dans le living pour un petit encas. Julian est aux fourneaux avec maman. Cela sent divinement bon. J’ai l’impression qu’il est aussi doué en cuisine qu’en musique. Nous discutons de choses et d’autres, et c’est en passant à table que Julian me dit :

— Mec, fais attention, tu vas te brûler les ailes. Je ne t’ai jamais vu comme cela.

 Il a raison, je n’ai jamais été attiré par une personne comme je le suis par Sarah. Sarah est douce, belle, intelligente, très bien élevée, mais elle ne fait pas partie de mon monde. En effet, chez nous, chacun prend une chaise et il s’assied. Chez elle, lorsqu’il y a une femme, un homme l'aide à s'asseoir. Une fois de plus, c’est Julian qui me sauve la mise en lui retirant sa chaise. Certaines manières mises à part, Sarah s’intègre très bien dans notre petit groupe. Mes frères sont rentrés et se sont joints à nous. Je suis le plus jeune de la fratrie de trois que nous sommes, biologiquement parlant je veux dire. En effet, Julian vit avec nous depuis l’âge de huit ans et je pense qu’Hugo et Hector se sentent bien ici aussi et c’est avec plaisir qu’ils s’installent dans nos vies.  Je ne sais pas l’expliquer,  mais Sarah va bouleverser ma vie, la vie de mes frères de sang et de cœur, c’est certain.

 Après le dîner, nous partons au cinéma. Elle ne connait pas ce type de films, sa famille n'en regarde pas. Tout en marchant à côté d’elle, nos mains se sont croisées, se caressent délicatement. Je me sens bien avec elle. Nous achetons nos tickets, un soda et un paquet de popcorn. Nous sommes contents d’être là, et c’est tout naturellement qu’elle s’installe dans le creux de mon épaule. J’ai envie d’être auprès de cette fille, sa présence me fait du bien, beaucoup de bien. Les lumières s’éteignent lentement, et même si le cinéma fait partie de mes passions, en ce moment, mon regard est attiré par la jolie fille qui est à mes côtés. Le générique du début de film est à peine fini que mes lèvres se retrouvent dans son cou et en dessous de son oreille. Elle apprécie cela et se rapproche plus près de moi. J’avoue que je suis plutôt inexpérimenté dans le domaine. Ma première fois s’est soldée par ce que l’on peut appeler un échec. Julian et moi avions rencontré une jolie petite rousse, on avait trop bu tous les trois. On s’est retrouvé dans le même lit, avec la même fille. C’était la première fois pour lui aussi et même s'il les fait toutes craquer, aucune ne lui résiste généralement, ici on peut dire que cela a été un bide total. On a dû tenir le coup cinq minutes à deux, la petite rousse nous a expliqué que l’on savait jouer de la musique et que cela nous permettrait d’emballer les filles. Elle s’est barrée quelques minutes plus tard et j’avoue que l’on a sombré dans un sommeil de gueule de bois.

 Je ne me décourage pas pour autant, bien au contraire, surtout lorsque les lèvres de Sarah se retrouvent sur les miennes. Elle m’encourage et je poursuis mon chemin. On dit toujours que Bruce Willis a beaucoup de charme, beaucoup de charisme et je le pense aussi, mais en ce moment même, je vole la vedette à Bruce et Sarah se prélasse dans mes bras. Ses lèvres sont tendres et chaudes. Ses yeux sont pétillants et je suis fier que ce soit moi qui la mette dans cet état. Je n’ai rien vu du film et Sarah non plus. Faudra que je pense à l’acheter en vidéo, j’apprécie beaucoup Bruce Willis.

 Nous sortons du ciné, il fait beau, le ciel est dégagé. Mon bras est autour de ses épaules et régulièrement, elle se colle à moi. Sa main est enlacée à la mienne et l’autre est passée autour de ma taille. Nous prenons un taxi et nous allons rejoindre le club de mon frère. Légalement nous ne pouvons pas y entrer, mais c’est l’avantage d’être le frère du patron. Comme d’habitude, l'endroit est bondé. Il y a quelques années, mon frère a acheté ce vieil entrepôt et l’a retapé, pierre par pierre, et aujourd’hui on fait la file pour y pénétrer. Tout, à peu près tout, est permis, tant que les personnes sont consentantes. Des pistes de danse et bars sont présents au rez-de-chaussée et des salons privés sont aux deux étages suivants. Une règle, pas de drogue, pas de mineur, sauf nous bien sûr. Les sorteurs veillent sur la clientèle qui entre et des chauffeurs et/ou taxis sont à votre disposition quand vous sortez. Il n’est pas question que l’on reprenne sa voiture en ayant bu, soit on est clean, soit un chauffeur vous conduit. Ce sont de petites règles, de petits détails, mais qui permettent à mon frère d’avoir un antre respecté et bondé.

Cet établissement a permis aussi l’ouverture de deux autres dans d’autres coins de la ville. Matthew a une entreprise qui fonctionne bien et une petite centaine de travailleurs sous ses ordres. En fait, Matthew ne donne pas d’ordres, il est le boss c’est certain, les murs lui appartiennent, le salaire des employés est payé par lui. Mais pour pouvoir travailler dans son entreprise, il y a là aussi quelques règles : on travaille avec lui et pas pour lui, c’est une équipe qui tourne et qui s’entraide. Les danseuses qui sont là dansent, c’est leur job, si les clients veulent plus c’est à elles de décider et Matthew ne prend pas un centime lors de ce type de travail. Il y a des chambres à leur disposition si elles désirent satisfaire un client, mais aucune fille ne travaillant dans ses murs n’entrera dans une chambre sans le souhaiter.

 Je rejoins mon frère, afin de le saluer et lui dire que nous passons un peu de temps ici. Il m’explique que nous sommes les bienvenus. Julian, Hector et Hugo sont déjà présents. Comme d’habitude, on ne paie ni l’entrée, ni les verres, mais pas question de se saouler la gueule, autrement, nous avons un des videurs qui nous ramène à la maison.

 Le bar et la piste de danse sont bondés. Il y a du monde dans tous les coins, c’est normal, c’est vendredi soir. Le samedi soir nous est réservé et nous y jouons régulièrement, très régulièrement. Demain nous ferons notre premier concert à quatre, Hugo et Hector se joignent à nous, c’est décidé, on se lance. Entre temps, le quart d’heure de slows est arrivé et c’est sur « One More Time » de Georges Michael que j’entraîne Sarah sur la piste de danse. Elle ne connait pas ce genre de musique et certainement pas non plus, « Sweet Shine of Mine » des Gun’s& Roses. En passant du temps avec elle, je me rends compte que nous ne faisons pas partie du même monde. Elle écoute de la musique classique et sa mère organise un bal de charité plusieurs fois par an, la mienne travaille pour Playboy. On passe un excellent moment, ensemble. Vers quatre heures du matin, Sarah me dit qu’elle est fatiguée. Nous rentrons à pieds. Nous sommes à une dizaine de minutes de la maison. Je ne lui ai même pas posé la question, mais tout naturellement, elle rentre avec nous. Les garçons vont dormir, moi je n’ai pas envie de dormir. Elle m’accompagne dans ma chambre, pourtant, je ne ferai rien qu’elle ne voudra pas. Le respect est pour moi primordial dans une relation. J’ai fermé la porte de ma chambre, elle me regarde et sourit.

— Je vais dormir par terre ma puce, pas de soucis. Je lui dis en l’embrassant tendrement sur les lèvres. Très vite, je constate qu’elle n’a pas forcément envie de dormir et j’avoue que moi non plus.

— Thomas, je ne veux pas que tu dormes par terre.

— Sarah, relaxe ma puce, ce n’est pas un problème, je vais prendre une couverture et un coussin et je m’installe.

— Thomas, ce n’est pas l’endroit qui m’inquiète, je n’ai pas envie que tu dormes et moi non plus, je n’ai pas envie de dormir, me murmure-t-elle en ouvrant les boutons de son chemisier.

— Sarah ne précipite pas les choses, on a tout le temps. Cela fait trois jours que l’on se connait, je ne suis pas du genre à brusquer les choses.

— Je ne brusque pas les choses non plus, me confirme-t-elle, j’ai simplement envie de faire l’amour avec toi.

 Nos corps se sont rapprochés, nos souffles se sont mêlés, nos vêtements ont très vite fait un tas au sol, mes lèvres se sont appropriées les siennes. J’aime sentir ses mains dans mon dos, ses lèvres sur mon cou. Je souris en pensant à ma première expérience et je me dis qu’aujourd’hui c’est beaucoup, beaucoup mieux. Nous nous sommes embrassés, nos corps se sont touchés, frôlés, sa langue a parcouru une grande partie de mon buste, mais je constate qu’elle est hésitante et je ne veux pas la brusquer, même si il faut que je continue à la main, mais il n’est pas question que je lui fasse faire quelque chose qu’elle ne veut pas.

— Hey, on peut s’arrêter si tu veux, je lui confirme en prenant son menton dans mes mains. Je n’ai pas l’intention de te faire faire quelque chose que tu ne veux pas. Si tu estimes que l’on va trop vite, on s’arrête. Donne-moi quelques minutes dans la salle de bain et je reviens, mais sois cool, on fait ce que tu veux, comme toi tu veux, je lui murmure tout en l’embrassant.

— Thomas, je n’ai pas envie d’arrêter.

— Que se passe-t-il, tu es tremblante, on a tout le temps ma puce, tout le temps.

— Thomas, j’ai envie de faire l’amour avec toi et c’est la première fois que j’ai envie de faire l’amour avec quelqu’un. Je, je…

— Ma puce, si tu as envie de moi et si tu as envie que l’on fasse l’amour, on fera l’amour. Si tu veux que l’on s’arrête, on le fait aussi. Et ce n’est pas un drame que tu sois vierge, au contraire, j’apprécie que tu te donnes à moi. Mais je veux que tu sois certaine. Je veux te trouver dans mes bras dans quelques heures en me disant que c’était sympa, je ne veux pas trouver un mot me mentionnant que tu as fait une erreur. Si tu veux de moi, je suis là.

— Thomas je suis vierge, je n’ai jamais fait l’amour. Je ne sais pas mettre un préservatif, me dit-elle en rougissant et en parlant à voix basse.

 En lui souriant, je prends le paquet de préservatifs, j’en sors un et m‘assieds sur le lit.

— Viens te mettre derrière moi, j’ai tout le matériel pour t’apprendre cela, je lui mentionne en souriant et j'ajoute que je ne suis pas expert, loin de là.

 Les rires et l'amour présents ont fait le reste. Quelques heures plus tard, nous sommes allongés l'un contre l'autre, nous sommes heureux et repus et je me rends compte que si ma première fois a été une catastrophe et que je ne me suis pas spécialement entraîné, je suis heureux d'être ici en ce moment avec Sarah. Son visage est posé sur mon torse, elle respire calmement, sereinement, je passe mes mains dans ses cheveux et je lui murmure que je l'aime. C'est fou, cela fait trois jours que je la connais, on est des ados, mais je sais que je veux faire un bout de chemin avec elle, je veux qu'elle fasse partie de ma vie.

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