Episode 42.1 - Achéron

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Luna

Quoi qu'elle se plût une nuit durant à cultiver un certain suspense, il allait de soi qu'Hazel Orsbalt me choisirait pour dame de compagnie et, le lendemain même de notre première entrevue, je me voyais sans surprise aucune octroyer une place dans le prestigieux manoir de Whistlestorm.

Hazel est une jeune fille réservée. Elle m'interroge souvent sur le monde extérieur. Je ne peux qu'imaginer ce qui se déroule dans sa tête : tout ce temps, elle a vécu retirée dans sa chambre, tout comme moi j'ai vécu à l'abri sur mon île. Sur mon île, cependant, les sujets d'observation n'ont jamais manqué. Épier en silence les interactions entre mes sœurs, les curiosités rapportées par les vacanciers dans leurs valises, jauger sans trop m'y mêler cet échantillon d'humanité charrié jusqu'à moi au gré des vagues et du temps, contempler l'évolution d'une poignée de semblables aux attitudes multiples qui gravitaient autour de moi toutes ces années durant, tenter de cerner sans pouvoir les comprendre les regards méfiants de nos voisins les pêcheurs ; tout cela m'a permis de relativiser le monde accessible à mes yeux qui, je le compris suffisamment tôt, n'était qu'une infime portion d'un univers subtil est complexe. Qu'a donc vu Hazel en dehors du manoir dans lequel elle déambule depuis plus de seize ans ? Qui a-t-elle côtoyé à l'exception des hautes sphères de la société d'Elthior à laquelle les Orsbalt sont étroitement liés ? À bien des égards, elle ignore tout des réalités qui s'étendent par-delà les fenêtres de sa prison dorée.

La vie à Whistlestorm est réglée comme l'horloge la mieux huilée de tout l'archipel. Lord Orsbalt, bien que maître de maison, s'absente tôt le matin et ne rentre que dans la nuit. Sa fille et lui entretiennent des rapports distants. Quant à moi, je ne le croise qu'à de rares occasions. Une fois seulement, le hasard voulut qu'il dînât avec nous. Ce fut le repas le plus silencieux auquel j'assistai jusqu'alors.

En temps normal, Hazel et moi prenons nos repas en tête à tête, dans son salon privé. Nous parlons, comme deux jeunes filles de notre âge. Nous échangeons nos points de vue sur nos lectures, nous partageons des anecdotes personnelles ou nous discutons du monde, à défaut de pouvoir le réinventer complètement. Je raconte à Hazel la ville dans laquelle elle n'a que rarement mis les pieds, la diversité des quartiers qui la composent, de la grandeur affolante et du tumulte de l'Agnopole à la tristesse des docks délabrés. Je lui dépeins le plus fidèlement possible la plage et la jungle de mon île d'origine, les splendides falaises en haut desquelles j'aimais à me jucher pour lire, les nuées d'oiseaux marins qui en jaillissaient à la tombée du jour. Hazel, quant à elle, me livre une satyre des plus distrayantes de la bourgeoisie d'Agnakolpa. Tandis qu'elle me rapporte les derniers scandales vestimentaires – la robe en plumes d'aigle de la baronne d'Anakar, ou encore la modeste toile de jute portée par Lady Ventris de l'Île du Paon – Hazel donne libre cours à ses talents d'actrice en imitant les caquetages offusqués et les murmures caustiques des invités de son père. Au fil des jours, je la découvre étonnamment critique vis à vis de son propre milieu social, dont elle ne manque jamais de moquer les usages archaïques et la superficialité. Telle m'apparaît Hazel Orsbalt : l'âme d'un philosophe séquestré dans le corps impuissant d'une demoiselle en exil au Royaume des Apparences.

Chaque matin, à l'exception des week-ends, Lady Orsbalt reçoit l'instruction d'un précepteur. Elle m'invite spontanément à assister à ses leçons et, n'étant pas tenue d'être assidue, j'accepte de partager son étude. À raison d'un par jour, se succèdent le professeur de mathématiques, l'instructeur en langues, le docteur en sciences, le maître de musique et une répétitrice diplômée en philosophie et sciences sociales dont les lectures assommantes recèlent de temps à autre quelque perle de la pensée. J'apprécie tout particulièrement son goût pour les intellectuels allemands. De son côté, Hazel prête une oreille attentive et montre un intérêt certain à chacun de ces enseignements. Je lui devine néanmoins sans peine une préférence marquée pour la leçon de musique.

Lors du premier cours auquel j'assistai avec elle, le maître me demanda si je savais jouer d'un instrument, et je pensai enfin tirer quelques mérites des longues années passées à apprendre seule le piano. Il me reconnut somme toute une certaine dextérité. Mais la fierté que j'en récoltai ne dura qu'un court instant, aussitôt ébranlée par la virtuosité absolue d'Hazel faisant vibrer les cordes de son violon. Bien que le maître m'encourageât à l'accompagner sur certains morceaux, une transe inéluctable s'emparait de moi dès que je percevais la fougue avec laquelle Hazel frottait les cordes de son archet. Il me fut alors impossible de me détacher d'elle, mon regard tout entier absorbé par la souplesse de son doigté, et la complainte suave de l'instrument qui seule pénétrait mes tympans. En l'espace de trois morceaux, sa mélodie m'avait transportée au point que, sans même m'en rendre compte, je me levai pour l'applaudir. Le maître me dévisagea froidement. Hazel porta sa main pâle à sa bouche pour dissimuler son rire, et je ne vins même pas à me sentir idiote, tant cette ovation me semblait méritée.

Une fois par semaine, le mercredi, Hazel reçoit la visite de son médecin, le Docteur Dobble. Thomas Dobble est un petit homme ventru dont le regard vicelard m'inspira une immédiate répulsion. Les yeux qu'il pose sur mon employeuse me font redouter que ses longues consultations tiennent davantage au voyeurisme qu'à l'expertise médicale. Lorsque je demandai à Hazel si elle faisait confiance à cet homme, elle me confia n'avoir jamais accordé sa confiance à quiconque.

— En revanche, ajouta-t-elle, je sais que la loyauté s'assure par deux moyens : l'argent et la menace. Le Docteur Dobble touche des honoraires avantageux et il est soucieux de sa réputation. Je n'ai donc aucune raison de mettre en doute ses diagnostics.

L'argent et la menace, c'est ce que vous enseignent vos précepteurs ?

— Non, évidemment. C'est là l'instruction de mon père. Le pauvre m'a appris à son insu les rouages de son métier. C'est un gouverneur médiocre et un homme plus détestable encore. Lui le premier, je ne lui ferais pas confiance.

Je ne saurais dire si c'est par méconnaissance qu'Hazel se montre si méfiante envers autrui, ou au contraire parce qu'elle a trop longtemps été la spectatrice privilégiée des intrigues politiques de son paternel. En outre, son mépris non dissimulé pour son unique parent me frappa, et je ne pus m'empêcher de lui en demander la cause.

— Il n'est sans doute pas plus mauvais qu'un autre, reconnut Hazel. Il n'y a dans son entourage que des requins sans morale. C'est parce que je suis sa fille qu'il m'horripile à ce point. J'ai tout bonnement honte d'être apparentée à une fripouille de son espèce.

— Vous savez, le monde entier n'est pas réglé selon ces lois-ci, Mademoiselle. Moi, par exemple, je n'ai que faire de votre argent. Quant aux menaces, elles ne m'impressionnent pas. Je n'ai aucun rang à défendre.

— Comme cela doit être reposant ! Dis-moi, Luna, si la paie t'indiffère, pourquoi travailles-tu pour moi ?

— Être votre dame de compagnie, ce n'est pas un travail à mes yeux. Ça en serait un si c'était contraignant, mais je vous vois davantage comme ma bienfaitrice que comme mon employeuse. Pour être tout à fait honnête, j'avais besoin d'un toit en ville, et j'ai eu l'occasion d'être logée dans cette maison que j'ai toujours admirée de loin. On pourrait dire que je suis une opportuniste, mais j'aurais été vraiment sotte de ne pas saisir une occasion pareille.

— Tu n'essayes même pas de me faire croire que tu me tiens compagnie par bonté de cœur ! Mais l'honnêteté aussi, vois-tu, je m'en méfie. Elle dissimule bien souvent des mensonges plus gros qu'elle.

— Ça non plus, je ne vous le cache pas : je suis bonne menteuse. J'ai mes secrets, comme tout un chacun. Il y a sans doute des choses que vous ne devriez jamais savoir à mon propos, que ce soit pour votre bien ou le mien. Toutefois, je n'ai aucune raison de vous nuire. Ça m'attriste, à vrai dire, de savoir que vous ne m'accorderez jamais votre confiance. Je ne suis pas une sainte, c'est sûr. Mais vous n'auriez pas trop d'une amie sur laquelle vous reposer. En ce qui me concerne, vous pourriez être mon amie.

Hazel m'accorda un sourire emprunt d'une douce mélancolie.

— Je n'ai jamais eu d'ami jusqu'à présent. Une véritable amie, peut-être lui ferais-je confiance.

Gagner l'amitié puis la confiance de cette princesse solitaire, voilà le moyen le plus sûr de me mettre à l'abri du besoin. Et toutefois, j'ai des remords à forcer le destin ; je sens qu'il me serait impossible de me servir d'elle sans entacher ma conscience. J'ai de la sympathie pour Hazel, une ébauche d'amitié néanmoins sincère. Je ne pourrais faillir à ma tâche ; je ne pourrais me résoudre à profiter de la position qu'elle me confère.

Les après-midis durant lesquelles aucune consultation ne la retient, Hazel et moi prenons le thé dans ses appartements. Le manoir est une véritable fourmilière, grouillant de domestiques affairés, au service de la noble famille. Hazel Orsbalt dispose de sa propre servante, l'androïde RF2348 que l'on connaît ici sous le nom de Mindy. Robot fonctionnel à la pointe de la technologie, Mindy effectue trois fois plus de tâches que ses homologues humains. On la croise tantôt faisant les chambres de l'aile ouest, où nous logeons Hazel et moi, tantôt rajustant les tableaux de la galerie des portraits. On la voit aller et venir, sa chevelure rose pimpante secouée en cadence à la mesure de ses pas, dans les longs couloirs de Whistlestorm, apportant sur un plateau quelque mets à sa maîtresse ou le coffret qui renferme les innombrables remèdes qu'ingurgite quotidiennement la frêle Hazel. Mindy exécute les ordres à la lettre et se tient toujours devant nous au garde-à-vous dans son costume de gouvernante impeccablement ajusté. De tous les ouvrages domestiques, il y en a un seul qu'Hazel se réserve le devoir d'accomplir par elle-même : la préparation du thé. Jamais deux fois le même, les thés que me sert mon employeuse sont sans cesse pour moi une véritable curiosité. Aucun ne présente une saveur tout à fait familière et, bien qu'il m'arrive de reconnaître un arôme de cannelle ou l'amertume caractéristique de la menthe brûlée, persiste toujours un arrière-goût que mes papilles ne sont en mesure d'identifier. Ayant tenté une fois de soutirer à Hazel l'un de ses ingrédients secrets, je compris qu'il serait vain d'insister. Elle ne me céda pour réponse qu'un sourire malicieux, visiblement décidée à entretenir jalousement les mystères de ses breuvages.

Au hasard d'une éclaircie, il nous arrive de quitter la terrasse couverte du salon d'Hazel pour aller nous promener dans les jardins du domaine. En cette saison des pluies, les fontaines demeurent muettes, toute vanne fermée, les bassins stagnants encombrés de feuilles mortes. Les parterres à l'anglaise, cependant, sont entretenus avec soin, de même que le dédale des haies qui jouxte le parvis de la demeure centenaire. Hazel aime à m'égarer dans ce labyrinthe, dont ses pieds à elle connaissent le moindre recoin et la moindre bifurcation. Toute partie de cache-cache se trouve pour moi perdue d'avance. Toutefois, au vu du plaisir que semble en retirer la jeune lady, je consens de bon cœur à la laisser m'égarer ou me découvrir parmi les cachettes qu'elle connaît déjà toutes.

Les jours de pluie, nous pouvons nous reclure des heures durant sous la verrière de la bibliothèque, plongées dans les ouvrages dont il nous arrive spontanément de citer les passages qui nous frappent. Ainsi je clame quelques vers d'Hemingway, et Hazel de me répondre d'une tirade de Ionesco. Parfois, tandis que la pluie battante s'abat sur la verrière, Hazel me surprend à pianoter sur l'accoudoir de mon fauteuil. Elle se lève alors en trombe pour s'emparer de son violon et bercer la scansion diluvienne des sanglots sensuels de son instrument. Feignant de reprendre ma lecture, je ne puis m'empêcher de l'admirer, splendide sous les cascades d'eau qui dévalent le dôme de verre, alors qu'elle embrasse elle-même les vibrations des cordes, devenue à son tour une sorte de mélodie charnelle qui virevolte, légère, dans la pâle clarté de juillet. Pâle, elle l'est aussi. Blonde comme les blés et blanche comme la neige, quand elle inonde tout ce qu'elle touche de sa pureté candide. En de pareils instants, il arrive que mon cœur se serre et que je me surprenne à la désirer, elle, la délicatesse faite femme. Alors, immédiatement, une honte coupable m'envahit. Moi, créature de l'ombre, les veines toute gorgées d'une vengeance vénéneuse, je ne pourrais l'aimer sans la souiller à jamais, sans attirer sur elle un malheur fatal. Réprimant la rougeur qui s'empare de mes joues, je m'efforce de replonger dans les pages tachées d'encre qui me siéent bien mieux que l'innocence immaculée. Voilà que je touche aux limites de ma liberté, cantonnée à jamais à fouler les ténèbres.

Il fallut trois jours avant qu'Hazel Orsbalt me dévoilât la pièce fétiche de ses appartements, contiguë au salon, et par la même occasion sa passion dévorante pour un art qui m'avait toujours quelque peu indifférée. La mystérieuse salle se révéla encombrée d'appareils de projection en tout genre : du modèle pelliculaire de collection à son équivalent holographique le plus récent ; et d'armoires remplies de copies de films aussi hétéroclites que leurs supports de diffusion.

Assistée par Mindy, Hazel installa un projecteur face à la cloison qui sépare la pièce du salon. Je les regardai faire en silence, trop intriguée pour oser briser la curieuse manipulation par une question superflue. Ainsi je me laissai entraîner à nouveau par Hazel dans la pièce principale de ses quartiers. Je l'observai décrocher du mur la toile figurant les neuf cercles de l'Enfer et ainsi révéler une large fenêtre dans la cloison. Le moteur de l'appareil se mit à ronronner de l'autre côté, bientôt accompagné par le cliquetis de la pellicule. Face au sofa, le large miroir qui occupe la moitié d'un pan de mur se métamorphosa en écran de projection. Hazel me fit asseoir et, trop impressionnée par le dispositif pour décoller les yeux de l'écran, je me laissai pour la première fois absorber par un film. Les figures en noir et blanc se mouvaient sur la surface du miroir devenue hermétique à nos propres reflets, et tandis que la caméra glissait de la chaussée presque noire aux voitures qui filaient, sirènes hurlantes, la voix du narrateur annonçait : « Voici le fameux Sunset Boulevard, à Los Angeles, en Californie. ».

Le cinéma, Hazel persiste à m'y introduire chaque soir. Après le repas, je prends place dans le sofa et lui laisse le soin de me surprendre, que ce soit par le film lui-même ou le projecteur choisi. Au fil des jours, je me familiarise aux images mouvantes, aux diverses expériences visuelles et sonores qui submergent l'espace autour de nous. Jusqu'alors, je croyais le cinéma un simple objet de divertissement, un art facile et impur. Au creux des murs ancestraux de Whistlestorm, le regard rivé sur le miroir et soutenue par l'amour bienveillant de ma jeune employeuse pour le septième art, j'y reconnais les prouesses de pensée mise en forme et je cherche avidement dans les actuels hologrammes ce qu'il reste du miracle poétique des vieilles surimpressions.

En raison de sa santé fragile, Hazel veille à garder une hygiène et un rythme de vie très strictes. Elle ne gagne jamais son lit plus tard qu'à vingt-deux heures. L'énorme pendule du salon ne manque pas de la rappeler à l'ordre quand sonne l'heure limite. Je profite alors seule de la quiétude de la bibliothèque. Par les nuits les plus claires, j'observe les étoiles à travers l'immense verrière. D'autres fois, je regagne ma chambre et sors par le balcon me dégourdir les ailes.

On m'a attribué la chambre persane, une suite dans les tons bleus décorée de précieuses céramiques et habillée çà et là de discrets arabesques. Au milieu de la chambre, trône un grand lit à baldaquins ouvert sur le dessus de sorte que l'on puisse admirer allongé la fresque peinte qui orne le plafond : une version huilée de l'histoire coloniale sur laquelle on peut assister au triomphe de l'armée britannique sur les peuples d'Anakar. Mieux que n'importe quel livre d'histoire, cette peinture seule dévoile l'ampleur de l'ego des illustres vainqueurs. Je dispose également d'un écritoire dont le tiroir supérieur comporte un verrou, d'une haute penderie et d'une lourde malle posée aux pieds de mon lit. Ce dernier rangement renferme un double fond, dans lequel je me garde bien de dissimuler quelque affaire sensible, consciente que mes hôtes connaissent mieux que moi leur mobilier.

La partie la plus admirable de mes appartements est sans aucun doute la salle de bain, dont le plafond voûté fut jadis recouvert de minutieuses mosaïques. La baignoire, un bassin incrusté dans le sol de marbre, rappelle volontiers le bain public d'un ancien hammam. Nous pourrions aisément y tenir à trois : Hazel, moi et le spectre de mes péchés. J'aime à me délasser dans l'eau tiède du bassin, la remuer de mes ailes à la façon d'une raie. En même temps que mon regard vagabonde au gré des abstractions carrelées de la coupole, je m'oublie moi-même dans le flot de mes illusions. Désillusions, en certains cas. Je sens le bonheur filer hors de moi tandis que je voue mon âme tout entière au simulacre de Némésis.

Ne cessez de veiller contre un ennemi qui veille, tandis qu'au loin parcourant les rivages de la noire destruction, je chercherai la délivrance de tous. Cette entreprise, personne ne la partagera avec moi.¹

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1 John Milton, Le Paradis Perdu, Livre II

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