Prologue : Une lettre

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« Amin, mon cher confrère,

Tu te doutes bien du pourquoi de ce courrier : je ne te serai jamais assez reconnaissant pour tout ce que tu as fait pour moi, et je tiens à te renouveler mes remerciements les plus sincères.

En réalité, ce n’est là qu’une seule des raisons qui me poussent à t’écrire aujourd’hui. L’autre est bien plus sombre, hélas : je crains qu’il ne nous faille renoncer. Ce que nous manipulons, la vie, la mort… cela va bien au-delà de notre emprise, et même de notre compréhension. Il nous faut arrêter de jouer aux dieux.

Car si nous n’en sommes pas, eux au contraire sont particulièrement courroucés par notre attitude. Et nous les avons bien trop ignorés jusqu’alors.

J’ose espérer que tu tiendras compte de ce message, même si je te sais assez sage pour cela. Crois-moi, ce n’est pas une mise en garde à prendre à la légère.

En ce qui concerne les autres, je doute d’être assez influent pour les convaincre de quoi que ce soit… et je suis inquiet. Très inquiet, même. J’ai bien peur que ce ne soit là que le début, et la fin s’annonce encore plus tragique que ce que nos esprits humains sont en mesure d’imaginer.

Puisses-tu rester aussi loin que possible de tout cela, désormais. C’est ce que je vais m’empresser de faire, en tous cas… en espérant que cela suffise ; et je n’en suis même pas certain.

Prends bien soin de toi.

Ton camarade, confrère et ami, reconnaissant pour l’éternité,

Isaac Hanub »

L’auteur reposa en douceur, sans même le reboucher, le stylo qu’il venait d’utiliser, puis s’enfonça confortablement dans le dossier de son fauteuil en cuir rouge, le regard dans le vide.

Au bout d’un instant, il fixa ses yeux bleu pâle sur la lumière blafarde de sa lampe de chevet, puis soupira.

— Et pourquoi pas, après tout ? murmura-t-il pour lui-même.

Il se redressa, écarta le courrier qu’il venait d’écrire sur la gauche de son bureau en bois clair, puis s’empara à nouveau de son stylo. Après avoir fouillé un instant dans chacun des tiroirs, il sortit un calepin en papier recyclé de l’un d’entre eux.

S’ensuivit un court moment de battement, qu’il passa à frotter son bouc blond, comme s’il cherchait par où commencer. Après une paire de minutes passées à réfléchir, il posa enfin la mine sur la première page du petit carnet et se mit à la faire danser. Bien vite, elle arracha à la feuille beige quelque bruit de griffonnage délicat, et les mots s’écoulèrent aussi vite que l’eau du Nil un jour de crue.

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