Les services secrets entrent en jeu

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Il est plus de sept heures le soir et Maggie Gibson est encore à son bureau dans les locaux quasiment vide de Channel 5, lorsqu'un sombre clochard puant fait irruption :

— Madame ! Madame ! Vous êtes journaliste ! J'ai un scoop pour vous !
Maggie sort instinctivement son spray au poivre de son sac, mais avant qu'elle ne puisse aspergé l'importun, ce dernier attise sa curiosité :

— Vous savez les barbares qu'ont débarqué c'matin. J'les connais bien ! J'pourrais vous en raconter sur eux !
Tout en étant sur ses gardes la journaliste creuse un peu :

— Qu'est-ce que vous savez au juste ?
Robert prend un air fourbe :

— Ça dépend de ce que vous offrez !
Maggie s'apprête à partir en pensant que ces clodos sont sans gêne, lorsque le mendiant l'arrête : — Ce sont des gens qui viennent d'un autre temps, qui connaissent pas nos coutumes. J'ai été leur prisonnier.
Sur le coup la journaliste met plus d'intérêt dans l'écoute du sans-abri :

— Vraiment... ? Raconte-moi ça, je ne serais pas ingrate.
Le clochard se sent aussitôt plus à l'aise, et va même jusqu'à s'installer sur la chaise de cuir d'un collègue absent :

— Ils se croient dans un autre monde. Ils ont peur du métro et ne savent pas traverser une route.
Maggie fait une moue dubitative :

— Mais encore ? Qui me dit que tu ne me racontes pas d'histoires pour avoir quelque argent ?
Le clochard se relève de suite et prend un air pitoyable :

— Non, je vous jure, leur chef se nomme As... born.. enfin quelque chose comme ça, et un des leurs m'a proposé d'être son esclave attitré pour les guider dans ce monde.
Cette fois Maggie est franchement intéressée :

—Tu veux dire Asbjörn ?

— Ouais, c'est ça, l’interrompt le pitoyable.
Maggie sort son porte-monnaie de son sac et tend un billet de cent dollars au clochard hypnotisé : — Tu crois que tu pourrais les contacter pour avoir une interview ?

— J'tiens à ma peau moi. Vous les connaissez pas … sont dangereux. J'les ai vus trancher la tête d'un homme parce que l'autre l'avait blessé avec un couteau. pleurniche l'homme de la rue.
Maggie qui suit scrupuleusement les actualités sait bien que rien ne vient à bout des Viking et là, ce pouilleux lui affirme qu'un des leurs a été blessé par un couteau. Elle doit à tout prix avoir le fin mot de tout ça :

— Tu veux dire qu'un citoyen de cette ville a pu en blesser un avec un simple couteau ?
Comme j'te l'dis, mais en matière de citoyen, tu repasseras. se détend le clodo
Maggie, que les manière du puant énervent :

— Mais il s'agissait bien d'un citoyen de cette ville, pas un de leurs compagnons ?
Robert prend un bonbon dans une coupe sur le bureau avant de répondre :

— Ouais si tu l'dis ! Mais moi ces putains de loubards, ils m'font chier, j’appelle pas ça des citoyens. Ces cons là ont eu c'qu'ils méritaient. Ils essayaient d'violer une nana quand les barbares les ont chopés. Mais enfin c'est pas une raison pour couper la tête ! On est pas en France !
— Et tu sais où ils sont ces loubards ? demande Maggie intriguée.
Robert sentant la monnaie lui échapper :

— Oh j'sais pas trop, y en a un qui gueulait qu'il allait aller aux flics. Mais moi j'ai préféré prévenir la presse. Parce que tu vois ma jolie ... la presse c'est quand même le peuple alors que les flics...
Maggie comprit qu'elle devait appâter le clodo si elle voulait en savoir plus :

— Oui oui, je vois... tu as bien fait... tu ne le regretteras pas. Pour l'interview, est-ce que mille dollars pourraient te faire changer d'avis ?
Robert se triture les méninges et les doigts :

— Ben faut qu'j'voie...
La journaliste s'impatiente :

— C'est ça, réfléchis, mais vite, ma proposition ne sera pas éternelle, et puis dormir sous les ponts, c'est plus ton truc... ?
Il est deux heures du matin et Robert n'en finit pas de se torturer l'esprit :

— Avec mille dollars j'pourrais en faire des choses, j'achèterai une p'tite baraque dans le Colorado, j'irai à la pêche... D'un autre côté ce barbare m'a promis la mort s'il me croisait à nouveau et je tiens à ma tête moi...
Subitement surgissent dans le bar une dizaine d'agents en gilet pare-balle. L'un d'entre eux prend le clodo par le col — Vous êtes Robert Melvin ? Suivez-nous sans résistance !
Robert surpris et un peu saoul, tente de résister :

— Mééééé ! J'ai rien fait...
Maggie qui avait suivi son indicateur se fait toute petite à une table, mais un agent, la prend par le bras et la tire sans ménagement vers les voitures noires garées devant le café, malgré ses tentatives d'intimidation :

— vous n'avez pas le droit... je suis journaliste pour Channel 5... je connais mes droits...je vous traînerais devant les tribunaux...
— c'est ça ma jolie, pour l'instant, tu la fermes ! la rudoie un homme qui semble diriger les opérations.
Robert n'en mène pas large bien que les agent l'aient traité au mieux : on lui a offert des habits neufs et il a pu prendre une douche chaude. Il a même eu droit à un plantureux repas. Cependant au fond de lui il sait qu'il n'a pas encore reçu la facture de tous ces avantages.

— vous vous sentez mieux maintenant ? demande mielleusement un agent

— Euh... oui, merci. répond le clochard comme s'il allait recevoir une bombe sur la tête.

— Alors sans doute vous pouvez librement nous raconter ce qui s'est passé avec les Vikings. termine le même agent.

— Vous savez déjà qui ils sont ? rétorque Robert ébahit

— Mais bien sûr, nous sommes à la C.I.A. et nous savons toujours tout.
La limousine noire stoppe net devant le maison de Maggie. L'agent la tient par le bras :

— attention, pas de scandale, si tu tiens à ton job !

— Espèces de salauds les maudit Maggie
La journaliste tremble un peu en prenant ses clefs au fond de son sac, elle les laisse tomber quand l'agent la bouscule :

— grouille-toi !
À peine le seuil franchi les agent mette son appartement à sac, vidant les tiroirs, soulevant les tapis, arrachant les draps de lit...

— Chef, j'ai ce qu'on cherchait ! annonce un agent en tendant une enveloppe kraft.

— Salopards, vous ne compter pas vous en tirer comme ça, j'écrirai un article dénonciateur sur vos méthodes, on est en Amérique ici, et j'ai des droits... s'indigne la journaliste furieuse

— Tu as juste le droit de la fermer ! Écoute ma jolie, soit tu te tiens tranquille t'as rien vu et on te laisse retourner à ta petite vie de pigiste, soit tu nous emmerdes et on te coffre pour association avec des terroristes et la prochaine fois que tu reverras le jour, tu seras aussi ridée que Brigitte Bardot.
La jeune femme sait bien que seule la C.I.A. Peut prendre de telles libertés et elle reste tranquille comme le lui a conseillé l'agent.

Au Pentagone l'ambiance est à la fatigue générale. Plusieurs agents ne sont même pas rentrés chez eux. Des tasses à café jonchent la table, des dossiers et photos éparpillés décorent la table. Certains messieurs ont dénoué leurs cravate, les femmes ont les cheveux un peu défaits. Soudain le directeur entre accompagné du maire. Aussitôt chacun tente de reprendre un aspect de lui qui soit présentable à défaut d'être correct.

— Bonjour à tous, vous connaissez tous notre maire, et bien il a une annonce de première importance à vous faire passer, démarre le directeur avant de passer la parole au maire. Le syndic de la ville prépare son discours en arrangeant son gilet un peu trop serré sur sa bedaine naissante :

— Madame, Messieurs, nous savons maintenant comment venir à bout des terroristes ! J'ai reçu ce matin même un coup de fil du commissaire Manix qui me permet d'affirmer cela devant vous. J'ai réuni une cellule de crise et plusieurs spécialistes, pour arriver à la conclusion suivante, les Vikings

– car ce sont bien de Vikings qu'il s'agit – ne peuvent être touchés ou blessés par des armes qui n'existaient pas de leur temps ! Chacun se regarde sans que personne n'ose dire que cette théorie leur paraît absurde. Le directeur de la C.I.A. s'est déplacé en personne pour confirmer mes dires, enchérit le maire

C'est alors que le général Walter Shimana croit bon intervenir : — Le bateau a explosé cette nuit sous les bombardements des drones ! Succès complet. — vous voulez parler de ce bateau ! Explose le maire en jetant sur la table le quotidien du jour. Quand le pentagone bombarde New-York ! titrait le New-York Times en première page. Cette nuit plusieurs drones ont survolé la ville et ont bombardé le quai, coulant plusieurs navires dont celui de Ben hassan III qui avait amarré son yacht pour quelques jours de vacances. Espérons que cela ne nous vaudra pas une crise diplomatique débouchant sur la troisième guerre mondiale.

— Quant au Drakkar, il est intact rugit le maire. Ce qui confirme ce que je viens de dire, nulle arme actuelle ne peut détruire les Vikings ! Tenez-vous le pour dit ! le maire menace le pauvre général qui semble soudain pris d'une crise de foie. Sylvia, la chargée du département des sciences et recherches adresse un sourire narquois à l'assemblée quoique plus spécialement adressé au général.

— La NASA peut plancher sur des armes efficaces que l'on peut remettre au goût du jour comme les catapultes, appelées autrefois trébuchet. Nous pouvons aussi nous servir d'arbalètes, arcs et flèches, et bien sûr toutes les armes blanches. Il nous faut quelques heures pour reconstituer une armée moyenâgeuse. Le directeur se frotte le menton, intéressé, quoique dubitatif :

— Êtes-vous sûrs que ces armes puissent en venir à bout ?

Avant que le préposé de la NASA puisse répondre, le médecin du département des sciences et recherches, fait la proposition suivante :

— On pourrait leur balancer le choléra ou la peste, ces maladies existaient déjà de leur temps... Le responsable de la C.I.A. essuie ses lunettes avec une petite peau de chamois :

— Notre centrale nous a confirmé avoir conservé quelques souches datant de ces périodes dans nos laboratoires.

Sylvia chasse quelques miettes imaginaires de sa jupe plissée, rectifie sa coiffure : — Messieurs, la population de New-York devra-t-elle payer en milliers de morts les conséquences de vos idées absurdes ?

Le directeur étouffe un bâillement :

— Nous sommes tous très fatigués, il y a plus de trois jours que nous penchons sur la question. Bien que l'urgence se fasse sentir, je suggère que nous prenions tous une demi-journée de repos. Général, vous travaillerez sous les ordres de la NASA qui vous fournira les armes adéquates pour venir à bout de ces sauvages. Une fois leur drakkar coulé, il ne nous restera plus qu'à éliminer la souche malveillante qui pollue notre ville. Tous les commissariats ont reçu l'ordre d'arrêter les terroristes par n'importe quel moyen. Nous les avons déjà prévenu de ne pas utiliser leurs armes à feu, ni leurs Tasers. Nous mettons sur pied des bataillons expérimentés en arts martiaux et avons lancé un appel à la population que tous les spécialistes de lassos, d'arbalètes, de tirs à l'arc et d'escrime se joignent à nous. Comme vous le voyez, rien n'a été laissé au hasard et ce n'est maintenant plus qu'une question d'heures avant de faire tomber ces terroristes. Je vous souhaite donc à tous un repos salutaire.


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