Echec à la Déesse

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Le chaos s'est emparé d'Istarios tel une épidémie hors de contrôle. Si les plus âpres combats se déroulent dans la Chôra, le "patient zéro" de tout ce fatras, les secteurs les plus sensibles pour les Sorciers et leurs alliés ne sont pas épargnés. Tout a été soigneusement préparé. Soigné dans les moindres détails. Pour l'ombre qui domine la canopée tranquille du parc de l'Echatiai, c'est loin d'être suffisant.
La forêt qui compose ce parc se trouve à la périphérie de la ville. Elle abrite le refuge des Créatures : le Sanctuaire ainsi que le Temple, le havre des Sorciers d'Hécate. Mais pas que. L'Echatiai regorge en son sein de tout un écosystème surnaturel particulier. Une population qui ne se dévoile qu'aux yeux qui savent voir. Et tandis que la nuit tombe doucement sur la cité des légendes, le visiteur importun de ces bois observe. Lui, voit parfaitement.
Il laisse planer sans aucune pudeur, cette aura terrible qui l'entoure. Des effluves imperceptibles de terreur et de mort. De sombres émotions que l'instinct primaire de l'Humain lambda poussera à fuir. La forêt elle-même semble trembler d'une douloureuse appréhension. Il règne dans la pénombre sinistre des lieux, un silence pesant. Lourd comme une chape de plomb qui s'abat sur les frênes, les pins maritimes et leurs locataires sylvestres.
Un moment de flottement où l'air se charge d'une électricité palpable. Une tension qui fait frémir une Nymphe dont l'attention se porte d'instinct, en direction de la menace encore à l'abri dans les ténèbres naissantes. Dans ses bras, deux jeunes enfants ne comprennent pas encore toute l'étendue de la catastrophe à venir et son absurdité. Cet évènement va leur faire ouvrir les yeux sur un monde inconnu auquel ils appartiennent malgré eux. Un univers qui peut être si merveilleux. Si terrifiant aussi.

Le trio arrive au Temple après que Nora ait décidé de l'évacuation du Sanctuaire.
La nymphe et les enfants de Duncan et Marie, suivent tranquillement le flux de Créatures qui viennent trouver refuge dans cette place forte qu'est le Temple. C'est sous sa barrière magique, dispensée par la Déesse elle-même, que tous espèrent être en sécurité le temps que cette affaire soit réglée. Personne encore n'a conscience de l'étendue du désastre qui guette la ville et l'impact sur leur existence.
Le brouhaha calme des réfugiés brise le silence moribond de cette forêt d'ordinaire si vivante et si bienveillante. Sur le chemin, à travers les bois, les Créatures auront eu à essuyer une ou deux incartades avec quelques monstres de Faille égarés. Mais rien de bien méchant c'est une question d'habitude. Ou alors un test pour le prédateur qui les toise depuis les hauteurs.
Nora fait un grand effort afin que ses pensées ne se laissent pas envahir par l'inquiétude et la peur. Elle se ronge les sangs à la fois pour le Sanctuaire, mais aussi pour les deux frères Danekis partis rejoindre le centre-ville. La rumeur d'un combat acharné dans la Chôra ne lui a pas échappé, hélas. Elle fait tout pour se montrer souriante et affable afin de ne pas apeurer outre mesure Arthur et Elizabeth. Parfois, son regard ne peut s'empêcher de dévier vers cette cathédrale sombre qui les enveloppe. Nora n'est pas tranquille, sa conscience non plus. Du coin de l'oeil, elle voit la petite foule de nymphes, de faunes aux traits tirés. Les rares centaures s'agitent et Asterion, l'unique Minotaure, est loin de se montrer aussi calme qu'à son habitude. La Néréide capte le regard de son plus fidèle ami au Sanctuaire. Sans un mot, ils se comprennent : quelque chose, ou quelqu'un, est ici.

La voix du jeune Arthur la tire de ses contemplations.

— Dis Tante Nora, est-ce que Papa et oncle Alan vont nous rejoindre et rester avec nous ? demande-t-il avec une petite moue boudeuse et ennuyée.

Il serre la main de sa petite sœur dans la sienne. Lilibeth est toute muette, tentant de réfréner ses larmes le plus possible. Une vraie Danekis, cette petite.

Nora s'arrête aussitôt puis vient mettre un genou au sol afin d'être à leur niveau. Ses doigts viennent doucement ébouriffer la tignasse indomptable du petit garçon puis caresser la joue ronde de sa cadette. Elle aimerait que les choses soient si simples.

— Bien sûr mon petit chou, lui répond la nymphe. Son regard céruléen embrasse les deux jeunes enfants qui peinent à contenir leurs craintes. Ils sont retournés en ville pour ramener tout le monde ici au Temple. Ils n'en auront pas pour longtemps, je te le promets. 
— J'ai entendu Titus parler de monstres dans la Chôra tout à l'heure. Qu'il y avait une attaque et que les Sorciers se battaient contre eux. J'ai peur...

Le gamin tente par tous les moyens de contenir un sanglot. Aussi inquiet qu'un enfant peut l'être pour son père. Nora se force à sourire mais son coeur se serre dans sa poitrine. Elle secoue la tête et chasse cette larme qui roule sur la joue d'Arthur.

—Tu n'as pas à avoir peur, Arthur. Ton père, ton oncle et les autres sont très forts. Ils sauront se débarasser des monstres sans problêmes. Et puis, au Temple vous serez en sécurité avec ta maman et Andreas, non ? Et puis il y aura moi et Asterion... - le Minotaure qui se trouvait à leurs côtés, sourit et hoche la tête. - Tout va bien se passer. 

Arthur renifle et essuie une autre larme du revers de la manche. Les mots de la nymphe, avec le soutien du Minotaure, arrivent à panser ses craintes. La petite embuscade dont a été victime le groupe plus tôt, a secoué les enfants présents. Même si les combattants du Sanctuaire ont tout fait pour les préserver de cette vision terrible en éloignant les créatures des Failles, cela a éveillé une peur naturelle chez eux. 

— Maman ! s'écrie soudain la petite Lilibeth jusque là, muette.

Elle se sent revivre à la vision de sa mère qui accourt à leur hauteur.
Les traits inquiets, le teint pâle, Marie remonte le flux de visiteurs inattendus à contre-sens et doit parfois jouer des coudes pour avancer. La petite fille vient se lover au creux de ses bras sans demander son reste, pour ne plus vouloir en sortir. Accrochée au cou de la Thaumaturge comme un koala. Nora se relève et laisse Arthur aller à la rencontre de son amie non sans un petit sourire désolé qui peine à convaincre.

— Merci de me les avoir ramenés, Nora. Je te revaudrais ça, souffle-t-elle visiblement soulagée. Duncan m'a dit ce qu'il se passait en ville. On l'a tous ressenti ici, mais je n'en sais pas plus.

Le regard que Marie adresse à la nymphe est emplit de questions sans réponses. Elle espèrait que la brune sache l'éclairer, mais force est de constater que cette dernière en est au même point. Tous les quatre reprennent leur avancée en se laissant porter par la petite foule qui passe les barrières magiques sous l'œil attentif des Sorciers préposés à cette tâche.

— Tout ce que Duncan a dit c'est qu'il y a eu un "Effondrement". Alan a eu l'air de comprendre tout de suite et ils sont partis en ville aussitôt en me demandant de te ramener Arthur et Lizzie, soupire Nora.

Son cœur se serre douloureusement à cette nouvelle pensée.

— Est-ce que l'on en sait un peu plus sur l'origine de ce phénomène ? questionne la nymphe, sans grande conviction.

Marie secoue la tête, contrite.
Oh bien sûr, elle sait parfaitement ce que le mot "Effondrement" veut dire mais les Failles, les perturbations du Voile c'est dans les cordes de son mari. Pas les siennes. Elle se contente de soigner du mieux qu'elle peut et c'est déjà pas mal.
La Thaumaturge en regretterait presque son ignorance pour le coup.

— Ce n'est pas naturel en tout cas. Il y a quelques jours, un artefact appartenant au Cercle a été volé au Musée.
— La statuette d'Hécate qui a valu un plongeon dans un benne à ordure pour Alan ? s'étonne Nora.

Marie opine du chef et poursuit.

— Oui, celle-là. Et je sais que tu vas me dire qu'il a pu la récupérer, mais ce que l'on a appris par la suite, c'est que son protecteur a été retrouvé assassiné. La statuette qu'Alan a retrouvée était fausse.

Nora manque de mots tandis que Marie lui raconte le reste de la mésaventure en partie responsable de la situation. La nouvelle surprend la Nymphe autant qu'elle a surprise son amie, d'autant qu' Alan n'est pas du genre à se méprendre de la sorte quand il s'agit de magie et d'artefact divin.
Les questions s'amoncellent dans l'esprit de la Naïade et pas une seule réponse apportée. Le flou total.



Pendant ce temps, la Chôra devient un véritable champ de bataille.
Deux frères bientôt rejoints par leurs pairs sont en proie à une terrible créature de Faille et sa horde. L'appel d'Alan pour dresser la barrière autour de la ville est relayé à travers l'esprit des Sorciers présents. Une agitation soudaine s'empare du Temple. Les mages défensifs délaissent l'entrée des derniers retardataires afin de se concentrer sur l'ordre de leur Grand Maître.
Cela n'échappe ni à Marie, ni à Nora qui l'interroge du regard alors que les premiers mots magiques sont prononcés dans un chœur guttural qui monte en puissance.

— Alan isole la ville, se contente de dire la Thaumaturge.
La nymphe n'arrive plus à cacher son appréhension.
— Il va bien, reprend Marie.

Le sourire est entendu bien évidemment, cette dernière ne dit rien de plus. Au vu de la réaction de la Nymphe, c'est suffisant.



Des Sorciers occupés sur tous les fronts. Les plus redoutables d'entre eux, éloignés à l'autre bout de la ville. Il n'y a personne pour remarquer la dernière volée de perdreaux qui s'échappent dans les lueurs orangées du crépuscule. Elle sonne le début d’un assaut massif sur le Temple.
L'Homme En Noir se tenait à quelques mètres du sol, lévitant avec une grâce presque menaçante, tel un oiseau de nuit prêt à fondre sur sa proie. Il lève le bras puis, désigne du doigt la direction de la cible dans un geste impérieux. Le sol se met soudain à trembler. Des centaines de créatures à l'apparence aussi hideuse que grotesque s'élancent à travers les bois et les fourrés pour se répandre telle une marée de crocs, de griffes et de venin sur l'Echatiai. Une cohue de cris, de hululements stridents qui résonnent dans la nuit qui s'installe.
Le Sanctuaire est déjà vide, la monstrueuse invasion n'aura rien à détruire et à assimiler pour grossir ses rangs. Elle oblique d'un seul homme vers sa destination finale, supervisée alors par son chef qui suit, presque distraitement, le mouvement.

Cette fois, la panique s'empare des réfugiés désormais à l'abri du bouclier magique du Temple. L'instinct de survie parle encore. Quelque chose dit à Nora que ça ne suffira pas et sa voix essaie de s'imposer au-dessus le tumulte.

— Courez ! Allez-vous mettre à l'abri dans le Temple ! hurle-t-elle.

Marie et les enfants pressent le pas, obtempèrent sans même discuter.
Une fois à l'intérieur, elle se tourne vers son amie et la questionne quant à ses intentions sans un mot. Nora se contente simplement de sourire en secouant la tête. Fille d'un Dieu, cheffe d'une communauté, attachée à cet endroit comme au Sanctuaire, elle allait le défendre au prix de sa vie s’il le fallait.
Marie comprend. Elle hoche la tête et disparait avec sa progéniture au milieu de la petite foule qui se presse dans le saint des saints de la Déesse de la Magie. La Naïade fait demi-tour et revient sur ses pas pour se camper auprès d'autres Créatures et Sorciers qui se tiennent prêts à eux aussi, montrer les crocs.

La plaine entourant le Temple est elle-même encerclée par la forêt qui voit ses cimes bouger, le bois craquer et l'écorce se fendre, sous l'avancée de cette armée monstrueuse. Dans les cœurs des défenseurs s'installent l'appréhension et la peur. Ils se savent menacés, mais par qui ? par quoi ? Comment se protéger d'un ennemi que l'on ne connait pas et dont on ne sait rien de ses intentions ? Impossible alors pour le Temple autant que pour le Sanctuaire de s'accorder sur une stratégie efficace. Nora est la première à le reconnaitre. Son ventre se tord comme si du plomb en fusion lui vrillait les entrailles. Pas question de vaciller pour autant. Jamais de la vie et l'Irlandaise peut se montrer vraiment têtue dans ce genre de situation, à la limite de l'inconscience. La fierté certainement.
Aréthuse, la partie divine de son être est là. Elle affleure son âme, prête à émerger à sa simple demande. Autour d'elle, quelques-uns de ses pairs ont déjà revêtus leur apparence naturelle. Astérion le Minotaure est le plus reconnaissable d'entre eux.

— Ils sont là, grogne ce dernier.

Il perçoit sans mal les ombres et surtout, les effluves de soufre et de moisissure que les monstres charrient dans leur sillage.

— Qu'est-ce que... c'est ? Quelles horreurs ! s'écrie une jeune Sorcière, la mine horrifiée

Elle plaque la main devant la bouche dans l'espoir de se protéger de l'odeur nauséabonde qui s'infiltre dans les moindres recoins de la plaine.

— Des créatures de Faille. Voilà ce qu'elles sont. Leur nature précise, on s'en fiche dans l'immédiat. Soyez simplement attentifs, gronde une Nora dont les moindres fibres de son être sont tendues comme la corde d'un arc.

— Elles ne peuvent pas entrer de toute manière. Personne ne peut franchir le bouclier de la Déesse, car elle nous protège ! répond un Sorcier un peu trop sûr de lui.

À moins que ce ne soit uniquement pour garder contenance devant la vision d'horreur qui s'étend devant ses yeux.



Se dévoilent à la faveur des dernières lueurs du jour, des créatures tenant vaguement de l'insecte avec leur carapace chitineuse, leurs multiples pinces. Des mandibules pouvant couper le tronc d'un vieux frêne comme si de rien n'était. À leurs côtés, des horreurs caoutchouteuses et leurs tentacules émergeants d'un faciès vaguement humain d'où s'échappe une bile acide. D'autres monstruosités volantes attendent, perchées sur les branches basses des pins, tels des vautours venus d'autres réalités mortifères. Et à leur tête, une silhouette. Une voix. Un rire qui résonne sous les frondaisons.
Tous les regards se lèvent en l'air pour en chercher son origine, sans la trouver.
L'écho est presque surnaturel. Il donne l'impression de cerner le Temple dans son ensemble, qu'il n'y aucune issue pour les Sorciers et leurs protégés.

— En voilà une belle preuve de dévotion envers votre Protectrice. Une loyauté sans faille. Je suis admiratif de cet attachement envers une Déesse qui se fait si discrète. Si... faible ?

Le timbre de la voix est emprunt d'une certaine arrogance. Voire même de mépris, lorsqu'il évoque Hécate, déesse de la magie, absente depuis si longtemps.
L'inconnu marque un point.
Nora cherche elle aussi l'auteur de cette provocation et enfin, débusque l'ombre qui se détache de la horde face à eux.

— Avec ou sans la Déesse, cet endroit ne tombera pas. Qui que tu sois, arrête cette folie avant de le regretter amèrement.

Difficile pour la nymphe de faire taire la colère sourde qui lui bat les tempes. Elle qui ne parlait plus qu'à travers la bouche de l'Humaine qu'elle incarne depuis des millénaires. Maintenant, c'est Aréthuse qui se dressait là, dans toute sa splendeur de naïade. La peau bleutée, de longs cheveux aux reflets d'émeraude en écho aux lueurs de nacre de ses prunelles divines.

— Aréthuse, très chère Néréide. Toujours à te mêler des affaires qui ne te concernent nullement, ricane l'Homme En Noir, nullement intimidé par l'ultimatum de son interlocutrice. Comment se porte Alphée ?

La horde hideuse qui l'entoure ricane aussi dans un gargouillis écœurant, un simulacre d'hilarité.
La nymphe quant à elle ne rit absolument pas. Au contraire, elle est même figée, crispée à l'évocation de son véritable prénom dans la bouche même d'un inconnu. Pire encore à l'évocation de celui qui fut, un jour, son bourreau. Alphée a violé son innocence et sa pureté dans les temps antiques. Ce trauma conditionne encore bien des aspects de sa vie sentimentale. C'est une plaie marquée au fer rouge au creux de son être.
La surprise autant que la douleur, se lit sur son visage aux traits fins et harmonieux digne de sa nature. Astérion à ses côtés s'en inquiète en silence.
L'autre reprend sa diatribe moqueuse.

— Es-tu réellement ici pour les protégés de ton précieux Sanctuaire ou pour ton si cher Sorcier Des Glaces ? À qui va réellement ton allégeance ? Tu ne tromperas personne. J'entends ton cœur qui s'affole d'où je me trouve, ma chère nymphe. Et si je te disais qu'il va mourir aujourd'hui ? Comme vous tous d'ailleurs.

Interdite, Nora ne peut répondre.
Elle qui est pourtant la reine de la répartie cinglante, est muette comme une tombe mais son esprit s'affole. Les pièces du puzzle s'assemblent et se mettent en place jusqu'à ce qu'une première réponse à ses innombrables questions ne la heurte en pleine face.

— Non c'est impossible... chuchote-t-elle.

L'Homme En Noir lève le bras et désigne le Temple, ordonnant en silence la charge de ses horribles sbires qui piaillaient d'impatience tout le long de l'échange. Dans l'autre main, la statue de Hécate qu'il tenait précieusement depuis lors, celle qui contient la Clé Du Voile, se casse et se réduit en poussière fine qui s'envole vers le Temple.


Le Bouclier qui entoure le Temple se brise. Les barrières s'effondrent sous les yeux incrédules des Sorciers et des Créatures qui se laissent submerger autant par la terreur que l'incompréhension soudaine.
La horde s'infiltre dans la plaine et moissonnent déjà les âmes fidèles d'Hécate. Au milieu du tumulte et des décharges magiques se tient une Nymphe, perdue, qui regarde l'ombre rejoindre les ténèbres. Comme si de rien n'était.

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