CHAPITRE 45 : La Renaissance de l’Homme

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Durant plusieurs mois, nous nous cachâmes de la banlieue d’Egality city, pour nous faire passer pour mort aux yeux des quelques survivants de l’ordre de Darwin. Nous prîmes le temps d’apprendre la survie le mieux possible dans ces conditions. Nous tenions à ne pas trop nous éloigner de la ville pour suivre l’évolution de notre action. Les premiers temps, Anabella et moi avons dû faire face à une forme de dépression qui suivait l’achèvement de notre objectif. Ce but avait rivé nos yeux vers une seule direction, nous permettant de ne pas regarder cette drôle de vie qui était devenue la nôtre. Puis, Miroslav est tombé malade. Il ne fut rapidement plus en mesure d’assurer un rôle dans la communauté. Nous nous occupâmes du petit Priam comme s’il s’agissait de notre fils. Un nouveau petit était également en route. La vie avait repris son cours. Aucune certitude à propos du bien-fondé de nos actions passées ne s’était installée. Le doute persistait toujours au sujet de la bonne moralité de notre intervention ainsi que sur sa réussite.

Quelles actions avaient été mises en œuvre suite à notre sabotage ? Qu’allait-il arriver une fois que la société se serait rendu compte de l’impact de celui-ci ? Est-ce que la communauté scientifique allait reprendre des recherches pour restaurer ce que nous avions défait ? Et si tout fonctionnait comme prévu, une société plus détestable encore n’allait-elle pas se mettre en place ? Le destin de la civilisation était entre les mains des contemporains de ce siècle. Bella et moi avions mérité notre repos. Pour autant de temps que possible, nous étions bien décidés à le prendre...

Aujourd’hui, notre petite Inès a bien grandi. Elle est intelligente du haut de ses 17 ans. Elle a les pieds sur Terre et a à cœur d’améliorer le confort de vie des Egarés. Elle est très respectée par son entourage. Je regrette que Miro ne l’ait pas connue. Priam a reçu l’amour qu’un enfant mérite, il est bien plus adapté à ce monde que moi. Nous lui avons raconté notre histoire, nos actions. Il est très alerte et attentifs aux changements de la société. Les Egarés ne sont plus ce qu’ils étaient. Nous avons travaillé très dur pour permettre à des milliers d’enfants rejetés de survivre. Notre communauté est sortie de l’ombre. Certaines entreprises, aillant constaté qu’elles n’arrivaient plus à s’approvisionner en clones conformes, ont ouvert leurs portes à qui avait la motivation de faire l’affaire. D’autres ont été plus longues à se décider et se laissent désormais convaincre par les naissances naturelles. C’est un pas énorme qui a été franchi pour notre communauté, mais également pour l’ensemble de la société. Malgré tout, et comme nous l’avions présumé, des conflits éclatent régulièrement. Une partie des clones conformes encore vivants et parfois hauts placés se plaignent d’être concurrencés par des déviants. Une ségrégation parfois très violente s’est mise en place et nous devons essuyer des attaques régulières. D’un autre côté, nous avons appris qu’il existait des algorithmes clandestins, différents de celui que nous avons détruit, autonomes, qui continuaient de produire des clones sur d’autres continents. Les propriétaires de ces algorithmes gardent précieusement leur secret et ont mis en place un marché d’exportation de clones. Là encore, des réactions violentes sont nées sur notre continent et le marché de l’armement commence lentement à reprendre son cours. Priam se sent très impliqué. Il pense qu’il est possible de mettre fin au clonage, désormais marginal, par la voie de la politique. Inès affirme que ces entreprises de clonage sont illégales et qu’il suffirait de les fermer par la force. Nous constatons que bien qu’elle ait raison sur un point, elles sont illégales, personne ne s’est donné de mal pour les faire fermer. Nous débattons parfois tous ensemble quand la journée n’a pas été trop dure. Anabella m’a semblé préoccupée dernièrement. Elle ressent la fougue de sa fille, ça lui fait peur. Elle est encore en quête d’identité et s’est beaucoup construite par rapport à nous, c’est normal qu’elle ait des idées révolutionnaires.

Priam s’est beaucoup absenté ces derniers temps, avec sa sœur, ils se sont fait installer un amplificateur. Je ne sais pas quel troc il a réussi à faire pour les obtenir. Anabella a l’air de savoir que c’est Inès qui a pu les payer avec de l’argent. A la maternité où elle travaille, elle connaît un jeune garçon très doué qui installe des puces de paiement clandestines. Elle a pu se faire un petit salaire régulier. Priam se fait verser également un salaire à la ville en utilisant le poignet de sa sœur. Ils ne seraient pas les seuls, plusieurs égarés ont trouvé de quoi payer et recevoir de l’argent à la régulière. J’ai bien l’impression qu’un début d’économie incluant les égarés commence à se mettre en place. Constatant tous ces progrès, Anabella explique régulièrement aux enfants que nous venons de très loin et que le monde était toujours très perturbé par nos actions, c’est la raison pour laquelle il fallait être patient. Ce matin, nous fêtons le 18e anniversaire d’Inès ainsi que mon millième cheveu blanc. Les enfants nous ont emmenés dans ce vieux hangar dans lequel Miroslav m’emmenait autrefois lorsqu’il fallait discuter de choses sérieuses. D’autres membres de la communauté nous y attendaient déjà. Priam expliqua à sa sœur qu’il était fier d’elle, et de l’adulte qu’elle devenait. Il fit un discours motivant décrivant notre vie difficile et à quel point lui et Inès avaient à cœur de faire cesser les inégalités. Il expliqua qu’aujourd’hui, la majorité de la population est originaire, soit d’une gestation artificielle mais aléatoire, soit d’une naissance naturelle pour les plus jeunes. Les clones génétiquement sélectionnés sont nettement sur le déclin. A quelques exceptions près il n’y a plus de différence entre les égarés et le reste de la population. « ...Il est temps d’accélérer ce qui est inexorable, de prendre notre place et d’en donner une à chacun. C’est bien ce que tu souhaites aussi Inès ?

— Oui, fit-elle en riant. Fini les puces ! »

Elle retira la puce mal fixée à son bras, et l’écrasa sous son pied.

Priam, souleva un drap immense pour présenter le gâteau à sa sœur et dévoila une flopée d’armes diverses comme je n’en avais plus vu depuis notre assaut d’il y a dix-neuf ans.

« Bon anniversaire petite sœur ! »

Fin.

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