Chapitre 4 : La proposition

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Quelques soucis d'espaces entre les mots. C'est sû à un changement de version (temporaire) de Word. ous pouvez ignorer ces coquilles :). Bonne lecture.

Le lundi vingt-trois juin 2132, je reçus un coup de téléphone de l'Etat major de l'armée des Nations Unies.

— Allo ?

— Monsieur Saliba ?

— Oui c'est lui-même, que puis-je pour vous ?

— Je suis le commandant Larry Greene des Nations Unies. Je souhaite m'entretenir avec vous d'un projet d'une importance capitale.

— « D'une importance capitale ? » je reconnais bien là les mots d'un officier, répondis-je. Vous parlez sans doute du programme Vernes non ?

— Affirmatif, nous avons besoin des meilleurs éléments pour ce programme, et c'est la raison de mon appel.

— Bien, je vous écoute.

— Vous n'êtes pas sans savoir la réussite de la mission menée par Vernes II ces cinq dernières années. La construction de Vernes III est aujourd'hui terminée. L'objectif est cette fois d'embarquer un voyageur à l'intérieur du vaisseau.

— Un voyageur ? Êtes-vous certain de vouloir envoyer un Homme à l'intérieur d'un trou noir ? Quel effet souhaitez-vous en tirer, mis à part de le tuer éventuellement ?

— Vous savez comme moi que c’est un sujet maîtrisé. Si vous ne le savez pas, on vous en fournira les preuves professeur.Il s’agit là d’une occasion unique d’être un pionner, le premier explorateur du temps. C’est une étape importante pour l’humanité.

— Je ne doute absolument pas de votre démarche humaniste …

— Monsieur Saliba, vous connaissez la crise mondiale sévissant actuellement. Parmi les avantages immenses qu’une telle exploration pourrait nous apporter, il n’est nul doute que l’observation du futur nous permettrait de tirer des enseignements des actes du présent et de rétablir la paix rapidement. C’est l’un des objectifs du programme Vernes.

— Bien sûr, « la paix ». Sauf votre respect commandant, avez-vous noté ce détail que nous ne sommes pas capable de revenir dans le passé ? Comment espérez-vous récupérer une quelconque information de cette personne, en admettant la réussite du projet ?

— ...

— Allo ? Commandant Greene ?

— ...

— Vous jouez avec des choses qui vous dépassent monsieur Greene. Nous allons terminer cet entretien. Au revoir.

— Monsieur Saliba, je souhaite vous rencontrer pour un entretien. Cela ne vous engage en rien, nous avons tout prévu pour vous libérer le temps nécessaire et prendre vos frais de déplacement à notre charge.

— Merci mais je ne pense pas que cela soit nécessaire.

— Si vous n'êtes pas d'accord avec ce projet, ce sera l'occasion de nous faire part de votre avis sur le sujet. Nous ne voulons négliger aucune piste. Votre avis, même contradictoire est important pour nous.

— …

— …

— C’est d’accord, lançai-je, me surprenant moi-même »

Ce commandant Greene n'était pas le militaire demeuré que j'avais imaginé, il a su m'attaquer avec le bon angle, par là ou j'étais vulnérable.

« Bien, je vous envoie les billets d'avion à votre domicile. Une fois à New York, vous serez pris en charge jusqu'au siège des Nations Unies. Le déplacement est prévu jeudi. Je vous verrai vendredi. A vendredi monsieur Saliba.

— A vendredi commandant. »

Tel un démarcheur intrusif, ce commandant avait mis le pied dans la porte et avait réussi à ouvrir une brèche dans ma défense en me faisant accepter ce rendez-vous. Je consolai mon ego en regardant le bon coté des choses, mettant en valeur l’intérêt d’un voyage gratuit qui me sortirait de mon quotidien.

Je me rendais donc à New York jeudi 26 juin. Je fis escale à l'Hôtel United Nations dans le quartier des affaires de Midtown East. Vendredi matin, un transport individuel m'attendait devant l'hôtel pour m'amener rencontrer Greene. Le pilote automatique m’emmena en dehors de la ville. Nous passâmes devant l'ancien siège des Nations Unies, aujourd'hui vendu à une entreprise de recherche en biologie. Je n'ai passé qu'une vingtaine de minutes à l'arrière de la voiture avant d'être déposé devant le complexe militaire, quartier général de l'ONU. Des soldats patrouillaient devant l'entrée du bâtiment. Puis, quand j'ai posé le pied dehors, une jeune femme était là, raide, devant moi. Je ne l'avais pas vue approcher bien qu'elle fût escortée par deux autres soldats. Elle était vêtue d'un tailleur militaire et ses cheveux roux semblaient avoir été égalisés au taille-haie ce qui renforçait, en plus de sa posture, une impression de rigueur des plus strictes. Les petites rousseurs parsemant le dessus de son nez et le dessous de ses yeux étaient les seuls signes d'irrégularité venant entacher la perfection de sa droiture.

— Monsieur Saliba, enchantée de vous rencontrer, lieutenant Kristen Munroe de l'a...

— L'armée des Nations Unies oui. Répondis-je avec le sourire. Je commence à me demander s'il reste des diplomates dans votre organisation.

— Je vois que les serviteurs de la paix, les médiateurs des conflits mondiaux ne vous sont pas en odeur de sainteté. Il me semble…

— Et c'est avec votre joli minois que vous attendrissez les plus durs chefs militaires sans doute.

Je me sentais d'humeur taquine. Sachant pertinemment que leur mission ne m'intéressait pas, je me suis laissé emporter par l'ivresse qu'apportait le pouvoir de n'avoir pas de comptes à rendre.

— Monsieur, j'espère que votre impertinence ne voile pas votre sens du jugement. Pendant que vous vous amusez à lancer vos réparties sexistes, des gens travaillent jour et nuit à faire cesser ces conflits. Suivez-moi je vous prie.

Je la suivis sans piper mot, elle s'était montrée sûre d'elle et dominatrice. « Ma petite Munroe, je suis sûr que ton autorité n'en serait que renforcée si tu ne portais qu'une paire de bottes en cuir ! » pensai-je. Je n'ai pas trouvé d'utilité à en rajouter, happé par mes pensées. Nous traversâmes une entrée de bunker pour arriver dans un bureau sans fenêtres. Une dizaine de personnes semblaient assister à un cours. Je m'apprêtais à entrer spontanément quand un militaire cinquantenaire aux cheveux gris et rasés droits me bloqua l'entrée du bureau. J'ai senti à son sourire qu'on allait encore me donner du « Monsieur Saliba ».

— Monsieur Saliba !

— Et bien on dirait que je suis célèbre dans votre bâtiment. Sans doute êtes-vous férus de mathématiques par chez vous ?

— Bien ! Vous êtes de meilleure humeur qu'au téléphone, répondit celui que je compris être le commandant Greene. Suivez-moi.

Qu'est-ce que c'est que cette manie de trimballer les invités partout. Ne serait-ce pas plus simple de réunir toutes les personnes qui souhaitent me rencontrer dans une seule pièce et de m'y amener directement ? Je le suivis malgré tout en répondant :

— C'est que j'attends mon week-end avec impatience commandant.

Il ne répondit rien. Je sentis que cette remarque était de trop et qu'elle était sans doute déplacée à une heure où les travailleurs disposant ne serait-ce que d’une journée de week-end étaient rares.

La rouquine et le gradé m'amenèrent dans une petite salle pour que nous discutions au calme. J'eus le temps d'imaginer quel pourrait être leur petit numéro manipulateur. Sans doute allaient-ils jouer aux gentils et méchants militaires, allaient-ils chercher, dans mes contradictions, à être systématiquement d'accord avec moi. Puis ils me flatteraient et me prouveraient ô combien je suis important et précieux. Enfin, ils m'expliqueraient que suis un type bien pour activer ce phénomène effroyable de dissonance cognitive si bien connu en psychologie et qui me pousserait à agir dans ce sens que je suis un type bien, puisqu'on m’en a convaincu. Enfin, ils tenteraient un rapprochementaffectif imparable pour casser cette solennité que je n'aurais eu aucun remord à repousser. Un cocktail détonnant de flatteries, d'enrobage et de sentiments culpabilisateurs qui me ferait dire oui à n'importe quoi !

Greene prit la parole.

— Merci de vous être déplacé monsieur Saliba. Le lieutenant Munroe et moi-même tenions à vous rencontrer pour vous parler du programme Vernes. J'ai cru comprendre lors de notre entretien téléphonique que vous n'approuvez pas l'idée d'observer notre futur ?

— Ce n'est pas tellement que je n'approuve pas le fait d'observer le futur, c'est surtout que je ne comprends pas comment en revenir.

— Monsieur Saliba, les progrès de l'humanité ont été considérables ces dernières décennies. Et il est certain que le développement de nouvelles technologies de voyages temporels n'est qu'une question de temps. A l'heure actuelle, nos scientifiques travaillent sur un prototype de machine à voyager dans le temps, y compris dans le passé. Selon nos estimations, ces recherchesréquisitionneront les cinquante années à venir. Vous comprendrez que nous ne pouvons pas attendre une telle durée pour agir. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons dès à présent envoyer un explorateur à une date avancée d'un siècle dans futur, là où le développement d'une machine permettant de revenir sera terminé.

— Vous êtes incroyables ! Vous voulez envoyer un homme loin de chez lui, probablement à la mort, sans même savoir comment le faire rentrer ? La stratégie du sacrifice est bien militaire.

Munroe prit la parole :

— Professeur Saliba, je me rends bien compte de votre réticence, et de votre manque de confiance. Je ne peux pas vous en vouloir, dans l’histoire, l’armée n’a pas toujours été un exemple. Mais pensez-vous réellement que nous aurions un intérêt quelconque à envoyer une ou plusieurs personnes à la mort, ainsi qu’un véhicule de plusieurs centaines de milliards de dollars ? Neil Armstrong est revenu sain et sauf de son voyage, tout comme Vernes II est revenu sur Terre parfaitement intègre. Rien n’indique qu’un humain à son bord aurait péri. Je ne vais pas vous mentir, le risque nul n’existe pas. Il y a une probabilité, certes faible mais pas inexistante, que quelque chose se passe mal. C’est à vous de prendre en compte la possibilité que vous ne reveniez pas. C’est aussi à vous de prendre en compte que votre nom noircira les pages des livres d’histoires, ornera les devantures d’écoles, baptisera des rues. Sans compter l’intérêt scientifique sans précédent que cette mission constitue pour vous.

— Et pour vous …

— Oui bien sûr, mais notre intérêt, c’est aussi celui du monde. »

Elle ouvrit un rapport tamponné confidentiel.

« Voici des photos prises la semaine dernière, le mois dernier, et tous les jours depuis des années aux quatre coins du monde. Cet enfant est mort lapidé par les membres d'une micro société vivant en autarcie et faisant justice elle-même. Ils ont une liberté de culte leur permettant meurtre et barbarie. Ces cadavres ont été empilés suite à un conflit entre différents groupes anarchistes qui n'étaient pas d'accord sur la manière dont la société devait s'effondrer. En avez-vous entendu parler ? Non, tous ces faits sont gardés secrets sous couvert de quelques conflits mondiaux séculaires, pour ne pas faire naître la panique. Voici les chiffres de suicides à Paris, Mumbai, Singapour, Washington, Casablanca, Londres etc. Ils ont été multipliés par mille ces trente dernières années. La mortalité est tellement importante chez les jeunes adultes que la population mondiale décroit à un rythme inquiétant. Allez-vous continuer à prendre le cancer qui ronge notre société à la légère ?

— C'est votre société capitaliste le cancer !

— ... Et nous ferons le nécessaire, monsieur Saliba, pour modifier cette société au mieux afin de préserver notre espèce. Grâce à votre aide.

— Mon aide ? Je ne suis qu'un mathématicien, et de plus, mon rejet viscéral des causes de l'armée m'empêcherait probablement d'entreprendre quoi que ce soit avec vous.

— Je comprends monsieur Saliba, mais vous êtes une personne brillante, et nous avons besoin de personnes brillantes pour ce genre de projet. De plus c'est justement cette attitude entière, cet esprit libre, ce regard sans influence sur le monde que nous recherchons. Si nous envoyons un militaire, il regardera uniquement là où nous lui auront dit de regarder… Je vais être franche avec vous, nous avons déjà envoyé une personne dans le futur, un militaire, c’est complètement confidentiel. Son rapport ne nous apporte pas suffisamment de données pour comprendre comment agir aujourd’hui. Nous l’avonsprobablementenvoyé trop tôt dans le futur. Ce qui est sûr c’est que c'est d'un esprit libre comme le vôtre dont nous avons besoin. Personne mieux que vous ne sera plus à même d'observer notre futur avec un œil affuté. Personne mieux que vous ne saura remettre en question les fondements d’une société malade avec une approche sûre et scientifique. Bordel Ameer - elle posa sa main sur la mienne - tu as fait un modèle géométrique à vingt-deux dimensions ! Ça n’est pas rienvingt-deux dimensions ! C'est du génie à l'état pur, l'humanité a besoin de toi !Nous avons besoin du professeur Saliba ! Et c’est la raison pour laquelle nous insistons lourdement.

C'est vingt et une virgule sept dimensions mais elle n'avait pas tort ! Elle m’était apparue particulièrement charmante après avoir déclamé cette vérité.

— ...

— Et vous ne serez pas seul.

— En admettant que j'accepte, à quel type de compensation puis je prétendre ?

Le commandant Greene reprit les rennes :

— Pour le premier voyageur du temps, un explorateur pionnier qui s’est risqué vers l’inconnu, le potentiel sauveur d’une société malade ? Voyons monsieur Saliba, soyez sûr que vous et votre famille ne manquerez plus jamais de rien.

— Je n'ai pas de famille, vous le savez. C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles vous m'avez choisi non ?

— En effet, mais il sera encore temps d'en fonder une à votre retour.

Je réfléchissais encore à une réponse cinglante, légèrement perturbé par le regard de Munroe quand Greene reprit :

— Venez, nous allons vous présenter les autres explorateurs.

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