Chapitre 4- partie 3

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Kate se sentait mal à l’aise. Elle ne savait quoi dire, en ces circonstances. Fallait-il parler de Grand-Père ? Et pour dire quoi ?

« Oui, votre frère que vous n’avez pas vu depuis au moins dix-sept ans sinon plus vient d'être explosé avec tout le parlement dans un attentat tragique. ». Du génie...

Mais était-elle seulement au courant ? Forcément, sinon comment se faisait-il qu’elle ait été informée de sa venue ! Mais était-ce seulement sûr ? Peut-être qu’elle devrait essayer de lui en toucher un mot ? Non, elle avait bien dit qu’elle vivrait ici à partir de maintenant, bien sûr qu’elle savait pourquoi elle était ici ! Et ce silence qui s’installait ! Elle se devait de dire quelque chose, au moins par politesse ! Elle n’avait pas pris des cours de bonnes manières pendant toutes ces années pour en arriver là enfin !

« Emmelia… ma tante…

-Chuuuuuuuuuuuuuuuuuut », chuchotta Emmelia, « Il ne faut pas parler avant d’avoir atteint ta chambre, tu vas les réveiller sinon. »

Kate déglutit. Elle se tut, attendant avec anticipation.

Enfin, après un temps qui lui avait paru infini, plusieurs couloirs aux fenêtres donnant sur la nuit noire traversés et un autre escalier gravi, elles atteignirent enfin la chambre que cherchait Emmelia. La femme regarda dans les poches de son veston, pour enfin en sortir une grosse clé. Elle la passa dans la serrure et, avant d’ouvrir la porte, intima à Kate de fermer les yeux.

La jeune fille s’exécuta.

Elle entendit le cliquetis d’un verrou qu’on débloque, le grincement d’une porte qu’on ouvre, le « tic » sec d’un interrupteur qu’on presse.

Ses paupières se parèrent d’un voile orangé.

« Il y a donc l’électricité ici ? » songea Kate impressionnée.

Avant qu’elle n’eut le temps d’y réfléchir plus, elle sentit sa grand-tante la pousser à travers la porte avec douceur.

Elle avança de quelques pas, pénétrant la chambre illuminée.

« Et…..Ouvre les yeux ! »

Devant Kate, un tourbillon chatoyant de bleu et de vert dans une jolie chambre, exigüe mais accueillante.

La majeure partie de l’espace était occupée par un immense lit de chêne verni, avec un lourd édredon dans une housse de satin bleu sur lequel reposait une fourrure blanche et soyeuse, et des oreillers de coton immaculé.

Les murs étaient tapissés élégamment d’un papier bleu brillant sous la lumière chaleureuse de l’ampoule électrique. D’épais rideaux de velours vert masquaient la fenêtre, isolant du froid mordant au-dehors, et tombaient lourdement sur le parquet de pin verni. En face du lit, une console ancienne, sur laquelle reposaient des piles de livres aux couvertures et intitulés austères ainsi qu’une horloge sous globe, aux rouages dorés étincelants. Au-dessus, un tableau représentant une scène maritime, un voilier échoué sur son flanc sur une dune de sable, rappelait les œuvres de quelques peintres Hollandais.

« Alors ? lança timidement Emmelia.

Kate se retourna « Alors ?

C’est……. C’est magnifique ! »

Emmelia soupira de soulagement, et sourit. Elle mit ses mains sur les épaules de Kate.

« Ma chérie….. tu n’as pas idée à quel point je suis heureuse de te voir. Je sais que ce n’est pas facile pour toi, mais je pense qu’il faut essayer de tirer le meilleur de cette situation, et d’essayer de nous reconstruire après ce qu’il s’est passé, dit elle en enlaçant la jeune fille.

Bien, repose toi maintenant ! Afin d'être en pleine forme demain ! »

Elle tourna les talons, déposant au passage la clé qui, comme Kate pouvait maintenant le voir, s’ornait d’un pompon bleu, et sortit de la chambre, refermant doucement la porte derrière elle.

Kate regarda autour d’elle. Elle se défit de son lourd manteau de peau, qu’elle avait gardé sur elle durant toute la visite de l’hôtel sans penser à le retirer, et qui maintenant l’étouffait plus qu’autre chose. Apercevant une chaise dans un coin, elle s’en délesta avec soulagement.

Elle s’assit sur le lit pour faire le point.

Alors.

Elle se trouvait chez une parente dont elle n'avait jamais entendu parler un mois auparavant, la sœur de son grand-père décédé avec qui elle avait passé toute sa vie, à des milliers de s de chez elle. Enfin, son ancien chez elle, parce que maintenant, chez elle, c’était ici.

Un hôtel perdu au milieu d’un désert de neige et de glace.

Elle sentit un poid se former sur sa poitrine . L’avenir aurait dû lui paraître moins incertain, maintenant qu’elle venait de retrouver un semblant de famille, et pourtant, elle ne put s’empêcher de ressentir un profond sentiment de détresse.

On frappa à la porte. Kate sursauta, et se pressa d’aller ouvrir. Piotr entra, il avait retiré sa chapka, et ne portait maintenant qu’une chemise de coton, fermée jusqu'au cou, mince mais résistante.

Il laissa tomber la lourde malle de la jeune fille avec soulagement, et s’étira avec un craquement sec.

Il balaya la pièce du regard.

« Ça vous plaît ?

- Je vous demande pardon ?

- La chambre. Ça vous plaît ? » redemanda le colosse

« Ah ! Oui ! Beaucoup ! » s’empressa de répondre Kate.

Piotr sourit.

« Je suis content. Ça fait un bout de temps qu’on attendait votre visite, alors Emmelia a voulu faire au mieux pour que vous vous sentiez chez vous ! Enfin, vous êtes arrivée plus vite que prévu alors on a été pris de court, mais je pense qu’on s’en est pas mal sorti tout compte fait ! »

Il se dirigea vers la porte. Alors qu’il s’apprêtait à sortir, il se tourna vers la jeune fille, un air triste sur le visage.

« Je m’excuse. Pour aujourd’hui. De ne pas avoir réussi à l’empêcher de vous faire du mal. »

Puis il claqua la porte derrière lui.

Kate soupira. Elle avait presque oublié l’incident qui avait eu lieu plus tôt dans la journée.

Le musicien, son haleine fétide et ses doigts crochus, parcourant son corps comme des araignées blafardes. Elle frémit en y repensant.

Elle s’approcha de sa malle, essayant tant bien que mal de mettre un peu d’ordre dans ses affaires. À la vue de sa chemise de nuit, elle réalisa à quel point le voyage l’avait exténuée.

Elle se changea, repensant à ce que Piotr venait de dire. Quelque chose l’intrigua.

Qu’est-ce qu’il avait voulu dire par « Vous êtes arrivée plus vite que prévu » ? Au contraire, L’Artic Express avait eu plusieurs jours de retard. Cela voulait-il dire que « un bout de temps » ne faisait pas juste référence au décès de Grand-Père ? Avaient-ils prévu de la faire venir ici avant, pas juste en cas de décès ? Tant de questions sans réponses !

Kate se mit au lit, le cerveau bouillonnant de questions. Elle ferma les yeux, ruminant jusqu’à n’en plus pouvoir, jusqu’à ce que le sommeil l’emporte

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