II

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Une nuit comme une autre.

Pierre était dans son lit à baldaquin, emmitouflé dans des couvertures recouvertes de personnages de mangas. Sangoku, Ichigo ou encore Meliodas y étaient représentés. Il avait toujours adoré les mangas et rêvé d’être comme les héros combattant le Mal.

L’orphelin regardait le plafond de sa chambre sombre où aucun trait de lumière ne filtrait des volets, imaginant combattre les hordes sanguinaires de Freezer, les monstres Hollows ou encore les démons tristement appelés les 10 Commandements. Mais ces images héroïques et épiques ne tardaient pas à s’étioler et à disparaître dans une brume de tristesse palpable, une atmosphère lourde dans laquelle Pierre se perdait, tentant de comprendre pourquoi ses parents n’étaient plus avec lui.

Il pensa alors à une chose : le médecin qui s’occupait de lui avait dit que sa mère et son père était partis pour un monde meilleur, qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? S’ils étaient ailleurs, alors peut-être pourrait-il les retrouver et les ramener ici, dans son monde, leur monde.

Il se dit en son for intérieur :

  • Je dois trouver un moyen de les retrouver et de les ramener. Ce monde doit forcément être accessible, on arrive bien à aller sur la Lune.

C’est sur cette pensée sélénite qu’un bruit sourd se fit entendre. Un craquètement presque inaudible sortit de la grande armoire siégeant au bout de sa chambre, une armoire cramoisie aux enluminures évoquant la Nature. La porte venait de bouger, Pierre en était sûr. Tétanisé et effrayé, il remonta sa couverture jusqu’au-dessus de sa tête et attendit.

La poignée tourna doucement et la porte s’ouvrit tout aussi lentement. Camouflé, Pierre fermait également les yeux. Qu’allait-il découvrir s’il décidait d’ôter les draps ? Un monstre ? Un voleur ? Après quelques secondes qui lui paraissaient une éternité, une voix douce et enfantine déclara mélodiquement :

  • Ne crains rien. Je ne te veux aucun mal, tu peux ouvrir les yeux.

La peur comme habit de sensations, Pierre ne savait pas quoi faire. Tout son être tremblait mais la délicatesse et la bienveillance que renvoyait la voix étaient telles qu’il ne put faire autrement qu’ouvrir tout doucement les yeux et retirer sa protection textile. Il vit se profiler progressivement une petite silhouette de forme humaine. C’était un petit garçon qui ne semblait pas plus âgé que lui et qui avait les cheveux noirs, assez courts. Un halo vaporeux l’entourait.

Il observait Pierre – qui n’osait pas ouvrir la bouche - d’une manière très naturelle mais aussi très rassurante. Ses yeux émeraudes étincelants hypnotisaient l’enfant, un sourire chaleureux se dessinant sur ses lèvres.

Pierre sourit en retour et toute tension l’abandonna. Il sentit sa peur fondre comme neige au soleil.

Le nouvel arrivant dit alors :

  • Je suis désolé si je t’ai fait peur. J’ai pensé que l’armoire était le meilleur endroit d’où venir pour te rendre visite. J’ai senti que tu avais besoin de moi.

Pierre ne comprenait pas ce qu’il se passait. Le garçon parla à nouveau :

  • Je sais, tu dois te demander qui je suis, mais surtout d’où je viens. Ne t’inquiète pas, tu le sauras en temps voulu. Pour le moment, tu devrais me suivre. J’ai quelque chose à te montrer et je pense que ça pourrait te mener à ce que tu cherches.

Le garçon pointa son doigt vers l’armoire entrouverte et Pierre n’en crut pas ses oreilles. Il finit tout de même par ouvrir la bouche et lui demanda, la gorge sèche :

  • Mais c’est une armoire ! Où veux-tu m’emmener ? Je ne te connais même pas !
  • Ne t’inquiètes pas. Tu dois me faire confiance, tu comprendras dans quelques instants. Viens avec moi.

Pierre était perdu, complètement confus. Il ne savait pas s’il devait croire cet enfant qu’il n’avait jamais vu auparavant, mais quelque chose en lui le poussait à le suivre pour découvrir ce qu’il comptait lui montrer. Son instinct lui intimait de faire confiance.

  • D’accord, je te suis. Montre-moi.
  • Excellent ! Allons-y alors ! C’est par là.

Tous deux se dirigèrent alors vers le meuble, mais au moment où le garçon se retourna, Pierre vit que quelque chose n’allait pas. A la base de son dos, il y avait une queue touffue qui ressemblait à celle d’un singe, celle-ci remuant doucement. Décidemment, tout était vraiment très étrange chez ce garçon. Intrigué et ne pensant à rien d’autre que satisfaire sa curiosité, il ne dit rien et suivit ce mystérieux inconnu.

  • Donne-moi la main, il faut que l’on passe en même temps pour que tu puisses venir.
  • D’accord, déglutit Pierre.

Il se sentit alors happé, comme si on lui avait accroché une corde au niveau de la taille et qu’on l’avait tiré d’un coup sec. Cela ne dura qu’une fraction de seconde et, l’instant d’après, ils n’étaient plus du tout au même endroit.

***********

Pierre était abasourdi, le paysage qui s’offrait à lui était tout bonnement magnifique. Une immense forêt luxuriante aux arbres bien verts et fleuris, pleine d’animaux calmes et dociles se dessinait devant lui. Des chevaux galopaient fièrement laissant des trainées de poussières sur leur passage. La plaine vallonnée aimantait son regard, l’herbe s’étalait à perte de vue.

Le soleil inondait de ses plus beaux rayons ce paysage sublime et irréel. Il se sentait quelque peu déboussolé à la vue de ce lieu, néanmoins il s’y sentait bien, apaisé. L’air était pur et le ciel, rosé, regorgeait de volatiles en tout genre. La tranquillité du lieu régit par le piaillement des oiseaux virevoltants le cueillit et un sourire immédiat commença à étirer ses lèvres. Il avait même oublié le garçon qui l’avait amené ici, perdu dans l’admiration de chaque parcelle de ce monde merveilleux et idyllique. Celui qui l’avait attiré ici lui tapota l’épaule :

  • Il ne faut pas que tu te perdes dans l’admiration du lieu Pierre, je suis venu à toi parce que tu avais besoin de moi. Il faut que tu comprennes ce qui est arrivé à tes parents.
  • Mais je ne comprends pas, pesta-t-il.
  • Regarde bien, lui répondit son nouvel ami.

Le lieu et l’atmosphère se tordit, laissant place à une grande route entourée d’arbres d’où sourdait un bruit oppressant. Pierre revit la scène de l’accident, mais il était hors de la voiture. Il entendit le choc et le métal s’envoler dans les airs. Les sirènes des secours lui vrillaient les tympans. Ils arrivaient très vite, sans doute appelés par des passants témoins de la tragédie. Sans trop savoir comment, il flottait dans l’air et se rapprocha de la scène, toujours tenu par le petit garçon et vit les visages des pompiers qui tentaient d'écarter les portières pour les sortir.

Il apercevait les yeux alertes des sauveteurs, des yeux d’où l’on pouvait voir une tristesse infinie et un malheur naissant. Leurs lèvres étaient comme suspendues dans le temps. C’est là que Pierre comprit, bien malgré lui.

  • Il s’est passé quelque chose d’horrible, commença-t-il à dire.
  • Oui, Pierre, tu commences à comprendre. Tu as le temps ne t’en fais pas, ne brûlons pas les étapes. Tu as passé l’étape du choc, je vais devoir te laisser avaler cette terrible nouvelle et je reviendrai.
  • Promets-le moi, s’il te plait !
  • Oui, promis. Je ne te laisserai pas tout seul.

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