Chapitre 13 - Reconnaissance

2 minutes de lecture

- XIII -

Reconnaissance

Je suis sorti de l’hôpital avec une attelle à l’épaule et un bleu au cœur : l’urgence était canadienne, et j’ai pris le premier avion pour Vancouver.

En arrivant, je suis passé à l’état-civil pour demander un acte de naissance, un formulaire et un renseignement. Puis je suis allé sonner chez Marie, et je lui ai demandé si elle acceptait de recevoir son presque-fils indigne.

Elle m’a fait asseoir au salon en essayant de paraître fâchée, mais j’ai vu dans ses yeux son bonheur de me voir solide sur mes jambes. Le sourire qui brillait dans son regard m’a encouragé à me jeter à l’eau.

Je lui ai demandé pardon pour toutes les horreurs injustes et injustifiées que je lui avais dites à l’hôpital. Je lui ai dit que j’étais fier qu’elle reste dans ma vie au-delà de l’ombre de mon père. Je lui ai dit que j’étais heureux de l’amour et des vacances qu’elle partageait avec mes enfants. Je lui ai dit qu’elle m’avait sauvé la vie en venant bousculer ma passivité et mon défaitisme au fond de mon lit d’hôpital. Je lui ai dit qu’elle m’était précieuse et que pour rien au monde je ne voulais la perdre.

J’avais apparemment franchi un cap ou une péninsule, et j’étais devenu capable d’exprimer mes sentiments. Marie les a reçus plus de Vingt Ans Après son entrée dans ma vie, comme un cadeau qu’elle n’attendait plus.

J’ai sorti de ma poche des papiers tout froissés, et je les ai posés doucement sur la table en lui disant que si elle voulait devenir ma mère, il ne manquait au dossier d’adoption que quelques paperasses et quelques paraphes.

Marie est soudain devenue toute rose et toute estomaquée. Elle a d’abord fait semblant de lire les documents que je lui avais apportés. Mais elle a vite renoncé car l’émotion était trop pressante, trop oppressante. Et elle m’a pris dans ses bras, comme un enfant que je n’étais plus et comme son enfant que j’allais être.

Je devais reprendre l’avion le soir même et nous n’avons pas eu le temps de nous épancher outre mesure. Mais j’ai eu les larmes aux yeux pendant tout le vol. Et Marie était au service des adoptions dès le lendemain matin, plus de deux heures avant l’ouverture.

La procédure fut longue, mais aujourd’hui la Belle Province a remplacé l’Île de Beauté sur mes papiers d’identité. Je suis Alessandro Karenine, fils de Nikolaï Karenine, décédé, et de Marie Bélanger, bien vivante.

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