Chapitre VII, Partie 6 : Première mission à EXODUS

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Dieter se tourna incrédule vers la jeune femme. Gauss. Il avait, bien sûr, déjà entendu ce nom. Les armées régulières de Lazarias'en servaient fréquemment. Il en avait déjà vu en action, mais seulement lors d'exercices. Seulement, ces machines étaient bien moins imposantes que ce monstre de métal.

 -Tu en as déjà entendu parler, je me trompe, demanda Eolia? Tes connaissances en armement et en sciences militaires sont larges, il me semble. Tu sais comment ça fonctionne, non?

 -En effet, répondit Dieter, toujours béat devant le gigantesque canon. Cependant, ceux que j'ai vus étaient autrement plus modestes. Le dernier modèle devait faire maximum dix mètres sur dix, je crois.

Eolia, une nouvelle fois, l'entraîna sur un petit chemin qui montait la colline. Le sentier était assez sinueux et pierreux, les deux militaires manquèrent de tomber à plusieurs reprises. Mais ce fut court, et en quelques minutes, il furent arrivés au sommet de la butte. En plus de l'arme, qui occupait une place conséquente, un batîment héxagonal assez large et monté sur chenilles était également présent. L'endroit grouillait de soldats, de scientifiques et de quelques dignitaires envoyés par le pouvoir. Ceux là devaient probablement vérifier que tout se passe bien.

Dieter se libéra de sa supérieure et se dirigea vers le canon. Il était particulièrement intrigué par ce nouveau modèle, et voulait l'examiner de plus près. Mais plus il s'en rapprochait, plus il appréhendait l'immensité de l'engin. Il faisait, avec ses presque un mètre quatre-vingt, à peine la taille des chenilles transportant le gauss.

 -Dans le canon, là haut, commença-t-il en s'adressant à Eolia, se trouve sûrement déjà un projectile d'une centaine de mètres cube en métal condensé et straboné. L'interieur de ce canon est tapissé de rails electromagnétiques boostés. Le boulet ultra dense est projeté à plusieurs kilomètres dans l'atmosphère, et retombe à pleine vitesse sur sa cible plusieurs kilomètres plus loin. J'ai juste?

Derrière lui, la jeune fille applaudit énergiquement et se rapprocha.

 -On l'a conçu un peu avant ton arrivée. Les Gauss de première génération étaient petits et innéficaces, l'empire les utilisait déjà lui même. Pareil pour les deuxième et troisième génération, ils ont gagné en taille mais pas vraiment en puissance. Les quatrième génération étaient plus intéréssants, on les utilise encore majoritairement aujourd'hui, et les armées de la CMO s'en souviennent encore. Mais avec ce bébé, on entre dans une autre ère...

 -...celle de la destruction et de l'horreur. La guerre s'en charge déjà bien toute seule, et en plus vous lui donnez un coup de pouce en créant ça. Pffff, les mots me manquent pour exprimer ma pensée.

 -Je te l'ai déjà dit, on a pas le temps de faire du sentimentalisme. La hierarchie attend des résultats, et mes hommes attendent des promotions. Tu vas devoir t'y faire, si tu restes parmi nous.

Dieter fronça les sourcils, amèrement ramené à la réalité de sa situation. En effet, il s'était extasié devant la mine d'informations qu'était EXODUS, mais il avait un peu oublié que son nouveau travail était de tirer sur des veuves et des orphelines. Il s'y habituerait, il le savait. Mais il allait devoir s'asseoir sur d'autres principes inculqués par ses parents. 

 -Très bien, lieutenant, cracha-t-il de mauvaise grâce en insistant bien sur le "lieutenant".

Tout deux se dirigèrent vers le centre de commandement mobile. Ces sortes de pièces roulantes étaient très utilisées par l'armée sur les champs de bataille. A l'interieur, on y trouvait une immense table de verre connectée, des postes de télécommunication, des écrans muraux, des câbles et des officiers ainsi que des scientifiques au service de l'armée.

Dieter déambula à l'interieur, jetant un oeil ici et là. Mais il n'eut pas le temps de flâner bien longtemps, bientôt Eolia l'emmena près d'un poste sur lequel se trouvait plusieurs classeurs. Elle en ouvrit un, en sortit deux feuilles et un crayon et les lui tendit.

 -Sous-Lieutenant Dieter, dit-elle solennelement et en prenant une posture grotesque, je vous attribue votre première mission. Rendez vous sur les corps des habitants de ce village et faites quelques relevés.

 -Pourquoi faire, demanda-t-il en prenant le fatras qu'elle lui tendait?

 -On va en avoir besoin pour optimiser la composition de certaines de nos armes. A ce propos...

 -Oui, il y a un problème?

 -Hé bien...les plans que tu as vu la première fois que tu es venu...c'était bien ceux d'armes chimiques...

 -D'a...d'accord, répondit-il feignant le sang-froid, mais qu'est-ce que tu veux que ça me fasse?

 -La dernière fois, quand tu m'en as parlé, j'en ai eu un peu honte, j'ai fait un peu de sentimentalisme. Comme je te l'ai reproché, ce serait hypocrite de ma part d'en faire. Bref, voilà.

Elle était un peu rouge, ce qui contrastait drôlement avec sa courte chevelure bleue. Cette déclaration avait une saveur particulière, pour Dieter. Ce dernier pensait en effet que, peut-être, elle avait des remords. Peut-être avait-elle tenté de cacher ses recherches parce que sa conscience n'approuvait pas la politique de ce pays. C'était le cas apparemment d'ailleurs, mais cet espoir venait de s'envoler. Elle n'était bien qu'un pantin de l'armée comme les autres, et avait juste eu un bref moment d'hésitation. Un peu comme un animal qui renifle sa nourriture avant de se jeter dessus. 

 -Très bien, je comprends, finit-il par répondre après quelques secondes de silence. Je vais aller faire mes relevés, je reviens.

 -Okay...tu...tu me fais ton rapport le plus tôt possible, d'accord?

 -Pas de soucis.

Les papiers ramassés, le jeune garçon sortit du complexe pour faire ce qu'on lui avait demandé. D'un pas lent et traînant, il redescendit la butte vers le village anéanti. Comme on pouvait s'y attendre, Dieter n'était pas particulièrement enjoué à l'idée de tripoter les cadavres de ses anciens amis. Il y retrouverait d'ailleurs sûrement le corps du Doyen décédé. Il imaginait toutes sortes d'horreurs, des membres arrachés, des flaques de sang coagulé. Il secoua la tête pour tout évacuer.

Mais il se retourna à mi-chemin. Sur le côté, quelques scientifiques en blouse blanche installaient le câblage du canon, d'énormes câbles gainés de plastique noir. Dieter pensa que ces installations devaient être très importantes pour le bon fonctionnement du canon.

Un sourire, soudainement, se dessina sur son visage pâle. Il tâta le fourreau de son fleuret du bout des doigts, et une idée lui vint en tête. Après tout, rien ne l'empêchait d'ajouter son petit quelque chose à lui à ce magnifique engin. Les alentours mêmes de la machinerie interne n'étaient pas ou peu surveillés, il l'avait vu en arrivant. Il n'aurait aucun mal à y mettre un peu de bazar en revenant de ses relevés morbides.

 -Un Gauss de quatrième génération, n'est-ce pas? On va bien voir ce qu'il vaut. David contre Goliath, ça risque d'être intéressant.

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