Chapitre V, partie 2 : Les premiers jours

5 minutes de lecture

Je jetai un oeil en arrière. De l'exterieur, ce sas était finalement plutôt petit. Il pouvait contenir au plus cinq personnes, selon moi, et cinq personnes pas trop rembourrées. Il devait avoir été fait pour des groupes de scientifiques comme celui d'Eolia, qui comptait six membres. Enfin, sept à présent.

En effet, ça faisait déjà trois jours que j'avais été intégré par le grand-lieutenant Tadéo à l'équipe du groupe de recherche EXODUS, sur demande spéciale d'Eolia. Malgré cela, l'enquête sur la mort du garde civil me visait toujours, bien que je ne fusse que peux suspecté. Il restait probablement des indices, j'avais quand même perdu beaucoup de sang à ce moment là. Tout plein de jolies traces d'ADN que les scientifiques de la garde allaient se faire un plaisir d'analyser en long, en large, et sûrement même en travers. Et le fait que je sois sous la responsabilité d'Eolia ne m'en protégeait pas. Heureusement pour moi qu'elle s'était évanouie.

Eolia, elle, s'était retournée et recoiffée. Le passage à la désinfection n'avait en effet pas laissé sa coiffure indemne, et elle y mettait assez de soin pour vouloir la garder ainsi même au travail. Elle appuya ensuite sur un interrupteur derrière la porte. Au plafond, sur le sol et même sur les murs, des néaons bleutés s'allumaient les uns après les autres. Le laboratoire, toujours aussi blanc, arborait ainsi une autre apparence, plus chaleureuse peut-être. Ils devaient servir d'éclairage ultra-violets, je n'avais pas trop d'idées à quoi ils pouvaient servir placés si loin des paillasses mais après tout, je n'avais jamais travaillé dans ce genre d'endroit.

Le labo, lui, était organisé assez simplement. Pas très grand, les murs parcourus de vitrines de verres abritant des produits étranges et colorés, une dizaine de paillasses alignées en trois rangées distinctes et apparemment un débarras. Celui ci devait être utilisé pour ranger la verrerie.

Eolia me tendit une liste à bout de bras. Je la pris, et pus lire dessus le materiel necessaire à la préparation : burettes, erlenmeyers, becher de prélèvement, pipettes graduées et jaugées. 9a allait à peu près, j'entrevoyais la tête de ce que je devais chercher. J'avais l'habitude de regarder mon père faire des experiences quand j'étais petit. Il nous montrait toujours des petites choses rigolotes à moi et mes frères et soeur, comme de la fumée colorée ou des arômes de banane.

Mais sur la liste figuraient également trois produits nécessaires à la manipulation : de l'eau, en bonne quantité et chauffée à bonne température, ainsi que de l'acétate de plomb, du dioxyde de soufre et de l'acide fulminique. Si l'eau en elle-même n'était pas dangereuse, je savais pertinemment que les trois autres produits étaient parfaitement toxiques, et potentiellement...mortels.

Je tournai le regard vers Eolia, qui me fit signe de me depêcher. Je devais installer le matériel, apparemment pour fabriquer une arme chimique, ou tout du moins un bon gros insecticide bien meurtrier. Plus rien ne m'etonnait de ce pays de cinglés, mais je me demandais quand même contre qui étaient préparés ces produits. Que préparaient encore ces enflures de militaires? Des représailles à Pharos? Un avertissement pour la Confédération des Monarchies Orientales? Ou peut-être tout simplement un moyen de pression destinés à tout les opposants au régime?

Peu m'importait ces histoires de politique, en réalité, mais je supportais mal que l'on fasse souffrir des gens par le gaz et les produits chimiques. Une arme de lâche, c'était bien tout ce que c'était.

Enfin, c'était mon boulot à présent. Au pire, si j'étais invité au theâtre des opérations, je trouverais un moyen de ficher le souk dans leur organisation. Sans vouloir me vanter, j'étais plutôt malin et ingénieux quand il s'agissait de mettre le bazar. Et puis, cet endroit pourrait me servir de temps à autre si je veux me faire une reserve de soporifiques. Ca servait toujours, des soporifiques.

Je continuais de penser tout en installant la verrerie. Eolia, elle, préparait les compteurs, ordinateurs et autres appareils de mesures que j'avais bien du mal à comprendre. Elle ne me laissait plus y toucher depuis que j'avais failli déclencher les systèmes d'alarmes du batîment en tentant d'acceder à l'antivirus. Diable, 415 ans et pas fichu d'apprendre à se servir d'une machine aussi simple que celle ci. Ca valait bien le coup d'avoir vécu jusqu'à maintenant.

Je m'atelais enfin à la dilution des produits dans l'eau. La hotte au dessus de moi avait interêt à être plutôt efficace, parce que sinon, malgré le masque que je portais et la combinaison, je risquais fortement de finir empoisonner à l'acetate de plomb gazeux. Je versai donc dans le bocal correspondant l'acetate et rajoutai de l'eau, et fis de même pour le dioxyde de soufre. Tout était prêt pour Eolia, les deux produits étaient en solution dans deux fioles jaugées et les sels d'acide  fulminique trônaient au milieu de la paillasse.

Je me rapprochai d'elle afin de pouvoir assister un minimum au procédé. Je la vis prendre un à un les differentes solutions, noter les quantités utilisées sur un petit carnet, verser l'acide à petites doses dans ne coupelle de verre et allumer le réchaud. Lorsqu'elle versa les sels fulminates dans la fiole, une fumée grise s'en échappat et fut aspirée dans la hotte. Elle posa le tout sur la chaufferette et laissa le tout mijoter. Raconté comme ça, on aurait vraiment dit une banale recette de cuisine. Mais j'avais 415 ans. 415 ans, c'est largement suffisant pour se renseigner sur un nombre conséquent de sujets variés. Les poisons ne me fascinaient pas, mais vu la quantité d'acide fulminique qu'elle avait versé dans cette fiole, le mélange risque d'être sacrément explosif.

 -Alors dis moi, Diet'...si c'est ton vrai prénom, parce qu'après tout, j'en sais pas grand chose.

Le fait de l'entendre parler après avoir préparé tout cet attirail dans le silence me surprit un peu. Je pouvais la jouer franco et lui dire mon vrai nom. Après tout, qui allait faire le parallèle avec un prince déchut mort depuis quatre siècles...

 -Eh bien justement, par rapport à ça...mon vrai nom, c'est plutôt Dieter. Voilà. Dieter.

 -Dieter...Dieter...tiens, c'est pas le nom d'un ancien prince lazarien ça, par hasard?

Eh bien voilà, grillé. Sur toute la planète, il n'y avait probablement qu'une seule personne qui aurait fait le lien entre un clochard mal fagoté habillé comme l'as de pique et un prince déchut mort depuis quatre siècles. Et cette personne se trouvait là, en face de moi. 

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Guillaume Conpte ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0