Chapitre 14 - Conclusions préliminaires

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Penché au-dessus d’un calepin à spirales, la mine de son stylo glissait avec frénésie sur le papier, Mike compilait ses notes avec la crainte obsédante d’oublier un élément :

« Fonctionnement général des Niamuh.

J’ai pu constater un fonctionnement automatique résiduel qui leur permet, sans ordre, de réaliser quelques actions de leur propre chef, avant de se mettre en veille. L’imbrication des émotions dans le système a été faite de telle sorte que certains actes sont directement associés à une conséquence émotionnelle (dans le cas de Danielle, le fait de s’être soulagée au milieu du salon avait fait passer son moral sous la barre des zéro…). Il est envisageable que le système ait inclus plusieurs codes sociaux limitatifs expliquant des réactions automatiques, assimilables à un réel esprit pensant : le principe de monogamie provoquant, en cas de trahison, un sentiment de jalousie ou de colère, une forme d’instinct de survie engendrant des réactions de peur en cas de danger, etc.

Toutefois, il s'agit d’actes automatiques induits par un process, c’est-à-dire « non ordonnés » par le gestionnaire. Ils sont conçus pour fonctionner selon un protocole logique du programme (action – émotions – réactions). Pour le cas de Sarah, l’acte de suicide étant dicté par le gestionnaire,  celui-ci est devenu prioritaire, car contenant le sous-système de réaction basale. Hors protocole émotionnel automatique, cela explique qu’il n’y a eu aucune réticence ni aucune peur.

Ainsi les actes peuvent être dictés par le gestionnaire, sans la moindre opposition des Niamuh.

Les émotions sont une conséquence des actions automatiques ou des vécus des Niamuh, mais il est possible de les contrecarrer ou les faire taire, tant que des ordres sont en cours.

Etape de création / duplication.

Deux phénomènes ont été observés :

1/ La création même de la matière a répondu aux théories de physique : le mouvement contraire des éléments atomiques électriques, en se percutant, ont donné consistance à l’inconsistant. L’origine du phénomène n’a toutefois pas pu être identifiée.

2/ Une lueur étrange a semblé donner vie à la matière. Il est trop tôt pour parler… « d’âme », mais c’est pourtant ce à quoi cela m’a fait penser. Des filaments de couleur étaient reliés au Niamuh en cours de constitution et provenant de… »

Mike raya les derniers mots et grogna. Incapable de transcrire clairement ces résultats. Il se sentait dépassé par sa découverte. D’où venaient ces fichus filaments ? De partout. De nulle part. Tout autour d’elle, comme l’apparition divine du Saint Esprit, version arc-en-ciel…

« Mon pauvre Mike, ton raisonnement est très scientifique… » se moqua t-il.

Pendant qu'il réfléchissait à de meilleures formulations, l’une des filles patientait tranquillement dans son placard, au milieu des piles de linge propre. La seconde était tournée vers le mur, près de la porte, dans une catalepsie parfaite. Il s’était résolu à cette séparation quand, quelques minutes après la finalisation de Sarah-2, elles avaient pris conscience l’une de l’autre comme n’étant pas un vulgaire miroir. Cela déclencha un protocole émotionnel violent. Le paradoxe d’un autre soi n’avait pas été envisagé et il avait créé un bug système. Une hostilité s’était emparée des deux Sarah et elles s’étaient jetées l’une sur l’autre en hurlant, chacune voulant détruire son double illégitime. Dans un réflexe humain, Mike avait tenté de les séparer. Les harpies l’avaient tout bonnement ignoré,  poursuivant leurs assauts. Il s'en était tiré avec plusieurs griffures sur les joues.

Pestant, il s’était extirpé de la mêlée pour rejoindre l’ordinateur et avait lancé des ordres :  Allez, hop, chacune dans un placard !

En une semaine, il avait déjà fait mourir puis renaître Sarah-2 plus de dix fois, tandis que l'autre restait le sujet témoin. Chaque fois, il avançait un peu plus dans la résolution de ses théories, mais de nouvelles questions naissaient à mesure. Le sujet était trop complexe. Il avait tenté d’ordonner à Sarah-1 d’étrangler Sarah-2, puis de la poignarder. Le fait de mettre face à face les deux Niamuh généraient systématiquement une hystérie effrayante. Certes, elles accomplissaient les premières consignes programmées mais, le processus s'enrayait dès que l’autre entrait dans le champ de vision. La programmation des ordres s'annulaient d'elle-même et elles réenclenchaient un protocole destructeur envers leur alter-égo. Lorsque l’une des deux succombait alors, l’autre retrouvait aussitôt un calme olympien.

L'intérêt qu'il portait à ces sujets d’expériences diminuait progressivement, conscient qu’il ne faisait que reporter la prochaine étape.


« Elle ne se souviendra pas de moi… »

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