Chapitre 24

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Emilie attacha ses longs cheveux en une queue de cheval haute et peignit ses lèvres de gloss. Elle vérifia son reflet une dernière fois dans le miroir de la salle de bain avant de s’emparer de son téléphone, qui vibrait pour la dixième fois en une minute. La jeune fille soupira. Quatre-vingt-quatre messages de Marc. La jolie blonde envoya rapidement une réponse à son ami pour confirmer - encore une fois - qu’elle serait bien à sa soirée, et même qu’elle était en route.

Après cela, Emi sortit de sa chambre et alla dans l’entrée pour terminer de se préparer. Elle inspecta sa tenue - un petit haut prune et un jean noir - avant d’enfiler un blouson en tweed. Bien que le temps fut doux, la danseuse savait que les températures automnales se rafraichissaient.

Sa mère passa sa tête par l’embrasure de la porte de la cuisine et lui demanda :

« Chérie, où vas-tu ?

- Chez Marc, maman. Il organise une soirée et j’ai été invitée. Les filles seront là, ajouta-t-elle dans l’espoir que sa mère la laisse faire. »

Cette dernière passa une main songeuse dans ses courts cheveux châtains, puis lui sourit tendrement.

« Bien, ma chérie, amuse-toi bien. Fais bien attention à ne pas attraper froid, dors quand même un peu, et surtout avertis-nous à chacun de tes déplacements. On t’aime très fort, mon petit rat. »

Emilie lui offrit un sourire rayonnant. S'ils avaient certes beaucoup de défauts, ses parents savaient quand même se comporter comme tels parfois.

La lycéenne s’engagea dans les rues parisiennes et profita de l’animation de la foule. Les effluves provenant d’un restaurant indien lui chatouillèrent les narines et lui ouvrirent l’appétit. Pourtant, elle ne se pressa pas. La jeune danseuse avait enfin réussi à se libérer de son stress, en dansant devant Dianna, et la vie ne lui avait jamais semblé si belle. Même les visages pressés des gens rentrant du travail ne réussirent pas à entacher sa bonne humeur.

La jolie blonde finit tout de même par arriver devant l’immeuble de Marc, qui la fit rapidement entrer. Emi le serra dans ses bras avec plaisir, car il lui avait vraiment manqué, et embrassa tous les gens présents. Elle devait être la dernière arrivée car Edouard, Charlotte et M.A. étaient déjà là. La jeune fille s’installa sur le canapé et se servit un jus d’orange, après avoir envoyé un message rassurant à ses parents.

La discussion s’engagea autour de la nouvelle couleur de cheveux de Channelle - la danseuse déchue de l'Académie Silberdorn -, qui ne lui allait pas du tout selon Edouard, leur spécialiste ès filles.

« Par contre, Emi, ce qui t'irait à la perfection, c’est une coupe courte. Tu vois, genre, un carré flou. Franchement, ça casserait ce côté un peu coincé que tu as.

- Non, certainement pas ! intervint M.A. en le fusillant du regard.

-Quoi, non ? rétorqua Edouard. Tu insinues que tu connais mieux que moi la mode féminine ? Laisse-moi te dire que c’est clairement pas le cas, surtout vu la manière dont tu t’habilles. »

La gothique émit une sorte de grognement agressif, animal, et se tourna à nouveau vers Emi avec un sourire affable.

« Tu es parfaite telle que tu es, chou, ne l’écoute pas. Si tu te sens obligée de changer pour un garçon, c’est qu’il n’en vaut pas la peine. »

Puis elle retourna dans son mutisme habituelle.

Emilie regarda alternativement ses deux amis, ne comprenant pas vraiment ce qu’il se passait.

« Mais… Pourquoi vous vous criez dessus ? Surtout à propos de mes cheveux, je veux dire, c’est débile comme sujet de dispute. Et puis, continua-t-elle en se tournant vers Edouard, je n’ai pas envie de me couper les cheveux. Je les aime bien à cette longueur. Mais merci pour ton avis. »

Marc éclata soudain de rire, rapidement suivi par Charlotte.

« C’est fou, gloussa cette dernière, c’est la première soirée de ma vie que M.A. parle plus que moi ! »

Marc donna un petit coup de coude dans les côtes d’Emilie.

« Si tu veux paraître moins coincée sans avoir à passer par la case coiffeur, bois ça, dit-il en lui tendant un petit verre empli d’un liquide ambré. »

Emi lui jeta un coup d'œil méfiant, mais s’en empara après que Charlotte l’eut rassurée. Le degré d’alcool n’était pas si fort, selon les dires de la jeune fille aux cheveux roses. La jeune fille trempa ses lèvres et fut prise d’une quinte de toux. Ce breuvage brûlait la gorge ! Ses amis s'esclaffèrent.

Mais, après une grimace, Emilie versa l’alcool dans son verre de jus d’orange - un mélange qu'elle termina cul-sec. La danseuse reposa son verre sous les regards surpris, et un peu ravis, des autres fêtards.

*********

Le jeune homme était arrivé en retard. Il jeta un regard désolé à Marc. Impossible de lui raconter pour les heures de colle. Cela impliquerait de lui expliquer ce qu’il s’était passé avec Mlle Morvan, donc la manière dont il avait « défendu » Emilie. Son ami en tirerait immédiatement des conclusions hâtives, et penserait enfin accompli son rêve de voir un jour leurs deux groupes d’amis fusionner. Tant pis. L’essentiel était qu’il avait fait acte de présence à la soirée. On lui pardonnerait son retard car son caractère fêtard relevait toujours l’ambiance à ce genre d’événement.

Adrien adorait les fêtes, car elles constituaient les rares moments où il se détendait vraiment. La musique, ses amis, les jeux, l’alcool… La sensation d’ivresse que lui procuraient - littéralement ou non - ces différents composants rendaient ces instants extrêmement plaisants.

De purs moments de bonheur. Le jeune homme avait passé le pas de la porte de Marc avec la certitude que cette soirée n’allait pas le décevoir. Une évidence qui ne le quitta pas, lorsqu’il décapsula une bouteille de bière et prit royalement place sur un pouf. Il avala une gorgée rafraîchissante et explora enfin ses alentours du regard.

Edouard avait beaucoup d’amis. Enfin, beaucoup d’amies. Lorsque c’était lui qui organisait une soirée, l’appartement était rempli. Marc, lui, se contentait de fêtes plus intimistes. Pas plus d’une dizaine de personnes à la fois, pour éviter la formation de groupes séparés et favoriser une ambiance conviviale, où personne ne se sentirait à l’écart. Adrien invitait rarement chez lui, mais il profitait toujours de l’hospitalité de ses amis avec joie.

Son regard tomba soudain sur une chevelure rose. Oh non. Pas elle. Charlotte. Adrien se promit d’éviter la compagnie de cette folle furieuse autant que possible. Heureusement, confortablement installée sur les genoux de Marc, la jeune fille ne semblait pas vouloir bouger. A leurs côtés, il trouva Edouard, qui ne lui adressa qu’un petit sourire tendu en guise de salutation, avant de se replonger dans ce qui semblait être un débat houleux avec sa voisine, la gothique.

Adrien arrêta subitement son observation. Il avait fait le tour de la pièce. Toutefois, un doute germa dans son esprit. Sur la table, on avait placé six verres. Six verres. Pour cinq personnes ? Un rire enfantin retentit soudain dans le couloir qui donnait sur la cuisine et les toilettes.

« Marc, s’enquit une voix amusée qui se rapprochait dangereusement, Pourquoi cette déco dans tes toilettes ? J’y aurais bien passé toute la nuit. »

Edouard lança un regard ravi à Marc.

« Je crois bien qu’elle est un peu pompette ! »

Ce à quoi Marc répondit avec un sourire tout aussi radieux. Adrien commença à s’inquiéter et s’était raidi sur le pouf, à mesure que le bruit de talons hauts se rapprochait. Qui ça, elle ? Se pouvait-il que…? Oh non, non, non, non, non. Faites que ce ne soit pas elle. Pitié.

Et pourtant. Les autres filles présentes étaient bien ses amies, à elle. Bien que son insignifiante personne ne l’intéressait absolument pas, Adrien avait été obligé de remarquer les personnes qu’elle fréquentait. Ces gamines n’étaient vraiment pas discrètes. Le jeune danseur lança un regard de détresse à Marc, ses yeux semblant supplier son ami de le rassurer, de lui dire que ce n’était pas elle, que son pire cauchemar n’était pas sur le point de se réaliser, et que cette personne qui avait admiré l’imposante collection de couvertures vintage de magazines Playboy du père de Marc n’était pas....

« Emi ! Je te sers un autre verre ?! s’exclama Charlotte alors que son amie entrait à nouveau dans le salon. »

Oh, non. Adrien enterra son visage entre ses mains. La soirée allait être très longue.

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