Chapitre 6

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Adrien courait en direction des vestiaires. En retard, dès le premier jour ! Dire qu’Edouard et Marc ne l’avaient même pas attendu après le déjeuner… Bon, il fallait dire qu’Adrien prenait un temps fou à manger et que comme il envoyait des messages sur son téléphone pendant le repas, ses amis avaient passé la majeure partie du temps à parler entre eux.

Leurs sujets de conversation n’intéressaient pas vraiment le jeune homme d’ailleurs. Qu’en avait-il à faire, que Marc fût dans la même classe – et même à côté – d’une des trois gamines qu’ils avaient vu ce matin-là ? Il l’avait trouvée très sympathique, et alors ? Il n’y avait pas de quoi en parler pendant la pause déj !

A son arrivée, de nombreux sacs, quelques manteaux et beaucoup de vêtements – sous-vêtements – l’accueillirent. Il était vraiment en retard… Adrien enfila aussi rapidement que possible son nouveau legging. Apercevant son reflet dans le miroir du vestiaire, il se dit que cette tenue le rendait trop efféminé à son goût. Il se recoiffa rapidement, s’aspergea de déodorant et s’élança vers les salles de danse. Arrivé devant la porte de sa classe, Adrien baissa la poignée de la porte, lentement, et faillit sauter de joie quand elle n’émit aucun grincement.

Mais son soulagement fut de courte durée. La porte qu’il venait d’ouvrir se trouvait juste à côté d’une estrade. Et devant cette estrade était assise l’intégralité des élèves et des professeurs de l’école. Des centaines de paires d’yeux s’étaient tournés vers le jeune homme. Ce dernier déglutit et se tourna vers la personne qui achevait son discours de bienvenue, sur la scène. Le célèbre chorégraphe, Franz Silberdorn. Son père. Qui lui lança un regard noir, où l’on pouvait lire une promesse furieuse. Ça allait barder à la maison, ce soir-là…

Adrien lui sourit innocemment, entra et ferma la porte. A pas de loup, il rejoignit la seule place libre qui, pour son plus grand malheur, se trouvait en plein milieu de la pièce. Il balbutia des excuses aux personnes qui se levèrent pour le laisser passer et s’affala sur la chaise. Sa voisine le fusilla du regard.

Emi avait bien mangé ce midi-là, et elle écoutait passionnément le discours du directeur de l’école. Tout chez cet homme la fascinait. Elle le trouvait incroyablement intéressant, et ce charisme ! Sa mère l’avait prévenue que le chorégraphe de renom avait des dons d’orateur mais elle ne s’attendait pas à être autant sous le charme.

Aussi, lorsque l’un des amis de Marc, qui était arrivé en retard, lui demanda de se lever, elle sentit son sang bouillir. Il ne semblait même pas être désolé. Quel impardonnable comportement ! Il avait interrompu l’oration et se permettait de la déranger en plus ! Quel manque de savoir-vivre.

« Quoi ? lâcha-t-il, irrité par son regard accusateur. »

Elle détourna la tête, montrant ainsi son total désintérêt pour sa personne. Son goujat de voisin se mit ensuite à se craquer les doigts. Cela faisait longtemps qu’Emi n’avait pas eu autant envie de découper quelqu’un en morceaux. Elle commença à taper du pied d’agacement.

« Tu pourrais arrêter, s’il te plaît ? Je ne supporte pas le bruit que font tes chaussures sur le parquet, osa-t-il demander, l’air agacé.

- Silence, malotru ! Tu fais craquer tes doigts, c’est pire ! Je n’arrêterai que lorsque tu arrêteras, siffla-t-elle à l’encontre du jeune voyou. Tu n’as vraiment aucune éducation. On ne t’a pas appris la politesse dans ta banlieue, mauvaise graine ? Dans mon milieu, on s’excuse lorsque… »

Elle écarquilla les yeux, outrée. Ce mirliflor s’était permis de plaquer sa grosse main sur ses lèvres délicates, l’empêchant ainsi de finir sa tirade. Elle frappa sa main et le regarda méchamment.

« Je pensais que cette école n’était fréquentée que par des personnes convenables. Je me suis visiblement trompée, marmonna-t-elle. »

Il semblait sur le point de riposter, mais un doigt vint frapper son épaule et le garçon se retourna.

« Je peux vous aider ? questionna ironiquement sa voisine de derrière. »

Le visage du jeune homme devint écarlate. Emi, quant à elle, se retourna lentement et fixa la scène, honteuse, en reconnaissant une professeure.

*****

Quand la cérémonie se termina enfin, Adrien ne prit même pas la peine d’applaudir, se leva, bouscula les personnes qui se trouvaient sur son passage, se lança à la recherche de ses amis… et en les apercevant, eut envie de faire demi-tour et de s’enfuir. Sa manœuvre fut interrompue par Marc qui pointa du doigt son ami dès qu’il le vit.

« Voilà Adrien ! s’exclama-t-il. »

Six personnes dardèrent leurs regards sur le nouveau venu : Marc, Edouard, la folle aux cheveux roses, la gothique louche, son irritante voisine de discours et… son père. De toutes les personnes présentes, il avait fallu que le directeur aille parler à ses amis. Adrien commençait à croire que la malchance le poursuivait. Il fit quelques pas hésitants vers le groupe et, se frottant la tête nerveusement, lança un timide :

« Salut Papa… »

Une expression de profonde stupeur s’inscrivit sur le visage d’Emi. Son fils ? Elle était… choquée. Ce garçon venait d’une des plus grandes familles de danseur. Emi eut envie de le jeter par la fenêtre.

« Emilie, tu connais Adrien ? lui souffla Marc en remarquant sa surprise, Emilie, tu vas bien ?

- Oui ! s’exclama-t-elle d’une voix trop forte pour être honnête. Ça va. Juste… un peu fatiguée. Mais ça va. »

Le directeur braqua son regard sur elle.

« Vous connaissez mon fils, Emilie ? demanda-t-il.

- Non, pas du tout !

- Mais moi, j’aimerais bien le connaître ! gloussa Charlotte d’un air coquin. »

Six regards se dardèrent sur elle. Celui, interloqué, du concerné, les expressions amusées des garçons, les visages impassibles de M.-A. et du directeur, mais surtout les yeux furieux d’Emi, qui semblait vouloir tous les crucifier.

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