Chapitre 1

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C’était un vendredi soir. En sortant de cours, je sentis son regard sur moi. J’ai l’habitude que les gens me fixent quand je les croise, je n’ai pas un physique des plus… banal. Comment dire. Je suis mélanique. Cela signifie que je suis atteinte de mélanisme, une rare condition génétique, surtout chez les humains. Ce que je veux dire, c’est que je ne suis que noire. Peau noire, cheveux noir, yeux, bouche, mains, ongles noirs. Bref, je suis habituée à voir les visages étonnés des passants, mais quand ils remarquent que je les vois, ils se détournent, gênés. Mais lui n’était pas étonné, il semblait… concentré. Il ne me suivit pas quand je repris ma route, je sus pourtant ce qui m’attendait.

En effet, en arrivant chez moi, il était là. Je soupirai profondément, abandonnant la pensée d’une soirée tranquille. Je passai devant lui pour entrer.

- Comment vas-tu, Adhara ?

Sa voix grondait. Je levai les yeux vers lui, mine perplexe.

- Comme si ça t’importait, soufflai-je.

- Bien sûr que ça m’importe !

Je fis la moue.

- Je suppose que c’est pour ça que je ne te vois que deux fois par an ?

- On tourne en rond Adhara, nous avons déjà eu cette conversation la fois dernière, et toutes les fois d’avant. Quand comprendras-tu que je ne veux que ton bien ?

Je lui tournai le dos, plongeant le regard dans le jardin. Je n’avais pas envie d’exploser. Pleurer, rire, crier. C’était tellement plus simple quand il n’était pas là.

- Adhara, je sais que tu ne veux pas de moi, mais au moins écoute-moi. Il faut que tu me suives.

Je me retournai vivement :

- Vraiment ?

- Vraiment.

Il avait l’air penaud. Une mèche tomba sur son visage, ombrant sa joue. Petite, je trouvais cela amusant, quand ses cheveux se rebellaient de son immuable lanière de cuir. Puis ce souvenir devint une relique de la vie heureuse, celle d’avant.

- Je ne vois pas pourquoi je te suivrais. Je n’ai aucune raison valable.

- Adhara…

- Quoi ? le coupai-je. Donne-moi une seule raison de te suivre maintenant alors que tu m’as abandonnée, encore et encore.

- Je n’ai jamais voulu te quitter, mais je devais le faire…

- C’est toujours la même chose avec toi ! Je devais, je devais, je devais ! Pourquoi tu ne viens jamais ? Pourquoi je n'ai jamais de tes nouvelles ? Papa franchement tu y crois ?

Il ouvrait la bouche pour répliquer quand il s’immobilisa. Ses pupilles se dilatèrent, ses narines vibrant, un peu comme un animal. Je voulus parler, poursuivre, mais il leva la main, m’interrompant :

- File, siffla-t-il entre ses dents.

- Mais…

- Enfuis-toi. Y’a quelqu’un dans le jardin.

Vous avez déjà lu des histoires flippantes, avec une personne qui s’introduit chez vous et ça part en film d’horreur ? Eh bien c’est bien plus effrayant quand on le vit.

Mon père ne bougeait pas, le moindre de ses muscles tendus, comme prêt à bondir. Il fixait un point derrière moi, par-dessus mon épaule. Oh. C’est vrai. La fenêtre.

Il y eut un brisement de verre, puis un poids sur mes épaules, la sensation de douleur, de chaleur. Je m’effondrai au sol, souffle coupé. Mon visage heurta quelque chose de dur avant de reposer dans les morceaux tranchants. Un grognement roula à mon oreille où déjà battait mon coeur, un souffle chaud coula sur mon cou. Le poids me quitta. Puis, enfin, le noir, accueillant et silencieux.

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