Épopée: Chapitre XII

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XII. Le plan.


Ils tentèrent de se reposer quelques heures. Elio avait besoin de soins d'urgence et Emilia tombait de fatigue. Tous deux étaient étendus sur leur couverture, près du feu de camp qui avait recouvré sa douce lueur bleutée. Sol se tenait à leur chevet. D'une part pour soigner le chevalier et d'autre part pour veiller sur son apprentie. Les trois autres restaient à l'écart afin ne pas gêner le mage. Ils discutaient de choses anodines pour passer le temps mais Jambar restait distant. Il scrutait la plaine désertique, ses yeux gris trahissaient son appréhension.

— Vraiment impressionnant ton espadon, disait Orm à Anton. Même si les armes enchantées, ça a jamais été ma passion. Trop brillant à mon goût.

— J'avais hésité entre les runes et l'alliage d'argent, mais quand j'ai vu le prix du métal...

— Tu m'étonnes ! Une épée presque aussi haute qu'un homme... Et toi Jambar, tu bouges si vite qu'on a pas le temps de voir tes armes.

L'intéressé répondit par un hochement de tête. Le barbare agita une main dans sa direction, sans succès.

— C'est d'affronter ces choses qui te tracasse, fit Anton ? Ce sont elles qui ont attaqué ton village n'est-ce pas ?

Jambar tourna la tête vers ses compagnons.

— Mon village ? Ah oui. Mais ce n'est pas cela qui me gêne. Je crois qu'on approche d'une ville ou d'un ancien village tragentopolien, elles n'ont pas pu sortir de nulle part, nous les aurions vu venir de loin. Ces choses ne portaient rien sur elles de particulier ?

Orm fit non de la tête, il avait déjà fouillé.

— Tu sais les morts vivants, expliqua-t-il, ils ont rarement grand chose sur eux. Ils sont morts, à quoi leur servirait de l'or ou des bijoux ?

— Ceux là étaient plus hargneux que la moyenne, songea Anton tout haut. Et cette étrange fumée noire... je n'avais jamais vu ça chez une horde de zombies.

— Tu as raison, renchérit Orm. C'est pas faute d'avoir écumé les Royaumes, mais là j'ai aucune idée de ce qu'on vient d'affronter. C'est dingue ce que les seigneurs noirs peuvent être inventifs quand ils ont un macchabée sous la main...

Le colosse partit d'un rire gras.

Une heure passa encore avant que Sol ne se lève pour les rejoindre.

— Tout va bien, dit-il avec un sourire bienveillant. Votre jeune ami a perdu pas mal de sang mais rien que la magie et les onguents ne puissent soigner. Cela m'a donné le temps de chercher la nature de la malédiction qui a ranimé ces pauvres hères. Il pointa du doigt les piles d'os noircis.

— Je pense que ça importe peu de savoir cela maintenant qu'ils sont morts encore une fois, fit Orm sarcastique, mais allez-y. C'est toujours pratique d'avoir des détails lorsque l'on raconte ses aventures.

— Il s'agit d'un maléfice inédit.

— Donc vous ne savez pas ce que c'est. C'est excellent ça comme détail, s'exclama Orm !

Le mage se renfrogna.

— Vous pouvez rester sérieux plus d'une minute s'il vous plaît ?

— Mais je suis très sérieux ! Vous imaginez le titre de la ballade: "Comment les intrépides aventuriers triomphèrent d'une horde de morts-vivants animée par une magie inconnue." Non seulement c'est la classe mais en plus c'est inédit ! Les bardes vont adorer... et les futurs clients aussi.

— En fait, c'est plutôt un mélange de nécromancie de haut niveau avec la création de golem. Le sort scelle l'âme dans le corps mais contrairement à la nécromancie, le cadavre réanimé garde son autonomie avec pour seul consigne de ne jamais nuire à son maître. Cependant la malédiction brise l'esprit et efface les souvenirs de la victime... Il faut être un vrai monstre pour concevoir un sort aussi affreux !

— Ou un génie, au choix, répondit Anton. On semble oublier ce détail mais, on est loin d'être en terrain connu ! C'est LE Seigneur Noir qu'on affronte et donc de loin le plus intelligent de ses congénères.

— Évitons de lui jeter des fleurs voulez-vous ?

Jambar avait sorti un parchemin de leurs bagages et le déplia sur une pierre. C'était une vieille carte des Terres Bannies. Non. De l'Empire Tragentopolien. Jambar posa un doigt ganté sur la carte.

— Nous sommes quelque part par ici, dit-il. Maintenant, regardez à l'Est... Mes craintes se sont confirmées: nous approchons d'une ville. Et pas des moindres...

Pentapolis, lut Orm. Et ben ils avaient le chic pour nommer leurs cités...

— C'est... c'était une ville marchande. Si l'on en croie la carte, c'était la plus importante après Tragentopolis, l'ancienne capitale et notre destination.

Elio s'était levé pour écouter. Il se pencha sur la carte.

— Attends Jambar, dit-il, intrigué. Si ce que tu dis est vrai, cette ville se trouve à peine à huit heures à vol d'oiseau. On devrait la voir d'ici ! Sauf...

— Si elle est dissimulée par un sortilège, déduisit Sol.

— Ou tout simplement si le Seigneur Noir l'a rasée. Je ne vois pas quel intérêt aurait un fou de plus de trois cent ans qui aime faire joujou avec des cadavres à cacher une ville entière par magie !

— Faire chier les aventuriers, proposa Anton ?

Tous se turent et le regardèrent. Puis ils acquiescèrent en même temps d'un air entendu, sauf Sol qui n'y comprenait rien.

— Donc si j'ai bien compris, votre plan est d'éviter la ville, demanda Sol ?

Les quatre autres sourirent, comme lorsqu'une grande personne explique quelque chose d'un peu compliqué à un enfant.

— Le plan, répondit Anton, c'est d'aller fouiller cette ville.

— Mais ça m'a tout l'air d'être extrêmement dangereux !

— C'est pour ça que c'est intéressant, renchérit Orm. S'il cache la ville, c'est forcement qu'il y a quelque chose à cacher ! Logique.

— Et puis, quitte à faire du tourisme, autant en profiter un maximum, Elio avait finis d'enfiler le haut de son armure et alla réveiller Emilia.

Elle ouvrit péniblement les yeux.

— Qu'est-ce qui se passe ? Elle grommela et lâcha un bâillement.

— Et bien nous repartons à l'aventure pardi, dit joyeusement le chevalier !

La jeune femme tira sur sa couverture.

— Encore ? Mais j'ai pas envie...

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