Épopée: Chapitre III

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III. Tractations et préparatifs :

— Non !

Il était environ huit heures le lendemain matin. Les aventuriers se trouvaient dans une loge mal rangée, empestant le cheval et les produits d'entretien, leur équipement posé au sol dans un coin. Cette fulgurante négation provenait d'un gnome portant une vieille veste rapiécée et coiffé d'une casquette de feutre rouge. Le petit être se tenait devant Jambar en le toisant d'un air de défi du haut de ses quatre-vingt-dix centimètres. Sur le bureau on pouvait distinguer, au milieu d'une montagne de documents divers, un petit présentoir métallique gravé d'une inscription :

Tim Fluburton

Fondateur et Président de

La compagnie de transport Fluburton

Jambar ,quant à lui semblait, autant qu'il était possible de le voir sous son foulard, assez contrarié.

— Tim s'il te plaît ! Je te rappelle que tu m'en dois une depuis pas mal de temps !

— Et t'as tout à fait raison, répliqua le gnome de sa voix nasillarde. Tu peux prendre des chevaux, voire une calèche et j'peux même te faire une ristourne si tu veux ! Mais pas ça ! J'en ai plus qu'un en plus...

Orm, que la dispute commençait à agacer, s'avança au niveau de Jambar. Il se racla la gorge, les deux autres se turent, puis il demanda :

— Bon ! Si ce n'est pas trop vous demander monsieur...il lorgna sur le présentoir. Fluburton ! J'aimerais que vous m'expliquiez, d'une, pourquoi ça vous dérange de nous prêter un chariot ? De deux, qu'est-ce qu'il a de si spécial ?

Les yeux du gnome fixèrent Orm.

— Vous prêter un quoi ? demanda Tim très calmement.

Jambar se tourna vers Orm et lui lança un regard pour le faire taire. Le barbare l'ignora royalement.

— Bah un chariot, j'imagine que c'est ce qu'on pense trouver dans une compagnie de voyage.

Après cet ultime affront fait à son commerce, le gnome semblait vraiment en colère. Il faut savoir que la plupart des émotions apparaissent de façon exacerbé chez les gnomes en colorant leur peau, la colère par exemple leur donne un teint rouge. Tim avait viré au cramoisi.

— Des chariots hein ? sa voix était encore plus aiguë. Et ben tenez, v'nez voir si moi, Tim Fluburton, je loue de ridicules chariots !

Il s'approcha de son bureau, saisit un énorme trousseau de clés et sorti de la loge à grandes enjambées.

— Bon vous venez ?! cria le gnome par-dessus son épaule.

— Orm ? dit Jambar.

— Oui ?

— La prochaine fois que tu veux m'aider à négocier, tu me demande d'abord s'il te plaît.

— Pas de problème.

— On y va ? les pressa Elio. J'ai l'impression que sa tête va exploser.

Tim les attendait devant un grand entrepôt, il s'était à peu près calmé. Le gnome se tourna vers les portes et sélectionna une clé de son trousseau puis la glissa dans l'une des...huit serrures. Cela piqua la curiosité d'Anton : qu'est-ce que ce gnome cachait dans cet entrepôt? Puis il se dit qu'il valait mieux ne pas s'en soucier, les gnomes étaient, de notoriété publique, naturellement très consciencieux.

Les portes s'ouvrirent enfin, révélant à nos héros un hangar d'une propreté inouïe au milieu duquel trônait un...

— C'est quoi ce machin? souffla Orm.

Le gnome avança jusqu'au machin et se retourna en s'exclamant tout en montrant la chose d'un mouvement théâtral.

— Ah ça vous la coupe hein ? Et d'abord cesse d'insulter mon travail mon grand. Il faisait maintenant face à la chose. Ceci ! s'écria-t-il en ouvrant les bras. Ceci est le tout premier pas vers la révolution du transport terrestre !

Le groupe s'approcha d'une étrange machine. Montée sur roues et entièrement faite de métal à l'exception de l'intérieur où se trouvaient de petits fauteuils en cuir. Une myriade de tubes sortaient d'une grosse boite à ce qui semblait être l'avant du véhicule, un autre tube plus gros sortait par l'autre bout.

— Et donc on va voyager là-dedans ? le jeune chevalier regardait la chose avec des yeux écarquillés.

— C'est le moyen le plus rapide d'atteindre les Murailles, expliqua Jambar, resté derrière le groupe, de plus il nous évite de prendre des chevaux et donc de l'équipement supplémentaire car une fois dans les Terres Bannies, nous devrons être les plus rapides et les plus efficaces possible.

— Avec un engin pareil ? fit Elio, incrédule. Au moins on peut attaquer depuis un cheval, là je vois mal comment on pourrait s'y prendre.

Jambar pointa du doigt de petits marches pieds le long du véhicule. On pouvait également apercevoir des poignées judicieusement placées sur la carlingue.

— En effet, vous avez pensé à tout...

Tim se retourna vers le groupe, puis vint se camper devant Jambar. Ils se regardèrent dans les yeux pendant un moment. Enfin, le gnome dit, cette fois tout à fait calmé :

« — Tu y es arrivé finalement, c'est la dernière ligne droite hein ?

Il croisa les bras et ajouta, toujours en fixant Jambar :

— Allez vas-y c'est offert par la maison, t'as raison je t'en dois une depuis longtemps et je pense que c'est le meilleur moyen que j'ai de t'aider. Vous comptez partir maintenant ? »

— Oui immédiatement, répondit Jambar.

Tim jeta un dernier regard sur l'étrange carrosse, se dirigea vers les portes du hangar et les ouvrit en grand. La lumière pénétra à l'intérieur, éclairant Jambar qui commençait à charger les paquetages dans un coffre soudé à l'arrière du véhicule. Les autres s'entre-regardèrent, puis Elio sourit. Il se tourna en direction de la lumière et s'exclama :

— Nous voici donc en route pour une fabuleuse aventure ! Nous figurerons bientôt parmi les légendes des Quatres Royaumes et notre périple sera chanté par...

— Tu viens nous aider à charger au lieu de dire des conneries ? fit Orm qui revenait du bureau de Tim en portant un sac de provisions sous chaque bras.

— Oui, oui, me voilà. J'appréciais juste le caractère solennel du moment.

— Ben il reste trois sacs à apprécier avant de partir.

Dès que les préparatifs furent finis, ils montèrent tous dans le chariot de métal. Jambar s'assit à la place du conducteur, Anton s'installa à côté de lui tandis que Orm et Elio occupaient les deux sièges à l'arrière. Anton fixa un instant les nombreux boutons et leviers devant Jambar, il y avait également un guidon central qui devait sans doute servir à diriger l'engin.

— Tu es sûr de savoir conduire cette chose ? souffla-t-il, anxieux, à Jambar.

— Absolument certain, lui répondit le foulard.

Il appuya ensuite sur un bouton rouge situé sur sa droite. Un grand bruit de ferraille se fit entendre et l'étrange boite à l'avant commença à trembler tandis que les tuyaux émettaient un glougloutement huileux.

— Au fait Jambar ! hurla le gnome pour couvrir le vacarme, s'il lui arrive quoi que ce soit, tu la rembourse à ton retour !

Le chariot de métal s'élança alors, dans un concert de chuintements, vers l'extérieur. Orm émit un OUUUUUUUHAAAAAAAAH sonore et la petite troupe disparue quelques instants plus tard à un tournant devant quelques passants médusés.

— Bonne chance mon vieil ami. dit Tim lorsqu'ils furent hors de vue.

Plus loin, alors qu'ils fonçaient à travers la ville, Elio demanda à Jambar :

— Au fait, tu as dit tout à l'heure que Tim t'en devait une...

— Oui, je lui ai sauvé la vie.

— Sans indiscrétion...de quoi l'as-tu sauvé ?

Jambar resta muet quelques secondes et, comme tous les autres le regardaient, il dit :

— Et bien disons que je l'ai sorti d'un accident impliquant des expériences sur un nouveau carburant et plusieurs maisons brûlées...

Anton, Orm et Elio s'enfoncèrent alors dans leur siège en s'agrippant aux bords.

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