Chapitre 38

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Comme Emma l’avait prévu, j’avais passé toute l’après-midi, mais aussi toute la nuit après d’Océane. Des voix au rez-de-chaussée me réveillèrent et j’entrouvris la porte pour écouter. Je reconnus la voix d’Océane, mais pas celle de l’homme.

— Tu ne m’as toujours pas dit qui était cette fille, Océane.

— C’est juste une amie. On a passé la journée et la soirée ensemble. Qu’est-ce que tu crois ?

— Ne me prend pas pour un idiot, tu n’invites jamais personne chez toi. Si ce n’est qu’une amie, pourquoi dormiez-vous dans le même lit ?

— Mais qu’est-ce que tu t’imagines enfin ! Je n’ai pas le droit de passer une soirée avec une amie ? On s’est couché tard et je ne savais pas si Nat’ allait rentrer alors oui, on a dormi dans le même lit. Je n’allais quand même pas la faire dormir sur le canapé.

— C’est exactement ce que tu aurais dû faire !

Comprenant que la situation dégénérait, je me rhabillai et descendis. Le jeune homme était plus petit qu’elle, mais en même temps, Océane était très grande.

— Occupe-toi de ce qui te regarde, d’accord ?

— Je suis…

— Je sais très bien qui tu es. Tu n’as aucun droit de diriger ma vie, Julien !

Quand je vis la main de ce Julien claquer contre la joue d’Océane, je serai les poings et arrêtai de bouger. C’était son petit-ami et elle ne voulait pas que j’intervienne. Je respirai un grand coup et repris la descente des escaliers.

— Bonjour, commençais-je en faisant comme si je n’avais rien vu alors qu’Océane avait sa main sur sa joue.

— Et tu es ? m’attaqua Julien.

— Juste une amie, excuse-moi Océane, je n’aurais pas dû amener autant de champagne, mentis-je pour la sortir de ce calvaire. Mais en tout cas, repris-je pour éviter qu’il ne parle, ton lit est bien plus confortable que le canapé.

— Le principal c’est que tu es bien dormi. Tu veux quelque chose de spécial pour le petit déjeuner ?

— Je prendrais ce qu’il y a, ne t’inquiète pas.

— Je peux aller à la boulangerie si tu…

— Pourquoi tu n’irais pas toi ? interpellais-je Julien. À ce que j’ai compris, c’est toi son petit-ami.

— Ouais c’est moi, cracha-t-il odieux. Mais je ne suis pas votre bonniche. Je ferais mieux de partir avant que vous ne me demander de faire votre ménage.

— C’est une très bonne idée. En tout cas, j’ai été ravi de te rencontrer.

— Ouais c’est ça.

Je l’accompagnai jusqu’à la porte et le lui ouvris.

— À bientôt, terminais-je avec un grand sourire avant de fermer la porte derrière lui.

Dès que la porte fut fermée, j’attrapai un torchon que je passai sous l’eau avant de faire asseoir Océane et de poser le torchon mouillé sur sa joue.

— Est-ce que ça va ?

— Oui. Merci de ne pas être intervenue.

— Tu m’as dit de ne pas le faire, je ne le fais pas.

— En tout cas, tu es une super actrice.

— J’ai juste profité de la situation pour qu’il s’en aille vite.

— Tu là vu faire c’est ça ?

— Oui et je me suis forcée à ne rien faire. Tu ne pourras jamais t’en sortir si tu ne demandes pas de l’aide Océ et je n’aime pas que quelqu’un te fasse du mal.

— Je sais Elena, mais…

— Je connais quelqu’un qui a plus ou moins été dans la même situation que toi. Si tu parlais avec elle, peut-être que…

— Non Elena. Ça ne sert à rien de vouloir m’aider, je ne peux rien faire.

— Océ ! As-tu oublié que je l’Impératrice ? Si j’avais voulu, il aurait été arrêté en moins d’une seconde pour avoir levé la main sur toi. Un mot de ma part et les gardes dehors serait intervenu !

— Et pour quel motif Elena ? Je ne suis rien pour la garde ! Que je sois ton amante n’y change rien.

— Tu fais partie de mon Conseil, tu n’es pas rien pour la garde. Et je ne laisserais jamais le moindre garde te traiter comme si tu n’étais qu’une moins que rien. Tu bénéficies de la protection de l’Impératrice elle-même et tu n’en profites même pas !

— Je ne veux pas de privilège Elena ! Je n’en ai jamais eu et ce n’est pas maintenant que ça va commencer.

— Si tu ne voulais pas avoir de privilèges, il ne fallait pas devenir mon amie et encore moins mon amante comme tu le dis. Je me suis fait la promesse qu’il ne t’arriverait rien et je compte bien la tenir jusqu’à la fin de ma vie, que tu le veuilles ou non !

Je me levai furieuse et me dirigeai vers la sortie. Pourtant, je ne voulais pas la quitter en étant fâchée avec elle, je l’aimais trop pour ça. Je me retournai et la serrai dans mes bras.

— Je t’aime Océane, je veux seulement te protéger.

— Je sais Elena. Je t’aime et moi aussi je veux te protéger, de lui surtout.

— Appelle-moi s’il y a quoi que ce soit et au cas où, à chaque fois qu’il débarque ici, tu m’envoies un message et un autre quand il part.

— Comme ça tu sais qu’il ne m’est rien arrivé. C’est promis.

— Merci.

Je l’embrassai une dernière fois avant de rentrer au château. Cet accord de messages était le seul moyen que j’avais trouvé sur le moment pour la protéger de cet homme. Une fois arrivée au château, Emma m’attendait dans la cour. Elle me suivit en silence jusque dans ma chambre.

— Tout s’est bien passé avec Océane ?

— Oui, c’était super. Jusqu’à ce que son petit ami me réveille en discutant avec elle et qu’il la gifle devant moi, sans que je ne puisse rien faire.

— Tu n’es pas intervenue ?

— Non. Elle m’avait demandé de ne pas le faire alors je l’ai écouté. Emma, je veux organiser un bal le plus tôt possible. Quand est-ce que ce serait possible ?

— Il faut que je voie avec l’ensemble des domestiques, mais si on s’y met dès aujourd’hui, je dirais une semaine pour que ce soit parfait. Pourquoi ?

— Ça va faire presque huit mois que je suis au pouvoir et je n’en ai encore organisé aucun. Je me suis dit que ça pourrait être sympa.

— Et comme ça, tu peux voir Océane et la surveiller, avoues.

— Possible. Sauf que je grillerais ma couverture si son petit-ami venait à se bal, ce qui se fera sûrement.

— Il ne t’a pas déjà vu à la télé ?

— Je ne pense pas. Il ne m’a pas reconnu se matin.

— Et bien dans ce cas, je vais aller prévenir tout le monde. Toi tu vas prendre une douche.

Écoutant la recommandation d’Emma, je filai sous la douche et me lava les cheveux. Après les avoir séchés, je mis une robe plus discrète, me fis une simple queue de cheval et emporta ma couronne avec moi. Avant d’aller prévenir le Commanda Fauster, je rejoignis Emma en cuisine pour m’assurer que la préparation de ce bal était possible. Emma m’informa que si tout le monde s’y mettait dès maintenant, il pourrait avoir lieu la semaine prochaine.

Je retrouvai ensuite le Commandant Fauster dans son bureau et lui expliqua ce que j’avais prévu. De son côté, il augmenterait le nombre de gardes présent au château ce jour-là afin d’assurer la sécurité des présents. Je retournai ensuite dans ma chambre et prépara la liste des invités. Au fils des mois, j’avais fait la rencontre des plus grandes fortunes de l’Empire et leurs familles. À la fin, je me retrouvais avec une liste de plus de cent invités, y compris Océane.

Après avoir écrit les invitations et demandé à l’une des domestiques de passage de les faire distribuer, je m’allongeai sur mon lit, téléphone à la main. J’appelai alors Océane et rapprocha mon téléphone de mon oreille.

— Océ, j’ai décidé d’organiser un bal la semaine prochaine et j’aimerais que tu viennes.

— Sérieux. Bah pourquoi pas, je me trouverais une tenue adéquat.

— Et… tu peux venir accompagner, c’est même conseillé.

— Pour éviter d’attirer l’attention ? Je comprends. Mais ça voudrait dire que je dois venir avec Julien. Si je viens avec mon frère, ne se sera pas crédible.

— Ce n’est pas grave, viens avec lui. Je pourrais le surveiller comme ça.

— Tu ne t’arrêtes jamais toi.

— De te protéger ? Non, jamais.

— Ah Elena, tu m’exaspères des fois.

— Emma me le dit souvent aussi. Tu seras là alors ?

— Bien sûr. Je ne raterais jamais un bal surtout si je suis invité par l’Impératrice en personne.

— Toi aussi tu m’exaspères des fois.

— Mais c’est pour ça que tu m’aimes.

— C’est vrai.

— Je dois te laisser, Julien vient d’arriver.

— Tu m’envoies un message dès qu’il part.

— C’est promis.

Elle raccrocha et je posai mon téléphone sur mon lit. Tant que je n’aurais pas de message m’indiquant que Julien était parti et qu’Océane n’avait rien, je savais que je ne pourrais me concentrer sur rien d’autre. Je décidai finalement de continuer à lire les journaux intimes de ma mère même si la mère que j’avais toujours connue était toujours de plus présente.

Pour elle, je n’avais toujours été qu’un pion à manipuler comme bon lui semblait. Ma mère avait eu des difficultés à tomber enceinte et une fois que j’étais enfin là, il n’y avait plus que mon éducation qui l’obsédait. Je devais devenir comme elle. En m’isolant ainsi du monde, en me privant d’amour et d’une vraie mère, elle avait voulu faire de moi une femme identique à elle. Pourtant, tout ce qu’elle avait essayé de faire n’avait fait que me rendre encore plus indépendant d’elle. Hormis mon accession au trône et ma liberté, sa mort n’avait pas changé grand-chose. Vivante, elle n’était jamais là, comme si elle avait toujours été morte pour elle.

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