Les effets dévorants du lien...

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J'essayais tant bien que mal de me concentrer sur la correction des contrôles de lecture que j'avais donnés à mes élèves mais c'était difficile. J'avais tellement de choses en tête ! Mon meilleur ami était toujours introuvable. Je n'arrêtais pas de m'imaginer que quelqu'un lui faisait du mal... C'était horrible ! Et John... Depuis le cauchemar que j'avais fait dans lequel il m'agressait, je ne l'avais pas vu. Ce matin, il était resté dans sa chambre pendant que je me préparais avant de partir travailler, et ce soir, depuis que j'étais rentré, c'était la même chose. Pourtant, je savais qu'il était là. Je sentais sa présence et parfois, j'entendais du bruit. Qu'est-ce qu'il faisait ? Pourquoi m'ignorait-il ? Ce rêvé était-il bien provoqué par lui ? Des questions... Toujours des questions !

-Ho et pis, merde ! Monsieur vit sous mon toit, après tout ! J'ai le droit de savoir ce qui s'y passe ! m'exclamai-je en me levant de ma chaise.

Décidé, je pris le chemin de la chambre d'ami dans laquelle il dormait. Arrivé devant, je me stoppai cependant et collai mon oreille à la porte. Valait mieux se méfier de « Monsieur ours »...

-Ha...

Qu'est-ce que c'était ? Un gémissement ? Surpris, je relevai la tête sur le moment. Mais... Il fallait que je sois sûr. Alors, je me penchai de nouveau et écoutai ce qui se passait dans cette chambre.

-Hum...

Est-ce qu'il serait en train de se masturber ?! Sous mon toit ?! Qu'est-ce que je devais faire ? Attendre qu'il ait fini ? Ou... L'interrompre ? Après un gros soupir de ma part, j'optai pour la seconde solution et toquai à la porte. Des bruits de pas ne tardèrent pas à se faire entendre et un John torse nu et à la sueur perlant sur sa peau vint m'ouvrir. Cette vision inattendue et terriblement sexy me déstabilisa quelque peu. Il n'avait pas l'air frustré ou même gêné. Avait-il eu le temps de terminer ce qu'il faisait ?

-Je...

Je me raclai la gorge et repris :

-Ça fait un moment que je ne t'ai pas vu, tu es toujours enfermé dans cette chambre quand je suis là. Qu'est-ce... que tu faisais ?

J'avais du mal à le regarder dans les yeux. J'étais trop mal à l'aise... Ma question était presque rhétorique parce qu'il était évident qu'il venait de faire ce que je savais qu'il venait de faire... La preuve était devant moi puisqu'il y avait des mouchoirs en papier dans la poubelle qui était vide avant qu'il s'installe dans la chambre...

-Tu sais parfaitement ce que je faisais, Lucas. J'ai senti ta présence derrière la porte. Sache que te savoir si près m'a fait venir.

-Que.. QUOI ?!

Je relevai mes yeux vers son beau visage qui me surplombait et le découvris impassible. Aucun malaise. Rien...

-Ok, je me casse... Ce n'était pas une bonne idée de venir voir ce que tu faisais, mais je m'inquiétais comme un idiot... dis-je en faisant demi-tour et en commençant à avancer dans le couloir.

Mais je n'eus pas le temps d'aller bien loin, car je fus brusquement attrapé et soulevé pour être ramené un peu rudement dans la chambre.

-JOHN ! LÂCHE-MOI ! criai-je en me débattant.

Évidemment, mes protestations ne servirent à rien du tout face à cet ours autoritaire, et je me retrouvai bien rapidement sur le lit, recouvert d'un certain corps imposant. Il se tenait au-dessus de moi, appuyé sur ses larges bras de chaque côté de ma tête.

-Tu t'inquiétais pour moi ?

-Quoi ?... Heu...

Eh merde ! C'était tout ce qu'il avait retenu de la situation ? Vraiment ?! Il venait pourtant d'être surpris en train de se soulager et il n'en avait même pas l'air gêné !

-Comment peux-tu ne pas être troublé d'avoir été pris en flagrant délit de plaisir solitaire ? demandai-je, exaspéré.

À mon grand étonnement, il me sourit.

-Pourquoi aurais-je honte ? C'est toi qui me mets dans cet état.

Je sentis mes joues chauffer intensément suite à ses paroles.

-Constate par toi-même l'effet que tu me fais, dit-il en m'attrapant la main afin de la poser sur son érection naissante.

Comment était-ce possible ? Il venait pourtant de se soulager ! Et il était déjà...

-Mon plaisir ne serait pas obligé d'être solitaire si tu étais plus complaisant.

Sur le coup, je me raidis de colère. Quoi ?! Mais le mufle ! Il voulait me mettre « ceci » sur le dos alors que s'il était en chaleur, c'était sans doute parce qu'il avait enclenché ce foutu lien sans ma PUTAIN D'AUTORISATION !

-Plus complaisant ?! Nan mais tu te fiches de moi ? C'est toi qui t'es imposé dans ma vie ! Qui m'as imposé ce lien sans que j'aie mon mot à.. Humppff...

John venait de me bâillonner la bouche de la sienne ! Nan mais quel goujat ce mec ! Mais... Qu'est-ce qu'il embrassait bien... Je ne pus empêcher ma main de se lever afin de se faufiler dans ses cheveux sombres alors que sa langue caressait la mienne avec passion. Il tenait toujours mon autre main contre son sexe dur, et je n'avais même pas envie de la retirer. Je perdais vraiment la tête...

Sa bouche si chaude glissa lentement sur ma joue, puis dans mon cou. Soudainement, John se redressa. Je le regardai, ne comprenant pas pourquoi il s'était arrêté. Il fixait mon cou.

-Je vais te mordre ailleurs. Tu n'as pas encore complètement cicatrisé. Sans doute parce que le lien n'est pas complet.

-De quoi tu parles ?

-Les calices cicatrisent rapidement des morsures de leur vampire. C'est naturel et c'est ainsi afin que le vampire puisse se nourrir plus souvent et que le calice s'en remette rapidement. Mais par ton entêtement, le lien entre nous n'est pas complet et les morsures restent longtemps gravées sur ton corps comme pour n'importe quel humain. J'aime voir ma marque sur toi, mais je peux comprendre que tu risques d'attirer l'attention, ce qui ne serait pas bon. Je vais te mordre ailleurs.

-Je… Tu… Quoi ?! Nan mais tu vas arrêter ça tout de suite, et je t'interdis de me mordre ! Je ne suis pas ton garde-manger ! Et... HÉ !!

Sans sommation, John m'avait lâché la main et en avait profité pour me retirer mon pantalon de pyjama ! Une fois fait, il replongea ses yeux dans les miens, comme si de rien n'était.

-Je vais te mordre ici, me dit-il en effleurant l'intérieur de ma cuisse et me déclenchant un frisson par la même occasion.

J'étais si interloqué par son attitude qui ne prenait absolument pas en compte ce que je disais, que je n'arrivais pas à parler, me contentant de le regarder.

-Mais avant... commença-t-il en attrapant de nouveau ma main.

Il la fit glisser sans hésitation dans son pantalon et son sous-vêtement avant de placer mes doigts autour de son sexe imposant, imprimant des gestes rapides à ma main. Je rougis violemment sur le coup. Je n'avais jamais fait ça, toucher le sexe d'un autre homme, le caresser aussi intimement, mais j'en avais envie. Oui... J'avais envie de toucher ce vampire au caractère si énervant. Ce dernier ne me cacha rien, placé au-dessus de moi, et je pus découvrir son beau visage se crisper sous le plaisir que ma main lui donnait. Le rythme était si rapide, presque frénétique, qu'il ne tarda pas à jouir sous mes yeux. C'était terriblement excitant...

Une fois son souffle repris, il me regarda. Et sa main toujours sur la mienne, il la fit glisser sur sa peau, la sortant de son boxer et la faisant remonter doucement sur son torse. Je sentais sa chaleur sous mes doigts. Il était littéralement bouillant... Lorsqu'elle arriva à son cou, il la souleva et la porta à sa bouche, y déposant un tendre baiser. Cet homme... Il allait me rendre fou !

Il finit par reposer ma main sur le lit, et sans que je ne m'y attende, se baissa et posa sa bouche sur mon boxer.

-John… Attends !

Il se stoppa et se redressa un peu, plongeant ses yeux emplis de désir dans les miens, un peu apeurés.

-Laisse-moi faire. Je n'irai pas trop loin, je ne te retirerai pas ton sous-vêtement.

Avait-il compris ma crainte ? Que je n'étais pas encore prêt pour cette intimité avec lui ? Face à sa patience et sa douceur du moment, je hochai la tête. J'en avais envie. Qu'il me touche, m'embrasse... Mais je ne voulais pas aller trop loin parce que je savais qu'après, je ne pourrais plus me retenir et que nous scellerions le lien. Et ça me terrifiait complètement. D'être lié pour toujours à ce vampire qui me faisait peur, parfois. De ne plus vieillir... De devoir tout expliquer à mes proches... De devoir déménager, de changer complètement de vie...

-Ha...

Mes réflexions furent interrompues par sa bouche qui venait de s'emparer de mon sexe à travers le tissu. Il le léchait, le savourait... Je sentais la chaude humidité de sa langue et c'était bon... Trop bon... Mais je pouvais admettre qu'il y avait également un côté un peu frustrant à ne pas sentir directement sa bouche sur ma peau... Frustration qui ne fut rien comparée à celle que je ressentis au moment où il s'arrêta, sa bouche continuant son chemin sur ma cuisse.

-HA !

Est-ce qu'un jour je me ferai à cette douleur lorsque ses dents se plantaient dans ma chair ? Je n'en eus plus aucun doute quand je sentis qu'il aspirait mon sang et le plaisir si fort qui en résultait et qui me traversa de manière fulgurante. C'était différent des autres fois où il m'avait mordu au cou. J'avais cette impression qu'il aspirait le sang à même mon sexe, et je ne tardai pas à jouir, les mains crispées sur le drap et John entre mes jambes. Je ne criai pas, je me mordis les lèvres et retins comme je pus mes gémissements qui ne demandaient qu'à sortir. Je n'aurais su dire pourquoi. Peut-être tout simplement par gêne qu'il me morde à cet endroit ou que la situation ait tourné de cette manière...

Dans un état de béatitude, de bien-être total, je sentis John se placer dans mon dos et me prendre dans ses bras alors que je reprenais mon souffle. Après ce que nous venions de partager, des brides de mon cauchemar me revinrent en tête. Il fallait que je sache.

-John ?

-Hum ?

-La nuit dernière, le rêve étrange que j'ai fait, ce n'était pas un rêve anodin, n'est-ce pas ? C'est toi qui l'as provoqué ?

Je le sentis se crisper. J'avais raison ! Il ne dit rien, mais la réaction de son corps me suffisait amplement comme réponse. Je me dégageai de ses bras et me levai en récupérant mon pantalon que j'enfilai précipitamment. J'étais sur le point de sortir, mais une main vint pousser ou plutôt claquer la porte, me faisant sursauter. Je me tournai pour découvrir que John se tenait juste derrière moi.

-Je ne pensais pas que ça tournerait de cette manière.

-Même si c'est vrai, tu n'as pas à provoquer ces rêves, surtout si tu es incapable de te contenir !

J'étais en colère, maintenant. Comment les événements pouvaient-ils toujours souffler le chaud et le froid entre nous ? C'était tellement fatiguant !

L'expression que j'avais sur le visage ne dut pas lui plaire, car en moins de temps qu'il ne le faut pour le dire, je fus plaqué contre le mur, « Monsieur ours » à quelques centimètres de moi, une de ses mains posée à côté de ma tête !

-Lucas, ne m'énerve pas.

Ses yeux étaient devenus dorés. Nan mais... Parce que c'était moi la personne énervante, ici ?!

-Pousse-toi et laisse-moi sortir. Ou tu veux encore m'agresser comme la nuit dernière ? Ça t'a plu à ce point-là ?

Je vis que ma pique avait fait mouche. Ses yeux reprirent leur couleur verte et il s'éloigna assez pour que je m'éclipse. Bon ! Allez, Lucas ! Tu as des copies à corriger ! Ne te laisse pas déstabiliser par ce rustre !

Arrivé dans le salon, je regardai l'heure. J'avais encore du temps, il n'était que 20 heures, et j'avais déjà corrigé une bonne moitié de copies. Je me réinstallai donc sur ma chaise et en attrapai une. Plein de courage au début, je ne tardai cependant pas à soupirer en découvrant les énormités contenues dans celle-ci. Cet élève avait-il seulement lu le roman dont il était question ?! Vraisemblablement, non... Ou alors, il n'avait vraiment rien compris !

La première question du devoir était simple : « Quelle est la particularité du roman La Princesse de Clèves. ? ». Nous avions vu ce point important en cours, et pourtant, la réponse qui avait été donnée était celle-ci : « C'est un roman philosophique. ». Visiblement, il confondait avec les œuvres vues l'année dernière ! Nous avions étudié Micromégas et Gargantua. Mais cette année, ça n'avait rien à voir ! La Princesse de Clèves était un roman PSYCHOLOGIQUE !! Je poussai un gros soupir et regardai le nom de l'élève. Évidemment...

-Ho la la ! Kévin...

-Qui est Kévin ? demanda une voix grave sur un ton pas très commode et qui me fit sursauter.

Je me tournai alors vers John. Il était toujours torse nu... Je ne pus m'empêcher de jeter un regard sur ce qui s'offrait à mes yeux.

-Tiens, tu es enfin sorti de ton trou ! m'exclamai-je d'un ton bougon en reportant mon attention sur le devoir. Il s'agit d'un de mes élèves. Je suis en train de corriger des copies.

Je poussai encore une fois un gros soupir en refusant de le regarder. À cause de lui, je me sentais grincheux !

-Tu ne peux pas mettre un t-shirt ou une chemise ? Tu fais exprès de te balader en mode « sexy » ou quoi ? C'est dingue, ça ! grommelai-je.

Je réalisai soudainement la portée de mes paroles. Je venais vraiment de dire ça ? Ho putain...

-Alors, comme ça, tu me trouves « sexy » ?

Je sursautai de nouveau, car « Monsieur ours » se trouvait derrière moi et venait de me chuchoter cette phrase à l'oreille. Comment pouvait-il se déplacer si vite ?!

-Hou là ! Éloigne-toi un peu ! J'ai besoin d'espace ! Et non, ce n'est pas ce que je voulais dire, commençai-je en essayant de me rattraper. N'importe quel homme est sexy, torse nu ! C'est tout !

J'entendis un petit rire qui m'énerva encore plus. Mes joues étaient brûlantes... Ok, j'étais de mauvaise foi. Mon mensonge était assez flagrant, mais jamais je ne lui dirai qu'il était putain de sexy en étant seulement vêtu d'un pantalon noir dévoilant ses muscles et son large torse qui brillait encore d'un peu de sueur... Ok, on arrête ! Tu te concentres, Lucas ! T'as du boulot !

Je vis John prendre un livre dans ma petite bibliothèque et partir s'installer dans mon fauteuil. Je me retins de dire quoi que ce soit sur son attitude désinvolte - il ne m'avait pas demandé la permission de prendre ce livre et il ne s'était toujours pas couvert... -, et je me reconcentrai sur mes devoirs à corriger. Normalement, j'allais pouvoir être tranquille, maintenant !

La soirée passa ainsi, dans un calme apaisant. Lui, lisant, et moi, travaillant dans le silence. C'était plutôt agréable. C'était assez bizarre, aussi. On aurait dit que nous formions un couple... Lorsque j'eus terminé, je m'étirai sur ma chaise, mes membres étaient ankylosés après ces quelques heures de correction ! Voyant que John était toujours assis dans le fauteuil, je me levai et me dirigeai vers lui.

-Qu'est-ce que tu lis ? demandai-je poliment.

-King Kong Théorie, mais je ne suis pas sûr d'aimer. C'est tellement vulgaire et cru !

En l'entendant, je lâchai un petit rire. Vu le personnage venant d'une noble famille et amateur de belles œuvres d'art, je savais qu'il ne pouvait apprécier ce genre de lecture !

-Je comprends ! J'ai découvert cette auteure et ce livre durant mes études universitaires. La première lecture m'a fait le même effet, mais en l'étudiant et en l'analysant, j'ai aimé. L'auteure se sert du langage comme d'une arme pour atteindre le lecteur. La vulgarité dont elle se sert est « une contre-performance linguistique et littéraire du genre », pour citer mon professeur. Elle a sciemment adopté un style polémique afin d'affronter directement son sujet. On a souvent attribué aux femmes une belle écriture élégante qui ne cherchait surtout pas à choquer, et cette auteure, elle, a choisi l'inverse. Elle ne veut pas ménager son lectorat, elle choisit d'aller droit au but. Elle se réapproprie un langage attribué aux hommes. Elle est connue pour se battre contre les stéréotypes de genre imposés par la société et qui font tellement de mal, et... Excuse-moi ! Je me suis laissé emporter ! terminai-je dans un petit rire.

À ce moment-là, John eut un geste auquel je ne m'attendais absolument pas puisqu'il m'attrapa délicatement la main qu'il serra entre les siennes.

-Ne t'excuse pas. C'était passionnant. Tu es vraiment un homme très intéressant, me dit-il en déposant un baiser sur la paume de ma main.

J'étais troublé et nos regards ne se quittaient plus. Le temps paraissait comme suspendu. Mais...

-Je...

Je me raclai la gorge et secouai la tête. La situation devenait terriblement dangereuse ! Il fallait que je me reprenne et vite !

-Je ferais mieux d'aller me coucher, dis-je en retirant doucement ma main des siennes.

Je crus lire de la déception dans ses yeux mais il ne dit rien, se contentant d'hocher la tête.

-Bonne nuit !

Sur ces mots, je me dépêchai de me diriger vers la sécurité de ma chambre où Pattoune devait déjà m'attendre.

-Bonne nuit, Lucas, dit-il d'un ton las.

Oui, il y avait de la tristesse dans sa voix. Et de la sentir me serra le cœur...

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