CHAPITRE 12: Sous le temple de Cybèle.

9 minutes de lecture

Attention ! C'est Gore de chez Gore ! Âmes sensibles s'abstenir.
Comme je n'envisage aucune publication, il n'y a aucune autocensure et ce n'est pas le pire.

( nouvelle version.)

Plutocrus contourna la statue de Cybèle*.
Cette partie du temple était toujours déserte, les sandales de l’archigalle résonnaient sur les dalles de marbre sombre, baisers de cuir sur pierre froide, claquements sonores qui se perdaient dans le vaste naos.
Enfin, il arriva devant une alcôve aux montants de porphyre où se dressait un bétyle d’un noir aussi profond que le gouffre de Cerbèrus*. Il servait de piédestal à un reliquaire de cristal dans lequel on pouvait apercevoir, sur un coussin de velours grenat ce qui pouvait ressembler à deux petits pruneaux bruns et racornis.
« C’est l’écrin de ma virilité, et je me souviens encore du fer qui ronge les chairs, et de cette douleur sans fin. Mais, bientôt, la vengeance sera mienne. » pensa Plutocrus.

Il avait déposé sa tiare et sa toge de lin fin pour ne conserver qu'une tunique sans ornements avant d'entamer la descente des marches.
Il passa derrière la pierre de jais qui dissimulait une trappe. Bientôt un escalier en colimaçon aussi roide que profond l’enveloppa d’une fraîcheur humide. Il commença à descendre dans ce puits ténébreux à peine éclairé par de toutes petites flammes. Des flammèches sortaient des crânes dont la calotte ouverte servait de réservoir à huile. Elles étaient placées de part et d’autre des marches révélant le chemin à suivre. Des odeurs âcres, fades ou trop suaves, des cris, des gémissements, des râles montaient des entrailles de ce séjour infernal et crépusculaire.
Plutocrus n’eut pas même une pensée pour toutes ces victimes qui par-delà la mort servait encore leur bourreau. Pour qui était étranger à ce lieu glacial, l’endroit aurait été insupportable. Ce macabre escalier le conduisit à un couloir interminable, dont les hampes des flambeaux étaient des fémurs humains. C'était une succession de autres portes, d’escaliers où s’entassaient des ossements. Les murs maculés d’un rouge brun transpiraient l’angoisse et la détresse.
Jouant machinalement avec ses trois colliers d’amulettes, l’archigalle avançait toujours d’un pas assuré.

Sublime de laideur, ses yeux sous de gris sourcils broussailleux lançaient un regard ténébreux. Un très petit nez aquilin au milieu d'une figure adipeuse et blafarde lui donnait l'air farouche d'un vieil hibou, et comme une plaie à peine cicatrisée, on devinait plus qu’on voyait sa toute petite bouche aux lèvres fines, presque blanches, se fendre d’un rictus atroce qu’il pensait être un sourire.
Le chef des Galles*, flamine* de Cybèle et d'Isis, était un homme d'une soixantaine année avec un embonpoint vénérable. Point de barbe, de rares cheveux argent, le regard mobile, louche et faux, mais parfois capable de garder une fixité extrême, la voix plaintive, câline pouvant s'élever haut dans les aigus. Des joues grassouillettes, un menton en terrasses, la main fine, potelée, encombrée de bagues, la jambe leste et bien rattachée à des petits pieds ramassés et dodus, tel était l'aspect que présentait dans son ensemble cet intéressant personnage.
Comme prêtre consacré à Cybèle, il était simplement Flamine, c'est-à-dire dans les rangs secondaires du sacerdoce Dominien. Mais ce n'était pour lui qu'une façade car, en réalité, il était le représentant du culte interdit de Lilith*.
Encore quelques pas et il parvint à la porte d'une crypte surmontée de kéroubs* grimaçants. C'était un amoncellement de cages de toutes tailles, peuplées d'une multitude d’esclaves plus morts que vifs qui, bien que n'ayant rien à attendre du prêtre, lui tendaient désespérément hors des barreaux leurs bras charbonneux. Ils imploraient un peu d’eau et de nourriture.
Il y avait un siège curule plié contre le mur. Il le déploya avec difficulté. Les montants de bois, à cause de l’humidité avaient gonflé, néanmoins il parvint à ses fins.
Il en secoua l’assise un peu moisie sur laquelle, avec précaution et presque répugnance, il s’assit.
Il y avait aussi pendant au plafond, au bout d’une chaîne rouillée, une petite cloche de bronze presque verte qu’il fit sonner nerveusement.
De jeunes galles ne furent pas longs à apparaître, tous transpirants une servilité non feintes.
Ils se prosternèrent devant leur Archigalle, qui avec un léger mépris, daigna leur donner ses ordres et ses remontrances.

  • Combien de fois ai-je demandé que la crypte soit mieux éclairée ? Combien de fois ai-je demandé que l’on change ce putain de fauteuil ? Si vous m’avez appelé, c’est que la parturiente est prête à mettre bas !
  • Oui grand prêtre. C’est une question d’heure.
  • La pièce des sacrifices, est-elle prête à nous accueillir ?
  • Oui grand prêtre.
  • Et faites un effort sur la propreté. Ce ne sont pas les esclaves qui manquent ! J’ai failli m’étaler sur des viscères. Combien de fois vous ai-je dit que le sang, c’est le vin d’amour des dieux ? C’est sacrilège de le gaspiller, regardez les dalles, le sang en a rempli tous les joints !
  • Bien Grand-prêtre, il en sera fait selon tes vœux.
  • C’est la dernière fois que je vous donne ces ordres. La prochaine fois, vous les rejoindrez dans les cages ! Avez-vous au moins pensé qu’il fallait nourrir les esclaves abandonnés à la déesse ?
  • Oui Grand-prêtre, mais comme nous savons que vous aimez les nourrir, trois officiants attendent vos ordres pour vous présenter les corbeilles.
  • Eh bien, enfin une bonne nouvelle. Qu’attendent-ils pour me présenter leur pitance ?

il frappa dans les mains. En effet, trois jeunes serviteurs aux tuniques vertes entrèrent chargés chacun d’une corbeille de jonc tressés tapissés de foin.
Elles débordaient de quartiers de chiens, de morceaux de rats mal cuits, de têtes de poissons, ou de pattes de poulets et si l’on regardait bien, on aurait pu découvrir des lambeaux de chair humaine. En connaisseur, Plutocrus huma l’odeur infecte des corbeilles sanieuses, qui semblait à peine l’incommoder. Il agita quand même devant son nez un fin tissu parfumé d’héliotrope.
Un des serviteurs lui tendit une pique dorée longue d’une coudée, négligemment, il remua à l’intérieur des corbeilles, il semblait rechercher quelque chose.

  • Et les yeux ! Où sont les yeux ?
  • Dans un pot sous la viande grand prêtre.
  • C’est bien, je vais pouvoir me distraire un peu avant de passer à des choses sérieuses.

Alors suivi des trois serviteurs portant les corbeilles, il fit le tour des cages et du bout de sa pique dorée qui valait bien plus que la vie de tous ses esclaves faméliques, il leur distribua les lambeaux de chair.
« On dit que ventre affamé n’a point d’oreilles, mais il n’a aussi point d’yeux » pensa-t-il en jetant un œil à un captif qui le goba sans faire le difficile.

  • Ils ne sont pas suffisamment affaiblis pour la suite de la conversion, il va falloir davantage les assouplir. Murmura-t-il. Puis il poursuivit plus fort pour que les galles entendent. Je veux que vous soyez une demi-douzaine à vous relayer, ils ne doivent plus dormir, je veux que vous leur frottiez les yeux la bouche et le sexe avec du poivre rouge et du jus de piments, je veux qu’ils hurlent à s’en faire péter les cordes vocales.
  • Bien Archigalle.
  • Allons voir les écorchés, combien sont encore en vie ?
  • Trois sur neuf Archigalle.
  • Que trois ? Décidément vous êtes des incapables ! Les bourreaux de Subarnipal, sont bien plus doués que vous. Décidément vous êtes des incapables ! Je veux voir cela.

Le prêtre accompagné de ses aides passèrent dans une autre salle, toute aussi morbide, toute aussi humide, toute aussi poisseuse de sang. Elle comprenait deux rangées de six colonnes avec dans certains des intervalles des victimes enchaînées et écartelées, toutes étaient plus ou moins biens écorchées, toutes étaient plus ou moins vivantes.

  • Ah ça non ! Je ne suis pas du tout satisfait ! Quel est le crétin qui à bâclé ce travail ?
  • C'est Paratos Archigalle.
  • Alors, c'est simple. Je veux qu'on l'écorche ! Et si ce n'est pas bien fait, l'écorcheur deviendra l'écorché et ainsi de suite. Je vous ai pourtant montré comment on faisait. Une peau cela ne s'épluche pas comme un vulgaire légume, c'est tout un art, d'abord les bons outils, vous utilisez quoi ?
  • Des couteaux en obsidienne comme vous nous avez demandé de le faire.
  • Mais vous ne voyez pas qu'ils sont émoussés ? Ils faut les faire retailler. Sainte Lilith, je suis entouré de bons à rien. Je vais redemander à Brutus de vous remontrer cela. C'est un idiot, mais lui il n'a pas son pareil pour écorcher un esclave, il s'applique le bougre et il fait cela très lentement, c'est simple tant qu'il n'a pas commencé à décoller la peau, sa victime ne c'est presque pas rendue compte qu'il l'avait incisée.
  • Noble Archigalle, que fait on des survivants ?
  • Oui, oui, oui... J'ai déjà essayé le sel, le vinaigre, l’huile bouillante... qu'est ce qu'il pourrait rester d'amusant à faire ? Personne n'a une idée ?
  • Non noble Archigalle, personne ne pourrait être aussi inventif que vous.
  • J'ai bien une idée, apportez un bassin rempli de cire chaude... non plutôt un tonneau et trempez les dedans. Je suis curieux de voir le résultat.
  • Bien noble Archigalle, il sera fait selon vos désirs. Mais nobles Archigalle, on les trempe la tête ou les pieds en premiers ?
  • Voyons... Les pieds devant, je ne suis pas si cruel. Je ne voudrais pas qu'ils meurent noyés.
  • Bien noble Archigalle, vos désirs sont des ordres.
  • Bien, passons à plus sérieux, où en sommes-nous avec les jumelles ?
  • Elles vous attendent au pilier de l’oubli maître, votre nain Minus dit qu’elles sont fins prêtes.
  • Allons voir cela. Après, j’ai encore à vérifier l’avancement du tunnel. Et bien qu’attendez-vous ! Je vous suis.

Plus tard dans la journée, alors qu’il avait sacrifié la vie d’une mère et de son nourrisson, alors qu’il avait jugé convenable l’avancée du tunnel et qu’il avait fait enchaîner les deux jeunes jumelles dans les cales de son bateau sous la garde de Minus, alors que l'oneraria* quittait le port d’Aquilata*, alors seulement, il put estimer que son voyage débutait sous les meilleurs auspices.
Il contempla avec ravissement un objet qui ressemblait à une carafe rempli d’un liquide rouge, presque visqueux dans lequel nageait une espèce de grosse larve qui souvent changeait de huance. « Tu m'as coûté une fortune... Il m'en a fallu du temps et des intrigues pour te posséder. C'est que tu viens de loin divine larve. Heureusement que la Civitas de Yuchekha n'avait aucune idée, ni de ta véritable valeur, ni de ton pouvoir... Sinon jamais l'Intendant du Dépotoir ne t'aurait vendu. Je te possède enfin. Nous allons faire de grandes choses ensemble. Cette garce d'Honorata m'a fait châtrer, elle va bien voir cette salope... je la ferai baiser par des ânes en plein forum. »
Dans moins de vingt jours, il serait au palais de Subarnipal, il pourrait alors sans crainte faire étalage de sa puissance et par sa voix parlerait Lilith, la déesse oubliée, celle qu’il vénérait sous le temple de Cybèle. À son retour le tunnel serait achevé, il passerait sous les fortifications du port, déboucherait dans une grotte proche des marrais.

***

Minus, son esclave, son nain, un rictus de satisfaction aux lèvres descendait dans l'entre ponts. Doucement, sans faire de bruit, il alla s’asseoir sur une caisse juste à côté de Brutus son frère, un géant aussi fort qu'il était idiot et vraiment, il était très fort.
Brutus dormait, allongé sur le dos, sa tête appuyée sur une liasse de cordes, son ronflement sonore emplissait l'air d'une vibration presque palpable. Minus parlait à voix basse pour lui même, de toute façon, son grand benêt de frère n'aurait rien compris.

  • Je jure sur les mânes de mes ancêtres, je jure qu'un jour bientôt, j'aurai sa peau, encore une fois mon maître n'a pas respecté sa parole... Il m'avait pourtant promis de nous affranchir si je lui ramenais ces deux jumelles... Eh quoi ! Elles sont ici, dans une cage, préparées à être sacrifiées pour une bête démonstration. Oui je le jure ! Plutocrus ne rentrera pas vivant de son voyage. Je suis curieux de savoir si sa Lilith le protégera du poison que je possède.



Annotations

Versions

Ce chapitre compte 10 versions.

Vous aimez lire sergent ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0