*** Le 27 juillet 2022 - 11h00 *** (04) Gestion des stocks.

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Je retirai mes chaussures et les rangeais dans le meuble destiné à cet effet qui se trouvait dans le couloir près de la porte d'entrée, puis j'allais m'asseoir dans le salon, suivie par Élise qui m'imita. Maman vint, elle aussi s'asseoir entre nous deux et passa ses bras autour de nos épaules.

— Je tiens encore à vous remercier pour votre aide, mes chéries. Vous avez fait preuve de beaucoup de force de caractère face au stress ressenti en ce début de journée. Je suis très fière de vous !

Elle nous avait dit cela en n'attendant aucune réponse de notre part, car elle s'emparai déjà de la télécommande en soupirant.

— Bon, maintenant voyons voir les dernières informations !

Et elle appuya sur le bouton qui mit le téléviseur en marche.

Lorsque l'écran s'est allumé il ne nous a pas fallu longtemps pour constater que des flashs d'infos à propos des événements étaient diffusés sur toutes les chaînes. Nous étions sans voix face aux images qui défilaient devant nos yeux ébahis. Certaines villes n'étaient plus qu'un cratère fumant, tandis que d'autres étaient déjà sous les eaux à cause des tsunamis causés par la chute des météorites dans l'océan. Il y avait eu également de nombreux éboulement suite aux séismes causés par les impacts. Tout cela était tout bonnement impressionnant car les dégâts matériels, mais aussi et surtout en vies humaines étaient inestimables !

Élise, vint se blottir contre moi et me demanda d'une toute petite voix.

— Tu crois vraiment que c'est la fin du monde, toi ?

— Je ne sais pas vraiment, petite sœur, mais les informations ne sont pas très réjouissantes, comme tu peux le voir... Honnêtement, je ne veux pas te mentir, mais j'ai un mauvais pressentiment.

En entendant mes paroles, elle se mit à renifler. Mais connaissant que trop bien son côté très émotif, je la serrai dans mes bras et lui caressait les cheveux dans un signe d'apaisement.

— Ne t'en fait pas petite sœur, sois forte. Je suis avec toi et je te promets de tout faire pour te protéger, quoi qu'il arrive. Et puis, il y à maman aussi ! Tu sais bien qu'elle n'est pas du genre à se laisser faire. Nous sommes de battantes dans la famille, et c'est ton cas aussi, même si tu ne le sais pas encore !

Maman s'était joint à la conversation en approuvant totalement ce que je venais de dire. De ce fait, Élise essuyait ses larmes avec le bas de son tee-shirt et tâchait de se ressaisir.

— Oui, Vous avez raison, nous sommes de battantes et puis surtout, nous sommes ensemble. Il faut que je me change un peu les idées, je vais aller jouer un peu dans ma chambre, je vous rejoins plus tard.

Avant qu'elle ne parte, j'essuyai la dernière larme qui perlait sur sa joue et lui collai un gros bisou sur le front, puis elle quitta la pièce. Dans la foulée maman me fit un clin d'œil en se levant à son tour.

— Bravo, grande sœur, tu viens d'éviter une belle crise de larmes ! Termine de regarder les infos, tu m'expliqueras ce que j'aurai manqué. Je vais commencer à préparer le repas pour le diner. Je vous laisse une demi-heure de tranquillité, mais ensuite, il faudra qu'on s'active ! Nous devons encore décharger la voiture et élaborer un cahier des stocks afin que je puisse calculer combien de jours nous pouvons tenir sans sortir. Pour le moment, nous avons de la chance, car nous somme épargnés, mais espérons que les choses ne s'empirent pas trop dans la région.

A peine ces mots prononcés, elle me caressa la joue, puis sortit de la pièce.

Désormais seule, j'attrapais la télécommande et zappait d'une chaîne à l'autre dans l'espoir de découvrir de plus amples informations sur cette fameuse pluie de météorites et sur les dégâts qu'elle avait engendré. De nombreux coins du globe étaient plongés dans le chaos le plus total. Les images étaient effrayantes. Le nombre de morts et de blessés était inestimable étant donné qu'on parlait de villes entières qui avaient été complètement rasées de la carte en un instant. Jusqu'à présent, plus d'une centaine de météorites avaient été dénombrées dans le monde entier. Ils pouvaient être de tailles diverses, allant de la grandeur de l'Atomium à celle d'un œuf d'oie. D'après eux, il était très probable qu'il en tombe encore ponctuellement partout dans le monde, et nous n'étions pas à l'abri d'un nouvel épisode. Néanmoins, le flux de la nuit dernière était déjà considéré par la presse comme le plus meurtrier de notre histoire en omettant l'extinction des dinosaures.

J'éteignais la TV, car toutes ces images qui défilaient devant mes yeux me rendaient du plus en plus nerveuse et je m'allongeai dans le divan afin de me détendre un instant. Les yeux fermés sur mon anxiété, je tâchais de faire le vide dans ma tête. Mais, j'eus beau essayer, je n'y parvins pas. Dix minutes plus tard, j'étais de nouveau sur pieds. Alors, je décidai de me rendre utile en vidant la voiture. Et puis, j'étais curieuse de voir ce que nous avions ramené lors de notre petite virée shopping improvisée.

J'ai rejoint maman dans la cuisine où elle s'activait aux fourneaux et je lui ai demandé où elle voulait que je range toutes nos nouvelles victuailles. Elle s'est arrêtée un instant de touiller dans sa casserole pour réfléchir à la question.

— Pose tout dans la buanderie, ma chérie. Je termine de préparer le dîner et je viens t'aider. Il est important que tu notes chaque chose que tu déballeras sur un carnet, afin de constituer un stock.

J'acquiesçais, tout en reniflant la bonne odeur qui émanait des casseroles. Mon estomac y répondit par un grondement que j'ignorais et je me rendis au garage où je m'emparais des clés qui pendaient sur le crochet. En un clic, la voiture était déverrouillée et j'en fis le tour en enjambant les bidons d'essence que nous avons abandonnés là tout à l'heure. Je me préparais mentalement à soulever les lourdes caisses en plastique qui croulaient sous les marchandises diverses que nous avions jetées dedans à la hâte. J'ai donc fait un tri sommaire de tout ça, avant que ça ne finisse par s'effondrer, puis je commençai les allers et retours entre le coffre et la buanderie. J'en étais à un peu moins de la moitié quand Élise montra le bout de son nez.

— Je peux t'aider ? Car je suis trop nerveuse pour jouer. Me dit-elle avec une moue excédée.

— Avec plaisir petite sœur, ce n'est pas de refus ! Et pour le reste, bienvenue au club ! Je n'arrive à penser à rien d'autre qu'à ça... Alors, pour penser moins, je me rends utile. Lui répondis-je en soupirant profondément.

— Je vais faire pareil, déclara-t-elle d'une toute petite voix. Le pire, c'est que j'y pense sans savoir quoi en penser exactement.

— Comme souvent, tu m'ôtes les mots de la bouche ! Dis-je en mimant avec mes mains des mots ôtés de ma bouche que je jette au sol et que j'écrase du pied. Ce qui l'a fait pouffer de rire et moi aussi. Je ne sais pas du tout quoi en penser non plus. Pour l'instant, le mieux à faire est de s'y mettre, petite sœur, car ce coffre ne va pas se vider tout seul !

Ne voilà pas qu'elle se met à taper du pied et qu'elle prend un air outré en protestant avec véhémence.

— Mais arrête donc un peu avec tes "petites sœur" ! Je n'ai que trois ans de moins que toi et je suis presque aussi grande que toi !

Surprise par sa petite crise de colère soudaine à laquelle je ne m'attendais pas, je hausse un peu la voix.

— Oh hé ça va hein ! C'est un surnom affectif, non pas nominatif. Et donc, tu préférerais que je t'appelle comment, du coup ?

Elle haussa les épaules en réfléchissant.

— Ben chais pas, moi ... Appelle-moi par mon prénom. Il est joli mon prénom, non ?

— Oui il est joli ton prénom, mais entre sœur, je trouve ça tellement formel. Enfin ce n'est pas grave, je trouverai bien autre chose qui ne déplaira pas à mademoiselle.

Elle afficha un petit air satisfait.

— Parfait ! Et surtout, tu oublies le mot "petit" dans toutes les langues et tu ne l'accoles pas à mon nouveau surnom, par pitié.

— Ça va, d'accord ! Aller, maintenant, trêve de bavardages, on s'y met !

Un certain temps c'était écoulé sans qu'on ne s'en aperçoive, nous étions afférées à tout décharger du coffre. Et quand il fût enfin vide, nous y avons rangé correctement les bidons d'essence. Une bonne cinquantaine de litres, ce qui n'était pas négligeable ! Ensuite, je demandais à Élise d'aller chercher un cahier et un Bic, ce qu'elle fit sans broncher.

La buanderie était sens dessus dessous avec toutes ces caisses posées ci et là. Quelle sinécure pour s'y mouvoir. Je me frayais donc un passage en les alignant toutes de l'autre côté de la pièce. Élise ne tarda pas à me rejoindre en me tendant ce que je lui avais demandé.

— Merci ! Bon ! Nous allons devoir noter tout le stock. Moi, je vais commencer par lister tous les aliments qui se trouvent ici, avant de ranger les nouvelles choses. Toi, je te propose d'aller faire de même dans la cuisine. Note tout sur une feuille et fais une liste à part pour séparer le frais du non périssable. Ah oui, et ne pique pas dans les casseroles en passant, chipie !

Elle s'en alla en gloussant. Et moi, je me mis à la tâche. Ça me prit une bonne vingtaine de minutes de recenser tout ce qui se trouvait dans notre petite réserve quotidienne. C'était déjà pas mal, mais nous n'aurions pas tenu longtemps avec ça. Heureusement que nous étions allées faire les courses ! J'allais quitter la pièce quand Élise réapparut, accompagnée par maman. Cette dernière était souriante quand elle s'adressa à nous.

— Merci mes chéries du vous occuper de ça. Le repas est prêt, nous pouvons aller manger. À moins que vous ne préfériez terminer, ici, avant ? C'est comme vous voulez. De toute façon, maintenant, je suis là pour vous aider, donc ça devrait aller vite.

Élise et moi échangeâmes un regard et je remerciai maman d'un ton plein d'entrain.

— De rien, maman et si c'est réellement l'apocalypse, c'est tout à fait normal que nous t'aidions. Tu nous as bien éduquées, tu sais ! Je suis d'avis que nous terminions ce que nous avons à faire ici, puis, nous irons déguster le délicieux repas que tu nous as préparé. De cette manière, nous en aurons terminé avec tout ça et nous pourrons nous reposer un peu après le repas.

Elle souriait de plus belle, les yeux brillants.

— Pour votre éducation, j'ai fait de mon mieux en tout cas ! Et pour le reste, je vous suis.

— Nous savons que tu as fait de ton mieux et nous te remercions pour ça, Tu es une maman merveilleuse ! Hein, Élise ?

— Oh oui ! Répondit-elle avec cœur, la meilleure des mamans !

Émue, elle s'approcha de nous, et nous pris tour à tour dans ses bras en nous disant qu'elle nous aimait de tout son cœur. Ce à quoi nous lui avons répondu que nous l'aimions très fort nous aussi.

Ensuite, nous nous sommes activées à trier toutes nous nouvelles victuailles. Il y avait un peu de tout. Beaucoup de boites de conserve, bien entendu, mais également plein d'autres choses utiles. Maman a suggéré de préparer quelques caisses de nourriture que nous laisserions dans la voiture au cas où nous devrions partir à toute vitesse sans avoir le temps de prendre quoi que ce soit d'autre. J'approuvais cette idée et lui parlai des sacs de survie auxquels j'avais pensé. Elle m'encouragea à les terminer et à les ajouter dans la voiture avec le reste lorsque ce serait fait.

45 minutes plus tard, tout était rangé et inscrit dans le cahier. La voiture était chargée et les sacs de survie étaient pratiquement terminés et contenaient tout ce qu'il nous fallait pour tenir 48h. Il ne nous restait plus qu'à y ajouter une tenue de rechange et nos objets personnels. Ce que nous nous promirent de faire après le repas. Maintenant, les estomacs criaient famine et, nous étions impatientes de passer à table.

Maman avait préparé les produits frais en priorité. Sur la table se trouvaient les restes du rôti d'hier, une salade garnie de tomates et de concombres et des patates en chemise saupoudrées de sel et imprégnée de beurre, c'était excellent ! La première partie du repas se passa dans un silence troublé par nos bruits de mastication, puis quand nos estomacs furent enfin apaisés, nos langues finirent par se délier quelque peu. Élise qui avait déjà dévoré tout le contenu de son assiette, pris la parole avec entrain au moment où elle se levait pour se resservir une deuxième fois.

— Ton repas est un délice, maman ! Je me régale !

C'était une remarque très juste à laquelle j'acquiesçais de bon cœur.

— Oui, je confirme, c'est vraiment un plaisir pour les papilles !

— Merci, les filles. Profitez-en bien, parce qu'à partir de demain, nous allons commencer à nous rationner en douceur. Autant que nous y mettions à notre aise, avant que nous n'y soyons confrontées de force.

Élise qui était maintenant en train de se resservir généreusement de pommes de terre, stoppa net son mouvement et leva des yeux indignés vers maman.

— Quoi ? On doit déjà, se rationner ! Tu es sérieuse ?! Mais tu as vu tout ce que nous avons rapporté du magasin ?! On en a assez pour un an au moins.

À cette réflexion, je ricanais entre mes dents en reposant la fourchette pleine de salade que j'allais porter à ma bouche.

— Mais enfin Élise, cesse de faire le bébé trop gourmand et ouvre les yeux. À nous trois nous n'avons même pas de quoi tenir quelques mois !

Maman soupirait d'approbation en hochant la tête.

— Ta sœur à tout à fait raison, Élise ! Si on continue de manger à notre rythme normal, le stock va rapidement diminuer. En plus de ça, tu es un petit ogre sur pattes, alors autant te freiner un petit peu dès maintenant, plutôt que beaucoup d'un coup, tu ne penses pas ?

Élise baissait les yeux vers son assiette en signe de soumission.

— Oui... Bon... d'accord, on va faire comme ça... Je n'ai pas vraiment le choix de toute façon.

Maman, lui lança une œillade entendue.

— Non, en effet, tu n'as pas le choix. Excuse-moi mais je suis d'avis qu'il vaut mieux prévenir que guérir.

Je marquais mon accord d'un signe de tête et pris la parole d'un ton posé, même si mon cœur battait à la chamade rien que d'y penser.

— Je suis totalement de ton avis, maman ! Mais d'ailleurs, puisque nous parlons de ça, tu ne penses pas que nous devrions peut-être tenter de retourner faire les courses demain aux premières heures ? Autant essayer mettre toutes les chances de notre côté, non ? Car, finalement cet après-midi tout s'est bien passé quand on y est allé.

Élise qui ne s'attendait pas à ça en lâcha sa fourchette de stupéfaction, avant de s'exclamer d'une voix aigüe.

— Quoi ? Mais tu es folle ! Je ne suis pas sûre que ce soit très prudent, ça.

Je haussai les épaules et me retournai vers maman qui semblait réfléchir intensément à ce que je venais de dire. Sa réponse se fit attendre quelques secondes, puis tomba comme un couperet.

— Je pense que tu as raison, ma chérie. Nous devrions tenter de ressortir afin de voir ce que cela donne. Si ça se trouve, les supermarchés environnants ne sont pas encore trop impactés par les évènements et ils auront peut-être reçu des livraisons de marchandises. Nous pouvons tenter notre chance, tout en restant prudentes, bien entendu. Élise, tu n'es pas obligée de venir, si tu ne le veux pas. Tu peux parfaitement rester ici et surveiller la maison en notre absence.

Totalement éberluée, les yeux d'Élise papillonnaient de maman à moi et de moi à maman. La seule chose qu'elle parvint à articuler était un "mais..." qui resta en suspens, tandis que les larmes lui montaient déjà aux yeux.

Le regard que maman posait sur elle un regard doux et c'est d'un geste empli de tendresse qu'elle serra sa main dans la sienne.

— Je sais ce que tu penses ma chérie, tu as peur que l'on sorte d'ici et qu'on ne revienne jamais, c'est normal. Mais je te fais la promesse que si cela s'avère trop dangereux, nous ferons demi-tour sans hésitation et que nous ferons tout notre possible pour revenir saines et sauves auprès de toi.

Élise renifla bruyamment et lâcha la main de maman pour se moucher dans sa serviette. Cela fait, elle reposa sa main sur la sienne et lui dit d'un ton qui semblait convaincu.

— Non ! Même si je crève de trouille, je vais venir avec vous. Il n'est pas question de rester ici toute seule. Et puis je vous serai plus utile dehors, que dedans.

Je lui saisis la main moi aussi et la félicitait d'un ton que je voulais enjoué.

— Ça, c'est très bien parlé petite sœur, bravo ! Nous sommes et resterons unies envers et contre tout.

— Envers et contre tout ! Reprirent-elles toutes les deux en cœur.

— Bon, les filles, maintenant débarrassons tout ça et allons regarder un peu les infos ! 

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