Chapitre 21

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Ambre 3

5 mars

Affalée sur le matelas, je fixais un point imaginaire au plafond. J'essayais de ne plus penser à rien, mais cela était plus facile à dire qu'à faire. Finalement, je me tournais vers la personne installée à mes côtés.

  • Je m'ennuie. Dis-je.

  • Hm.. Fit simplement Damon .

Il ne m'écoutait pas, trop absorbé par le bouquin qu'il lisait. Il pouvait être tellement taciturne parfois. Sa présence ne m'était pas désagréable, mais de temps en temps, quand Dean n'était pas avec nous, je me demandais vraiment ce que je foutais là.

  • Qu'est-ce que tu lis ?

  • Un livre.

  • Il parle de quoi ?

  • Tu ne veux pas te trouver quelque chose à faire ? Soupira-t-il agacé.

Finalement déçue de l'ambiance du jour, je retournais à mon occupation. Autrement dit ne rien faire. Au bout de quelques instants Damon , ferma son livre.

  • Bon, qu'est-ce que tu veux faire ?

  • Je n'en sais rien. Dis-je en attrapant une de ces mèches rebelles.

  • Tu n'avais pas des devoirs ?

  • Comme tous les jours.

  • Et tu n'as pas l'intention de les faire.

  • Comme tous les jours.

Il se leva soudainement et se dirigea vers mon sac de cours.

  • Je n'ai pas besoin de ton aide petit génie. Riais-je.

Cependant, mon sourire s'effaça très vite. Au lieu de sortir ma trousse du sac, il en sortit d'autres objets, dont j'avais oublié l'existence pendant un court moment.

  • Qu'est-ce que... Dit-il sous le choc.

Je sentais déjà les reproches fuser.

  • Je peux savoir d'où ça vient ? Me dit-il en me montrant mes papiers buvards et une fiole.

  • T'occupe Damon , je m'amuse.

  • Tu t'amuses ?

J'eus à peine le temps de me redresser, voyant qu'il fouillait encore et il sortit alors le seul objet, que je ne voulais pas qu'il voie. Pendant un court moment, une lueur sombre passa sur son visage. Une boule se forma dans ma gorge, cependant, je ne comptais pas lui montrer. Je me relevais du lit et attrapais mon sac pour qu'il cesse de regarder dans mes affaires.

  • Pourquoi tu as un couteau sur toi ? Dit-il soudainement menaçant.

  • Rien, mêle-toi de ce qui te regarde.

J'allais faire un pas en arrière, quand il m'attrapa le poignet de toute sa force.

  • Oh, tu te calmes. Me dit-il voyant l'agressivité sur mon visage.

Sans me lâcher, il s'approcha.

  • Je me répète. Pourquoi tu te trimbales avec un couteau ?

  • Pour rien. Dis-je.

  • Et je suppose que du LSD ce n'est rien non plus. Dit-il ironique et amer.

  • Parfaitement. Crachais-je en me dégageant.

  • Je fis de nouveau un pas en arrière et remis ce qui devait être caché aux yeux de tous à sa place.

  • Quand on traîne avec une arme blanche, ce n'est jamais sans raison.

  • Non effectivement, j'en avais une, excellente même. Mais il n'allait sûrement pas la connaître.

  • Qui sait, peut-être que je rackette des gamins à la sortie des écoles. Lançais-je, dans un sourire glacial.

  • Ou alors pour te défendre....

Sa remarque me fit tiquer. Je tentai de ne pas lui montrer qu'il avait vu juste, mais le tressaut que mon corps venait d'avoir n'allait pas passer inaperçu aux yeux d'un Atkins .

  • Qui ? Ambre. Dit-il dans un chuchotement de rage.

  • Personne, occupe-toi de tes affaires.

  • Occupe-toi de tes affaires ? Depuis quand tu me parles comme ça ?

  • Depuis que tu joues les petits cons curieux ?

Je savais que parler de cette façon à Damon n'allait pas m'avancer, que rester sur la défense n'était pas à mon avantage. J'aurais dû sourire comme à chaque fois, mais je sentais qu'il allait me percer à jour. Alors, je sortais les crocs. Je me sentis complètement oppressée dans cette pièce, il fallait que je sorte. Mais c'était sans compter sur le garçon buté qui était avec moi. Quand il me vit ouvrir la porte, dans un claquement elle se referma aussitôt, alors qu'il faisait barrage entre moi et la sortie. Une scène que j'avais vécue bien trop souvent à mon goût.

  • Réponds-moi Ambre.

  • Personne !

  • On ne se promène pas avec des couteaux quand on ne craint rien. De qui tu cherches à te défendre ?

  • Tu es vraiment idiot ou quoi ? Je te le dis personne. C'est juste une précaution.

  • Quand on veut prendre ses précautions, on met des préservatifs dans ses affaires et non une arme.

  • Peut-être que je suis une fille qui aime le sexe hardcore. Dis-je neutre.

Ma remarque avait été la mauvaise. Damon , qui jusque-là tentait resté calme, sortit de ses gonds. Il était facile d'énerver le cadet de la famille, mais je savais aussi que c'était une chose à éviter.

  • Lâche-moi.

Je le sentis m'agripper les épaules fermement, et me plaquer contre le mur derrière moi, quitte à me faire mal.

  • bon, tu as des choses à me dire, je crois.

  • Tu n'es pas ma mère.

  • Si je l'étais, crois-moi que je t'aurais déjà mis mon poing dans la figure pour ce que je viens de voir. Maintenant, tu arrêtes tes petites cachotteries.

  • Je ne te cache rien.

Je le vois comme le nez au milieu de la figure que tu es différente. Tu es sans arrêt en train de nous envoyer sur les roses mon frère et moi, tu ne me dis plus rien. Tu ne me parles plus de tes disputes avec tes parents, pourtant l'autre jour, j'ai pu voir un sacré bleu dans ton dos. Tu viens de moins en moins ici, tu fais comme si je n'existais pas pendant des jours... Et maintenant, je trouve de la drogue et un couteau dans ton sac ? Qu'est-ce qui t'arrive putain !?

  • Il m'arrive tout simplement que je fasse ma vie de mon côté. J'ai toujours pris de la drogue depuis que tu me connais. Ne fais pas l'enfant à un moment. Dean n'est jamais là, dès que toi et moi, on se voit, tu me décroches à peine deux mots. Tu n'as qu'à le dire si je te fais chier.

Je m'arrêtai pour reprendre ma respiration. Les hostilités étaient lancées. Il parut un peu surpris que je crie aussi fort que lui, mais après tout, il ne me connaissait pas.

  • Ambre , fumer des pétards et ça, il y a tout de même une différence. Tu ne crois pas ?

  • Je n'ai jamais dit le contraire.

  • Je sais que tu as peur, de quelque chose où quelqu'un, je n'en sais rien. Mais il suffirait que tu me le dises.

  • Ouvre bien grand tes oreilles Damon . Quoi que tu fasses, tu ne sauras jamais rien. Je ne cracherais jamais le morceau.

C'était dit, oui, je faisais tout pour garder mes mensonges pour moi, oui, je cachais bien des choses qu'il ne pouvait même pas imaginer, mais il était maintenant prévenu que, quoi qu'il fasse, je resterais muette. Enfin, il lâcha mes bras qui étaient quelque peu douloureux.

  • Bien. Fit-il en baissant la tête. Tu ne me fais pas confiance, c'est ça ?

  • Non, cela n'a rien à voir.

  • Je sais que je ne suis pas du genre à beaucoup discuter, mais en général. Ta présence est suffisante.

Cela me prit au cœur de voir soudainement que je venais de blesser Damon Atkins , cet être habituellement si imperturbable et intouchable. Pouvait-il seulement comprendre que je faisais ça pour lui, pour le préserver de ce monde si cruel et bestial ?

  • S'il-te-plaît, je te le demande une dernière fois. Qui te veux du mal ?

Pour son propre bien, je ne pipai pas Il n'arriverait pas à me faire parler. Une mine exaspérée apparue sur son visage. J'étais à la fois désolée et soulagée qu'il me laisse enfin tranquille. Pourtant, je compris que je venais de faire une grosse erreur. Sur son visage, une mine blessée restait affichée alors qu'il retournait à sa lecture. Moi, je ne pouvais bouger. Je sentais que mon silence envers le cadet des Atkins venait de briser quelque chose. Sa confiance, son amitié, je ne saurais le dire. Pourtant, il avait bien compris que dans ma vie d'adolescente normale, il y avait une chose qui clochait, un truc pas net que je cachais. Puis, après mûre réflexion, je décidais de partir de la maison voyant que j'avais vexé Damon et qu'il n'allait plus me décrocher un seul mot.

  • Damon , ne dit rien à personne...

Avais-je lâché avant de m'enfuir lâchement. Après le coup de poignard dans le dos que je venais de lui faire, il était évident qu'il allait me balancer. Je tentais tout de même ma chance en espérant qu'il m'écoute.

Je me détestais tellement de me cacher et de cacher à ceux que j'aime ma souffrance. Et tout ça par quoi ? La peur. Simplement et uniquement ça. Mon Dieu, que j'étais pitoyable, risible et temps d'autres mots qui n'étaient pas suffisants. Au loin, j'aperçus ce lieu qui était vraiment ma maison. De l'extérieur, elle ressemblait à toutes les maisons de quartier, blanches plus ou moins bien entretenues, avec quelques laissés allés au niveau du jardin. Si j'avais vécu dans celle d'à côté, où alors celle au bout de la rue... Non, il fallait que ce soit ce lieu, avec ces gens et cette souffrance. L'idée même me causa la nausée. Prise d'un haut-le-cœur, je vomissais. Je n'avais rien avalé de la journée et pourtant, j'avais encore quelque chose à rejeter. Finalement après m'être calmé, je rentrais dans cet enfer.

Mes parents étaient tranquillement assis. Mon père toujours le cul visé sur son fauteuil, ma mère très câline avec lui. Ils levèrent à peine les yeux quand ils m'entendirent. Leur comportement était étrange, plus que suspect, mais avec les années, je comprenais tout ce que cela signifiait. Alors d'un pas las, je montais une à une les marches d'escalier. Mon pou était irrégulier, des sueurs me prenaient le corps par à-coups. Sans surprise, le Monstre était assis sur mon lit attendant patiemment que je daigne montrer le bout de mon nez. Ses yeux azurent étaient tellement voilés quand c'est moi qu'il regardait. Son sourire était si, glacial, et irritable. Pourtant, je n'y fis pas gaffe et je fermais la porte de ma chambre à clef, qui avait retrouvé son verrou pour l'occasion.

2 juillet

 J'avais mal à l'estomac, j'étais dans un état presque léthargique aujourd'hui. C'était souvent comme ça quand mon frère avait décidé de pourrir un peu plus mon existence, je pouvais être sûr que dans les jours à venir, j'étais sans force, presque morte. Dans ces moments-là, j'étais faible, aussi bien physiquement que moralement. J'avais entendu mon téléphone sonné à plusieurs reprises dans la nuit, nous étions samedi. Ce devait être Jade, qui devait se demander pourquoi une de nos nombreuses fêtes se déroulait sans moi. Je n'avais cependant pas attendu de faire la fête pour me mettre dans un état second. Des joints, oui, j'en avais fumé, je ne sais plus combien. Du LSD, oui, j'en avais consommé et c'est ce qui m'avait mis dans une telle situation. Le bad Trip me guettait depuis que je ne voyais plus les garçons, et aujourd'hui, je subissais de plein fouet le revers de la médaille. Il me semble que le Monstre est venu voir ce que je faisais dans la nuit.

Mais heureusement pour moi, je n'en ai aucun souvenir. Je crois même qu'une dispute violente a eu lieu ce matin entre mes parents, à tel point que mon frère a dû intervenir. Cependant tout est trop flou pour que j'en sois sûr. Oui, j'avais passé une nuit abominable. Dans ce bad Trip, je croyais qu'à tout instant quelqu'un allait débarquer dans ma chambre pour me tuer... J'avais saisi mon couteau et j'étais restée aux aguets pendant des heures. Ce n'est que quand je suis redescendue que j'ai remarqué que j'avais enfoncé profondément la lame de l'arme dans la chair de ma main. Dans un excès de générosité, que je devrais payer, mon frère m'avait soigné cette entaille béante. À croire que les disputes de nos parents l'affectaient lui aussi et le rendait presque normal n'importe quoi... finalement j'avais décidé de prendre une douche froide pour me remettre les idées en place. Cela avait plutôt bien marché. les vertiges étaient moins accentués et je pouvais me concentrer. Cependant, alors que j'allais retourner dans ma chambre, mon frère m'interpella.

  • Ambre .

La voix métallique du Monstre ne me fit même pas sursauter. Je me retournai lentement, me demandai ce que j'avais encore bien pu faire pour avoir son attention.

  • Quelqu'un pour toi devant la porte.

Ce fut ces simples mots... Mais j'eus du mal à les assimiler. Pour moi ? Devant la porte ? Personne ne sait où j'habite, c'est idiot... Personne ne vient jamais toquer à cette maison. Qui serait assez stupide et suicidaire pour faire ça ?

Avec difficulté, je descendais les marches trouvant que mon environnement tournait toujours autant finalement. Heureusement que la rambarde soutenait mon poids. J'ouvrais enfin la porte d'entrée.

  • Que... Dis-je surprise.

  • Évidemment. Une seule personne était assez stupide et suicidaire pour venir chez moi.

  • Damon ...Quoi ?

Je me frottais le visage pour tenter de retrouver mes esprits et me reconnecter à la réalité.

  • Dure soirée ! Dit-il.

  • Oh que oui, très dure. Mais pas la même que ce à quoi il pensait.

  • Pourquoi tu es là ? Dis-je dans une voix devenue rauque à cause de la fumette.

  • À ton avis ? Je te rappelle que le téléphone existe.

  • Oui, je le savais. Mais cela faisait des mois que je ne lui adressais plus la parole...où voulait-il en venir exactement ? Voyant mon air perplexe, il continua.

  • Tu es injoignable !

  • Ah oui, j'ai changé de numéro de téléphone...

  • Quoi ? Et comment ça se fait ?

À ce moment-là, je sentis une main moite se poser sur mon épaule. Par réflexe d'auto-défense, tous les muscles de mon corps se tendirent. Je savais que depuis le début de la conversation mon frère se tenait non loin de là. Il apparaissait visiblement au bon moment. Il avait bien trop peur que je raconte à Damon que c'était lui-même qui avait changé ma ligne téléphonique pour m'éloigner un peu plus des garçons. Sa présence juste à côté de la mienne était si désagréable et pesante. Mais le cadet des Atkins avait des yeux de lynx, et ça mon frère ne le savait pas. Mais Damon remarqua le soubresaut furtif de mon corps et son regard envers le Monstre étaient un regard bien trop insistant à mon goût.

  • J'ai cassé le mien. Dis-je plus dure soudainement.

  • Je voulais qu'il s'en aille avant que je ne ramasse ses conneries.

  • Ah.! Dit-il conscient que la présence de cette troisième personne m'était gênante. Pourquoi tu ne viens plus nous voir ?

  • Je ne vois pas de quoi tu parles. Dis-je presque agressive.

  • Quatre mois que tu ne donnes plus signe de vie, sans raison, soudainement... J'ai droit à une explication, il me semble.

La main posée sur mon épaule me pressa un peu plus fort. C'était un avertissement. Premièrement, cela signifiait que Damon devenait un peu trop dérangeant pour mon frère et deuxièmement que je devais faire attention à ma prochaine réponse.

  • Je suis très occupée... Dis-je sèchement.

  • Je vois...

Il regarda une dernière fois mon frère. Un regard qui en disait long. Il comprit qu'il n'obtiendrait pas une syllabe de plus temps qu'il était avec nous. Aussi, il battit en retraite, pour cette fois du moins.

Je refermais derrière moi. À la fois le cœur lourd, car j'allais sûrement passer un mauvais quart d'heure, mais étrangement légère, car Damon ne m'avait pas oublié.

Loin de là.

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