Malaise

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Je devais passer un week-end serein chez mes parents, mais il n’en sera rien. En arrivant hier soir, ma mère m’a annoncé que le Professeur Hilgarde avait besoin de mes services durant les deux prochains jours pour garder Tristan et me payait une fortune pour ça. J’ai bien tenté de lui expliquer qu’il fallait que je me repose, puis de lui faire croire que j’avais des partiels à réviser. Hélas, mes mensonges ne l’ont pas convaincue. Ma mère n’a pas été dupe de mon petit manège préférant mettre sur le dos de la fainéantise mon manque d’envie d’aller gagner 300 euros. « Tu me remercieras quand tu les auras dans ta poche pour aller faire les soldes » a été sa dernière réplique à ce sujet.

Impossible de lui expliquer que je ne veux pas retourner chez ce psychopathe qui enchaîne des vampires. Ni qu’il m’apparaît sous la forme d’un atroce zombie quand je cauchemarde. Quant à lui révéler que je comptais trouver du réconfort dans ma chambre d’enfant après la tentative de viol que j’ai subie le week-end dernier, c’est hors de question. Ma mère aurait exigé que je dépose une plainte : c’est impossible !

J’ai donc appelé Clémentine pour lui raconter ce que je m’apprête à faire et j’ai senti mon angoisse se transmettre à ma meilleure amie. « Tu ne peux pas y aller, invente n’importe quoi ! » m’a-t-elle suppliée. Sauf que, prise de court, je ne vois pas quoi inventer… Tout subterfuge mis à jour par ma mère entraînera inévitablement des questions de sa part, questions auxquelles je ne veux surtout pas répondre !

C’est donc armée d’un sac à dos plein de fringues, de mon ordi, et d’une bombe au poivre (merci maman qui me suppliait depuis des années de la prendre) que je pars à vélo chez le professeur. J’y arrive bien plus rapidement que je ne l’aurais voulu. Il m’a donné rendez-vous à dix heures précises et je déteste être en retard. C’est Tristan qui m’ouvre la porte du manoir. Sa petite bouille est un rayon de soleil dans cette épreuve.

– Val !

Je me baisse pour le serrer contre moi.

– Salut, bonhomme. Comment vas-tu ?

– Ze suis content de te voir ! On fait une galette des Rois ? Papa a azeté ce qu’il faut.

– Acheté, le reprends-je.

– A-che-té.

– OK, on fait une galette des Rois !

Après tout, cela nous occupera au moins une heure avant le repas et m’évitera de penser à tout ce qui s’est passé ici la dernière fois que j’y suis venue. Je pénètre dans le manoir, referme la porte derrière moi puis, alors que Tristan détale vers la cuisine, le professeur surgit devant moi. J’ai du mal à rester détendue : il me scrute avec un petit air satisfait.

– Ainsi, vous êtes venue. C’est bien.

– Maman m’a dit que vous partiez pour le week-end, je ne pouvais pas vous laisser tomber !

Je tente un sourire. Celui qu’il me rend me glace.

– Vous me serez très utile ici, effectivement.

Je sens mon pouls qui s’accélère : sa phrase est à double sens, cependant je n’arrive pas à cerner où se trouve le piège. Je me force pour continuer de sourire, mais je dois plus grimacer qu’autre chose.

– Vous rentrez demain soir ?

– Vous prendrez la chambre à côté de celle de Tristan.

– Celle de votre femme ?

Ma surprise se lit dans mon intonation.

– Oui, ce sera parfait.

Nouveau sous-entendu qui me fait dresser les poils : comment ça « parfait » ? J’espère qu’il y a un verrou à la porte de cette chambre !

Il me tourne un instant le dos le temps d’attraper un sac de voyage en cuir posé derrière lui puis ouvre la porte d’entrée. Je me pousse pour lui céder le passage tout en accrochant une nouvelle fois son inquiétant regard.

– Prenez soin de vous, Valentine.

J’ouvre la bouche pour lui répondre, en vain. Il referme la porte. Je reste à la contempler en tremblant. Depuis quand m’adresse-t-il ce genre de conseils ? Je fais lentemeent demi-tour, scrutant avec appréhension l’intérieur du manoir : j’ai soudain l’impression d’y être piégée. Heureusement, le retour de Tristan me sort de mon angoisse.

– Tu viens, Val ? Z’ai sorti les pâtes à tarte et la poudre d’amande.

Je regarde le petit garçon et tente de me rassurer : le professeur ne mettrait pas la vie de son fils unique en danger ! Je me fais des films.

Je devais passer un week-end serein chez mes parents, mais il n’en sera rien. En arrivant hier soir, ma mère m’a annoncé que le Professeur Hilgarde avait besoin de mes services durant les deux prochains jours pour garder Tristan et me payait une fortune pour ça. J’ai bien tenté de lui expliquer qu’il fallait que je me repose, puis de lui faire croire que j’avais des partiels à réviser. Hélas, mes mensonges ne l’ont pas convaincue. Ma mère n’a pas été dupe de mon petit manège préférant mettre sur le dos de la fainéantise mon manque d’envie d’aller gagner 300 euros. « Tu me remercieras quand tu les auras dans ta poche pour aller faire les soldes » a été sa dernière réplique à ce sujet.

Impossible de lui expliquer que je ne veux pas retourner chez ce psychopathe qui enchaîne des vampires. Ni qu’il m’apparaît sous la forme d’un atroce zombie quand je cauchemarde. Quant à lui révéler que je comptais trouver du réconfort dans ma chambre d’enfant après la tentative de viol que j’ai subie le week-end dernier, c’est hors de question. Ma mère aurait exigé que je dépose une plainte : c’est impossible !

J’ai donc appelé Clémentine pour lui raconter ce que je m’apprête à faire et j’ai senti mon angoisse se transmettre à ma meilleure amie. « Tu ne peux pas y aller, invente n’importe quoi ! » m’a-t-elle suppliée. Sauf que, prise de court, je ne vois pas quoi inventer… Tout subterfuge mis à jour par ma mère entraînera inévitablement des questions de sa part, questions auxquelles je ne veux surtout pas répondre !

C’est donc armée d’un sac à dos plein de fringues, de mon ordi, et d’une bombe au poivre (merci maman qui me suppliait depuis des années de la prendre) que je pars à vélo chez le professeur. J’y arrive bien plus rapidement que je ne l’aurais voulu. Il m’a donné rendez-vous à dix heures précises et je déteste être en retard. C’est Tristan qui m’ouvre la porte du manoir. Sa petite bouille est un rayon de soleil dans cette épreuve.

– Val !

Je me baisse pour le serrer contre moi.

– Salut, bonhomme. Comment vas-tu ?

– Ze suis content de te voir ! On fait une galette des Rois ? Papa a azeté ce qu’il faut.

– Acheté, le reprends-je.

– A-che-té.

– OK, on fait une galette des Rois !

Après tout, cela nous occupera au moins une heure avant le repas et m’évitera de penser à tout ce qui s’est passé ici la dernière fois que j’y suis venue. Je pénètre dans le manoir, referme la porte derrière moi puis, alors que Tristan détale vers la cuisine, le professeur surgit devant moi. J’ai du mal à rester détendue : il me scrute avec un petit air satisfait.

– Ainsi, vous êtes venue. C’est bien.

– Maman m’a dit que vous partiez pour le week-end, je ne pouvais pas vous laisser tomber !

Je tente un sourire. Celui qu’il me rend me glace.

– Vous me serez très utile ici, effectivement.

Je sens mon pouls qui s’accélère : sa phrase est à double sens, cependant je n’arrive pas à cerner où se trouve le piège. Je me force pour continuer de sourire, mais je dois plus grimacer qu’autre chose.

– Vous rentrez demain soir ?

– Vous prendrez la chambre à côté de celle de Tristan.

– Celle de votre femme ?

Ma surprise se lit dans mon intonation.

– Oui, ce sera parfait.

Nouveau sous-entendu qui me fait dresser les poils : comment ça « parfait » ? J’espère qu’il y a un verrou à la porte de cette chambre !

Il me tourne un instant le dos le temps d’attraper un sac de voyage en cuir posé derrière lui puis ouvre la porte d’entrée. Je me pousse pour lui céder le passage tout en accrochant une nouvelle fois son inquiétant regard.

– Prenez soin de vous, Valentine.

J’ouvre la bouche pour lui répondre, en vain. Il referme la porte. Je reste à la contempler en tremblant. Depuis quand m’adresse-t-il ce genre de conseils ? Je fais lentemeent demi-tour, scrutant avec appréhension l’intérieur du manoir : j’ai soudain l’impression d’y être piégée. Heureusement, le retour de Tristan me sort de mon angoisse.

– Tu viens, Val ? Z’ai sorti les pâtes à tarte et la poudre d’amande.

Je regarde le petit garçon et tente de me rassurer : le professeur ne mettrait pas la vie de son fils unique en danger ! Je me fais des films.

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