6

3 minutes de lecture

Je me souviens de nos discussions sans fin dans les cafés parisiens, de ces heures passées en dehors des salles de classes, où, autour d’une tasse fumante, nous avons appris, peu à peu, à nous connaître. J’ai commencé à te suivre dans les rues de Paris, à t’écouter me raconter ton enfance, ton présent et tes projets. Nous nous sommes promenées dans les parcs, les musées, les galeries, nous appropriant cette ville si grande où nous avions toutes deux décidé de poser nos valises, attirées par cette image de ville lumière, ville de l’amour, ville de tous les rêves.

Je me suis fait une place dans un coin du studio de danse, où je te regardais bouger ton corps au rythme de la musique. Ce sport artistique ou cet art sportif n’était qu’un prétexte pour que je puisse t’observer en silence et quitter les murs gris de mon appartement. Au fil du temps, les seuls moments où nous ne voyions plus étaient la journée, lorsque tu étudiais et que je travaillais, et quand nous dormions, bien qu’il nous arrivait de plus en plus souvent de s’installer momentanément chez l’une ou chez l’autre.

Ta brosse à dents s’était faite une place sur le lavabo, ton thé préféré était rangé dans mon placard, tes vêtements se mélangeaient aux miens dans les tiroirs. Il m’était désormais impossible d’ignorer la place que tu prenais dans ma vie. Et dans mon cœur. Pourtant, malgré les évidences placées sous mes yeux, l’idée de t’avouer mes sentiments et d’imaginer qu’ils puissent être réciproques me semblait aberrante.

Pour les fêtes de fin d’année, nous sommes retournées chacune dans nos familles. Habituée à te trouver toujours dans les parages, ces deux semaines loin de toi m’ont paru interminables. Tu hantais mes pensées, j’étais dépendante de toi, même la magie de Noël ne parvenait pas à t’effacer de mon esprit. Au vu des nombreux messages que tu m’envoyais, je ne pense pas me tromper en disant qu’il en était de même pour toi, bien que sur le moment je n’y croyais pas et pensais simplement que tu t’ennuyais. Mais au retour des vacances, il a bien fallu que je me rende à l’évidence : ce que je n’osais espérer, imaginer, était une possibilité que je pouvais toucher du doigt, saisir à pleines mains et protéger au fond de mon cœur.

C’était chez toi. Dans ton appartement, à peine plus grand que le mien. Le ciel était noir, les étoiles éclipsées par les illuminations de la ville. Tu étais sous la douche. Je réfléchissais trop. Je voulais t’embrasser, te tenir la main. Je voulais plus mais j’avais peur de ce plus. Et si je me trompais depuis le début ? Et si je ne te plaisais pas du tout ? Et si je n’avais pas été assez prudente ? Que j’avais dit quelque chose qu’il ne fallait pas, fait quelque chose qu’il ne fallait pas, sans m’en rendre compte ? J’avais besoin de savoir où tout ça nous menait, ce qu’on était.

J’étais encore plongée dans mes pensées, les yeux dans le vide, lorsque tu es sortie de la salle de bain, vêtue d’un pyjama informe. Tes cheveux mouillés tentaient de se redresser sur ta tête. Putain que t’étais belle. On s’est lovées dans le lit et on a parlé toute la nuit. De tout et de rien, mais surtout de tout.

Tu savais que je sortais d’une dépression, qu’il m’arrivait encore de voir son ombre dans la nuit. Tu m’as demandé si je voulais bien en parler. T’expliquer. Te raconter. Alors je l’ai fait.

Annotations

Vous aimez lire Otter de lune ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0