25 -  Ariana

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Ariana

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   Nous avons trouvé un hôtel pour ce soir. Histoire de ne pas rester cloîtrés dans notre voiture indéfiniment. Hôtel pris sous un faux nom bien sûr, pour éviter que quiconque ne puisse nous pister et nous tomber dessus.

Debout devant le miroir de la salle de bain, je fixe mon reflet avec colère. Cette colère glaciale qui ne m'a pas quittée depuis hier, qui me brûle et m'étouffe, qui rend chaque respiration douloureuse et chaque pensée inflammable.

Donni a osé me prendre mon petit frère. Il a eu le culot de lui voler sa confiance pour mieux le manipuler et en faire sa poupée. L'autre jour, il a eu le toupet de me saluer d'un mouvement de tête respectueux.

Lorsque je le trouverai, j'honorerai mon tatouage à l'épaule, je ferai ce que n'importe quel Cortez aurait fait, et qu'importe la suite : je tuerai Donni de mes mains, et rendrai son corps aussi méconnaissable que l'était celui de Lina.

La porte s'ouvre et Hugo apparaît, l'air aussi miné que moi, les cheveux en bataille et le regard électrique.

— Tu devrais dormir, t'as une sale gueule, me lance t-il.

— Et toi tu ferais mieux de fermer ta gueule, après ce que t'as fait.

— Je pouvais pas savoir.

— Il était soupçonné il y a deux ans, papa voulait sa peau, et toi tu l'as pris comme bras droit.

Mes mots lui font mal je le sais, son visage se décompose et une chair de poule aussi visible qu'inattendue s'empare de ses avant-bras.

Il est mal, et c'est bien fait pour lui.

Je lui avais demandé de faire quelque chose pour éloigner Damian du gang, pour le freiner dans son besoin presque irrépressible d'aller se mettre en danger à leurs côtés, il ne m'a pas écouté, et voilà le résultat.

Donni les a eus tous les deux, il a eu ce qu'il voulait, et j'ai hâte de connaître ses raisons, si tant est qu'il en ait.

Il aurait dû être arrêté il y a deux ans, à la place de papa. Cependant, il était plus facile d'accuser le grand chef qu'un simple sbire. Je savais que Donni n'était pas fiable, j'en ai parlé à Hugo. Qu'à t-il fait dans sa rébellion ridicule et destructrice ? Il l'a gardé, lui a donné de nouvelles responsabilités, l'a laissé grignoter du pouvoir et du terrain, pour au final retourner auprès de son gang d'origine, les King100.

— Papa...

— Papa, qu'importe l'être abject qu'il peut être parfois, ne te pardonnera pas d'avoir laissé Dam entre les mains d'un type qui l'a conduit tout droit au cœur d'un réseau de prostitution. Il te flinguera peut-être pas, mais tu seras radié. On avait la mission de protéger Dam et les jumeaux, quelle franche réussite !

D'un geste souple, je sors une cigarette de ma poche pour me l'allumer et en tirer une bouffée considérable. De l'herbe ne serait pas de trop, de l'acide même, pour bien me péter la tête, oublier, arrêter de penser à ce qui doit être en train de se passer dans cette ville, entre les murs d'un hôtel ou dans une ruelle.

Mes mains se crispent, mes doigts se bloquent, et je casse ma cigarette en deux, sans le vouloir.

— Tu devrais te détendre, vraiment, murmure H.

— J'aimerais bien savoir comment tu fais, si t'as une formule magique ? Perso, c'est compliqué de me détendre pour le moment.

— On a rendez-vous avec ce type dans une heure.

— La belle affaire. En une heure, combien de passes peut enchaîner un gamin selon toi ?

Mes propres mots plats, sans aucune émotion, me terrifient. Je crois que tant que Damian ne sera pas là, devant moi, en vie, je ne pourrais pas sortir la tête de cette peur muée en fureur qui me domine et m'asphyxie.

Peut-être que je suis en train de flancher.

Hugo s'est crispé. Toujours derrière moi, il me fixe à travers le miroir.

— Je suis désolé Ari.

— Tu diras ça à Dam. Moi j'en ai plus rien à foutre de tes états d'âme.

Et sur ces mots, je me redresse après avoir écrasé mon mégot dans l'évier, le fusille une dernière fois du regard, et quitte la salle de bain.

Jay dans la chambre, est en train de lacer ses chaussures, concentré, la langue entre les dents.

— J'ai un pochon dans mon sac.

— Super, bonne fumette à toi.

Je dois sortir m'aérer, avant de m'en prendre à l'un d'eux.

Rapidement je traverse l'hôtel, pour me retrouver dans la rue, sombre et étouffante, en compagnie de mon petit ami au téléphone.

À sa discussion, je saisis qu'il parle avec Samuel. Alors, je lui fais les yeux doux pour le convaincre de me passer le portable, une fois qu'il en aura terminé.

Les mots de Rafaël sont doux, prévenants. Il parle de chances, de piste, de possibilités et d'espoirs. Drôle de discours dans ces circonstances, mais qu'importe. Voir Rafaël joué l'optimiste pour une fois, a le don de me rassurer.

Si même lui y croit, c'est qu'il doit bien y avoir une chance qu'on retrouve Damian avant qu'il ne soit trop tard.

Il souhaite une bonne soirée à son frère, avant de me tendre son portable.

— Salut petit chat.

Un rire triste s'élève à l'autre bout du téléphone. Samuel me paraît si loin, voix éteinte à travers un micro, que mon cœur déjà serré, se tord sur lui-même pour se faire encore plus petit.

— Raf m'a dit que vous avez une piste ?

— Oui, un homme nous a donné un numéro ce matin. Ton frère l'a appelé cet après-midi, et il veut bien nous rencontrer.

Vous ?

— Non, que Raf et H.

Il acquiesce, me donne des nouvelles des jumeaux, qui s'évertuent à clamer que tout va bien, alors que c'est la ''guerre'' dans leur tête. J'essaye d'avoir plus de détails, mais Samuel reste très vague, ne met pas vraiment de mots sur les faits.

On parle encore un peu, puis Sam me passe Fiona, après m'avoir souhaité bon courage, une nouvelle fois.

Danny a appelé madame Kaya, me balance t-elle abruptement. Elle est au courant.

Mon cerveau court-circuite un instant, avant que je ne remette un visage sur ce nom isolé.

Notre assistante sociale. Celle qui a clos notre dossier après s'être fait tirer dessus.

J'inspire par le nez, et lui demande ce qu'elle en a pensé.

— Elle a prévenu la police.

— Et ?

— Et je leur ai expliqué deux-trois trucs au téléphone. Ils vont faire une descente chez les King demain.

Mon cœur respire un bref instant.

Nous parlons encore un peu avec Fiona, de ce qu'ils prévoient de faire exactement, du départ des jumeaux demain matin pour le ranch des grands-parents Portgas.

Puis, comme Samuel, elle me souhaite de rester calme et réfléchie, avant de me promettre que tout ira bien.

Je raccroche, et tends son portable à Rafaël avant de soupirer, les yeux clos. Sa main vient instinctivement se passer dans mes cheveux, me caresse doucement, tente de m'apaiser.

— Donni devait savoir pour toi, non ? Sinon, pourquoi il aurait laissé ce fond d'écran ?

— J'en sais rien, murmure t-il en me prenant contre lui. Peut-être ? J'ai pourtant toujours été cordial avec lui. J'ai jamais eu un mot plus haut que l'autre.

— Ça me tue d'avoir rien vu, tu peux pas savoir.

Lentement, ses mains passent autour de ma taille pour me serrer contre son torse. Je sens, même à travers son tee-shirt, con cœur tambouriner contre mon dos.

— Ce mec, c'est le bon, j'espère.

— On va croiser les doigts.

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