24 - Damian

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Damian

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   Lorsque j'ouvre les yeux, dans le noir complet, je suis plus que nauséeux, complètement ailleurs. Mon visage contre un sol métallique glacé me semble engourdi : comme paralysé, il m'est compliqué de cligner des paupières ou d'ouvrir la bouche pour respirer.

Mes bras tordus dans mon dos me font atrocement mal. Je sens distinctement le cordage à mes poignets, solide et coupant.

Qu'est-ce qui se passe... ?

Avec toute la force dont je dispose, je me retourne sur le dos, et tente de m'asseoir. Mes jambes aussi sont solidement attachées, pas moyen de me mettre debout. De plus, ma cicatrice à la cuisse, celle causée par le coup de couteau au parc, me lance et me tire, comme si elle s'apprêtait à se rouvrir. Je tourne la tête en tous sens, inspire, tente de comprendre.

Ça sent l'huile de moteur et la poussière.

Je suis dans une voiture, un petit camion peut-être. L'espace où je me trouve est trop petit pour être un simple coffre, et le mouvement sous moi me permet d'assurer que nous sommes en mouvement.

Confus, mon esprit tente de faire le point. Je me souviens de l'hôpital, de l'urgence de Rafaël, de mon début de marche du lycée jusqu'à chez moi puis...

Black out, une nouvelle fois.

Ça craint. Ça craint vraiment.

En me déplaçant du mieux que je peux, j'essaye de tâtonner autour de moi, de trouver la porte de ce coffre, si tant est qu'il y en ait une.

Les parois sont humides sous mes doigts, et la chaleur de l'endroit est différente de celle de Soledo. Plus humide, plus moite, ça ressemble au climat régnant chez nos grands-parents au Mexique.

Dos aux parois du véhicule, je remue mes mains comme je le peux pour assimiler, en apprendre le plus possible sur ma prison de métal roulante.

L'une des parois bouge plus que les autres ; les portes, je les ai trouvées.

Il y a une poignée intérieure, qui ne fonctionne pas lorsque j'essaye de l'abaisser. Et, de toute façon que ferais-je une fois la porte ouverte ? Je sauterai en plein vol ? Ça me tuerait, j'ai l'impression que nous roulons vite. Le problème étant que ma situation ne me permet pas de savoir si je ne serais pas abattu une fois arrivé à destination. Dans le flou total, impossible de faire un choix rationnel. Et puis, peut-être qu'en sautant en marche, il me serait possible de m'en tirer avec un bras ou une jambe cassée ? Après tout, ils le font souvent dans les films, non ?

Quel autre choix ai-je ?

Après avoir pris de l'élan, je me jette contre la porte, épaule en avant. Résultat, un craquement sourd de mes os, et un léger tremblement. Mais surtout, un bruit sourd, bruyant, qui à coup sûr a attiré l'attention du conducteur.

Peu importe. Je réitère l'opération, encore plus fort. Cette fois-ci, je crois bien sentir mon épaule se défaire.

Mon cri de douleur me surprend moi-même, et je me laisse retomber par terre, épuisé, le corps en miette. Ma respiration est saccadée, erratique. L'air confiné est irrespirable, j'ai l'impression d'avaler de la poussière à chaque inspiration.

Quelques secondes plus tard, le véhicule s'arrête, et j'entends dans le silence une portière claquer. Des pas lourds écrasent un bitume sec, puis les portes s'ouvrent.

Dans l'obscurité de la nuit, je ne discerne pas grand chose, si ce n'est la silhouette massive de l'homme face à moi. Une lampe torche à la main, il me pointe du faisceau lumineux, m'aveugle.

La même odeur que celle que j'ai sentie avant de me faire piquer vient chatouiller mes narines.

— Reste tranquille un peu !

Je défaille alors une nouvelle fois. Cette voix, rauque qui tonne et me menace, c'est celle de Donni.

C'est... impossible.

— Donni ? Putain, mais qu'est-ce que tu fous ?

La lampe torche s'agite, et alors je peux mieux discerner l'intérieur de ma petite prison : un coffre de camionnette, j'avais raison. L'intérieur est sale, délabré.

La panique commence alors à me saisir à la gorge, pour la première fois depuis mon réveil.

Je suis ligoté, dans une camionnette conduite par Donni, et à en croire le climat, nous sommes au Mexique ou du moins, pas loin de la frontière.

La nausée redouble.

— Tu... pourquoi je...

— Désolé el principe, la roue tourne, et elle vient de t'écraser.

Un rire gras suit sa réplique, avant que les portes ne se referment dans un battement.

Alors je me jette en avant, je donne de grands coups dans la porte avec mon autre épaule, celle encore valide. Je hurle, je frappe, j'interroge, puis je finis par me taire.

J'espère que Ariana est en sécurité.

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