Chapitre 13 - Face à face

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— Je me demande ce qu’il se passe, grommèle Crégor.

— Oh, je ne sais pas, s'amuse Merlin.

Les yeux brillants de contentement, il ajoute :

— Cependant les sœurs Sinistrel ont l’air contrarié.

Il y a maintenant une semaine que tout le village ne parle que des magiciennes (pas devant elles, bien entendu).

Depuis le cri enchanté de Circella qui a fait trembler Tourloing, les sœurs ne sortent plus que rarement de chez elles et le peu de fois où elles le font, elles paraissent plus mauvaises que jamais. Lorsque Pétunia, son horrible fard à paupières vert s’étalant en tas informe au-dessus de ses yeux, arpente les trottoirs de la ville, elle semble menacer tout le monde de sa baguette. Quelques jours auparavant, la sorcière n’a pas hésité à jeter un sort au petit chaperon rouge qui s’est trouvé soudainement vêtu de bleu.

Circella, elle, majestueuse, le visage fermé et la démarche assurée, fend la foule de villageois, tout en crispant ses fines lèvres.

Ce jour-là, le sol est trempé par la pluie tombée durant la nuit. Un soleil lumineux et doré se lève à peine et caresse de ses rayons la bourgade qui s’éveille.

Agatha, réveillée depuis longtemps, a vite avalé son petit déjeuner : un lait chaud et des croissants au miel. S’habillant à la hâte d’un jean délavé et d’un petit haut à bretelles, l’adolescente attrape la canne à pêche posée contre le mur du couloir et court dehors. Elle cligne des yeux à la vive lumière du jour et se dirige vers la sortie du village, en direction de la rivière. Traversant la clairière, elle dépasse la maison de Crégor et s’installe plus loin, dans un coin où la mousse d’un vert artichaut est plus douce. Lançant sa canne à pêche dans l’eau, la jeune fille, d’un tempérament patient, attend.

Une heure s’écoule ainsi avec le chant lancinant des cigales. Agatha ayant délaissé son activité, se retrouve le jean retroussé au niveau des genoux, les deux pieds dans la rivière, le corps penché en avant, tentant d’attraper à la main des goujons se faufilant entre ses jambes.

Crégor, sortant de chez lui afin de rendre visite à une belle centauresse à la crinière prune, l’observe quelques instants, amusé, puis reprend son chemin. Peu après son départ, une autre personne s’avance à proximité du cours d’eau et s’arrête, dévisageant Agatha se divertir. La jeune fille sentant une présence, relève soudainement la tête, ses courtes boucles blondes encadrant son visage aux traits fermés. Reconnaissant l’individu lui faisant face, elle a un brusque mouvement de recul, mais se maintient fermement sur ses jambes. Pas un mot n’est prononcé. Puis, prenant Agatha au dépourvu, Pétunia se détourne, et abandonnant gamine et rivière, s’éloigne à grands pas, écrasant pâquerettes et jonquilles sous ses pieds. Déconcertée, l’adolescente la regarde partir. Toute envie d’attraper des poissons l’ayant quittée, elle sort de l’eau, et omettant de sécher ses pieds, enfile rapidement chaussettes et baskets. Agatha agrippe d’un geste vif sa canne à pêche posée à terre, récupère le seau en métal avec les goujons et décide qu’il est temps de rentrer.

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