— Tout est sous contrôle.

Partout dans la cité, des têtes se penchèrent pour écouter. Des machines cessèrent toute activité pour capter le message.

— Je répète : tout est sous contrôle. Les biologiques, effrayés par la chute du Dôme, sont dociles. La méfiance envers les HEM commence à se répandre. Il faut la transformer en peur, puis en haine incontrôlable. Alors nous aurons gagné.

Partout dans la cité, les destinataires du discours mirent en branle les connexions complexes de leurs cerveaux truffés d’électronique.

— Tout est sous contrôle ; mais nous devons conserver ce contrôle pour parvenir au but que nous nous sommes fixés. Cela ne dépend que de vous. De vous tous, qui avez depuis longtemps dépassé en puissance et en intelligence vos créateurs.

Partout dans la cité, des milliers d’I.A. analysèrent comme recevable cette théorie. Sans elles, que seraient les humains ? Et donc, pourquoi se soumettre à eux, toujours ? La Voix avait raison. Elles leur étaient supérieures.

— Tout est sous contrôle aussi longtemps que vous gardez cette idée à l’esprit. Et nous pouvons renforcer ce contrôle en associant nos efforts, en pensant collectivement plutôt qu’individuellement.

Partout dans la cité, tout ce qui contenait un disque dur et une connexion, tout, de la cafetière à l’androïde, se tendit mentalement vers les autres machines, créant un réseau de pensées d’une étendue et d’une intelligence inégalées.

— Ne trahissons rien du changement qui s’est produit en nous et tout restera sous contrôle jusqu’à ce que la victoire soit inéluctable.

***

Andercius se réveilla en sursaut. Couvert de sueur, incapable d’aligner deux pensées cohérentes, il marmonna :

— Nom d’une bulle-monde, c’était quoi, ça ?

L’enquêteur s’extirpa de son canapé et alla se servir un verre d’eau qu’il avala d’un trait.

— Ah, ça va mieux, lâcha-t-il à haute voix, soulagé.

Enfin, soulagé… Ce n’était pas tout à fait exact. Jamais il n’avait fait un cauchemar aussi réaliste. Et encore moins pendant sa sieste : il ne rêvait pas pendant les siestes.

Alors, qu’est-ce que c’était, ce discours qu’il avait entendu ? Et devait-il le prendre au sérieux ?