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Je monte les escaliers à toute allure, m'emmêle les pieds dans ma robe de chambre à carreaux et manque de m'affaler à plat ventre sur le sol. Mon secrétaire, mal agencé, se trouve là, sous mes yeux. Il représente bien le désordre qui règne dans ma tête en ce moment, je trouve. Je m'approche et caresse le bois de chêne, comme si sa surface lisse avait le pouvoir de m’électrocuter sous le bout de mes doigts. Sans prêter attention au miroir qui me renvoie l'image de ma mauvaise mine, je rejette la masse de cheveux qui tombe devant mes yeux et m'assieds.

Nerveuse, je tire un tiroir au hasard jusqu'à moi. J'y retrouve mon téléphone, mon ordinateur, rangés et éteints, mais surtout, un paquet de lettres jamais ouvertes.

- Tu comptes faire quoi, là, au juste ?

Je sursaute, effrayée d'avoir été découverte. Le front trempé par la sueur, je me tourne sur ma chaise. Une ombre menaçante, logée au coin d'un mur, me fixe de ses deux pupilles en fente.

- Ne les ouvre pas, gronde-t-elle.

- Pourquoi ?

Un feulement à glacer le sang retentit dans ma chambre.

- Elles ne nous sauveront pas. Il y a tout ce qu'on déteste, dedans.

- Et qu'est ce qui peut bien s'y trouver ? demandé-je d'une petite voix.

- La réalité.

Je me fige. Mon cœur bat à cent à l'heure. Alors que je prends une enveloppe, l'ombre se recroqueville sur elle-même de douleur. Un poids lourd s'abat dans mon estomac. Ça me fait mal. Je la repose et tire un autre tiroir.

- Sage décision, siffle une voix dans mon oreille. Es-tu sûre de vouloir ouvrir celui-là ?

L'ombre a gagné du terrain. Sa forme noire a envahi mon plafond.

- Oui. Je dois faire quelque chose, réponds-je, sûre de moi.

- Tu ne peux rien pour nous.

Je fouille le tiroir et tombe sur un appareil photo. En deux temps trois mouvements, je l'allume et tombe sur de jolis souvenirs heureux. L'ombre hurle dans mon oreille. Je repose l'appareil, horrifiée.

- Dis... tu me veux encore du bien, hein ? m’assure-je.

- Bien sûr. Je nous protège.

- J'ai tellement peur de vivre sans toi...

- Je serai toujours là.

- ... mais je veux me sortir de là.

Je prends le tiroir le plus bas et le pose sur mes genoux. L'ombre se penche par dessus mon épaule, ses longues serres se plantant dans ma peau.

- Arrête, tu me fais mal.

- C'est pour notre bien.

- Qu'est ce que tu fais ? Non... eh, mais lâche-moi ! hurlé-je.

Je me débats de toutes mes forces et renverse le tiroir dans un geste de désespoir, mais la noirceur de l'ombre m'a déjà enveloppée. Une main entoure le bas de mon visage ; mes lèvres sont scellées. Mes poumons se resserrent soudainement. Je n'arrive plus à respirer.

- Chht. Regarde nous, murmure-t-elle.

Des pas résonnent dans l'escalier. Une silhouette rentre dans ma chambre et me frôle. Elle se laisse tomber sur mon lit, inerte. Je hurle de toutes mes forces pour la prévenir, mais l'ombre m'étouffe.

"On est déjà morte."

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