Mon père, ce héros...

de Image de profil de jean-alain Baudryjean-alain Baudry

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Imaginez un grand type. Une espèce de géant massif. Avec des paluches comme des battoirs. Il aurait pu d’un seul coup de poing assommer un veau. Je le revois immense imposant trônant au bout de la table. Sans un mot dans un silence religieux il sortait son opinel grand modèle de sa poche. L’ouvrait. Tournait délicatement la virole pour bloquer la lame brillante. Puis, il prenait de sa main gauche la miche de pain entamée de la veille. Coupait une large tartine qu’il posait près de son assiette. Non pas pour se servir en premier mais parce que l’entame était un peu sèche sur le dessus. Il en coupait une deuxième, la meilleure, là où le pain est à la foi rassis et moelleux, et la posait près de l’assiette de ma mère. Ensuite il découpait les suivantes et les lançait avec précision à mes frères et à mes sœurs en commençant par moi qui étais l’aîné. Honte au maladroit qui laissait tomber sa tranche de pain. Sauf ma petite sœur trop jeune. C’est ma mère qui la lui posait dans son assiette.


« Héla... Héla... Mais tu m’as toujours dit que tu étais fils unique » « Oui et alors ? »

« Ben... qu’est-ce que c’est que ces histoires de tartines... de géant débonnaire... de famille nombreuse ? » « Je trouve que ça fait bien pour commencer... Bon... Ben... »

Mon père était petit et sec. Le type méditerranéen. Les cheveux frisés et noirs. L’œil perçant. Les gestes vifs. Toujours agité quand il parlait et il parlait tout le temps. Dans la famille on l’avait surnommé l’ovni. Il y avait des bruits qui courraient. On disait que ma grand-mère l’avait eu avec un italien qui fuyait le fascisme. « Stop... » « Quoi stop ? » « Ton père il est né avant la guerre de 14 ? » « Oui en 1913 pourquoi ? » « Mussolini c’est APRES la guerre de 14. »

Mon père... TROISIÈME

Dans mes souvenirs il était au bout de la table. Tout mou et bedonnant. En train de regarder d’un œil morne le brouet que ma mère nous servait chaque jour. Une espèce de sauce avec toujours le même goût fadasse. En fait, elle ne faisait jamais le même plat mais le résultat ne variait jamais. Quoiqu’elle cuisine ce qui sortait du réchaud à gaz finissait par se ressembler en fin de cuisson. Mon père sauçait son assiette consciencieusement. Il passait et repassait son pain jusqu’à ce qu’il ne reste plus aucune trace de nourriture. On aurait pu la remettre dans le buffet. Pendant ce temps ma mère et moi parlions de tout et de rien. Quelques fois il plaçait un mot. Comme on ne s’occupait pas de son opinion il renonçait dans l’indifférence générale. « Ça ne colle pas. » « Qu’est-ce qui ne colle pas ? » « Tu m’as toujours dit que te mère était malheureuse avec lui. Qu’elle pleurait sans cesse. » « T’es chiant... Tu me demande de décrire mon père. Mais qu’est-ce que tu veux que j’en dise. C’est littéraire ce qu’il faut que je fasse. Si je raconte la vraie vie ça n’intéressera personne. En plus mon père... Mais qu’est-ce que j’en ai à foutre de mon père... Des souvenirs d’enfance il faut que ça se tienne... Que ça soit haut en couleur... Regarde PAGNOL... BAZIN... et j’en passe... Mais si tu veux, je vais te parler de ma mère. » « Arrête... Arrête... T’es nul... Change de sujet. »

« T’AS PEUT-ÊTRE RAISON... 

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Mon père, ce héros...Chapitre5 messages | 6 ans

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