Partie 2 : Thalas

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Accompagnant le soleil levant, une chaleur venue tout droit des enfers germa dans le bas de son dos, tirant Thalas d’un mauvais sommeil. La souffrance innommable s’imposait à lui avant même qu’il n’ouvre les yeux… La routine continuait simplement son cours, alors à quoi bon réagir ?

La vie du roi d’Ushar était réglée comme une horloge. A peine fut-il assis sur son lit que les premiers serviteurs demandèrent à entrer dans la chambre luxueuse pour aider leur maître à se préparer. Alors que Thalas se plaça face large miroir d’argent fixé au mur dans un cadre ouvragé. Un serviteur apporta les vêtements qu’il porterait aujourd’hui. Deux autres l’aidèrent à retirer sa tenue de nuit.

Son corps nu, certes bien sculpté, avait perdu beaucoup de poids ces vingt dernières années, affaibli par la douleur. Sa haute taille rendait sa maigreure encore plus flagrante. Sa peau pâle, presque intacte, portait quelques ecchymoses éparses, souvenir de ses récents entraînements à l’épée, qu’il voulait manier aussi bien qu’avant l’accident.

L’accident… Oui, celui qui avait détruit sa vie, qui avait failli le conduire à sa perte, à la mort… Qui avait marqué son corps à jamais, y laissant la pire des cicatrices... Au niveau de sa hanche droite, des mâchoires s’étaient refermées avec une puissance jamais égalée dans le règne animal. Le monstre n’avait pas mordu pour tuer : il n’avait pas visé la gorge, ni la tête, ni un organe vital… Non, il s’était défoulé, pour décharger sa rage sur la proie qu’il avait attrapée. Sa chair était marquée à vie au niveau de sa hanche et du bas de son dos. Sa peau fut arrachée, sa chair retournée et ses os en miette. Aujourd’hui, de profondes cicatrices étaient toujours visibles et déformaient son bassin.

Thalas s’arracha à ses souvenirs douloureux pour considérer les tenues que lui présentaient ses serviteurs. Tout d'abord, on l'aida à enfiler des vêtements moulants, qui laissaient voir le défaut de sa posture. Cousus dans de riches tissus, ils étaient dignes d'un roi. Puis on glissa sur ses épaules l'un de ses larges manteaux aux couleurs du royaume. C’était autant une marque de pouvoir, qu’une manière de dissimuler la difformité de son bassin. On l'aida ensuite à mettre ses nombreux bijoux et ses bottes sombres. Un serviteur s'approcha enfin avec un petit coussin rouge aux coutures d'or sur lequel reposait la couronne royale. Thalas attrapa la couronne et la déposa sur sa chevelure noire parsemée de cheveux gris, tandis que son autre main restait appuyée sur sa canne.

Les préparatifs durèrent un peu plus longtemps que d'habitude. C'était l'anniversaire du couronnement du roi. A cet occasion, un grand nombre de personne se déplaçait jusqu'au château pour le rencontrer et lui offrir un présent. Des riches et des pauvres, des suzerains et des nobles étrangers qui cherchaient sa bonne grâce… À croire que tout Fasnor se donnait rendez-vous dans son palais. Cela durerait toute la journée, Thalas n'aimait pas cette perte de temps mais il n'avait pas d’autre choix que de faire bonne figure devant ses sujets.

C'était si long…

Le roi, installé sur son trône, accueillait chaque visiteur avec un sourire. Seul : la reine n'était pas conviée. Elle avait d'ailleurs quitté le palais ce jour-ci. Thalas voyait un peu de tous dans les cadeaux, des objets de valeurs, des vêtements, de la nourriture, des animaux… Bref, on lui offrait des choses dont il n’avait que faire et ça en devenait lassant. Malgré tout, un homme parvint à le surprendre.

Alors que la matinée traînait en longueur, un homme vêtu presque intégralement en noir se présenta. Thalas ne le connaissait pas. Mais très vite, son attention dévia sur celui qu'il traînait par le cou au bout d’une chaîne. Un esclave ? Cela faisait longtemps qu'on ne lui en avait pas offert un. Le roi avait bien assez de serviteurs. Ce genre de cadeau était risqué… Mais après tout, il avait déjà bien assez de tout ce qu'on pouvait lui offrir.

— Mes respects, mon roi. Je m'appelle Tendal. Je me présente face à vous en ce jour pour vous offrir ce présent.

En finissant de parler, l'homme en noir tira le jeune homme blond qui tomba à genoux entre eux. Thalas prit alors le temps d'observer celui qu'on lui présentait.

Cet esclave était particulièrement mignon. Son physique plaisait en tout point au roi qui gardait malgré tout un air plutôt neutre en analysant le jeune homme. Ses cheveux blonds et ébouriffés comme des épis de blé, sa carrure frêle qui lui donnait un petit côté fragile… Il aimait ça, mais cela ne suffirait pas.

— Très bien… Mais qui es-tu, Tendal ? D'où viens-tu pour penser que je manque de serviteurs prêts à se plier en quatre à mes moindres volontés ? Qu'a-t-il de plus que les autres ?

— C'est bien simple, mon roi, répondit Tendal, ignorant les premières interrogations de Thalas. Ce jeune homme possède un don des dieux ! De ses mains, il est capable d'apaiser temporairement n'importe quelle souffrance.

Le roi avait bien remarqué que le nouveau venu éludait la plupart de ses questions… Cependant il ne put relever car sa dernière phrase l'ébranla… Était-ce possible ? Seul un léger haussement de sourcil marqua sa surprise. Mais en son fort intérieur, l’émotion était bien plus marquée. Pourrait-il ressentir à nouveau, ne serait ce qu'un instant, la tranquillité d'un corps sans souffrance ?

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