Chapitre 7 : Des ruines pour remparts (1)

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Alors que les cinq possédés s’approchaient de Vyrian et Kela, les fissures présentes sur les murs s’illuminèrent, révélant de complexes motifs qui nimbèrent les lieux d’un voile bleuté. De chaque côté du couloir, des parois d’eau sortirent des interstices entre les pierres et se rejoignirent formant une première barricade. Une seconde protection s’éleva du sol jusqu'au plafond.

L'un des Altériens se fit surprendre par le dispositif et se retrouva piéger par l'une des parois aqueuses. Le malheureux se débattit et pour chaque coup porté, Vyrian pouvait voir la structure se densifier. Lorsque le prisonnier cessa de s'agiter, ses doigts étaient brisés et ses jambes tordues sous les impacts de ses coups. L'homme commençait à perdre connaissance sous l'effet de la douleur et du manque d'oxygène. Ils le regardèrent expirer les dernières bulles d'air, avant qu'il ne sombre définitivement. Mort, l'Altérien n'opposait plus aucune résistance et l'eau retrouva une consistance plus liquide.

La vue du dispositif de défense rappela à Vyrian ses cours de physique sur les fluides non-newtoniens, à l'exception prêt qu'ici, ils étaient magiquement améliorés. Sa tâche accomplie, le mur d'eau se désagrégea, faisant disparaître le corps par la même occasion et un nouveau mur se dressa à l’emplacement de l’ancien.

Kela fut la plus vive. Elle tira violemment le biologiste dans le couloir de gauche. Le scientifique n’eut d’autre choix que de se lever. En se redressant, il put voir les silhouettes des Altériens bloqués de l’autre côté des barricades d’eau esquisser des gestes sur leur droite. Ils devaient chercher un moyen de les empêcher de fuir.

Au même moment, le mur d’eau s’opacifia et un tracé lumineux apparut à son pied. Il serpenta sur le sol, s’arrêta devant les deux rescapés avant de filer dans le couloir que souhaitait emprunter Kela. Ils le suivirent d’un commun accord, mais arrivé dans une aile du bâtiment familière, Vyrian ralentit.

— C’est un cul-de-sac par là !

Kela, qui avait, prit de l’avance se retourna.

— Ait confiance !

On aura tout vu.

Le scientifique ne releva pas le commentaire des siens et ne disposant pas de meilleure solution, il reprit sa course et rattrapa la jeune femme qui se tenait devant le mur en question.

Evidemment, tu t’attendais à quoi ?

Le rayon de lumière monta sur la paroi, se répandit sur les nombreuses gravures les illuminant sur son passage et les pierres commencèrent à se liquéfier, coulant au sol et formant successivement un escalier qui s’enfonçait dans les ténèbres. Une fois l’infrastructure en place, le faisceau de lumière réapparut et vint éclairer les premières marches.

— Que...

Vyrian partageait l'étonnement des survivants, jamais il n'aurait pu songer en regardant les ruines qu'elles renfermaient un tel mécanisme. Il se tourna vers Kela dans l'espoir d'en apprendre plus. La jeune femme ne semblait pas surprise par les événements. Mais avant qu'il n'ait eu le temps de l'interroger, des craquements se firent entendre. Ils se retournèrent en direction du bruit, celui-ci provenait de l'intersection dans laquelle ils avaient rencontrés les Altériens. Les intrus n'avaient pas dû trouver d'autre entrée et devait être occupés à attaquer les défenses aqueuses.

Pressés par les tambourinements de leurs poursuivants, Kela et Vyrian empruntèrent l'escalier et s'enfoncèrent dans l'obscurité. Alors qu’ils descendaient de plus en plus profondément, le scientifique interrogea sa partenaire.

— Tu sais où ça mène ?

— Si j'en crois les exercices de sécurité que j'ai pu faire à Hydrios, on se dirige vers le coeur de la source. C'est elle qui nous a sauvé, je ne pensais pas qu'elle pouvait encore être active après tout ce temps. Ca fait plus d'un siècle que ces ruines ont été abandonnées. Par le passé, des guerres de territoires ont eu lieu et pour se protéger, chaque village a construit un système de défense, aujourd’hui encore en place : Alteryx avec sa barrière magique, la confrérie avec ses statues, Hydrios avec sa source et Hemyra avec sa cité fortifiée.

— Tu avais l'air de savoir où aller, tu avais prévu ce qu’il vient de se passer ?

— Non, réfléchis jamais je nous aurais mené dans la gueule de Faric ! C'est juste qu'il m'avait semblé reconnaître le symbole camouflé par les fissures sur le mur, faute de meilleure idée, j'ai pris cette direction.

— Et comment se fait-il que tu ne les as pas vus arriver ?

— Tu ne l’as peut-être pas vu à cause des projections de pierres, mais une aura noire les entoure, je n’arrive pas à percer ce voile. Je suis aveugle face à eux.

Vyrian percevait l'agacement dans la voix de la Visionnaire, ses yeux luisaient d'un éclat peu naturel dans la pénombre, le biologiste comprit qu'elle devait utiliser ses aptitudes de Visionnaire.

— Tu essaies tout de même.

— Oui. Le triangle que je forme avec mes mains me sert juste à projeter l’image.

Pour accentuer ses paroles, elle joignit ses doigts et forma un triangle, Vyrian put voir une brume noirâtre et étouffante avant que la jeune femme n'interrompe la projection et que les volutes se dissipent. Mais malgré cela, il avait l'impression qu'elles étaient toujours présentes, tapies dans l'obscurité.

Après un certain temps, ils finirent par atteindre un palier. L’escalier se retira sous leurs pieds et le mur reprit forme laissant les deux compagnons dans le noir, éclairés par le faisceau de lumière qui ne tarda pas à s'effacer. Une multitude de points lumineux apparut sur les murs et le remplaça éclairant un chemin de pierre. Ils l'empruntèrent et l’éclairage suivit leur progression.

Ils marchèrent une cinquante de mètres avant qu'un grand bassin d’eau apparaisse. Plus ils se rapprochaient, plus Vyrian sentait monter un mal de tête qu’il attribua d’abord au lieu. Il ne devait pas supporter de se retrouver ainsi enfermer. Mais bien vite, il sut que ce n’était pas le problème.

— Que faîtes-vous ? Nous …

La voix des survivants se tue, interrompit nette dans leurs pensées. Ce silence soudain ne présageait rien de bon. Vyrian en eut la confirmation, lorsque deux rayons lumineux les scannèrent des pieds à la tête. Il pouvait voir sur le mur d’en face leurs silhouettes se dessiner dans l’obscurité. Le corps de Kela apparut dans un bleu pâle. Quant au sien, il en était de même sauf au niveau de son front, une zone violette d’un aspect maladif contrastait par rapport à la pureté qui émanait du reste de sa silhouette lumineuse. C’est à ce moment-là que Vyrian fit le rapprochement entre le silence des survivants et son mal de crâne, d’une manière qu’il ne parvenait pas encore à expliquer les ruines semblaient percevoir leur présence.

Vyrian regarda apparaître sur le mur un nouveau faisceau d’un blanc éblouissant qui vint rencontrer la zone violette. Sous la vive douleur, il ne put retenir un cri et il s’effondra, les mains sur ses tempes. Kela se tenait à ses côtés et semblait l’interroger, mais le chercheur ne percevait pas ses paroles. Elle posa sa tête sur ses cuisses, et le força à la regarder.

— Concentrez-vous sur mes lèvres ! Avez-vous gardé une communication avec les vôtres ?

Vyrian peinait à la comprendre, mais lorsqu’il ajouta les bouts de dialogue les uns aux autres, une angoisse le saisit, comment en était-elle arrivée à une telle conclusion ?

— Oui.

— Bien, nous allons les faire disparaître.

— Quoi ? Non !

Mais avant que Kela ne puisse lui répondre, la douleur s’était estompée comme si elle n’avait jamais existé. Lorsque Vyrian perçut la voix des siens, il en fut soulagé, mais il changea rapidement d’opinion à l’entendre.

Qu’avez-vous fait ? Nous avons perdu le contact avec les autres !

Vyrian réalisa avec effroi que le faisceau l’avait débarrassé des survivants extrémistes.

Il se tourna vers le mur et vit sa silhouette lumineuse du même bleu pâle que celle de Kela, seul un point légèrement plus foncé apparaissait sur son front. Il devinait qu'il s’agissait des survivants restants.

Kela se pencha sur lui, le scientifique pouvait voir l'inquiétude dans son regard.

— Vous vous sentez mieux ? La Source a senti une souillure en vous et vous en a débarrassez.

Vyrian se redressa et croassa d'une voix mal assurée.

— Elle aurait mieux fait de s’abstenir.

Surprise, la Mysticienne écarquilla les yeux.

— Pourquoi ?

— Parce que je préfère avoir mon ennemi à l’œil, que de savoir qu’il puisse agir dans mon dos.

Kela, qui ne connaissait rien de l'état des survivants, prit peur.

— Vous pensez qu’ils seraient en mesure de nous nuire ?

— J’en ai bien peur, cette séparation, je crains qu’elle ne les radicalise encore plus.

— Et que pourraient-ils nous faire ?

— Ca je l’ignore et c’est bien ce qui m’inquiète.

Alors que Vyrian se redressait, un tremblement secoua la terre faisant onduler la surface de l'eau et de la poussière se répandit dans l'air. Le biologiste supposait que les Altériens n'étaient pas étrangers au phénomène. La Visionnaire se tourna vers l'entrée qui demeurait toujours fermée, avant de s'adresser au chercheur.

— Un problème à la fois, on a des intrus à chasser.

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