Chapitre 1 : Confession

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Il se fait tard, la lune resplendit, tandis que sur mon deux-roues je rentre d'une journée harassante et aussi ennuyeuse que peut l'être ma vie. Le vent brûle mon visage et les minutes s'écoulent tel le flot des marées. Presque arrivé à destination, je sens en moi une vague apaisante et enivrante, une sensation de puissance et d'excitation qui m'offre, le temps d'un instant, un instant seulement l'impression d'être vivant. Je ne suis pourtant en rien malheureux, mais ma vie est un cercle de lassitude qui n'en finit plus. Un cycle infernal que je veux étouffer de mes propres mains.

Le scooter rangé, je monte, vidé et désireux de retrouver cette sensation si pure et si prenante que celle vécue tout à l'heure. Durant toutes ces années j'ai consacré mon temps à me contrôler. À refuser désirs et plaisirs pouvant m'offrir d'interdites jouissances. À être un monsieur tout le monde, laissant planer une sorte de vide permanent qu'on tente de combler comme on peut.

Je le sens, elle est là dans notre maison, elle m'attend sagement. Mais qu'est-ce que j'attends de mon côté ? Je me tiens devant la porte, le regard fixé sur la serrure, clef à la main, prête à s'enfoncer.

J'entre le regard vide et l'esprit ailleurs. Je ne veux pas parler, seulement laisser cette folie me dévorer d'un seul coup et sombrer à jamais. Je passe un instant dans le salon, elle me dit bonsoir, me demandant si ma journée s'est bien passée. De mon côté j'esquisse un sourire hasardeux en feignant l'intérêt porté à ses mots. Je retourne sur mes pas et décide de me mettre à mon aise, ne gardant que mon euphorie comme tenue du soir. J'enlève mes écouteurs afin de laisser La sonate au clair de lune occuper l'espace. Je retourne dans le salon et me baisse pour atteindre la partie de la bibliothèque qui m'appartient. Je regarde un court instant les ouvrages : Serial Killers, Cannibalisme, Journal d'un tueur, L'art de l'embaumement, traité de médecine légale, l'histoire du cinéma X, et d'autres encore. Je souris… Et m'empare du tanto japonais que je garde précieusement au-dessus de ces ouvrages.

Je sors la dague de son étui puis de son fourreau. L'adrénaline parcourt mon être, tel le ruisseau devenant rivière puis mer pour finir océan. Doux mélange de peurs et d'envies provoquant des tremblements dans tout mon corps. Bien que restant calme d'apparence, je bouillonne à l'intérieur, je crois que je n'en peux plus. Me voici éveillé, nu et armé ; la voici allongée, peu vêtue et aveuglée par ses occupations.

Je me retourne. Je suis au-dessus de sa tête, dans son dos. Elle reste fixée sur son écran. Je m'approche puis l'embrasse sur le front, caressant sa nuque ce qui la surprend et la pousse à basculer la tête en arrière pour me voir, et tombe nez à nez avec le sabre qui vient s'enfoncer d'un geste nerveux au travers de sa gorge.
Son visage se crispe d'un coup et apparait une grimace fort déplaisante. Je retire la lame laissant le sang gicler hors de sa gorge. Elle porte les mains à son cou, tandis que prise de convulsions elle gesticule dans tous les sens. Encore une fois, comme le disait Ed Kemper, le premier meurtre ne se passe jamais comme prévu. On ne sait pas forcément comment s'y prendre à part peut-être dans nos fantasmes. Le résultat est là.
Je suis obligé de la planter plusieurs fois dans le ventre pour la faire taire. Je lui tranche la gorge, lui coupant plusieurs doigts par la même occasion. Trancher les cordes vocales pourrait avoir une utilité par rapport aux cris. Heureusement la peur a étouffé les siens. Elle rampe comme une chienne sur le sol couvert de son sang qu'elle étale quelque peu maladroitement. C'est réellement sale, ce n'est pas à mon goût. Je dois même admettre qu'à un moment j'ai failli vomir, un réflexe purement humain, mais je me tiens. Je la contemple se vider. Elle crache du sang, se pisse dessus. Elle me regarde d'un air si surpris que mon plaisir grandit jusqu'à ce que ce regard devienne aussi vide que mon âme au même moment.

Elle gît sur le sol, nue et transpercée de part en part. Je vis à nouveau de sa mort, rempli d'une délicieuse sérénité. Je l'ai enfin fait ! Pourtant je sais que ce bien-être va vite disparaitre pour laisser place au manque et à la peur.

Beethoven continue sa folle sonate tandis qu'après avoir pris quelques clichés, je réfléchis à ce que je vais devoir faire disparaitre pour montrer que seule la passion et la folie m'ont condamné. Mais pour le moment je ne veux pas y penser. A cet instant je vis, à cet instant je suis moi.

Pour le reste…

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