02 - Mangeuses d'âmes

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17e jour de la saison du soleil 2448

Argent bondit de la table en pierre, épée longue à la main. Elle descendit sur sa sœur et frappa. Le son de fer s'entrechoquant résonna dans la pièce éclairée par des torches accrochées aux murs. Leurs flammes semblaient dansées avec les deux femmes. Sa jeune soeur à la chevelure argentée défaillit sous la pression. La force physique d'Argent dépassait grandement la sienne. Elle faillit perdre son équilibre et recula de quelques pas. Elle tint son épée haute, mais ne fit pas d'initiative. Les yeux gris d'Argent rencontrèrent les siens et le long visage de l'aînée devint sévère.

- Encore une fois, tu n'as pas paré adéquatement. Tiens ton épée près de toi. Aussi, le placement de tes pieds est mauvais. Garde-les à une bonne distance l'un de l'autre. C'est essentiel pour ton équilibre.

Azéna grogna et s'élança sur sa sœur. Elle tenta de l'atteindre à l'épaule. Argent para l'attaque avec une telle aisance qu'elle savait qu'allait allait mettre sa sœur en rage. D'un coup puissant, elle la repoussa et mit un terme à la prochaine attaque avec un regard intimidant. Elle baissa son épée lorsque la respiration d'Azéna ralentit.

- Tu ne gagneras pas avec l'impulsivité. Tu dois rester calme et concentré, conseilla-t-elle.

Azéna tourna les yeux, en rogne.

- Je sais.

Argent sourit légèrement. Elle connaissait assez sa sœur pour comprendre sa hâte au but. Elle s'était toujours battue pour obtenir ce qu'elle voulait, contrairement à ses frères et sœurs qui avaient l'avantage du sang pur. Elle était pointée du doigt et intitulé bâtard en cause de son adoption. Les sujets des Kindirah ne reconnaissaient pas son héritage.

- Je ne suis pas la meilleure enseignante, dit Argent avec douceur. Je peux te recommander à mon maître si tu le désires. Il t'enseignera comme il l'a fait pour moi.

- Il accepterait juste parce que c'est toi qui ferrais la requête. Il ne m'aime pas et tu le sais.

Argent ne pouvait pas le renier, mais elle se faisais du souci pour sa petite sœur. Elle se fichait qu'elle soit adoptée. Pour elle, elle était tout simplement sa sœur avec une étrange couleur de cheveux et elle méritait autant de respect qu'un autre Kindirah.

Azéna déposa son épée sur la table et s'y assied.

- Je n'ai pas le temps d'être une ratée. Les rumeurs à propos de la guerre deviennent insistantes. Ça si elle n'a pas déjà commencé. L'épée est une arme de base. J'ai besoin de la maîtriser.

- Ne t'en fais pas, réconforta Argent. Tu y arriveras. Tu fais déjà une admirable archère. Les gens ont souvent une spécialité dans laquelle ils excellent.

Quelqu'un dévala les escaliers tournants et déboucha dans la salle en haletant.

- Mère a dit que je pouvais vous trouver ici, dit la petite fille. Elle a dit que vous pratiquiez vos viles méthodes de tuerie.

- A-t-elle vraiment dit ça? demanda Argent, un sourire malicieux aux lèvres.

Elle savait que Tria aimait déformer les paroles des autres pour les mettre à son avantage, donc elle voulait s'assurer que ce qu'elle disait était vrai.

- Oui, répondit Tria en hochant de la tête. Vous êtes des dames, pas des chevalières, pas des soldates et pas des dragonnières! termina-t-elle en fixant Azéna avec des grands yeux sévères.

À ces paroles, Azéna pouffa dans l'intention de se moquer de sa jeune soeur. Sachant qu'elles allaient probablement commencées à se chamailler, Argent attira l'attention de Tria ailleurs:

- Et comme tu es belle petite dame.

Elle s'approcha de la fillette, le regard pétillant d'enjouement. Comme un prédateur qui traque sa proie, elle effectua ses mouvements avec attention.

- Je ne suis plus une enfant, dit Tria, à moitié en riant. Tu sais que je suis trop vieille pour ces jeux.

Argent ne l'écouta pas et continua d'avancer.

- Ne grandis pas trop vite, conseilla Azéna qui prit une gorgée de sa chope remplie de bière qu'elle avait volée de l'entrepôt de leur père.

- Argent m'en empêche, rigola Tria.

Elle et Argent se pourchassèrent l'une l'autre dans un jeu de chat et de souris alors qu'Azéna les observaient en ricanant. Tria était petite et élusive, mais au final, Argent se faufila derrière elle et l'attrapa dans ses bras pour la chatouiller. Elle se tortilla en vain. Sa robe de soie limitait ses mouvements. Elle finit par se glisser hors de la prise d'Argent et courut derrière Azéna qui fit mine de ne pas la voir.

- Mère va te disputer si tu salis ta belle robe, taquina la dragonnière. Pour qui tu la porte de toute façon?

- Personne en particulier, répondit Tria. On ne sait jamais quel beau seigneur ou quel prince pourrait la voir.

Azéna roula les yeux.

- Il y a d'autres choses dans la vie que les hommes, tu sais.

- Oh, toi et ton étrange mentalité, répliqua Tria. J'ai une bonne idée. Pourquoi ne faisons-nous pas comme dans le bon vieux temps ce soir?

Argent et Azéna se tournèrent vers leur petite sœur, surprises.

- Ça ferait changement des rumeurs de cette guerre, continua Tria. C'est tout ce qu'on entend dernièrement.

Argent regarda au travers de la fenêtre. Dehors, la lune, aussi dorée que le cœur de l'été, brillait avec enthousiasme. Elle annonçait que demain sera le temps de s'aimer et de procréer: le festival de la Passion et la nuit sera animée par la chaleur des émotions. La tradition voulait que les jeunes couples s'accouplent, donnant naissance a un enfant au printemps pour célébrer le renouvellement de la vie.

Argent se demanda si elle allait encore passée cette nuit seule. Elle désirait le sentiment d'un corps contre le sien, du lien puissant qui se forme entre deux âmes. Elle songea à Demien, son meilleur ami et un soldat dévoué à son père. Il était né d'une famille roturière ce qui rendait un amour impossible entre eux. De toute façon, elle ne savait pas si Demien l'appréciait de cette façon.

« Ne sois pas stupide, se dit-elle. Oublie tout ça une bonne fois pour toute. »

Ces encouragements l'aidèrent, mais son cœur continua de serrer.

- Argent, appela Azéna. Est-ce tout va bien?

Argent cligna des yeux et tourna son regard vers sa sœur adoptive. Elle sourit de son mieux afin de cacher ses émotions turbulentes.

- Oui, tout va bien.

Azéna ne parut pas convaincue, mais n'insista pas.

- Bon, alors, allons dans ma chambre.

- Non! s'écria Tria.

Elle se dépêcha vers les escaliers et tendit les bras de chaque côté de son corps comme pour les empêcher de procéder.

- La chambre d'Argent, comme on faisait.

- C'est entendu, dit Argent. Attends-nous en haut. Nous allons remettre la salle en ordre.

- Bonne idée. Avant qu'un serviteur ne s'en rende compte et qu'il dise à père.

Tria monta en ricanant alors qu'Argent et Azéna restèrent derrière pour remettre les tables et les chaises en ordre. Ils firent un tel vacarme qu'une servante, inquiète, vint jeter un coup d'œil et fut soulagée de voir que ce n'était que des inquiétudes vides. Elle regarda les deux épées étendues sur l'une des tables avec suspicion et remonta.

- J'espère qu'elle va garder son clapet fermé, se plaignit Azéna. C'est une vraie pie et je pourrais me passer de la colère de Bayrne. C'est une bonne chose qu'il n'est pas au château en ce moment.

Elle accota son épée sur son épaule et monta.

- Tu viens?

Argent acquiesça, accrocha son épée à sa ceinture et suivit sa sœur adoptive jusqu'à sa chambre.

À l'intérieur, Tria était enroulé dans une couverture légère et portait son pyjama. Elle attendait sur le lit avec deux autres couvertures pour Azéna et Argent. Le lit à baldaquin était entouré de quatre tables de nuit sur lesquels une chandelle illuminait la chambre. Le vent nocturne faisait virevolter ses drapés blanches et violettes, couleurs du royaume.

-Tu t'es tenue occupée, dit Argent avec un sourire.

Elle déposa son épée sur une table à part, Azéna derrière elle.

- Vous voulez la fenêtre fermée?

- Non, répondirent Azéna et Tria ensemble.

- La brise est rafraîchissante, expliqua Tria.

Ses tresses ébène dansaient, puis tombaient lentement sur ses épaules.

- Très bien, dit Argent.

Elle et Azéna s'installèrent auprès de Tria, s'enroulant dans leur propre couverture.

- Alors, mes deux guerrières, taquina Tria, par quelle histoire commence-t-on?

- Les dragons? suggéra Argent.

- Oh, ce n'est plus amusant depuis que je suis dragonnière, dit Azéna. J'en connais plus sur eux que l'histoire nous le dit.

- Dire que c'était ton préféré sujet, rit Tria.

- Tu adores lire, dit Azéna à Argent. Raconte-nous quelque chose que tu as découvert récemment dans les pages de la bibliothèque de la famille.

Argent n'y songea pas longtemps.

Elle se rappela un jour pendant lequel elle traînait au marché avec Demien en plein cœur de la saison de la lune durant laquelle la lune est bleue et la neige est reine. Elle portait un habit de cuir et de fourrure de loup. Demien était distrait par un marchant qui lui ventait ses grands boucliers sur lesquels il avait gravé l'aspérule de Daigorn. Argent fut impressionné par le travail du forgeron, mais pas assez pour la découragée d'aller voir l'homme encapuchonné qui lui faisait signe d'approcher.

- Je parie que vous êtes de haute naissance, disait-il d'une voix rauque.

- Vous avez raison, répondit Argent.

- Pas étonnant.

Il toussa.

- Pour une si jolie dame, je propose un trésor réservé à une personne telle que vous.

Il se pencha et fouilla dans sa marchandise pour enfin en sortir un vieux livre épais à la couverture de cuir sombre. Il le remit à Argent en souriant comme un dément.

- Regardez bien, ma Dame. Ce n'est pas un livre comme les autres. Il est unique; c'est probablement le dernier exemplaire qui existe.

- Il n'y a pas de titre, disait Argent en examinant le livre. Qu'est-ce que c'est?

- Il est étrange, n'est-ce pas? Ce n'est qu'un livre qui parle de l'inconnu, sans véritable nom. Certains dit que ces textes sont vrais tandis que d'autres assurent que c'est un tas de mensonge écris par des sorciers. D'une façon ou d'une autre, c'est de la bonne information si ça finissait par être vrai. Je te le donne pour un soleil d'or. C'est un prix d'ami à ne pas manquer.

Il sourit encore, cette-fois bien plus largement, révélant deux canines en or bien trop acérées pour être représentative d'une dentition humaine.

« Un prix d'ami, songea-t-elle. Devrais-je? Je n'ai jamais vu ce livre dans notre bibliothèque. C'est un prix ridicule pour un vieux livre. »

Elle ouvrit le livre à une page aléatoire et y aperçut des images d'un peuple humanoide aux caractéristiques d'arbre et avec des lions cornus et aux dents de sabres à leurs côtés.

- Est-ce que ces créatures existent vraiment? questionna-t-elle.

- Ah je savais que le peuple gris vous intéresserait, ricanait le vieil homme en se frottant les mains pour se réchauffer. Le savoir ne devrait pas être caché du peuple. Et puis, un soleil d'or me nourrirait pour une année au moins. Ce serait bien apprécié, ma Dame.

Argent lui remit la pièce dorée entre les mains. L'étrange marchant fit une révérence profonde et la laissa retourner auprès de Demien.

À cet instant, Argent revint à la réalité et sourit à ses soeurs.

- J'ai trouvé la parfaite légende à vous raconter.

Elle attendit qu'Azéna et Tria portèrent toute leur attention sur elle.

- Alors, on parle du peuple gris surnommé ainsi par notre peuple en cause de leur location.

- Les landes grises? questionna Tria, les yeux ronds.

Argent acquiesça.

- On les surnomme aussi les mangeuses d'âmes, car, après qu'ils aient mangé, la victime revient d'un coma avec une intelligence réduite et une personnalité différente. Ils ne sont plus les mêmes comme si leur âme avait été volée. Ils sont réduits à des êtres chaotiques sans raison. Apparemment, le peuple gris rôde nos royaumes avec tant de subtilité qu'on ne se rend jamais compte qu'ils sont parmi nous. Sans nom, sans véritable but, ils errent tout simplement.

On croit qu'ils n'ont pas entièrement leur humanité ce qui expliquerait pourquoi ils se nourrissent de notre âme. Ils sont grands, maigres et possèdent une longue queue noire et mince. À leur côté est un lion sombre de la grandeur d'un cheval, souvent du sexe opposé de leur maître. Les mâles ont des cornes tandis que les femelles ont de longues canines. On dit qu'ils sortent la nuit pour chasser pour leur maître.

Argent remarqua que Tria s'était recroquevillée dans sa couverture. Elle en profita pour en ajouter encore plus.

- Tu n'as jamais entendu leur rugissement lorsque la lune est haute?

- Des mythes, conclut Azéna.

- Qu'est-ce que tu en sais? demanda Tria. Tu croyais que les elfes et les dragons n'existaient pas jusqu'à l'été passé.

Elle se tourna vers Argent avec des yeux apeurés.

- Où va la connaissance des victimes?

- Bonne question, répondit Argent. On dit que la mangeuse d'âmes absorbe toutes les connaissances et les mémoires de leur victime et qu'il devient encore plus puissant.

Elle était conscience que ce dernier morceau d'information n'était que le fruit de son invention, mais c'était trop amusant de terroriser Tria.

- Ils ont l'air effrayants, dit Tria.

Elle se tourna vers Azéna.

- Est-ce que les elfes gris dont tu parles proviennent des landes grises aussi?

- Non, répondit Azéna. Ils sont d'un royaume appelé Gosform. C'est en cause de leur teinte de peau qu'ils se surnomment ainsi.

- J'aimerai rencontrer un elfe, surtout s'ils sont aussi beaux que Fayne le prétend.

- Ils sont les êtres les plus bizarres d'Aerinda, répliqua Azéna avec une touche de sèchesse. Ils mangent de l'écorce.

- Leur culture est intéressante, répliqua Argent. Père m'a dit que les elfes de lune font partie de l'Empire du Haut-Roi, mais qu'on ne doit pas révéler pas ces informations.

Le Haut-Roi était le suzerain suprême de plusieurs territoires en Aerinda, incluant les trois royaumes humains et celui des elfes lunaires. Son devoir était de protéger ses sujets depuis l'ombre et de sortir de sa cachette lorsque l'équilibre de l'empire était en péril. Directement sous le Haut-Roi, le Roi Brun, en charge de Daigorn et d'Elthen, le Roi Bleu, en charge de Nëowalds et le Roi Rouge, en charge de Dètmor régnait en son nom. Très peu de gens savait quoi ce soit à propos du Haut-Roi. Il était presque comme un mythe et souvent, mêmes les rois oubliaient qu'ils faisaient partis du même empire et se querellaient. Argent s'était toujours demandée pourquoi le Haut-Roi avait permis Elthen de conquérir Daigorn. Il avait toujours sonné comme une fraude à ses yeux.

- Tu crois que père me laisserai épouser un elfe de lune? questionna Trya, les yeux brillants d'espoir.

- J'en doute. Père est trop fier. Il n'accepterait pas d'enfants demi-elfes dans notre famille.

- Ça serait en sont intérêt de le faire, dit Azéna. Une telle alliance donnerait un grand pouvoir à Daigorn. Les elfes sont des êtres avec une affinité naturelle à la magie et aux éléments. C'est bien rare qu'ils ne puissent pas contrôler le mana.

Elle changea son ton de voix à hautain afin d'imiter son père de façon sarcastique.

- Mais, bien sûr, il est impossible de raisonner avec moi à moins qu'on s'appelle Sérus Kindirah ou qu'on est seigneur ou roi. J'ai bien trop une tête de cochon pour ça.

Tria et Argent pouffèrent de rire. Azéna sourit, fière d'elle-même ; elle adorait se moquer de père.

On cogna à la porte. Le son inattendu fit sursauter Azéna.

- Dame Argent, dit une voix féminine pleine d'incertitude. Désolé de vous déranger à une heure si tardive, mais Dame Rivatha vous convoque dans sa chambre.

Azéna de détendit et soupira de soulagement.

- Tu es paranoïaque, ria Tria. Rien de mal ne pourrait nous arriver ici.

- J'y serai, répondit Argent. Merci, Ryah.

Elle attendit que la servante parte et porta son attention sur ses sœurs.

- Vous devriez aller vous coucher.

Tria hocha de la tête et courut à sa chambre. Azéna hésita avant de suivre sa petite sœur. Elle observa le regard d'Argent aussi subtilement qu'elle le pouvait. Inconfortable, Argent s'avança vers son balcon, mais n'ouvrit pas la fenêtre. Elle évitait les yeux sondeurs d'Azéna. Pendant un long moment, elle resta là dans le silence en espérant que la dragonnière se lasserait. L'étonnante patience d'Azéna finit par l'irriter. Elle voulait être seule.

- Va te coucher Azéna, dit-elle avec l'autorité d'un seigneur.

Sa voix s'adoucit, mais son expression resta aussi froide que de la glace.

- S'il te plaît. Je vais bien aller. Ne t'en fais pas pour moi.

Azéna poussa un hmph. Elle empoigna son épée et sortit.

- Je vais faire mumuse dehors, annonça-t-elle nonchalamment.

« Sacré Azéna, songea-t-elle. Elle sait pour Demien. Je suis bouleversée à chaque année durant le festival de la Passion. Elle n'est pas idiote. Je sais aussi ce que mère veut. Encore... Elle ne gagnera pas. Je ne le ferai pas. »

Elle regarda la lune une dernière fois et se perdit dans son halo doré avant d'être interrompue par un bruit de roche qui frappa contre le mur de pierre du château. Dehors, un jeune homme se préparait à tirer une deuxième roche. Il s'arrêta lorsqu'Argent ouvrit la fenêtre.

- Demien, dit Argent. Encore ici pour une partie de plaisir à te faire buter par une fille?

Demien venait souvent lui rendre visite durant le festival de la Passion. Il disait qu'ils avaient tous les deux pas d'amoureux, donc qu'ils devraient se divertir en pratiquant leurs compétences de combat. Encore une fois, il sourit et réanima la tradition.

- Par une femme, tu veux dire. Allez, viens. Mes meurtrissures d'hier t'attendent pour une deuxième ronde.

- Malheureusement, pas ce soir. J'ai des devoirs qui m'attendent.

Demien leva les bras en signe de résignation.

- D'accord... Vous les nobles.

Il rit et salua Argent comme un militaire en faisant l'idiot.

- À demain, ma Dame Kindirah.

Il s'inclina et fit demi-tour.

- Pas demain, cria Argent.

- Pourquoi pas?

- Père arrive d'Elthen. Je dois être présente à son retour.

- Bon, je te verrai plus tard.

Il sourit, un sourire qui avait toujours su se faufiler derrière les murs d'Argent, puis il déguerpit.

« Il n'est qu'un soldat, songea Argent. Un soldat de l'aspérule blanche sous les ordres de père. Contrôle tes émotions et fait ton honneur à ta maison. Dans le fond, je l'envie lui et Azéna. J'aimerai avoir cette liberté... »

Elle sourit malgré elle et s'arrêta devant son épée. Elle glissa l'arme sous son lit et se mit en route vers la chambre à coucher de ses parents. Elle cogna:

- Mère?

- Argent, dit Rivatha. Entre, ma fille.

Le garde de droite ouvrit la porte. Argent entra et s'assit sur le rebord du lit de sa mère. Celle-ci termina de lire un parchemin au sceau doré brisé et un sourire se dessina sur ses lèvres.

- Tu sais que la guerre s'annonce et que nous n'avons que peu de ressource militaire.

- Vous m'avez trouvé un seigneur puissant qui a une immense armée à sa disposition, devina Argent avec désintérêt.

En dedans d'une année, une dizaine de seigneurs s'était présentée devant Argent et lui avait offert leur main. Elle les avait tous refusé.

- C'est exact, mais encore mieux.

- Qu'est-ce que tu veux dire? questionna la guerrière suspicieuse.

- Le Roi Brun nous accorde une union entre toi et son héritier. Il désire lui aussi renforcer notre lien. C'est un grand honneur. Tu seras la reine de Daigorn et d'Elthen.

- Père ne cessera jamais d'essayer de me marier, n'est-ce pas?

Rivatha baissa le regard.

- Je croyais qu'il avait enfin compris que je n'étais pas prête, continua Argent.

- Tu as atteint l'âge adulte l'an passé, dit sa mère. De plus, c'est un honneur que nous ne pouvons pas nous permettre de refuser.

- Je sais ce que le Roi Brun désire.

Elle plongea son regard dans celui de sa mère et fronça les sourcils.

- Il veut s'assurer que nous ne joignons pas notre cause aux rebelles. Il a besoin de nos ressources. Elthen est un désert asséché et Daigorn est un buffet florissant. C'est clair comme le vent.

- Ça va des deux sens, ma fille. Nous avons besoin du support de ses troupes. En retour, nous l'aidons avec les ressources. Je sais que c'est difficile pour toi, mais essaie de comprendre.

- Et si je refuse?

- Le Haut-Roi l'a ordonné.

- Tiens... Il se montre enfin de bout du nez celui-là, répliqua la jeune femme avec irritation.

Elle serra les poings et traversa le seuil de la porte.

- Peux-tu aller chercher Azéna? demanda Rivatha.

- Je ne sais pas où elle est, répondit Argent. Elle est partie courir les rues.

Malgré sa frustration, elle réussit à accorder un sourire en coin à sa mère.

- Tu la connais, elle est où les ennuis l'appellent.

- Évidemment, ria Rivatha. Si tu l'as vois...

- Je lui dirai qu'elle vienne te voir.

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