Monsieur K a peur.

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Sans réfléchir, Monsieur K avait pris place dans la rame du 7 bis.
Enfant, Philippe était très fier de cette particularité : sa station (Louis-Blanc) avait sa ligne, une ligne circulaire, qui plus est !
Pour le moment, cette ligne permettait surtout à Monsieur K , de réfléchir à la situation, sans devoir sortir de la rame...

Monsieur K regarda sa montre : il était 9 heures. Il y a à peine une heure et demie, il sortait du train !
Ce voyage dans le passé lui avait semblé long, si long. Monsieur K songea aux analyses de Bergson sur le temps des horloges et le temps vécu.
Mais il sortit rapidement de sa rêverie et relut le message envoyé par l’application :

"Bonjour Philippe, je suis ta voix, tu ne me connais pas, mais moi, oui, et je connais surtout toutes tes faiblesses, même les plus intimes. Le monde tel que tu le connais touche à sa fin, et cela à cause de toi mon frère. Je sais que tu ne me crois pas ! Va dans le métro, et tu y trouveras peut-être une réponse, mon frère !"

Tout cela était si étrange. Qui se cachait derrière TOWNSURVIVAL ?
Il sentait confusément que le message disait la vérité, mais quelle vérité ?
Depuis qu’il était dans le métro, l’application était muette.

Monsieur K ne comptait plus le nombre de boucles de la ligne 7 bis.
Il commença à regarder autour de lui, l’heure de pointe était passée. La rame était pratiquement vide.
En face, un homme, entre deux âges somnolait. Un jeune homme, debout, fixait le vide, l’air absent.

Sur sa droite une dame âgée regardait la couverture du livre lu par sa voisine d’en face.
Le regard de Monsieur K s’attarda sur la lectrice. C’était une jeune femme d’une trentaine d’années, vêtue avec élégance. Elle était fort jolie, mince, brune avec de superbes yeux bleus.

Elle ignorait tous les regards, car elle était pongée dans son livre. Une bande rouge entourait le petit livre « Le livre dont tout le monde parle ».
Il lut le titre « Trois mains et deux destins ».
Sans savoir pourquoi Philippe se sentit très mal et se concentra sur l’ado qui venait de monter dans la rame.

Elle ne pouvait guère passer inaperçue : habillée en Cosplay, les cheveux de toutes les couleurs de l’arc en ciel, elle semblait découvrir Paris.
Monsieur K sourit ZAZIE ! L’héroïne de Queneau se retrouvait transportée dans ce Paris des années vingt (du nouveau millénaire).

Monsieur K récita, intérieurement son poème :

A Paris il y a le métro
Cela pue vraiment trop
Il y a du monde dans le métro
Plein de monde qui va au boulot

Sauf
Évidemment sauf
Pour les chômeurs
Les dormeurs
Les flâneurs
Les voleurs
Du métro

Dans le métro
On est pressé
Bousculé
Coincé
Voire caressé
Avec plaisir
Ou déplaisir
C’est selon
La saison
Et le visage du polisson
Qui passe à l’action
Dans le métro

Dans le métro
On est beaucoup
A se tenir debout

Et hop on démarre
Et là on se marre
On part en avant
On se cogne les dents

Et le métro freine
Et sans peine
On part en arrière
Vlan sur le derrière

Et on tombe aussi
Sur ceux qui sont assis
Tant pis
Ils n avaient qu’à être debout
On l’est bien nous

Le vibreur le sortit de cette poétique rêverie :

« - Philippe,
- Anne-Sophie ?
- J’espère que tu n’es pas dans le métro ?
- Mais pourquoi donc, demanda Philippe interloqué ?
- Tu es en danger, ils en ont après toi.
- Qui : ils ?
- Pearl, la nouvelle petite amie de Vincent a couché avec un type de la NSA, il lui a tout raconté, chuchota Anne- Sophie.
- C’est quoi ce délire ?
- Ils vont confiner toute l’humanité, en raison d’un virus mortel, mais cela ne sera qu’un prétexte.
- Un prétexte ? répéta Philippe, interloqué.
- Tu es dans la Matrice !
- Je suis dans la matrice ?
- Oui, tu as vu Néo ?
- J’ai cru le voir, rectifia Philippe.
- Ce type d’erreurs ne cesse d’augmenter. Il faut changer des milliards de milliards de données. En confinant tout le monde, modifier en profondeur la matrice sera plus simple : ce sont les vraies raisons du confinement.
- Mais qui est derrière tout cela, demanda Monsieur K ?
- Tu le sais c’est... »

La communication s’interrompit brutalement.
Monsieur K releva les yeux et son visage se glaça d’horreur...

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