Chapitre 13 suite 2

6 minutes de lecture

Un grincement de porte ponctué d’un gloussement nerveux vint soudain troubler la quiétude qui régnait dans la garnison depuis qu’Alis et Aymeric s’étaient endormis. Deux silhouettes enlacées se faufilèrent à l’intérieur et refermèrent le lourd battant.

- Brrr, cette pluie a bien rafraîchi l'air, il fait meilleur ici, s’exclama Bénédicte en se frottant les bras frileusement.

- Ne parle pas si fort, nous ne sommes peut-être pas seuls, lui murmura Arnaud d’un air agacé en la poussant sans ménagement contre le mur de torchis.

Bénédicte esquiva un baiser vorace en tournant la tête, mais laissa les mains avides du soldat pétrir sans retenue les courbes pleines de son corps. Mi-inquiète mi-endolorie, elle grimaça en laissant échapper une plainte avant de le questionner prudemment :

- Tu crois ? Allons ailleurs alors.

La main d’Arnaud abandonna à regret une fesse bien rebondie pour aller crocheter méchamment le chignon à demi défait de Bénédicte et l’obliger à tourner la tête dans sa direction. Il la fixa droit dans les yeux et cracha entre ses dents d’un air mauvais :

- Cela n’avait pourtant pas l’air de te déranger que toute la garnison entende tes gémissements quand c’était Aymeric qui te besognait. Aurais-tu honte qu’on te surprenne avec moi ?

- Non, bien sur que non, balbutia Bénédicte, ses yeux couleur châtaigne agrandis de peur devant son rictus sauvage.

Arnaud relâcha ses cheveux et lui caressa la joue d’un air redevenu enjôleur - cela aurait été dommage que la donzelle prenne la fuite avant qu’il ait assouvi son désir.

- Je préfère ça, ma belle. Allez, viens, il est temps de passer aux choses sérieuses, lui intima-t-il en la tirant par la main pour la détacher du mur et la faire passer devant lui.

Aussitôt, il plaqua les mains sur ses fesses pour la faire avancer plus vite.

Bénédicte eut un nouveau gloussement nerveux avant de s’arrêter devant une paillasse.

- Je vois que tu avais bien repéré les lieux. Avais-tu déjà des vues sur moi ?

Arnaud ricana d’un air narquois avant de la faire pivoter face à lui. Ses yeux noirs sondèrent ceux de la lavandière confuse qui secouait la tête négativement.

Bénédicte se sentait de plus en plus mal à l’aise. Arnaud était plus jeune et aussi bien bâti qu’Aymeric, mais son visage, pourtant agréable et plein de charme quand il s’en donnait la peine, se révélait parfois empli d’une cruauté à faire froid dans le dos. Elle commençait à regretter la pulsion de dépit qui l’avait jetée dans ses bras. Elle qui pensait oublier les tendres caresses du capitaine, se retrouvait prise au piège dans les mailles de cette sombre brute qui la pétrissait jusqu’à la pincer douloureusement sans le moindre remords. Ecoeurée par cette bouche avide fouillant la sienne autant que par ces doigts aux ongles trop longs meurtrissant son intimité, Bénédicte, sur le point de fondre en larmes, essaya de se soustraire à ces assauts.

- Tu me fais mal, Arnaud, doucement…, aïe, gémit-elle lorsqu’il quitta sa bouche pour s’emparer voracement d’une pointe de sein qu’il avait réussi à dénuder.

Enfin, elle sentit avec soulagement, sa main quitter la place tandis que son bliaud retombait le long de ses jambes.

Arnaud releva la tête et, le souffle court, la bascula sans ménagement sur sa couche où elle tomba rudement sur les fesses. Dans la pénombre, Bénédicte devina plus qu’elle ne vit son regard de fauve posé sur elle alors qu’il murmurait d’une voix sourde :

- Reste là, je vais chercher une chandelle pour voir ton visage grimacer et se tordre sous mes coups de boutoir. En attendant, déshabille-toi et écarte les jambes !

- S’il te plait, Arnaud, je…

- C’est ce que tu es venue chercher, non ? Alors, fais-le !

Par crainte de représailles, Bénédicte n’osa pas lui répliquer et s’empressa d’exécuter ses ordres malgré le frisson de peur qui lui secoua l’échine. D’un œil anxieux, elle le regarda s’éloigner et allumer sa chandelle à la torche plantée dans le mur à côté de la porte. Le voyant faire demi-tour, elle acheva de se débarrasser en hâte de sa chainse et se glissa sous la couverture de peaux de renards qui recouvrait sa couche. C’est maintenant, alors qu’elle se trouvait bien au chaud, qu’elle s’aperçut avec angoisse qu’elle tremblait de tous ses membres.

- Quelle idiote, se morigéna-t-elle.

Pourtant elle connaissait sa réputation ! Mais il fallait toujours qu’elle se fourvoie dans des situations impossibles. Comme avec Aymeric. Bien sûr ce n’était pas le même problème, elle n’avait jamais souffert sous ses caresses, au contraire. Par contre, quelle déchirure cela avait été lorsqu’il lui avait expliqué qu’il ne voulait pas s’attacher, que leur histoire n’avait que trop duré, qu’il ne voulait pas la faire souffrir…

À ce souvenir, des larmes envahirent ses yeux qu’elle essuya d’un revers de main.

Oh, bien sûr, Aymeric avait eu la délicatesse de nier qu’il avait des vues sur une autre femme, mais elle n’était pas dupe. D’ailleurs, la manière dont il reluquait cette moins que rien d’Alis était assez éloquente. Mais qu’à cela ne tienne, un jour ou l’autre, elle ferait payer cette sale serve.

Perdue dans ses sombres pensées, Bénédicte ne s’était pas aperçue qu’Arnaud, au lieu de la rejoindre, s’avançait au milieu de la travée, éclairant en un lent va-et-vient les couches de chaque côté en quête de quelque présence. Parvenu au fond de la salle, il s’arrêta et regarda l’étrange spectacle qu’il avait devant les yeux.

- Tiens, tiens, se dit-il en esquissant un sourire mauvais, notre cher capitaine n’a pas perdu son temps. Je ne sais pas comment il a fait pour attirer cette sauvageonne dans sa couche, mais alors là, il m’en bouche un coin ! Pauvre Gautier, il va faire une de ces têtes quand il saura la nouvelle. De toute façon, ce gros bêta n’avait aucune chance et d’après ce qu’il m’a raconté, ce n’est pas demain la veille que notre belle Alis va lui pardonner. En tout cas, ça pourrait bien arranger mes affaires car qui va s’occuper de la consoler lorsque Aymeric la laissera ? Tout vient à point à qui sait attendre. Ça fait trop longtemps que cette garce m’échauffe les sens avec ses airs de ne pas vouloir y toucher. Profites-en ma belle, les bonnes choses ne durent qu’un temps !

Arnaud jeta un rapide coup d’œil vers sa couche avant de reporter son attention sur Aymeric avec un sale rictus au coin des lèvres.

- C’est ça, fais de beaux rêves noble capitaine, Arnaud est là pour veiller sur tes protégées délaissées. Eh oui, elles viennent toutes chercher du réconfort dans mes bras, même la grosse Bénédicte que je vais aller de ce pas foutre de bon coeur sous ton nez, quelle revanche ! Si tu savais comme je hais ta loyauté et tes bons sentiments. Quel plaisir de te voir ainsi à ma merci, il me suffirait de te planter ce poignard dans le dos sans que tu ne t’aperçoives de rien, mais ma vengeance en serait amoindrie. Je préfère m’attaquer au seul défaut de ta cuirasse : ton grand cœur. Et Dieu sait que de ce côté-là, j’ai réussi un coup mémorable dont je ne suis pas peu fier. Tu n’es pas près de savoir le fin mot de l’histoire, mais ta mine dépitée me suffit amplement. Allez, trêve de discours, il faut battre le fer tant qu’il est chaud, faudrait pas que Bénédicte refroidisse !

La lavandière, qui n’avait rien perdu de son petit manège, ne savait que penser de son attitude sournoise encore plus soulignée par la lueur fantomatique de sa chandelle. Pourquoi était-il resté aussi longtemps devant la couche d’Aymeric ? Elle n’eut pas le temps de s’interroger davantage car Arnaud était parvenu au pied de sa paillasse et la considérait d’un air moqueur :

- Alors, ma belle, tu es prête ?

Hochant la tête, Bénédicte osa tout de même lui demander d’une toute petite voix :

- Qu’est-ce que tu faisais ? Il est là ?

- Oui Aymeric est bien là. Mais ne t’inquiète pas, ton beau capitaine dort à poings fermés, susurra Arnaud d’un ton mielleux en ôtant ses habits. De toute façon, même si tes gémissements le réveillent, il aura de quoi s’occuper !

Le feu aux joues, Bénédicte se poussa pour lui faire de la place pendant qu’il se glissait à ses côtés. Il en avait trop dit ou pas assez, aussi, prenant son courage à deux mains, elle balbutia d’une voix étranglée :

- A… avec qui…

- Qu’est-ce que ça peut te faire ? Tu le sauras assez tôt, l’interrompit-il d’un grognement agacé. Viens, continua-t-il en la saisissant à bras le corps pour la faire basculer sur lui, montre-moi ce que ce cher capitaine t’a appris.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Laetitia Sabourin ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0